Comment utiliser le Big Data dans le domaine de la sclérose en plaques ? Et quelles sont les nouveautés concernant les options thérapeutiques existantes ? Le congrès ECTRIMS de Berlin a apporté des éclaircissements.
Big MS Data (BMSD) Network représente une collaboration entre les registres nationaux de la SEP du Danemark, de l’Italie et de la Suède, ainsi que de MSBase et de l’OFSEP (France). Une cohorte de 11 871 patients de ce réseau a été utilisée pour évaluer à quel moment un traitement modificateur de la maladie (DMT) devrait être initié afin de prévenir l’accumulation de handicaps à long terme [1]. Le démarrage d’un DMT dans les six mois suivant le début de la maladie s’est avéré optimal à cet égard.
De même, He et al. ont utilisé les données du registre MSBase et de deux registres locaux pour une analyse similaire [2]. Ils ont constaté que les patients traités tôt après le diagnostic par un traitement très efficace (rituximab, ocrelizumab, mitoxantrone, alemtuzumab, natalizumab) présentaient une accumulation moindre de handicaps.
Données à 5 ans sur l’ocrelizumab
De nombreuses données sur les options thérapeutiques déjà approuvées ont été présentées à Berlin, notamment les données à 5 ans sur l’ocrelizumab chez les patients atteints de SEP rémittente (études OPERA I et II) [3,4]. Ils ont montré que les patients qui sont passés de l’interféron β-1a à l’ocrelizumab (“switcher”) après la phase en double aveugle de deux ans pour la phase de prolongation en ouvert (OLE) ont connu une réduction rapide du taux annuel de poussées (ARR) [3]. Tant chez ces “switchers” que chez les patients qui avaient déjà reçu l’ocrelizumab en double aveugle (“OCR-OCR”), la réduction de l’ARR obtenue s’est maintenue jusqu’à l’année 5. Par rapport aux “switchers”, les patients “OCR-OCR” ont également obtenu une réduction significative et continue de la progression de leur handicap jusqu’à l’année 5.
Après le changement de traitement, les “switchers” ont également présenté une réduction robuste et continue de l’activité de la maladie mesurée par IRM (lésions Gd+ T1 et nouvelles lésions T2) jusqu’à l’année 5 [4]. Dans le groupe “OCR-OCR”, la suppression quasi totale des lésions Gd+-T1 obtenue en double aveugle a été maintenue pendant l’OLE. Le faible nombre de nouvelles lésions T2/de lésions qui s’agrandissent est également resté stable. Enfin, après cinq ans de traitement, les patients randomisés initialement pour recevoir l’ocrelizumab présentaient une perte de substance cérébrale inférieure à celle des “switchers” (volume cérébral total et substance grise blanche et corticale).
Interféron β-1a vs fingolimod dans la SEP pédiatrique
Cette année, l’ECTRIMS a également abordé le thème de la SEP pédiatrique à plusieurs reprises. Ainsi, Brenda Banwell, MD, Philadelphie, a présenté lors d’une session scientifique les données de l’étude de phase III PARADIGMS, la première étude active contrôlée achevée conçue spécifiquement pour les patients pédiatriques atteints de SEP [5]. Des patients âgés de 10 à 17 ans ont reçu pendant deux ans soit 0,5 mg de fingolimod par jour (soit 0,25 mg/j chez les patients ≤40 kg de poids corporel) ou 30 μg d’interféron (IFN) β-1a i.m. une fois par semaine. Enfin, le fingolimod a entraîné une réduction significative de 82% de l’ARR par rapport à l’IFN β-1a. Le fingolimod a également permis de réduire significativement l’activité de la maladie détectable par IRM ainsi que le volume des lésions inflammatoires aiguës par rapport à l’IFN β-1a. Le taux d’atrophie cérébrale a été significativement réduit de 40% sous fingolimod. Le profil de sécurité du fingolimod chez les patients pédiatriques était conforme à celui observé chez les adultes [6]. Le taux global d’effets indésirables était plus élevé sous IFN β-1a que sous fingolimod (95,3% vs 88,8%). Des effets indésirables graves sont survenus chez 16,8% des patients sous fingolimod et 6,5% des patients sous IFN β-1a.
Analyse primaire de l’étude de phase II sur l’évobrutinib
Xavier Montalban, MD, Barcelone, a présenté l’analyse primaire de l’étude de phase II sur l’évobrutinib, un inhibiteur de BTK, lors de la session Late Breaking News [7]. BTK joue un rôle central dans différents processus du système immunitaire adaptatif et inné impliqués dans la pathogenèse de la SEP. L’étude contrôlée par placebo a maintenant évalué différentes doses d’évobrutinib (25 mg QD, 75 mg QD, 75 mg BID) sur une période de 24 semaines. Il a été démontré que 75 mg de QD et 75 BID entraînaient une réduction significative des lésions Gd+-T1 par rapport au placebo. En outre, une tendance à la réduction de l’ARR a été observée. Dans l’ensemble, le traitement a été bien toléré. Des augmentations de plusieurs paramètres de laboratoire (ALT, AST, lipase) ont été observées, en particulier dans le groupe recevant 75 mg d’évobrutinib BID. Celles-ci étaient toutefois réversibles et asymptomatiques. Aucune des trois doses n’a entraîné d’infection grave ou de lymphopénie. C’est la première fois qu’une réduction de l’activité de la maladie a été démontrée dans le cadre d’une étude randomisée pour un inhibiteur de BTK. L’étude actuelle va maintenant se poursuivre pendant 24 semaines supplémentaires.
Source : Congrès ECTRIMS, 10-12 octobre 2018, Berlin (D)
Littérature :
- Iaffaldano P, et al : The optimal time to start treatment in relapsing remitting multiple sclerosis patients : results from the Big Multiple Sclerosis Data Network. Ectrims 2018 ; Abstract 204.
- He A, et al : Le démarrage précoce des thérapies à haut rendement améliore les résultats en matière d’invalidité sur 10 ans. Ectrims 2018, Abstract P919.
- Hauser SL, et al : Long-term reduction of relapse rate and confirmed disability progression after 5 years of ocrelizumab treatment in patients with relapsing multiple sclerosis. Ectrims 2018 ; Abstract P590.
- Arnold DL, et al : Long-term reduction in brain MRI disease activity and atrophy after 5 years of ocrelizumab treatment in patients with relapsing multiple sclerosis. Ectrims 2018 ; Abstract P588.
- Chitnis T, et al : Essai du fingolimod versus interféron bêta-1a dans la sclérose en plaques pédiatrique. N Engl J Med 2018 ; 379 : 1017-1027.
- Arnold D, et al : Effects of Fingolimod on MRI Outcomes in Patients with Pediatric Onset Multiple Sclerosis : Results from Phase 3 PARADIGMS Study. AAN 2018 ; Abstract S51.005
- Montalban X, et al : Primary analysis of a randomised,
- étude de phase 2, contrôlée par placebo, de l’évobrutinib (M2951), inhibiteur de la tyrosine kinase de Bruton, chez des patients atteints de sclérose en plaques en rechute. Ectrims 2018 ; Abstract 322.
Littérature complémentaire :
- Torke S, et al : Inhibition of Bruton’s tyrosine kinase selectively prevents antigen-activation of B cells and ameliorates B cell-mediated experimental autoimmune encephalomyelitis. Ectrims 2018 ; Abstract P575.
InFo NEUROLOGIE & PSYCHIATRIE 2018 ; 16(6) : 58-59