Avant de se précipiter sur le tiroir des analgésiques, il faut envisager le diagnostic différentiel et le traitement causal : En premier lieu, l’examen clinique ciblé et l’échographie sont utiles. L’objectif d’un traitement adéquat de la douleur dans le traitement des troubles musculo-squelettiques est d’améliorer l’activité physique et sociale. Les thérapies multimodales de la douleur ont fait leurs preuves dans le traitement des états douloureux chroniques. Les patients doivent être encouragés à poursuivre leurs activités quotidiennes dans la mesure du possible, dans les limites de la douleur. L’ostéoporose symptomatique est une cause fréquente de troubles musculo-squelettiques chez les patients âgés.
Les douleurs chroniques ou aiguës de l’appareil locomoteur sont des motifs de consultation fréquents dans les cabinets de médecine générale. La conséquence commune des différents syndromes douloureux est un déficit fonctionnel qui affecte les activités quotidiennes et la qualité de vie. Les objectifs d’un traitement adéquat de la douleur sont une amélioration de l’activité physique et sociale avec une réduction consécutive de la douleur.
Les douleurs musculo-squelettiques peuvent être difficiles à évaluer, mais un examen clinique précis ainsi que des examens complémentaires, notamment l’échographie, soutenus par des considérations de diagnostic différentiel, conduisent souvent à des mesures thérapeutiques ciblées dont le succès est prévisible.
Douleurs musculo-squelettiques chroniques
La douleur chronique est l’un des problèmes de santé les plus urgents dans notre pays. Les conséquences socio-économiques sont immenses. La plupart des patients souffrant de douleurs chroniques souffrent de troubles musculo-squelettiques, parmi lesquels les maux de dos sont les plus fréquemment cités.
Contrairement au syndrome douloureux aigu, la douleur chronique entraîne un détachement progressif de la perception de la douleur par rapport au problème physique (tab. 1). La douleur en tant qu’expérience émotionnelle désagréable est subjective. Les raisons non somatiques ont une influence décisive sur l’évolution de la maladie. Pour le patient, l’identification du noyau somatique – souvent l’élément déclencheur de la maladie douloureuse – est une condition préalable à la mise en place d’un traitement efficace de la douleur. Le médecin doit accorder une attention particulière aux facteurs supplémentaires qui favorisent ou aggravent la douleur.
Les patients souffrant de douleurs chroniques se trouvent dans un cercle vicieux : la douleur entraîne une peur du mouvement et donc un évitement de l’effort physique ainsi que des postures de protection qui aggravent la douleur. En outre, les patients eux-mêmes se trouvent souvent dans une spirale descendante générale en ce qui concerne l’environnement social et l’environnement de travail. Une douleur prolongée affecte le psychisme, ce qui renforce à son tour la perception de la douleur. Ces interactions défavorables entraînent non seulement une intensification aiguë de la douleur, mais aussi une persistance chronique des symptômes douloureux.
Les patients souffrant de douleurs chroniques ont généralement vécu une odyssée de mesures diagnostiques et thérapeutiques. Ces patients se heurtent à l’hostilité de la société et, assez souvent, à celle des professionnels de la santé. Une acceptation sans jugement de la problématique, de l’empathie et de la patience sont donc des conditions importantes dans le traitement des patients souffrant de douleurs chroniques. L’entretien avec le patient fournit des informations importantes sur ses idées concernant la cause de sa douleur et ses attentes en matière de traitement médical. L’éducation des patients sur l’origine de la douleur et sa gestion peut être utile. Elle doit être suivie d’une discussion sur les objectifs du traitement.
Comment traiter ?
En matière de traitement, les thérapies interdisciplinaires multimodales de la douleur ont fait leurs preuves. L’objectif est d’agir à la fois sur le noyau somatique de la douleur et sur les événements psychosociaux. Outre les patients souffrant de douleurs chroniques, les personnes menacées de chronicité devraient notamment être orientées précocement vers une approche thérapeutique multimodale. Dans la plupart des centres, un programme de traitement multimodal de la douleur en milieu hospitalier est géré conjointement par le corps médical et des professionnels de la physiothérapie, de l’ergothérapie et de la psychothérapie ou de la psychiatrie, et souvent par des intervenants supplémentaires (soins infirmiers spécialisés, services sociaux, thérapeutes de médecine parallèle). On trouve également des approches thérapeutiques dans les soins spirituels ou dans le domaine artistique.
Le traitement physiothérapeutique comprend principalement des approches physiothérapeutiques actives avec des instructions d’exercices à domicile, des thérapies de mouvement spécialisées telles que la gymnastique fonctionnelle de la colonne vertébrale ou l’entraînement avec des appareils (thérapie d’entraînement médicale). L’hydrothérapie (bain de marche) en groupe a souvent un effet de soutien. En outre, des mesures passives telles que la TENS (stimulation nerveuse électrique transcutanée), le massage, la thérapie par la chaleur et le froid ainsi que l’électrothérapie et les ultrasons peuvent être utilisées dans certains cas.
