La dysfonction érectile (DE) est un problème clinique qui apparaît dans la pratique de la médecine générale et dont l’importance socio-économique ne cesse de croître. En présence d’une DE, il est indiqué de procéder à des examens complets, car les symptômes de la DE peuvent être un marqueur précoce important de maladies non encore diagnostiquées. Grâce aux techniques modernes de revascularisation endovasculaire, il est aujourd’hui possible de revasculariser avec succès par cathétérisme des vaisseaux érectiles de petit calibre.
La dysfonction érectile (DE) est définie comme l’incapacité répétée d’obtenir ou de maintenir une érection permettant la pénétration vaginale lors d’un rapport sexuel. Des millions d’hommes dans le monde sont concernés, la DE apparaissant à partir de 40 ans. L’étude MMAS (Massachusetts Male Aging Study) a révélé une prévalence de la DE de 52% chez les hommes âgés de 40 à 70 ans [1]. L’incidence augmente avec l’âge. Outre la DE, les autres troubles sexuels fréquents sont une baisse de la libido et des problèmes d’éjaculation.
La sexualité des personnes âgées reste un grand tabou dans notre société. Or, pour de nombreuses personnes âgées, la sexualité revêt une grande importance et est considérée comme une source importante de vitalité, de bien-être et de relation de couple intacte. C’est pourquoi les troubles de la fonction sexuelle entraînent une dégradation non négligeable de la qualité de vie ainsi que de la relation de couple.
Causes de la dysfonction érectile
Les causes de la DE sont souvent multifactorielles. Des facteurs artériels, veineux caverneux, endocriniens, neurogènes et psychogènes jouent essentiellement un rôle. Outre l’âge, les principales causes chez de nombreux patients atteints de DE sont les maladies cardiovasculaires. Les facteurs de risque sont notamment la maladie coronarienne, la maladie artérielle périphérique, l’abus de nicotine, l’hypertension artérielle, l’hyperlipidémie, le diabète sucré et des antécédents familiaux positifs. En outre, les traumatismes et les opérations du petit bassin ainsi que divers médicaments peuvent entraîner ou favoriser la DE.
Depuis la publication de Goldstein et al. 1998, la première grande étude sur le sildénafil, on peut affirmer sans exagérer que les inhibiteurs de la phosphodiestérase 5 (inhibiteurs de la PDE 5) ont révolutionné le traitement de la DE [2]. Le taux de réussite du sildénafil est de 50 à 80% pour toutes les formes de DE. On se demande donc souvent pourquoi un diagnostic approfondi de la DE devrait être effectué, étant donné qu’il existe des traitements médicamenteux efficaces avec les inhibiteurs de la PDE 5 (tableau 1).
Évaluation diagnostique de la dysfonction érectile
Pour diverses raisons, il convient de procéder à une évaluation approfondie avant de traiter la DE. Le point central réside dans la détection de maladies jusqu’alors inconnues. Un exemple classique est la DE comme premier symptôme du diabète sucré chez un patient jusque-là en bonne santé. La prévalence de la DE chez les diabétiques de plus de 60 ans est d’environ 75%, et l’ampleur de la DE augmente proportionnellement avec la gravité de la maladie.
Chez les patients ayant subi un infarctus du myocarde, l’anamnèse révèle souvent une DE (>70%) qui a précédé l’événement cardiaque de plus d’un an. Cela a été démontré dans les études pionnières de Montorsi et al. ont été démontrées de manière impressionnante [3]. Un peu plus de 50% des patients souffrant d’angine de poitrine aiguë et d’une coronaropathie documentée par angiographie présentent une DE.
Il est intéressant de noter que l’étendue de la DE est significativement corrélée au nombre de vaisseaux coronaires touchés. Le diamètre des artères péniennes (1-2 mm) étant plus petit que celui des artères coronaires (3-4 mm), le même niveau de dysfonctionnement endothélial et d’athérosclérose entraîne une diminution plus significative et plus précoce du débit sanguin dans ces vaisseaux, ce qui explique pourquoi la DE précède généralement un événement cardiaque [4]. La DE apparaît chez presque tous les patients environ trois ans avant les symptômes cardiovasculaires. C’est pourquoi il est essentiel que les patients concernés soient examinés par un médecin généraliste afin de détecter rapidement d’autres maladies.
Un autre aspect essentiel est de savoir s’il y a ou non une DE. De nos jours, les patients ont souvent des idées exagérées sur leurs performances sexuelles. Dans cette situation, l’étape décisive est un entretien de clarification et non l’administration d’inhibiteurs de la PDE 5.
