Les dysfonctionnements pneumologiques et neurologiques se retrouvent de manière égale dans la maladie de Parkinson et sont typiques de la maladie. Il faut donc faire preuve de respect mutuel : Les pneumologues ne doivent pas négliger le fait que les symptômes respiratoires de leurs patients atteints de la maladie de Parkinson peuvent être directement corrélés à la maladie neurologique.
La maladie de Parkinson (MP) est un trouble neurodégénératif dû à une perte progressive de dopamine striatale, qui entraîne des tremblements, une bradykinésie, une rigidité et une instabilité posturale. On sait depuis de nombreuses années que les troubles respiratoires font également partie des symptômes associés à la maladie de Parkinson, mais leur prévalence est probablement sous-estimée. Dans l’ensemble, les troubles respiratoires dans la MP semblent être corrélés aux scores moteurs, mais la relation avec les thérapies pharmacologiques, les phénotypes de la maladie et les symptômes non moteurs n’a pas encore été entièrement étudiée.
Une équipe dirigée par le Dr Andrea D’Arrigo, du Centre Aldo Ravelli de l’Université de Milan, a axé sa revue sur les schémas obstructifs et restrictifs et a mis en évidence les mécanismes pathogéniques présumés sous-jacents [1].
Troubles respiratoires obstructifs et restrictifs
Plusieurs études ont montré un trouble respiratoire obstructif dans la maladie de Parkinson. L’obstruction des voies respiratoires supérieures (OVS) est décrite avec une prévalence très variable allant de 6,7% à 67%. Les indicateurs peuvent inclure une dyspnée, une hypophonie, une voix tremblante, un stridor ou une respiration sifflante.
On peut distinguer deux types d’OAI : le premier type (“flutter respiratoire”) se caractérise par des ralentissements et des accélérations successifs et réguliers du flux. Dans le second type, on observe des changements de débit brusques et irréguliers (qui tombent souvent à zéro) dans une boucle de volume d’écoulement anormale due à des mouvements irréguliers et saccadés des structures glottiques et supraglottiques, ce qui entraîne une obstruction intermittente des voies aériennes. Bien que la physiopathologie soit encore en discussion, les deux modèles reflètent probablement des dysfonctionnements dans les ganglions de la base, écrivent le Dr D’Arrigo et al. La littérature fait état d’une corrélation possible entre l’AUA et les tremblements, et un travail rapporte l’association de l’AUA avec la bradykinésie. Un lien avec la dystonie est également décrit.
Un trouble respiratoire restrictif a été décrit à la fois chez les patients symptomatiques et asymptomatiques, avec une prévalence variable allant de 28% à 94%. La pathogenèse est controversée, plusieurs hypothèses ont été postulées, notamment la dysautonomie liée à la maladie de Parkinson et les effets secondaires des dérivés de l’ergot, tandis qu’une faiblesse myopathique de la paroi thoracique semble peu probable. Aucune corrélation avec les tremblements, la bradykinésie ou la rigidité n’a été décrite, mais une relation avec l’arthrose de la colonne vertébrale a été postulée comme probable.
Apnée et pneumonie d’aspiration dans la maladie de Parkinson
En ce qui concerne la présence d’un syndrome d’apnée, les auteurs ont trouvé des résultats d’études contradictoires, probablement en raison des différents échantillons de patients et des méthodes utilisées, comme ils l’ont écrit.
Une apnée survenant pendant le sommeil peut être classée comme centrale (lorsque le débit d’air diminue en raison d’une défaillance de l’activation des muscles respiratoires), obstructive (lorsque l’obstruction des voies respiratoires supérieures arrête le débit d’air malgré l’effort des muscles respiratoires) et mixte. Certains travaux ont identifié une prévalence plus élevée d’apnée obstructive dans les populations atteintes de MP, tandis que d’autres ont constaté une incidence plus faible, voire l’absence d’apnée ou de troubles du sommeil, par rapport aux témoins.
On peut supposer qu’il existe un lien entre le handicap moteur et l’apnée, mais le rôle des médicaments de la MP n’est pas clair. La pression positive continue (PPC) semble efficace pour réduire les événements, améliorer la saturation en oxygène et approfondir le sommeil chez les patients atteints de la maladie de Parkinson et d’apnée obstructive du sommeil.
La pneumonie par aspiration est une complication dramatique qui peut expliquer le début aigu/subaigu de la fièvre et de l’insuffisance respiratoire chez un patient atteint de MP. Physiologiquement, la déglutition nécessite une coordination adéquate entre les muscles du pharynx et les muscles respiratoires, mais ce mécanisme est souvent altéré dans la maladie de Parkinson. La dysphagie est typique des stades avancés de la maladie. En outre, un trouble de la toux a été détecté chez plus de 50% des patients asymptomatiques atteints de MP, ce qui peut également contribuer à une aspiration silencieuse et à un risque accru de pneumonie.
