La paupière inférieure représente un défi particulier pour le traitement esthétique. Le PRP est une thérapie rapide, peu invasive et avec peu d’effets secondaires dans ce domaine. Les patients acceptent bien la procédure autologue “naturelle”.
La région autour de l’œil, en particulier la paupière inférieure, est l’une des zones les plus délicates du visage. D’un point de vue anatomique, la paupière inférieure pose deux problèmes principaux : D’une part, il s’agit d’une peau très fine (un phénomène qui s’accentue avec l’âge) avec peu de structure sous-jacente. Les vaisseaux sanguins brillent à travers, ce qui peut se manifester par des cernes bleutés. D’autre part, la peau y perd progressivement de son élasticité et se relâche (cutis laxa).
Il n’y a donc pas principalement un problème de volume ou de rides, mais plutôt un problème de régénération, ce qui nécessite un traitement régénérateur (amélioration de la circulation sanguine/structure de la peau, stimulation de la synthèse du collagène).
Possibilités et limites des différentes thérapies esthétiques
Une approche envisageable en raison des modifications anatomiques est l’administration de volume via l’acide hyaluronique. Il est important, d’une part, de choisir l’acide hyaluronique approprié (produits spécifiquement prévus à cet effet) et, d’autre part, de se méfier de la surcorrection. Il peut arriver que cela entraîne une absorption excessive de liquide, ce qui est exactement l’inverse de l’effet recherché. L’approche thérapeutique est en principe possible pour cette localisation, mais elle est exigeante et délicate et doit donc être confiée à des mains expertes et spécialisées. De même que, par exemple, le traitement au laser dans la région de la paupière inférieure.
Ce qui fonctionne très bien pour les pattes d’oie, c’est la toxine botulique. Cependant, la paupière inférieure n’est pas accessible ou ne constitue pas une indication appropriée (l’amincissement de l’épiderme et le relâchement de la peau ne sont pas abordés). Les personnes ayant tendance à avoir des gonflements/poches sous les yeux peuvent même voir leur aspect s’aggraver à court terme lors du traitement de la patte d’oie (l’absence d’activité musculaire empêche également le drainage de la lymphe, le liquide stagne). Si l’on avance vers le nez lors du traitement, on risque non seulement d’avoir des poches sous les yeux, mais aussi un ectropion (basculement de la paupière vers l’extérieur avec larmoiement consécutif de l’œil).
Pour le microneedling, qui constitue également un bon traitement régénérateur pour d’autres indications, la paupière inférieure est anatomiquement difficile d’accès et trop sensible (douleurs). En outre, le risque d’hématome est plus élevé à cet endroit.
Les méthodes chirurgicales sont une possibilité, surtout en cas de cutis laxa et de gonflement. Cette opération consiste à retirer l’excès de peau et, si nécessaire, le corps gras mentionné. Entre des mains expérimentées (généralement des chirurgiens plasticiens et des ophtalmologues pratiquant la chirurgie), les résultats sont bons. Cependant, l’acceptation par les patients d’une telle intervention (également plus coûteuse) est limitée. Aujourd’hui, la demande s’oriente de plus en plus vers des procédures moins invasives avec des temps d’arrêt plus courts.
Le PRP, une approche thérapeutique pertinente pour la paupière inférieure
Les débuts du traitement par PRP se situent dans le domaine de l’orthopédie (par exemple, revitalisation du cartilage). En outre, il est utilisé depuis longtemps dans le traitement des plaies pour la cicatrisation. D’autres indications (pour une monothérapie ou une thérapie combinée) sont le rajeunissement général de la peau, les striae distensae ou l’alopécie androgénétique.
Les facteurs de croissance et les cytokines endogènes contenus dans les thrombocytes sont particulièrement importants pour l’effet régénérateur. Ceux-ci ont notamment un effet anti-inflammatoire et stimulent la prolifération. Il est essentiel de séparer le PRP des érythrocytes et des leucocytes de la manière la plus douce possible, mais complète, sous peine d’effets indésirables dus aux protéases et aux radicaux libres. On y parvient en prélevant d’abord 10 à 15 ml de sang au patient, puis en le centrifugeant verticalement (idéalement à 1500 tours ou 350 G pendant cinq minutes). Ensuite, le plasma se trouve dans les deux tiers supérieurs de la seringue et une petite quantité de leucocytes et de plaquettes se trouve juste au-dessus des globules rouges (figure 1). Cette méthode permet d’augmenter la concentration de plaquettes dans le plasma d’un facteur 2,5 par rapport au sang total.
Pour éviter toute contamination, un système fermé à double seringue (double seringue ACP® de la société Arthrex) convient pour le retraitement. Après la centrifugation, le PRP est aspiré par le piston interne de la double seringue (Fig. 2). On dispose donc alors d’environ 3-5 ml de plasma (selon le système). Le PRP est ensuite aspiré de la seringue interne dans de fines seringues d’environ 1 ml chacune. Ensuite, on peut soit mettre une canule pour injecter le plasma par voie sous-cutanée en une seule piqûre, soit l’appliquer par voie sous-cutanée avec des aiguilles très fines en trois ou quatre piqûres sur toute la région de la paupière inférieure (env. 1-2 ml).