Schéma en 3 étapes du diagnostic de la DE
Les étapes nécessaires au diagnostic de la DE suivent un schéma en trois étapes (méthodes d’investigation non invasives, semi-invasives et invasives) et sont conformes aux directives de la Société allemande d’urologie (DGU) et de l’Association européenne d’urologie (EAU) [5].
L’anamnèse et l’examen clinique jouent un rôle central dans l’évaluation non invasive de la DE. Il s’agit notamment de questions relatives aux maladies cardiovasculaires, neurologiques et psychiatriques ainsi qu’aux troubles métaboliques. Il est important de disposer d’une anamnèse médicamenteuse détaillée, car l’association d’inhibiteurs de la PDE 5 avec des nitrates, en particulier, constitue une contre-indication à leur utilisation. La consommation de nicotine et d’alcool devrait également être enregistrée. Les troubles hormonaux tels que le déficit androgénique partiel de l’homme âgé (PADAM) peuvent être associés à une baisse de la libido et à une DE. Pour mieux quantifier la DE, des questionnaires tels que l’International Index of Erectile Dysfunction (IIEF) peuvent être utiles.
L’examen physique peut révéler des signes d’hypogonadisme secondaire (pilosité, peau sèche, atrophie musculaire). En outre, le membre doit être examiné pour détecter un phimosis ou une induratio penis plastica. La palpation rectale est impérative pour exclure une prostatite ou un carcinome prostatique. En outre, il fournit des indications sur une éventuelle hypertrophie de la prostate. Les examens de laboratoire recommandés sont le dosage du glucose, le statut lipidique et le taux de testostérone totale.
Le diagnostic semi-invasif associe le test d’injection des corps caverneux (test SKAT) à une échographie duplex pour évaluer les vaisseaux artériels péniens. Le test SKAT consiste à injecter de la prostaglandine E1 (PGE1) dans le corps caverneux, ce qui entraîne une augmentation de l’afflux de sang artériel après la relaxation des cellules musculaires caverneuses et l’érection. En cas d’origine neurogène ou endocrinienne, une dose initiale de 5 µg de PGE1 suffit ; en cas d’origine vasculaire, une dose de 10-20 µg est recommandée. Si aucune érection adéquate ne se produit, la dose peut être augmentée à 40 µg. L’échographie duplex couleur est réalisée pour détecter le flux artériel dans les artères profondes du pénis appariées dans le tiers proximal de la tige. La vitesse du flux systolique doit être de 30 cm/s, selon les lignes directrices européennes (EAU) >. En complément, une tomographie assistée par ordinateur avec contraste peut aujourd’hui fournir des informations importantes sur l’emplacement de l’obstruction artérielle et être ainsi utile pour la planification d’une éventuelle intervention endovasculaire.
Le diagnostic invasif comprend la cavernosométrie et la graphie dynamiques de la perfusion (DICC) et l’angiographie intra-artérielle sélective des artères péniennes. Les deux procédures ont une valeur informative très élevée en ce qui concerne l’état des vaisseaux.
Traitement de la dysfonction érectile
Pour la grande majorité des patients, l’option de traitement de la DE la plus attrayante est l’inhibition orale de la PDE 5. Les inhibiteurs de la PDE 5 sont donc aujourd’hui recommandés comme traitement de première intention de la DE. Ils sont cliniquement efficaces et ont un profil d’effets secondaires favorable. Quatre inhibiteurs de la PDE 5 différents sont actuellement autorisés : le sildénafil, le tadalafil, le vardénafil et le nouvel inhibiteur de la PDE 5 plus sélectif, l’avanafil (tableau 1).
En cas d’échec du traitement par les inhibiteurs de la PDE 5, l’étape suivante consiste à utiliser l’injection de SKAT. Les injections SKAT sont particulièrement efficaces pour les troubles érectiles organiques et non endocriniens. La forte concentration active du médicament induit une érection chez de nombreux patients, sans effets secondaires systémiques. Il est également possible d’appliquer localement Muse® (PGE1 transuréthral).
La substitution de la testostérone seule pour le traitement de la DE est plutôt rare (environ 3%) – une combinaison avec un inhibiteur de la PDE 5 est plus courante.
Les pompes à vide sont efficaces chez de nombreux patients, car elles permettent d’atteindre un état proche de l’érection, suffisant pour avoir des rapports sexuels. Les taux de satisfaction sont estimés à environ 70% dans la littérature, ces chiffres se rapportant au couple.