Le traitement ergothérapeutique agit par le biais d’un entraînement moteur et fonctionnel des mouvements pertinents pour la vie quotidienne. Les patients sont formés par les professionnels à l’ergonomie au travail et reçoivent des conseils concernant l’organisation de la journée et le pacing (stratégie dynamique dans la gestion des activités). De plus, des ergothérapeutes adaptent les aides techniques et s’exercent à leur utilisation.
Les méthodes psychothérapeutiques dans le traitement de la douleur utilisent généralement les outils de la thérapie cognitivo-comportementale et tentent de détecter les pensées et les schémas comportementaux défavorables et de les modifier progressivement en pensées positives. Les stratégies d’adaptation à la douleur et les exercices de relaxation sont des thèmes importants. En outre, il existe des points de départ dans le traitement des troubles dépressifs souvent présents en même temps.
Le traitement médicamenteux de la douleur suit en principe les lignes directrices de l’OMS. Le bénéfice du traitement analgésique doit être évalué à intervalles réguliers. Des évaluations standardisées permettent d’objectiver le traitement de la douleur. La saisie régulière d’une simple échelle VAS permet déjà de surveiller le traitement. Dans le cadre d’une prise en charge ambulatoire, même les patients dont la douleur est bien contrôlée doivent bénéficier d’une consultation médicale au moins tous les trois à six mois. En outre, les antidépresseurs à faible dose doivent être utilisés régulièrement dans le traitement de la douleur des douleurs chroniques de l’appareil locomoteur. Les antidépresseurs tricycliques et les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSN) sont efficaces dans le traitement de la douleur. Les preuves de l’efficacité des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (ISRS) sont un peu plus faibles.
Il convient de noter qu’un traitement prolongé au paracétamol à une dose supérieure à 3 g/j suscite de plus en plus de préoccupations en matière de toxicité. En revanche, le profil d’effets secondaires des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) en termes de toxicité gastro-intestinale, rénale et cardiovasculaire est bien connu. L’expérience clinique et une méta-analyse récente dans l’arthrose montrent que les AINS sont supérieurs au paracétamol en termes d’efficacité. En raison des effets secondaires connus des AINS, les opiacés et les opioïdes à longue durée d’action sont également de plus en plus utilisés.
Une approche thérapeutique multimodale dans le traitement des patients souffrant de douleurs chroniques est aujourd’hui incontestée. L’absence totale de douleur est rarement atteinte. Cependant, l’objectif commun des efforts thérapeutiques est d’atteindre une intensité de douleur aussi acceptable que possible, permettant une activité physique et sociale maximale.
Traitement des douleurs musculo-squelettiques aiguës
En cas de troubles musculo-squelettiques aigus, il est essentiel d’informer le patient de l’évolution spontanée souvent favorable. Un entretien médical informatif sur cet état de fait et un traitement limité dans le temps et axé sur les symptômes suffisent souvent dans le cadre du traitement. Tous les patients souffrant de troubles musculo-squelettiques doivent être encouragés à poursuivre leurs activités quotidiennes dans la mesure du possible, dans les limites de la douleur. Les problèmes secondaires liés à l’immobilité sont ainsi réduits, ce qui entraîne une amélioration plus rapide des symptômes et une diminution du risque de chronicité.
Chez la plupart des patients présentant des troubles musculo-squelettiques aigus non spécifiques, il n’est pas nécessaire de recourir à l’imagerie médicale lors de l’évaluation initiale. En revanche, un contrôle médical dans une à deux semaines pour évaluer l’évolution est presque toujours utile.
Traitement des troubles musculo-squelettiques chez les patients âgés
Chez les personnes âgées en particulier, les troubles musculo-squelettiques non traités ont un impact négatif sur la mobilité. L’évitement de l’activité physique entraîne une altération rapide des fonctions. Les conséquences sont le retrait social et la dépression. Le traitement du cercle vicieux de la douleur, de la dépression et des troubles du sommeil nécessite souvent une approche thérapeutique multimodale. Cette option est de plus en plus proposée dans le cadre des traitements complexes de réhabilitation précoce en gériatrie.
En ce qui concerne le traitement médicamenteux de la douleur, il convient de tenir compte de la diminution des fonctions hépatiques et rénales avec l’âge. En outre, les interactions médicamenteuses doivent être prises en compte de manière accrue. En conséquence, la dose d’AINS doit être ajustée à la baisse chez les patients âgés de plus de 70 ans. Outre les analgésiques de base que sont le paracétamol et le métamizole, les opiacés à faible dose occupent une place importante dans le traitement de la douleur chez les patients âgés.
La prévalence des fractures ostéoporotiques au niveau de la colonne vertébrale et de l’anneau pelvien est difficile à estimer. De notre point de vue, elles sont pourtant très souvent à l’origine de douleurs musculo-squelettiques (tab. 2). Il est certain que la présence d’une fracture ostéoporotique augmente non seulement le risque d’autres fractures, mais aussi la mortalité générale. En conséquence, ces patients bénéficient non seulement d’un traitement adéquat de la douleur, mais aussi d’un traitement de l’ostéoporose. Une aide de maintien/support adéquate (ceinture lombaire, ceinture trochantérienne, etc.) améliore la mobilité et réduit le besoin d’analgésiques.
Littérature complémentaire :
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