Les auteurs rappellent l’importance de la prévention pour une prise en charge adéquate de la pneumonie par aspiration. Un régime léger est généralement la première étape. Une position du menton vers le bas lors de la déglutition peut être utile, et parfois un orthophoniste ou un thérapeute de la déglutition peut vous aider. La question de savoir si la stimulation dopaminergique apporte un bénéfice est controversée. Malgré l’importance des circuits des ganglions de la base dopaminergiques dans le processus de déglutition, des résultats contradictoires ont été rapportés dans différentes études. Chez les patients présentant une sialorrhée importante et un risque accru d’aspiration, un traitement par anticholinergiques ou des injections de botuline dans les glandes salivaires peut être indiqué en dernier recours.
Ce à quoi il faut faire attention sur le plan thérapeutique
La plupart des publications soulignent le rôle des médicaments antiparkinsoniens comme facteur de protection contre l’insuffisance respiratoire. Des essais sur des chiens ont montré que la lévodopa augmente la fonction musculaire inspiratoire et que la dopamine améliore la fonction diaphragmatique en cas d’insuffisance respiratoire aiguë chez les patients atteints de BPCO. Au fur et à mesure de l’évolution de la maladie, les médicaments anti-Parkinson peuvent aider à maintenir la pression inspiratoire maximale de la bouche et la pression inspiratoire nasale. En conséquence, la lévodopa au coucher est associée à une apnée obstructive du sommeil moins sévère dans la maladie de Parkinson. Comme on ne sait pas que la dopamine augmente la force musculaire, elle peut améliorer la fonction respiratoire en augmentant la coordination musculaire par une activité centrale.
Il faut toutefois tenir compte du fait que les médicaments antiparkinsoniens peuvent entraîner des effets secondaires tels qu’une fibrose pulmonaire pleurale induite par les agonistes dopaminergiques comme la bromocriptine ou des dyskinésies diaphragmatiques induites par la lévodopa. La présence d’autres dyskinésies, plus fréquentes dans la maladie de Parkinson (par exemple des mouvements involontaires anormaux du tronc, du visage ou des membres), doit alerter le médecin sur la présence de dyskinésies diaphragmatiques chez les patients présentant une insuffisance respiratoire. Des preuves indirectes du rôle bénéfique du traitement dopaminergique dans l’OMA ont été fournies par l’insuffisance respiratoire aiguë qui peut survenir après l’arrêt de ces médicaments, mais aussi par la réponse de l’OMA à l’apomorphine intraveineuse.
La corrélation entre les médicaments pneumologiques et la MP ne doit pas être négligée, en particulier les anticholinergiques systémiques peuvent jouer un rôle dans la maladie de Parkinson. L’acétylcholine joue un rôle clé dans la modulation de l’activité dopaminergique dans les ganglions de la base, et son inhibition peut augmenter le tonus dopaminergique central. Les bronchodilatateurs anticholinergiques pourraient avoir des effets centraux, comme l’ont rapporté certains auteurs. Un effet sur les troubles moteurs dans la maladie de Parkinson semble possible, bien que cela n’ait pas été étudié dans la littérature actuelle. Il convient toutefois de garder à l’esprit que les anticholinergiques peuvent être associés à des troubles cognitifs et à un délire. Au stade avancé de la maladie de Parkinson, lorsque la démence est également une caractéristique très fréquente, ces symptômes peuvent être encore plus fréquents.
Facteurs neurologiques et pneumologiques en étroite corrélation
Les dysfonctionnements neurologiques et pneumologiques sont étroitement liés chez les patients atteints de MP, résument le Dr D’Arrigo et al. Les pneumologues doivent être conscients que les problèmes respiratoires chez cette catégorie de patients peuvent être une conséquence directe de la progression de la maladie et/ou de la stimulation dopaminergique. En outre, les pneumologues devraient prendre davantage en considération les anomalies spirométriques qui pourraient apparaître dès les premiers stades de la maladie et le rôle thérapeutique potentiel de la stimulation dopaminergique de la fonction respiratoire qu’avec les médicaments inhalés classiques.
D’autre part, les neurologues devraient toujours prendre en compte les valeurs pneumologiques dans les antécédents médicaux d’un patient atteint de MP et se concentrer sur la fonction respiratoire comme cible thérapeutique potentielle pour améliorer la qualité de vie d’un patient qui se plaint de troubles respiratoires. Il convient également de rappeler le bénéfice potentiel de la réhabilitation pulmonaire sur les épreuves respiratoires fonctionnelles et la tolérance à l’effort dès les premiers stades. Il peut être tout à fait judicieux d’envisager un programme d’entraînement respiratoire parallèlement au traitement dopaminergique chez les patients qui signalent des problèmes respiratoires.
Bien que le rôle des médicaments contre la maladie de Parkinson soit toujours controversé, il faut tenir compte du fait qu’ils peuvent jouer un rôle potentiel dans l’amélioration de la fonction pulmonaire et de la contribution négative potentielle à la coordination musculaire et à l’aggravation de la dyskinésie chez les patients atteints de dyskinésie, concluent les auteurs.
Littérature :
- D’Arrigo A, et al : ERJ Open Res 2020 ; doi : 10.1183/23120541.00165-2020
InFo PNEUMOLOGIE & ALLERGOLOGIE 2021 ; 3(1) : 28-29