En cas d’essoufflement pendant le sport, il faut toujours penser à un asthme d’effort. Les symptômes typiques de l’asthme d’effort comprennent la respiration sifflante, l’essoufflement et/ou la toux pendant ou après l’exercice. La spirométrie et les tests de bronchoprovocation directs et indirects sont utilisés à des fins diagnostiques. Le traitement repose sur des bêta-sympathomimétiques à action rapide et, en cas de symptômes fréquents, sur des stéroïdes inhalés ou des antagonistes des leucotriènes. Pour les sportifs licenciés, la thérapie doit tenir compte de la liste des produits dopants.
Lorsque nous faisons de l’exercice, différents ajustements sont nécessaires au niveau du système cardiovasculaire et de la respiration pour nous adapter aux nouveaux besoins musculaires. Entre autres, il y a une augmentation du volume des minutes de respiration et du débit cardiaque pour fournir suffisamment de carburant (oxygène, glucose) aux muscles. Lors d’un effort maximal, le débit cardiaque atteint ses limites chez le sujet sain, l’alimentation du muscle atteint une limite et celui-ci se fatigue, de sorte que l’effort doit être arrêté à plus ou moins long terme [1]. Chez l’asthmatique, en revanche, le système est limité bien plus tôt par une diminution du volume respiratoire par minute. L’apport en oxygène s’épuise et la limite d’effort est considérablement réduite [2].
L’asthme est une maladie fréquente. En Suisse, environ 7% de la population est concernée à des degrés divers.
Définition de l’asthme et de l’asthme d’effort
L’asthme bronchique est défini comme une maladie inflammatoire chronique des voies respiratoires présentant les deux caractéristiques supplémentaires suivantes, qui doivent toutes deux être présentes [3] :
- sifflement, essoufflement, sensation d’oppression thoracique ou toux variable prolongée
et
- une obstruction variable des voies respiratoires.
La plupart des asthmatiques souffrent à la fois d’une toux chronique et d’une gêne à l’effort.
Si les symptômes ne surviennent qu’à l’effort (c’est-à-dire en l’absence de toux), on parle d'”asthme induit par l’exercice” (EIA). La bronchoconstriction induite par l’exercice (EIB) est une forme particulière de bronchoconstriction, qui se manifeste de manière similaire sur le plan clinique, mais qui se caractérise par une autre forme d’inflammation des voies respiratoires.
On parle d'”asthme variable” lorsqu’il n’y a qu’une toux et que les patients ne souffrent d’aucune gêne à l’effort.
Physiopathologie
Chez les personnes allergiques, le contact avec l’allergène provoque une réaction excessive du système immunitaire, qui entraîne une inflammation éosinophile de la muqueuse bronchique médiée par l’IL-5 [4]. L’inflammation conditionne la toux chronique, qui produit aussi typiquement des sécrétions claires ou blanches. Si le contact avec l’allergène se poursuit, mais aussi en réponse à des stimuli non spécifiques tels que l’air froid ou sec, les muscles lisses sont activés et le bronchospasme se produit. Dans le sport en particulier, on respire pratiquement toujours par la bouche, ce qui supprime l’effet protecteur des voies respiratoires supérieures. L’air n’est pas réchauffé ni purifié. En particulier par temps froid, de l’air très sec et froid pénètre ainsi dans les bronches, ce qui provoque une irritation et une gêne sans qu’une réaction allergique classique ne se produise. De plus, lorsque l’on respire par la bouche, l’air n’est pas débarrassé des particules moyennes et grosses, ce que fait habituellement le nez. Cela entraîne une irritation supplémentaire de la muqueuse. Ces mécanismes peuvent également entraîner une inflammation et un gonflement de la muqueuse, suivis d’un bronchospasme, chez les personnes non allergiques via l’irritation de la muqueuse. Contrairement à l’allergie, l’histologie révèle une inflammation des neutrophiles dans les bronches, déclenchée par les macrophages et l’IL-8 [5,6]. Dans ce cas, on parle de “bronchoconstriction induite par l’exercice” ou de “bronchospasme induit par l’exercice” (EIB) (Fig. 1).
Clinique
Classiquement, à l’effort, on observe un essoufflement et un sifflement respiratoire. En écoutant attentivement, le sifflement se situe dans l’expiration. Cependant, les patients ne le perçoivent généralement pas comme tel.
Chez les patients souffrant d’asthme allergique (y compris l’EIA), les symptômes dépendent de la concentration dans l’air des allergènes concernés. Nous voyons donc ici une association avec le pollen saisonnier. Les symptômes apparaissent rapidement après ou dès le début de l’effort et sont généralement sévères, ce qui les oblige à interrompre leur activité sportive. L’essoufflement peut également survenir lors d’efforts plus légers de la vie quotidienne, par exemple en montant des escaliers ou une côte, ou en courant à la hâte pour rejoindre un train [3,8].