Pour que les plaquettes libèrent les facteurs de croissance, elles doivent être activées, par exemple avec l’ajout d’anticoagulants. Les facteurs de croissance ont toutefois une durée de vie très courte. Lorsqu’elles sont toutes libérées en même temps dans le cadre d’une injection d’anticoagulant, c’est comme si vous aviez une serrure et mille clés pour la fermer. Comme les plaquettes, lorsqu’elles entrent en contact avec les fibres de collagène, sont également activées (mais via un processus endogène, lent et continu), on pense que l’on obtient ainsi un meilleur effet. Personnellement, je n’ajoute pas d’anticoagulant. Les avis sont toutefois partagés sur ce sujet.
L’effet positif du PRP sur la peau vieillissante de la paupière inférieure réside dans les facteurs de croissance. Ceux-ci réactivent la synthèse du collagène, stimulent la prolifération cellulaire et l’angiogenèse. L’élasticité s’en trouve améliorée et un effet de volume se produit. En outre, le PRP stimule la dégradation des composants endommagés de la matrice extracellulaire de la peau vieillissante (un effet probablement dû à une meilleure circulation sanguine). La synthèse de l’acide hyaluronique par le corps est augmentée, ce qui attire les fluides et entraîne également une augmentation du volume.
Cas personnels et expériences
Mon expérience personnelle positive avec le PRP pour le traitement de la région inférieure de l’œil (Fig. 3) coïncide avec celle de l’étude en cours du PD Dr. med. Matthias Aust, qui a déjà présenté les résultats positifs de son traitement lors de congrès spécialisés.
Le processus de régénération avec la formation de nouvelles cellules et fibres prend du temps, c’est pourquoi les patients doivent être informés précisément qu’ils ne peuvent s’attendre au résultat final que quatre à six mois après la fin du traitement. En général, on fait trois à quatre séances à quatre semaines d’intervalle.
La sélection des patients est également cruciale dans cette approche thérapeutique “naturelle” (pour la sécurité, mais aussi pour un succès optimal). Il existe bien entendu des contre-indications ou des indications limitées, notamment
- maladie tumorale active
- Grossesse et allaitement
- Âge inférieur à 18 ans
- les maladies et inflammations cutanées aiguës
- Dysfonctionnement des plaquettes sanguines
- Patients sous traitement anticoagulant ou
- Traitement antiagrégant plaquettaire
- Infections.
Le PRP est une méthode relativement facile à mettre en œuvre, peu risquée et efficace, en particulier pour des localisations aussi délicates, et qui nécessite relativement peu de moyens matériels. Les conditions ou le système sont toutefois déterminants. Un traitement optimal, complet et sûr du plasma doit être garanti. De plus, même avec ces approches autologues, il ne faut pas oublier qu’un diagnostic et une indication clairs doivent être posés avant le traitement. Tous les patients présentant des cernes ne sont pas automatiquement éligibles pour un traitement PRP. Les cernes sont-ils réellement dus à un amincissement de l’épiderme ou s’agit-il plutôt d’une hyperpigmentation d’origine ethnique (sur laquelle le PRP n’a aucun effet) ?
L’acceptation de l’approche par les patients est élevée, bien qu’il s’agisse d’une thérapie au milieu du visage (où il n’est pas possible de couvrir avec un foulard), ce qui exige une grande confiance dans le médecin. Après le traitement d’une durée totale d’environ une demi-heure, la zone de traitement est légèrement rouge et un léger gonflement des paupières inférieures peut apparaître pendant un à deux jours. Le patient peut reprendre directement le travail (pas de temps d’arrêt à proprement parler). Il est important de comprimer et de refroidir pendant environ cinq minutes après l’injection. Un maquillage par-dessus est relativement rapide.
En raison des insuffisances susmentionnées de certaines autres approches esthétiques, le PRP peut être un bon choix pour offrir une alternative peu invasive, rapide et avec peu d’effets secondaires aux patients qui se sont jusqu’à présent “contentés” de simplement maquiller leurs cernes (parce qu’ils ne souhaitaient pas d’approches plus invasives, par exemple).
Messages Take-Home
- La paupière inférieure représente un défi anatomique particulier pour le traitement esthétique.
- Les patients qui souhaitent un traitement aussi rapide que possible, peu invasif et avec peu de douleurs/d’effets secondaires, peuvent trouver dans le PRP une bonne
- option thérapeutique régénératrice.
- L’acceptation de la procédure par les patients est élevée.
- Pour les approches autologues “naturelles”, il est également essentiel d’établir au préalable un diagnostic et une indication clairs. Les patients appropriés doivent être soigneusement sélectionnés et informés à l’avance des effets attendus et des périodes de traitement.
DERMATOLOGIE PRATIQUE 2017 ; 27(3) : 30-32