La télémédecine est un domaine de la cybersanté, qui désigne l’utilisation de technologies électroniques (numériques) dans les soins médicaux et dans le domaine de la santé en général. Les sous-domaines se divisent en eCare (télémédecine), eAdministration (administration), ePrévention (prévoyance), eResearch (recherche) et eLearning (éducation et formation des patients). La télémédecine en soi est l’utilisation de technologies numériques pour échanger des informations médicales à distance ; la télédermatologie concerne le traitement des maladies de la peau et des muqueuses adjacentes.
La télémédecine est un domaine de la cybersanté, qui désigne l’utilisation de technologies électroniques (numériques) dans les soins médicaux et dans le domaine de la santé en général. Les sous-domaines se divisent en eCare (télémédecine), eAdministration (administration), ePrévention (prévention), eResearch (recherche) et eLearning (éducation et formation des patients) [1]. La télémédecine en soi est l’utilisation de technologies numériques pour échanger des informations médicales à distance ; la télédermatologie concerne le traitement des maladies de la peau et des muqueuses adjacentes.
En principe, les systèmes techniques sont basés sur deux applications différentes : la technologie Store-and-Foreward (SAF) ou l’application en temps réel. Dans le cas de la technologie SAF, la transmission des résultats est décalée dans le temps, dans le cas de la seconde, elle se fait en temps réel (exemple : contact téléphonique, vidéoconférence). Une consultation de télédermatologie comprend l’enregistrement des données (caméra numérique ou vidéo, PC, smartphone, applications), la transmission des données (en temps réel ou SAF), l’utilisation des données (documentation, diagnostic, planification et/ou évaluation du traitement, recherche) et l’archivage des données (respectant la qualité et la protection des données) [2]. Outre ces formes de solutions techniques, il existe d’innombrables applications médicales et de santé qui ne sont pas prises en compte dans cet article.
Priorité à la cicatrisation des plaies
Toutes les affections dermatologiques sont en principe éligibles à l’utilisation de la télédermatologie ; cela est désormais bien documenté pour le psoriasis vulgaire, la dermatite atopique et les plaies chroniques [1].
Le traitement des plaies chroniques met l’accent sur leur cicatrisation. Le processus de traitement implique plus que le simple changement régulier des pansements. Tout commence par un diagnostic avec définition de la genèse de la plaie, dont découle l’élaboration d’un concept thérapeutique. La thérapie comprend à la fois un traitement causal (par ex. chirurgie des varices, reperfusion artérielle, etc.) et un traitement symptomatique (thérapie locale). Par la suite, il est nécessaire de changer régulièrement les pansements, d’évaluer le succès de la cicatrisation et de procéder à d’éventuels ajustements thérapeutiques. Cela devrait se faire avec des contrôles dans des centres spécialisés ou auprès de praticiens expérimentés dans le traitement des plaies ; mais l’expertise appropriée pour ces patients n’est pas toujours immédiatement disponible à tout moment et en tout lieu. Les trajets sont souvent longs et coûteux, ce qui a un impact négatif sur la qualité de vie des patients. Ces circonstances/inconvénients peuvent être influencés positivement par l’utilisation de la télédermatologie [3].
