Souvent, l’eczéma de contact chronique est une combinaison d’eczéma irritatif et d’eczéma allergique de contact. Le choix des allergènes à tester est guidé par l’anamnèse. Outre le nickel, qui reste la cause la plus fréquente d’allergie de contact, on observe souvent des sensibilisations de contact aux composants en caoutchouc, aux peintures textiles et aux résines époxy, mais aussi à certains conservateurs contenus dans les cosmétiques. Les sensibilisations à la para-phénylènediamine sont également récurrentes et la tendance est à la hausse depuis quelques années pour les sensibilisations aux acrylates.
L’année dernière, une mise à jour des lignes directrices S1 sur l’eczéma de contact a été publiée – une occasion suffisante pour réexaminer l’eczéma de contact, son évaluation et les allergènes de contact actuels. Les eczémas allergiques de contact sont fréquents, avec une prévalence pouvant atteindre 20 %. Les femmes sont plus souvent touchées que les hommes. Le diagnostic différentiel doit être établi en particulier pour les eczémas de contact irritatifs, mais il existe de nombreux autres diagnostics différentiels (tableau 1). L’eczéma de contact chronique est souvent une combinaison d’eczéma irritatif et d’eczéma allergique de contact, en particulier au niveau des mains. Dans le cas des manifestations d’eczéma, il peut être difficile d’identifier le modèle et donc l’agent toxique en question, car l’allergène peut être transmis par voie aérienne ou par le partenaire, ou être déplacé pour provoquer l’eczéma (par exemple, transmis des mains aux paupières).
Substances allergènes : Antécédents et tendances de fréquence
Le choix des allergènes à tester doit être guidé par l’anamnèse. Indépendamment de cela, les tests de la série standard (tableau 1) peuvent souvent mettre en évidence des sensibilisations, même en cas d’anamnèse normale. Les patients doivent être informés au préalable des risques potentiels. Ainsi, le test épicutané peut provoquer des réactions cutanées irritatives mais aussi eczémateuses prolongées. Un autre risque est le déplacement de la pigmentation sur la zone de test. Rarement, il peut y avoir une flambée de l’eczéma initial ou une sensibilisation active due au test.
Nickel, cobalt : le hit-parade des allergènes reste dominé par le nickel, même si l’on constate une baisse des sensibilisations. Cependant, la teneur en nickel des bijoux et des matériaux de piercing dépasse encore parfois les limites autorisées par la directive européenne, de sorte que des sensibilisations continuent de se produire, en particulier chez les jeunes patients. (Fig. 1). Les rasoirs et, de manière moins évidente, les souris d’ordinateur, les ordinateurs portables et les téléphones mobiles peuvent également être des sources de nickel, qui doivent être répertoriées dans l’anamnèse en fonction de la localisation de l’eczéma.
Les sensibilisations au cobalt sont également fréquentes et généralement associées à une sensibilisation au nickel. Outre une telle allergie de couplage aux sels métalliques des bijoux, le cobalt peut également être observé en tant qu’allergène isolé. Les sources d’allergènes peuvent alors être les peintures et le cuir.
Parfums : parmi les causes croissantes d’allergies de contact aux parfums figurent les hydroperoxydes terpéniques tels que le limonène, le linalol et parfois le géraniol.
(Chloro)-Méthylisothiazolinone : le conservateur (Chloro)-Méthylisothiazolinone(MI) a été de plus en plus utilisé dans les cosmétiques, les produits de soins personnels et les produits ménagers depuis les années 1980, ce qui a entraîné une véritable épidémie de sensibilisations de contact. Une modification de l’Annexe V de la Réglementation européenne sur les cosmétiques V. 2018 a interdit l’utilisation de MI dans les produits cosmétiques sans rinçage et l’a limitée dans les produits avec rinçage à une concentration insuffisante pour avoir un effet conservateur, de sorte que son utilisation à cet égard dans les produits n’a plus de sens. L’IM peut également être observée en tant que toxine professionnelle (figure 2) et concerne alors principalement les esthéticiennes et les peintres.
Résine époxy : les sensibilisations à la résine époxy, que l’on rencontre principalement dans le secteur de la construction, ont également une importance professionnelle. Les allergies peuvent être dues non seulement aux résines elles-mêmes, mais aussi aux diluants et aux durcisseurs, qui doivent donc toujours être testés.
les ingrédients du caoutchouc : Les sensibilisations de contact aux ingrédients du caoutchouc sont également fréquentes. Les sensibilisations au thiurame sont les plus fréquentes, suivies par le dithiocarbamate et le mercaptobenzothiazole. Ces allergies peuvent être particulièrement problématiques avec les gants de protection, même s’ils ne contiennent pas de latex.
Teintures pour textiles : présentent des fréquences de sensibilisation de >1%, de sorte que les eczémas persistants ou chroniquement récurrents d’origine incertaine, en particulier sur le tronc, doivent faire l’objet de tests épicutanés pour ces colorants. Les patients concernés doivent éviter les textiles synthétiques, car ils sont plus souvent traités avec des colorants (azoïques) allergènes que les textiles en fibres naturelles.
paraphénylènediamine : la sensibilisation à la paraphénylènediamine par les tatouages dits “au henné noir” est une tendance persistante (figure 3) des sensibilisations de contact acquises pendant les vacances. Cette sensibilisation rend impossible toute coloration foncée ultérieure des cheveux (par exemple avec des colorants contenant de la toluènediamine) et toute activité dans le domaine de la coiffure. Il faut absolument éviter les “tatouages temporaires”, prétendument sans danger car simplement peints, qui sont proposés sur les plages de vacances, mais aussi parfois dans les hôtels ou chez les coiffeurs.
