Le congrès annuel de l’American Association for Thoracic Surgery s’est tenu cette année à Minneapolis. Le professeur Thierry Carrel présente ses points forts personnels.
Réduction de l’anticoagulation après l’implantation d’une valve aortique mécanique [1]
L’étude prospective PROACT de la FDA a examiné si une anticoagulation per os moins agressive était plus justifiable que celle recommandée par l'”American Heart Association” ou l'”American College of Cardiology”. L’étude a été menée sur des patients ayant reçu une valve aortique de la société ON-X. Les résultats de l’étude sont présentés dans le tableau ci-dessous.
Les patients présentant un risque accru d’événements thromboemboliques ont reçu de la warfarine avec un INR cible de 1,5-2,0 ou 2,0-3,0 à partir de trois mois postopératoires. Tous les patients ont reçu 81 mg d’aspirine et ont été autorisés à surveiller eux-mêmes leur INR. Les résultats sont présentés dans le tableau 1.
Les auteurs concluent que l’INR peut être ajusté dans la fourchette 1,5-2,0 chez les patients ayant subi un remplacement valvulaire aortique par prothèse mécanique, en association avec de l’aspirine à faible dose ; cela entraîne une réduction significative des événements hémorragiques, sans pour autant augmenter le taux d’événements thromboemboliques.
Administration unique d’érythropoïétine à haute dose deux jours avant une chirurgie cardiaque [2].
Plusieurs études ont montré que l’administration d’érythropoïétine à court terme peut réduire de manière significative le besoin de transfusions sanguines externes. Les protocoles précédents étaient basés sur une administration de cinq jours et entraînaient souvent des problèmes d’observance chez les patients traités. Les auteurs ont donc étudié l’effet d’un bolus unique de 80 000 UI d’érythropoïétine humaine recombinante (HRE) deux jours avant une intervention chirurgicale cardiaque programmée. L’étude a été menée de manière prospective et randomisée sur 400 patients. Le critère d’évaluation principal était la nécessité d’une transfusion sanguine, le critère secondaire l’incidence des effets secondaires et des complications. Les taux d’hémoglobine ont été déterminés le premier, le deuxième et le quatrième jour. Le groupe HRE a reçu en moyenne 0,39 concentré érythrocytaire contre 1,12 concentré chez les patients témoins (p<0,01). La moyenne de l’hémoglobine au quatrième jour postopératoire était de 10,2±0,68 g/dl dans le groupe HRE contre 9,02±0,92 g/dl dans le groupe témoin (p=0,02). La mortalité et le taux de complications n’ont pas montré de différence significative. Le protocole simplifié (dose unique) semble efficace et a permis d’éviter les problèmes liés à une application plus complexe.
Résultats précoces après implantation d’une valve en aval par transcathéter en Scandinavie [3].
L’implantation transcathéter “valve-in-valve” est de plus en plus utilisée comme alternative au remplacement chirurgical des valves en cas de prothèses biologiques usées. Les auteurs résument l’expérience en Scandinavie entre 2008 et 2012.
Quarante-neuf patients ont été traités dans onze cliniques ; une valve aortique a été implantée chez 45 patients, une valve mitrale et une valve tricuspide chez deux patients chacune. La majorité des patients ont été traités par voie transapicale et la durée moyenne d’observation était de 11 mois. Aucune mortalité n’a été observée et le taux de réussite technique était de 95,6%. Les complications graves suivantes sont survenues :
- accident vasculaire cérébral (2,2%)
- infarctus du myocarde périprocédural (4,4%)
- complication d’accès vasculaire (2,2%).
L’hémodynamique a montré un gradient de pression moyen entre 4 et 38 mmHg, (moyenne 17 mmHg) et un gradient de pression maximal entre 7 et 68 mmHg (moyenne 30 mmHg). Ce registre multicentrique a confirmé que l’approche “valve-in-valve” est une option acceptable pour les patients à haut risque et qu’un gradient de pression sous-optimal subsiste chez un nombre considérable de patients. Les conséquences à long terme de cette hémodynamique systolique défavorable doivent être étudiées plus avant.
La fibrillation auriculaire paroxystique (FAP) doit-elle être traitée à l’occasion d’une intervention de chirurgie cardiaque ? [4]
Plusieurs études prospectives randomisées ont démontré l’efficacité d’un traitement d’ablation peropératoire en cas de fibrillation auriculaire permanente. La situation est clairement moins claire chez les patients présentant une fibrillation auriculaire paroxystique. L’hypothèse de cette étude était la suivante : l’ablation par voie auriculaire gauche n’entraîne pas d’augmentation du risque périopératoire et entraîne une diminution des épisodes de fibrillation auriculaire.
Plus de 4000 patients ont été observés, dont 1044 avec une fibrillation auriculaire préopératoire. 541 patients souffraient de fibrillation auriculaire paroxystique (FAVli) et 50% nécessitaient une intervention sur la valve mitrale. Les trois groupes suivants ont été comparés : patients avec FHVI traités (n=429), patients sans traitement (n=112) et enfin patients sans antécédents de FHVI (n=3271). La mortalité à 30 jours était comparable dans les trois groupes. Les patients qui ont été traités ont eu une durée d’hospitalisation plus courte, une incidence et des complications périopératoires plus faibles (24% vs 45%). Le taux d’accidents vasculaires cérébraux était également comparable dans les trois groupes.
La réalisation d’une ablation des veines pulmonaires par voie auriculaire gauche chez les patients atteints de fibrillation auriculaire n’entraîne pas d’augmentation du risque périopératoire ni de la mortalité périopératoire. Les patients ayant subi une ablation peropératoire ont présenté un taux plus élevé d’intervalle sans fibrillation auriculaire et un meilleur taux de survie par rapport aux patients non traités. Cette étude montre que l’ablation des veines pulmonaires peut être une intervention tout à fait valable chez des patients sélectionnés.
Source : Congrès annuel de l'”American Association for Thoracic Surgery”, 4-8 mai 2013 à Minneapolis/USA
Littérature :
- Puskas J, et al. : Réduction de l’anticoagulation après un remplacement mécanique de valve aortique : résultats intermédiaires de l’essai randomisé PROACT de la FDA. AATS Abstract-Book, p. 87.
- Weltert L, et al. : Singlehighdose of Erythropoietin twi days before surgery : a simplified short term approach to blood spare. AATS, Abstract-Book, p. 93.
- Ihlberg L, et al. : Résultats cliniques précoces de l’implantation transcathéter de valve in-valve dans les pays nordiques. AATS Abstract-Book, p. 97.
- Andrei AC, et al : Should paroxysmal atrial fibrillation be treated during cardiac surgery ? AATS Abstract-Book, p. 107.