Dans notre service de Graz, nous avons pu faire les premières expériences de télédermatologie dans le traitement des plaies chroniques dès le début des années 2000 [4]. Dans notre service ambulatoire, l’évaluation et le traitement ont été effectués en face à face et les photos numériques, les données anamnestiques pertinentes du patient ainsi que les résultats des examens ont été transmis électroniquement à un expert. Les résultats étaient fondamentalement concordants, mais il manquait d’autres éléments pour pouvoir recommander un traitement, comme l’état général, les maladies antérieures pertinentes et les informations concernant la réponse au traitement précédent. En outre, aucune conclusion n’a pu être tirée quant à l’acceptation de la visite électronique par les patients ou le personnel soignant, ni quant à une éventuelle réduction des coûts pour le système de santé. Ces questions ouvertes ont ensuite donné lieu à une étude prenant en compte ces points [5]. En coopération avec des médecins spécialistes et des praticiens ainsi que des infirmières à domicile, un suivi télédermatologique des patients a été effectué pendant 3 mois après la visite initiale dans notre service ambulatoire. Les photos numériques ont été accompagnées de fiches techniques standardisées permettant à l’expert de se faire une idée complète de la plaie et du patient. En outre, les praticiens pouvaient également poser des questions. Il s’est avéré que la majorité des groupes de personnes impliqués étaient très satisfaits ; la satisfaction des patients était plutôt en corrélation avec le taux de guérison, ce dernier étant conforme à nos expériences antérieures tirées de la vie quotidienne et de la littérature [6]. Il est intéressant de noter que les visites médicales ou ambulatoires sont passées de 64 avant l’inclusion dans l’étude à 9 pendant l’étude, ce qui s’est traduit par une réduction des coûts de transport de 46%, tout en maintenant la qualité des soins. Au fur et à mesure de l’amélioration des médias numériques, y compris téléphones portables, une autre étude a été menée [7]. La question a été posée de savoir si les patients/leurs proches pouvaient être aidés dans leur thérapie par l’utilisation de la télédermatologie par eux-mêmes (groupe télé et groupe de contrôle avec des visites régulières en ambulatoire). En outre, le gain de temps résultant de la suppression des visites en ambulance a été évalué. Cette étude a également montré que les visites ambulatoires pouvaient être remplacées par des visites télédermatologiques (1,6 visite/patient/mois contre 0,6 télévisite/patient/mois) ; 6 des 20 patients télétransmis ont été suivis exclusivement par télévisite. Dans l’ensemble, cela a permis d’améliorer la qualité de vie des patients souffrant de plaies chroniques et de faire gagner du temps aux médecins traitants et aux patients. La réduction des coûts de transport permet d’alléger le budget de la santé.
COVID-19, un moteur pour la télémédecine
Par la suite, l’intégration de la télémédecine dans la pratique clinique quotidienne a considérablement augmenté et a fait des pas de géant avec la pandémie COVID-19 à partir de 2020, surtout dans le domaine du traitement des plaies. Peter Elsner décrit que pendant la pandémie, les possibilités de soins personnels pour les patients dermatologiques étaient considérablement réduites. Celles-ci ont toutefois pu être compensées, du moins en partie, par l’extension des prestations de télédermatologie. Cette expérience devrait être utilisée pour améliorer encore l’utilisation et l’acceptation par les patients et les dermatologues [8]. Chen et al. ont publié une revue systémique et une méta-analyse concernant la télémédecine et la gestion des plaies chroniques en 2020. En effectuant une recherche dans la littérature, ils ont constaté que la prise en charge des patients atteints de plaies par télémédecine n’était pas inférieure à la visite en direct traditionnelle, ni en termes d’efficacité ni en termes de sécurité, et qu’elle pouvait être mise sur un pied d’égalité avec cette dernière [9]. Chanussot-Deprez et al. concluent également dans leur revue que le traitement des plaies par télémédecine n’entraîne pas de perte de qualité des soins et que les coûts sont réduits tout en améliorant la qualité de vie des patients [10].
Toutes ces expériences, observations et résultats d’études ont conduit à l’élaboration du guide S2k de télédermatologie en langue allemande, sous la direction de Mathias Augustin, avec la participation des sociétés savantes d’Allemagne, d’Autriche et de Suisse, qui a été publié en 2020 et reste valable jusqu’en 2024 [11]. Il s’agit d’une recommandation basée sur des preuves pour l’utilisation de la télédermatologie dans la pratique quotidienne, notamment dans le domaine du traitement des plaies chroniques. Pour les plaies chroniques, le diagnostic et la prise en charge thérapeutique peuvent être effectués par télédermatologie ; les données cliniques, d’appareillage et d’anamnèse nécessaires doivent être disponibles pour le diagnostic primaire des plaies aiguës et chroniques. Zarchi et al. ont montré au Danemark, dans le cadre d’une étude prospective randomisée, que les patients atteints d’ulcères de jambe bénéficient d’un taux de cicatrisation significativement plus élevé lorsqu’ils reçoivent des soins de soutien par télédermatologie en plus des soins ambulatoires de routine [12].
