Les rayons UV sont impliqués dans de nombreuses maladies de la peau. Le spectre s’étend des dommages aigus, tels que la dermatite solaire, aux effets chroniques tardifs, tels que le vieillissement prématuré de la peau ou le développement d’un cancer de la peau. Le point commun de ces changements induits par les UV est l’exposition excessive aux UV, qu’elle soit aiguë ou chronique. Les déclencheurs sont principalement les longueurs d’onde moyennes dans la gamme des UV-B entre 290 et 320 nm. Lorsque l’exposition aux UV provoque des réactions cutanées dans un cadre quotidien, c’est-à-dire modéré, on parle de photodermatoses au sens propre du terme.
Les déclencheurs de la photodermatose sont souvent les UV-A dans la gamme de longueurs d’onde 320-400 nm. Contrairement à l’exposition excessive aux UV, qui entraîne des modifications chez tout le monde en fonction du type de peau, les photodermatoses ne touchent que les individus prédisposés. On distingue les photodermatoses primaires dues à un photosensibilisateur (exogène) et les photodermatoses secondaires dans le cadre d’une cause endogène.
Photodermatoses primaires idiopathiques
Par définition, on parle de photodermatoses primaires idiopathiques lorsque l’étiologie est inconnue.
L’urticaire solaire est une maladie rare. Cette forme d’urticaire peut être déclenchée par l’ensemble du spectre UV jusqu’à la lumière visible. Une exposition appropriée entraîne la formation de papules(figure 1), qui peuvent aller jusqu’au choc anaphylactique dans les cas les plus défavorables, en cas d’exposition de l’ensemble du corps. En raison de l’effet généralement insuffisant des antihistaminiques systémiques, une thérapie UV ou une photochimiothérapie (PUVA) est mise en œuvre.
Fig. 1 : Urticaria solaris : Urticae après détermination du seuil UV
La photodermatose polymorphe (syn. “allergie au soleil”, acné de Majorque, polymorphic light eruption) est la photodermatose la plus fréquente en Europe centrale. L’étiologie est inconnue. L’exposition au soleil provoque des lésions cutanées prurigineuses qui peuvent varier en termes de flores primaires, allant des macules aux papulovésicules(Fig. 2), en passant par les urticaires et les plaques ou les réactions multiformes. C’est à cette circonstance que la maladie doit son nom.
Fig. 2 : photodermatose polymorphe
Cependant, les patients individuels présentent généralement un tableau monomorphe, avec des efflorescences répétées lors d’une nouvelle exposition au soleil. Les zones normalement protégées de la lumière sont touchées, tandis que le visage, par exemple, est souvent épargné. Quelques heures après l’exposition aux UV, des lésions prurigineuses apparaissent sur la poitrine, le haut des bras, le dos des mains, les cuisses et éventuellement les joues. Si l’on s’abstient de consommer des UV, ces symptômes disparaissent en quelques jours sans laisser de lésions cutanées résiduelles.
Outre la protection contre les UV par des vêtements appropriés – les produits de protection solaire ne suffisent généralement pas – et une accoutumance progressive au soleil, une thérapie UV au sens d’un “durcissement” peut être utile au printemps ou avant les départs en vacances chez les patients très symptomatiques. Cela doit être fait avec des unités de radiothérapie médicale sous le contrôle du spécialiste et non dans un solarium. En cas de photodermatose polymorphe déjà apparue, l’utilisation d’antihistaminiques systémiques et de stéroïdes topiques peut soulager les symptômes et accélérer la rémission spontanée.
L‘Hydroa vacciniformia est également très rare et se caractérise par l’apparition aiguë de vésicules hémorragiques sur le visage (figure 3) et les mains, qui guérissent par cicatrisation. Dans l’étiologie incertaine, le virus d’Epstein-Barr est évoqué comme un déclencheur possible.
Fig. 3 : Hydroa vacciniformia : érosions cicatrisantes résiduelles après des vésicules hémorragiques
Le prurigo actinique, en tant que variante familiale, est plus fréquemment observé en Amérique chez les patients d’origine indigène et constitue une rareté en Europe. Dans ce cas, les zones chroniquement exposées au soleil présentent des lésions cutanées prurigineuses qui, à l’exception de la thalidomide, ne répondent guère aux traitements topiques ou systémiques.
Le terme de dermatite actinique chronique regroupe des appellations plus anciennes comme la réaction persistante à la lumière, la réticuloïde actinique et l’eczéma photosensible. La clinique correspond à un eczéma lichénifié chronique dans les zones exposées à la lumière. Le visage et le dos des mains sont généralement touchés. Outre une prophylaxie stricte de l’exposition, une PUVAthérapie ou des immunosuppresseurs (glucocorticoïdes systémiques, azathioprine, ciclosporine A) sont utilisés en fonction de la gravité.