En outre, les patients atteints d’asthme allergique souffrent pratiquement toujours aussi d’une toux irritative chronique. La seule exception à cette règle est l'”asthme induit par l’exercice” (EIA). La toux est surtout gênante la nuit et il n’est pas rare qu’elle produise le matin des sécrétions épaisses, vitreuses ou blanches, qui doivent être toussées.
Chez les asthmatiques de performance non allergiques (EIB), les symptômes n’apparaissent qu’au cours de l’effort, c’est-à-dire après environ 10 à 15 minutes. apparaissent, sont souvent très gênantes, mais n’entraînent pas nécessairement l’arrêt de l’effort. Un phénomène de “running through” peut se produire – les symptômes peuvent donc s’améliorer malgré la poursuite de l’effort. La performance est néanmoins limitée. Outre les difficultés respiratoires, la toux est également fréquente en tant que corrélat de l’asthme. La toux peut également survenir après l’arrêt de l’effort [3,9].
Dans le cas de la BEI, les symptômes sont déclenchés par des stimuli non spécifiques, tels que l’air froid ou très sec. Ainsi, les sportifs d’hiver (surtout les skieurs de fond) sont nettement plus souvent touchés que les autres sportifs [10]. De plus, il semble que les vibrations dans les voies respiratoires qui se produisent pendant la course provoquent encore plus la réaction asthmatique. Mais l’air très chaud ou les concentrations élevées d’ozone dans l’air peuvent également provoquer une irritation et une inflammation des muqueuses. C’est précisément lors d’une augmentation rapide de la ventilation (sprints, sports de type “stop-and-go”) que l’effort est particulièrement important, même en été [11].
Il est également possible qu’aucun problème physique n’apparaisse, en particulier chez les sportifs mieux entraînés. L’asthme de performance entraîne alors simplement une limitation de la performance et se traduit par une baisse de la performance ou une absence de progrès malgré un entraînement structuré (tableau 1).
Diagnostic
Conformément à la définition, le diagnostic d’asthme bronchique peut être posé en cas de manifestation clinique typique associée à des modifications typiques de la fonction pulmonaire. Cela vaut aussi bien pour l’asthme allergique classique que pour les formes particulières [3].
L’anamnèse doit donc en premier lieu déterminer l’apparition, la fréquence, l’évolution et l’intensité des crises de dyspnée. La toux doit également être évaluée en termes d’occurrence et de qualité afin d’obtenir la meilleure image possible des symptômes. La toux pendant et après l’effort peut être révélatrice. L’enregistrement précis des symptômes facilite ensuite le choix des thérapeutiques utilisées.
Le diagnostic à l’aide d’appareils en cas de suspicion d’asthme lié à la performance s’inspire du diagnostic de l’asthme bronchique classique [12,13].
L’examen primaire est la spirométrie. Si l’on trouve ici une obstruction (quotient de Tiffenau <70%), un test de réversibilité positif peut déjà fournir le diagnostic. Pour cela, l’inhalation d’un bêta-sympathomimétique à action rapide (salbutamol, fénotérol, albutérol) doit normaliser le quotient de Tiffenau et améliorer le VEMS d’au moins 200 ml et 12%.
Si la spirométrie est normale dès le premier test, des tests de bronchoprovocation sont utilisés. La méthode la plus courante est la bronchoprovocation à la méthacholine. Il s’agit d’une stimulation directe des récepteurs situés sur les cellules musculaires lisses des bronches, ce qui entraîne une activation et une contraction chez les asthmatiques. Cette obstruction des bronches peut être détectée par spirométrie et fournit le diagnostic. Cependant, les patients atteints d’EIA ne présentent souvent pas de résultats positifs à cet égard, de sorte qu’il convient de recourir à des tests de provocation indirects.
Les tests indirects simulent l’exposition de la muqueuse bronchique à l’augmentation de la ventilation [14]. Dans le cas du test au mannitol, par exemple, la substance (une grosse molécule de sucre) retire le liquide de la muqueuse et provoque ainsi la déshydratation qui serait autrement déclenchée par une ventilation accrue. L’obstruction est également mesurée à l’aide d’un spiromètre [15]. Les méthodes et les valeurs limites sont présentées dans le tableau 2.
Diagnostic différentiel
En premier lieu, il faut penser aux maladies cardiaques et à la BPCO, surtout chez les patients âgés et les fumeurs. Ce dernier peut déjà être mis en évidence ou exclu par les tests fonctionnels respiratoires qui sont réalisés comme diagnostic de base de l’asthme (obstruction persistante après inhalation d’un bêta-sympathomimétique à action rapide).