Pour l’utilisation quotidienne dans la pratique, on peut donc dire que le compte-rendu numérique peut être assimilé à un compte-rendu en présentiel, surtout pour les patients existants. En mode SAF, il est recommandé de prendre une photo numérique de chaque :
- pansement couché et pansement secondaire avant réception,
- plaie immédiatement après le retrait du pansement,
- la surface de contact du pansement et
- de la plaie après nettoyage.
L’utilisation d’une règle graduée, éventuellement incluse L’échelle de couleurs, qui permet également d’inscrire le score de douleur, s’avère utile [1]. Il faut cependant toujours tenir compte du fait qu’en plus de la qualité d’image correspondante, des informations de base sont également transmises.
Résumé
Le diagnostic télédermatologique, de préférence par la méthode SAF, et la prise en charge des plaies chroniques sont réalisables et étayés par des preuves. Une qualité d’image appropriée et des informations pertinentes et actualisées sur l’évolution de la plaie et l’état général du patient sont indispensables à l’efficacité et à la sécurité du diagnostic. Cette forme de traitement permet d’obtenir des consultations régulières d’experts sans perte de qualité – y compris de zones non centrées – avec une amélioration de la qualité de vie pour les patients et une réduction des coûts pour le système de santé. Il est désormais bien accepté par les patients et les utilisateurs.
Messages Take-Home
- Le traitement des patients atteints de plaies chroniques nécessite des connaissances appropriées.
- Des contrôles réguliers de l’évolution avec adaptation éventuelle du traitement dans des centres spécialisés sont nécessaires.
- La télédermatologie permet cela sans perte de qualité, amélioration de la qualité de vie et réduction des coûts.
Littérature :
- Augustin M, et al : Pratique de la télédermatologie. J Dtsch Dermatol Ges 2018 ; 16 (5) : 6-57.
- Reinders P, et al. : Domaines d’application de la télédermatologie. Dermatologue 2022 ; 73 : 47-52.
- Gamus A, et al : Télémédecine versus soins en face à face pour le traitement des patients atteints d’ulcères de l’extrémité inférieure. J Woud Care 2021 ; 30 (11) : 916-921.
- Salmhofer, et al : Wound teleconsultation in patients with chronic leg ulcers. Dermatology 2005 ; 210 : 211-217.
- Binder B, et al : Teledermatological monitoring of leg ulcers in cooperation with home care nurses. Arch Dermatol 2007 ; 143 (12) : 1511-1514.
- Nelzen O, et al : Pronostic à long terme pour les patients atteints d’ulcères de jambe chroniques : une étude de cohorte prospective. Eur J VAsc Endovasc Surg 1997 ; 13 (5) : 500-508.
- Eber E, et al. : Télédermatologie mobile dans le traitement des ulcères chroniques. Dermatologue 2019 ; 70 : 346-353.
- Elsner P : La télédermatologie à l’heure du COVID-19 – une revue systématique. J Dtsch Dermatol Ges 2020 ; 18 (8) : 841-847.
- Chen L, et al : Telemedicine in chronic wound management : systemic review and meta-ananlysis. JMIR Mhealth Uhealth 2020 ; 8 (6) : e15574.
- Chanussot-Deprez C, et al : Telemedicine in wound care : a review. Adv Skin Wound Care 2013 ; 26 (2) : 78-82.
- Augustin M, et al. : Ligne directrice S2k Télédermatologie 2020 ; www.awmf.org/leitlinien/detail/II/013-097.html.
- Zarchi K, et al : Expert advice provided through telemedicine improves healing of chronic wounds : prospective cluster controlled study. J Invest Dermatol 2015 ; 135 (3) : 895-900.
DERMATOLOGIE PRATIQUE 2022 ; 32(4) : 6-8