Photosensibilité en cas d’implication d’un déclencheur exogène
Un érythème aigu urticarien avec des cloques suivies d’une hyperpigmentation à répartition bizarre, souvent en bandes, correspondant à un contact avec des parties de plantes, doit faire penser au diagnostic de phytophotodermatite (Fig. 4).
Fig. 4 : Phytophotodermatite
La plante en tant que déclencheur n’est pas visible en premier lieu par les patients, car il y a un retard dans l’apparition des lésions cutanées, avec un maximum après 72 heures. Les doses d’UV (principalement des UV-A) nécessaires pour déclencher une réaction photoxique sont atteintes même lorsque la couverture nuageuse est dense. Les déclencheurs sont les plantes contenant des furocoumarines, les furocoumarines agissant comme photosensibilisateur. Outre les plantes ornementales, les parties de plantes provenant d’aliments tels que le céleri, le panais ou les agrumes font également partie des déclencheurs possibles.
Un tableau clinique similaire peut être observé dans le cas de la dermatite de Berloque, qui n’est toutefois pas causée par des plantes, mais par des parfums ou des cosmétiques parfumés. Les déclencheurs sont à nouveau d’origine végétale, puisqu’il s’agit d’huiles essentielles, souvent des huiles de bergamote, qui contiennent des furocoumarines. Le traitement des réactions phototoxiques se fait au stade aigu avec des glucocorticoïdes topiques de classe 3 ou 4 dans une base peu occlusive comme une crème ou une lotion.
Les cloques de grande taille nécessitent un traitement identique à celui des brûlures du deuxième degré. L’application locale de corticostéroïdes, éventuellement associée à des antiseptiques, au-delà de la phase de cicatrisation aiguë est importante pour prévenir un déplacement ultérieur de la pigmentation. En cas d’hyperpigmentation existante, il est indiqué de se protéger systématiquement du soleil avec des produits solaires non parfumés. Un éclaircissement peut être soutenu par de l’acide azélaïque, de la vitamine A acide topique ou de l’hydroquinone à 5% avec 1% d’hydrocortisone, en tenant compte du risque d’une nouvelle irritation inflammatoire avec un déplacement supplémentaire de la pigmentation.
Les réactions médicamenteuses phototoxiques font également partie des réactions phototoxiques, mais dans ce cas, le tableau clinique n’est pas caractérisé par des bulles et des traces d’écorchure, mais par des exanthèmes dans une distribution exposée à la lumière (figure 5).
Fig. 5 : Réaction phototoxique au torasémide
Les modifications de la peau vont de l’urticaire à l’exanthème vésiculeux en passant par des réactions semblables à des coups de soleil. Les déclencheurs les plus courants sont résumés dans le tableau 2.
S’il ne s’agit pas d’un photosensibilisateur obligatoire, mais d’une sensibilisation individuelle, on parle de dermatite de contact photoallergique ou de dermatite photoallergique systémique.
Photodermatoses secondaires avec cause endogène
Les photodermatoses secondaires vont des défauts de réparation de l’ADN génétiquement déterminés (xeroderma pigmentosum) aux maladies métaboliques comme les porphyries, en passant par la photosensibilité dans les collagénoses comme le lupus érythémateux ou la dermatomyosite (figure 6).
Fig. 6 : Érythème héliotrope dans la dermatomyosite
Diagnostic
L’anamnèse et, dans le cas de la phytophotodermatite par exemple, la clinique typique sont des éléments importants pour le diagnostic des photodermatoses. Des tests plus poussés avec détermination du seuil d’exposition aux UV, photo patch test et éventuellement photoprovocation peuvent être effectués dans des centres spécialisés (en général les institutions dermatologiques).
Littérature complémentaire :
- Lehmann P : Diagnostic des photodermatoses. J Dtsch Dermatol Ges 2006 ; 4 : 965-975.
- Bylaite M, Grigaitiene J, Lapinskaite GS : Photodermatoses : classification, évaluation et prise en charge. Br J Dermatol 2009 ; 161 Suppl 3 : 61-68.
- Lehmann P, Schwarz T : Photodermatoses : Diagnostic et traitement. Dtsch Arztebl Int 2011 ; 108 : 135-141.
- Chantorn R, Lim HW, Shwayder TA : Photosensitivity disorders in children : part I. J Am Acad Dermatol 2012 ; 67 : 1093.e1-18.
- Chantorn R, Lim HW, Shwayder TA : Photosensitivity disorders in children : part II. J Am Acad Dermatol 2012 ; 67 : 1113.e1-15.