Le diagnostic différentiel doit également porter sur les embolies pulmonaires. Il faut également envisager des “causes banales” telles que l’obésité, le manque d’entraînement ou une hyperventilation primaire. Les causes rares incluent le “dysfonctionnement du cordon vocal”, l’aspiration de corps étrangers ou les sténoses endobronchiques ou les tumeurs [6,16].
Chez les amateurs ambitieux et les athlètes, le surentraînement doit également être envisagé comme cause de la dyspnée d’effort (tableau 3) [17].
Thérapie
Tous les patients souffrant d’asthme d’effort doivent prendre en compte les conditions extérieures pour leur entraînement. Ainsi, les séances intensives doivent être évitées lorsqu’il fait très froid ou très chaud. De même, en cas d’allergie connue au pollen, la concentration de pollen doit être interrogée avant les entraînements (www.pollenundallergie.ch). En cas d’exposition élevée au pollen, il convient d’éviter, dans la mesure du possible, de faire du sport en plein air et de recourir à des méthodes d’entraînement alternatives [5].
Une bonne préparation permet de réduire considérablement les symptômes. Il est recommandé de procéder à un échauffement d’environ 15 minutes avec une augmentation lente de la puissance et de la ventilation. En s’adaptant lentement à l’augmentation de la respiration, on parvient à exercer une stimulation moins forte sur la muqueuse, de sorte que la réaction bronchoconstrictrice est moins violente ou peut être totalement évitée [18].
Le traitement médicamenteux de l’asthme d’effort ne s’écarte généralement pas des recommandations générales pour l’asthme bronchique. Les lignes directrices du GINA [5] font foi.
La base est l’utilisation de bêta-sympathomimétiques à action rapide (salbutamol, fénotérol), qui doivent être utilisés 5 minutes avant l’effort en cas de symptômes et également à titre préventif lors de la pratique d’un sport. L’effet dure environ trois à quatre heures, de sorte qu’une inhalation répétée n’est pas nécessaire dans la plupart des cas.
Si les symptômes surviennent plus de deux fois par semaine ou si l’inhalation à la demande est utilisée plus de deux fois par semaine avant ou pendant le sport, un traitement de base contre l’inflammation bronchique doit être utilisé en complément. Pour cela, on dispose principalement de stéroïdes topiques (budénoside, fluticasone, ciclésonide) ou d’antagonistes des leucotriènes (montelukast, zafirlukast) [19].
L’expérience montre qu’il est recommandé d’utiliser en premier lieu des stéroïdes inhalés à doses faibles à moyennes (pour la posologie, voir les lignes directrices du GINA). En l’absence d’amélioration, il convient d’envisager le passage à un antagoniste des leucotriènes avant d’étendre le traitement. Les études n’ont pas montré de supériorité claire pour l’une ou l’autre substance.
En cas d’absence de réponse à la monothérapie, on a recours à une thérapie combinée, où l’association d’un stéroïde topique et d’un bêta-sympathomimétique à longue durée d’action est plus souvent utilisée, notamment pour des raisons pratiques. En cas de persistance des symptômes, une combinaison des trois médicaments peut également être prescrite comme traitement de fond.
Chez les patients atteints de BIE légère, l’ajout d’huile de poisson peut contribuer à un meilleur contrôle (acides gras oméga-3 500 mg 2×/jour).
Son utilisation doit être considérée comme un complément à la thérapie ci-dessus, en particulier pour les athlètes qui s’entraînent fréquemment [20]. L’objectif du traitement de l’asthme est d’obtenir un patient sans symptômes avec le moins de médicaments possible.
Cas particulier du sport de compétition
Pour les sportifs qui participent à des compétitions nationales ou internationales (en général tous les sportifs licenciés), le traitement de l’asthme de l’effort doit tenir compte des dispositions de l’Agence antidopage (AMA, en Suisse : Antidoping Suisse) [21].
Les corticostéroïdes inhalés et les antagonistes des leucotriènes ne figurent pas sur la liste des substances dopantes et peuvent être utilisés sans restriction. En revanche, certains bêta-sympathomimétiques sont totalement interdits, tandis que d’autres sont soumis à des valeurs limites. Les stéroïdes oraux sont interdits en compétition.
Pour les athlètes internationaux, il existe également des règles supplémentaires concernant la notification du diagnostic et des médicaments, qui varient selon les fédérations sportives. Dans ce cas, il est recommandé de faire appel à un pneumologue ou à un médecin du sport.
Un contrôle des substances utilisées peut être effectué sur www.antidoping.ch.
Prévisions
Comme pour les autres formes d’asthme, le pronostic de l’asthme d’effort est en principe bon. En respectant les règles de conduite, il devrait être possible d’obtenir un contrôle largement complet avec la large gamme de médicaments. Ainsi, il n’y a pas lieu de craindre une réduction à long terme de la fonction pulmonaire. En tout état de cause, une BEI acquise dans le cadre d’un entraînement excessif est totalement réversible après la période de pratique sportive active [22].
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