Sensibilisation à l’acrylate : en augmentation suite à l’utilisation de produits de vernis à ongles appropriés et d’adhésifs à base d’acrylate pour fixer les systèmes de mesure du glucose et les pompes à insuline.
Recommandations pour les tests épicutanés
Le test lui-même ne doit être effectué qu’après la guérison de l’eczéma aigu. Les points de test sont le dos ou les cuisses. La zone de test ne doit pas être exposée aux UV quatre semaines avant l’application du test. Les corticostéroïdes locaux doivent être arrêtés sept jours avant le test dans la zone de test. Les corticostéroïdes systémiques et les antihistaminiques H1 doivent également avoir été arrêtés cinq jours avant le test. Le test doit être collé pendant 48 heures avec lecture après 48 et 72 heures. Ce protocole de test donne une meilleure sensibilité. En revanche, une lecture dès 24 heures peut augmenter la spécificité. Une lecture plus tardive peut être utile pour certains allergènes (corticostéroïdes, formaldéhyde, formol, p-phénylènediamine, métaux) afin de pouvoir enregistrer les réactions positives.
Les réactions positives se caractérisent par des papules et des infiltrats. Si elles ne sont pas clairement visibles, la palpation ou la lumière tangentielle d’une lampe de poche peuvent être utiles. Les réactions allergiques se caractérisent par une dispersion et un crescendo de la réaction, tandis que les réactions irritatives sont plutôt bien délimitées et atrophiques. Enfin, les résultats doivent être évalués en fonction de leur pertinence clinique, en conjonction avec l’anamnèse. Pour la documentation, un document écrit (passeport d’allergie) est remis au patient avec la liste des substances testées positives et leur éventuelle présence.
Messages Take-Home
- Les eczémas de contact irritatifs et allergiques peuvent survenir après une lésion aiguë, répétitive ou chronique de la barrière épidermique par des irritants.
- Le diagnostic d’un eczéma de contact allergique se fait par la mise en évidence d’une sensibilisation de contact aux allergènes causaux par un test épicutané.
- Le choix des allergènes à tester doit être guidé par l’anamnèse. Les allergènes importants sont le nickel, le cobalt, les ingrédients en caoutchouc, les peintures textiles et les résines époxydes. En outre, le conservateur (chlore)méthylisothiazolinone (MI), de plus en plus présent dans les produits cosmétiques, a entraîné une véritable épidémie de sensibilisation de contact.
- Les sensibilisations à la para-phénylènediamine dues aux tatouages au henné noir sont également fréquentes et les sensibilisations aux acrylates sont en augmentation constante du fait de l’utilisation de produits industriels correspondants.
Littérature complémentaire :
- Dickel H, et al : S1-Leitlinie Kontaktkzem. J Dtsch Dermatol Ges 2022 ; 20 : 711-734.
- Alinaghi F, et al : Prevalence of contact allergy in the general population : A systematic review and meta-analysis. Contact Dermatitis 2019 ; 80 : 77-85.
- Johansen JD, Werfel T : Highlights in allergic contact dermatitis 2018/2019. Curr Opin Allergy Clin Immunol 2019 ; 19 : 334-340.
- Kreft B, Geier J : L’allergie aux conservateurs, un problème récurrent : qu’est-ce qui va, qu’est-ce qui vient, qu’est-ce qui reste ? Dermatologue 2020 ; 71 : 190-196.
- Skudlik C, Geier J, John SM : Tendances actuelles en dermatologie professionnelle. Dermatologue 2014 ; 65 : 983-995.
- Richardson C, et al : Mobile Phone Dermatitis in Children and Adults : A Review of the literature. Pediatric Allergy, Immunology and Pulmonology 2014 ; 27 : 60-68.
- Läuchli S, Lautenschlager S : Dermatite de contact après un tatouage temporaire au henné – un phénomène en augmentation. Swiss Med Wkly 2001 ; 131 : 199-202.
- Kind F, Scherer K, Bircher AJ : Dermatite de contact à la para-phénylènediamine dans les teintures capillaires suite à une sensibilisation aux tatouages au henné noir – un problème récurrent. JDDG 2012 ; 10 : 572-578.
- Wagner N, Kamann S, Oppel E : Allergie de contact aux systèmes de mesure du glucose et aux pompes à insuline. Dermatologue 2020 ; 71 : 205-210.
- Uter W, et al : Contact Allergy-Emerging. Allergènes et impact sur la santé publique. Int J Environ Res Public Health 2020 ; 17 : 2404.
- Oppel E, et al. : Contact allergy to the Dexcom G6 glucose monitoring system-Role of 2,2′-methylenebis(6-tert-butyl-4-methylphenol) monoacrylate in the new adhesive. Contact Dermatitis 2022 ; 87 : 258-264.
DERMATOLOGIE PRATIQUE 2023 ; 33(3) : 5-7