Les implants péniens (modèles semi-rigides ou hydrauliques) sont toujours considérés comme une solution de dernier recours. La mise en place d’un implant pénien dans le corps caverneux entraîne une destruction irréversible du tissu pénien et constitue donc un traitement définitif.
Cathéter de revascularisation
Si une diminution de la perfusion artérielle est suspectée à l’échographie, elle peut éventuellement être visualisée par tomographie informatisée. Le site
L’artère iliaque interne n’est pas toujours bien visible en échographie duplex, de sorte qu’une imagerie en coupe peut être utile chez les patients dont l’échographie duplex indique une diminution de la perfusion et des facteurs de risque cardiovasculaire. Dans la mesure où il y a une macro-obstruction artérielle et pas de microangiopathie, une revascularisation endovasculaire par cathéter peut être discutée (Fig. 1).
Les obstructions des artères pelviennes proximales (artères iliaques communes, artères iliaques externes) peuvent être traitées avec succès par cathétérisme depuis de nombreuses années. En revanche, la revascularisation de l’artère pudendale interne a été rendue possible principalement grâce à la miniaturisation du matériel de cathétérisme au cours des dernières années. Par conséquent, les données disponibles à ce sujet sont encore relativement peu nombreuses.
Dans le cadre de l’étude ZEN, Rogers et ses collègues ont traité 30 hommes âgés d’une soixantaine d’années présentant une réponse sous-optimale aux inhibiteurs de la PDE 5 et une sténose d’une ou des deux artères vérifiée par angiographie. pudendae internae par l’implantation de stents coronaires recouverts de médicaments [6]. Au total, 383 patients ont dû être dépistés et 89 angiographiés. Environ un tiers des patients ne se prêtaient pas à une dilatation en raison de l’absence de macro-obstruction et un autre tiers en raison d’une obstruction trop importante. Le succès technique de l’intervention a été de 100%. Après la mise en place d’un stent, près de 60% des patients dilatés ont connu une amélioration de la fonction et de la circulation sanguine pénienne. Cependant, à six mois, le taux de sténose résiduelle vérifié par angiographie était de 34%. Cette étude pilote montre des résultats encourageants de la thérapie endovasculaire chez les patients atteints de DE liée à l’artériosclérose.
Conclusion
En résumé, la DE représente un symptôme marqueur important dont l’importance est encore souvent sous-estimée pour le diagnostic de maladies non diagnostiquées jusqu’à présent.
Il n’est pas rare qu’une obstruction artérielle soit à l’origine de la diminution de la tumescence pénienne. Les techniques modernes de cathétérisme permettent aujourd’hui la revascularisation artérielle des vaisseaux péniens de petit calibre.
Littérature :
- Johannes CB, et al : Incidence du dysfonctionnement érectile chez les hommes âgés de 40 à 69 ans : résultats longitudinaux de l’étude sur le vieillissement masculin du Massachusetts. J Urol 2000 Feb ; 163(2) : 460-463.
- Goldstein I, et al. : Le sildénafil oral dans le traitement du dysfonctionnement érectile. Groupe d’étude sur le sildénafil. N Engl J Med 1998 May 14 ; 338(20) : 1397-1404.
- Montorsi F, et al : Erectile dysfunction prevalence, time of onset and association with risk factors in 300 consecutive patients with acute chest pain and angiographically documented coronary artery disease. Eur Urol 2003 Sep ; 44(3) : 360-364 ; discussion 364-365.
- Gandaglia G, et al : A systematic review of the association between erectile dysfunction and cardiovascular disease. Eur Urol 2014 May ; 65(5) : 968-978.
- Hatzimouratidis K, et al., Association européenne d’urologie : Lignes directrices sur les dysfonctionnements sexuels masculins : dysfonctionnement érectile et éjaculation précoce. Eur Urol 2010 May ; 57(5) : 804-814.
- Rogers JH, et al : Stents périphériques à élution de zotarolimus pour le traitement du dysfonctionnement érectile chez les sujets présentant une réponse suboptimale aux inhibiteurs de la phosphodiestérase-5. J Am Coll Cardiol 2012 Dec 25 ; 60(25) : 2618-2627.
Littérature complémentaire :
- Diehm N, Baumann F : Dysfonction érectile – Les progrès techniques permettent un traitement endovasculaire. Cardiovasc 2013 ; 2 : 22-25.
CARDIOVASC 2016 ; 15(3) : 32-35