Le traitement endovasculaire de l’AVC ischémique aigu se concentre en premier lieu sur l’élimination mécanique des thrombus du vaisseau cérébral concerné (thrombectomie mécanique). En utilisant les techniques de deuxième génération (stent-retriever), il est possible d’obtenir des taux de recanalisation élevés dans des délais d’intervention courts. Les études à bras unique montrent une très bonne récupération neurologique des patients traités. En utilisant ces techniques, les options thérapeutiques pour les patients victimes d’un AVC se sont considérablement améliorées, en particulier en cas de contre-indications/d’occlusion persistante après une thrombolyse intraveineuse ou en dehors de la fenêtre de 4,5 heures pour la lyse systémique. Des études randomisées et contrôlées sont en cours pour déterminer dans quelle mesure la thrombectomie mécanique remplace ou complète la thrombolyse systémique en cas d’occlusion vasculaire proximale.
L’AVC ischémique aigu est l’une des principales causes de morbidité et de mortalité dans les pays industrialisés. Le risque d’AVC au cours de la vie est estimé à 1 sur 5 pour les femmes et à 1 sur 6 pour les hommes. Les facteurs pertinents pour la récupération neurologique après un AVC sont bien connus : le taux de recanalisation, la fenêtre temporelle entre l’apparition des symptômes et la recanalisation et dans quelle mesure une transformation hémorragique se produit dans la zone touchée après l’AVC (hémorragie intracrânienne symptomatique). La recanalisation, en particulier, a un impact considérable sur la récupération du patient. Les chances de vivre de manière indépendante après un AVC sont 4,4 fois plus élevées après une reperfusion réussie par rapport à une occlusion persistante. Parallèlement, la mortalité après recanalisation diminue de manière significative [1].
Approches thérapeutiques systémiques et locales
La thrombolyse systémique par voie intraveineuse améliore nettement la récupération neurologique des patients par rapport aux groupes témoins. Les inconvénients sont la fenêtre thérapeutique étroite de 4,5 heures après le début des symptômes et le taux de recanalisation modéré, en particulier pour les occlusions des vaisseaux intracrâniens proximaux (art. carotide interne et art. cerebri media). En outre, toute application de fibrinolytiques augmente le taux d’hémorragies intracrâniennes.
Le traitement endovasculaire des AVC ischémiques aigus évolue
Les approches thérapeutiques endovasculaires visent à prolonger la fenêtre thérapeutique, à réduire l’utilisation de fibrinolytiques et à atteindre des taux de recanalisation élevés. Dès 1982, les premières études ont montré que l’administration endovasculaire locale de fibrinolytiques dans le vaisseau concerné au-delà de la limite de 4,5 heures pouvait conduire à une recanalisation réussie.
L’étude suivante PROACT II (“Prolyse in Acute Cerebral Thromboembolism-2”) [2] a ainsi pu montrer clairement une amélioration du résultat des patients victimes d’un AVC avec occlusion de l’artère cérébrale par rapport au groupe témoin. La thrombolyse intra-artérielle continue d’être utilisée dans presque tous les centres de traitement des AVC dans une fenêtre de six heures pour la circulation antérieure et sans fenêtre clairement définie pour la circulation postérieure. Techniquement, cette procédure est simple : après une visualisation angiographique des vaisseaux cérébraux par un accès transfémoral et l’introduction d’un cathéter dans l’artère, par exemple. carotide interne, un petit cathéter (microcathéter) est introduit dans le thrombus, par exemple dans l’artère cerebri media (fig. 1). Par rapport à la thrombolyse systémique, on y applique une dose plus faible de fibrinolytique et on procède éventuellement à une manipulation mécanique.
L’inconvénient de cette procédure est la durée de l’intervention : la thrombolyse intra-artérielle, qui dure environ 60 à 90 minutes par segment vasculaire, est une procédure relativement longue. En outre, malgré la dose réduite et l’application locale du médicament, on constate une augmentation des hémorragies intracrâniennes symptomatiques d’environ 2% (en cas d’évolution naturelle) à environ 10%. En même temps, la procédure est techniquement simple et les complications du traitement, telles que perforation ou dissection, sont très rares.
Étant donné que la majorité des occlusions aiguës des vaisseaux cérébraux sont des événements thromboemboliques, il n’est pas nécessaire de poursuivre le traitement du vaisseau cérébral après dissolution ou élimination du thrombus, par exemple par thrombolyse intra-artérielle. Une ATP ou un stenting du vaisseau n’est nécessaire que dans très peu de cas, comme c’est pratiquement toujours le cas en cas d’infarctus du myocarde. On ne trouve que rarement des modifications artérioscléreuses, comme une sténose intracrânienne de haut grade du vaisseau concerné.
Stenting intracrânien : Comme pour le traitement de l’infarctus aigu du myocarde, des études ont été menées dans le passé sur le stenting de l’occlusion intracrânienne, par exemple dans l’artère cérébrale moyenne. Les taux de recanalisation sont élevés (80-90%) et la durée d’intervention est courte. L’inconvénient est que le calibre initial du vaisseau ne peut que rarement être rétabli, car le thrombus est comprimé contre la paroi. De plus, l’implantation d’un stent nécessite une inhibition de l’agrégation plaquettaire avec un risque accru d’hémorragie intracrânienne après un AVC [3].
Thrombectomie mécanique
En raison de la physiopathologie et de l’obstruction généralement mécanique d’un vaisseau cérébral par ailleurs sain, la thrombectomie mécanique, c’est-à-dire l’élimination de l’obstacle à l’écoulement du système vasculaire, s’impose. Comparable à la manœuvre de Fogarty dans les vaisseaux périphériques, cette procédure pourrait remédier à certains inconvénients de la thrombolyse intra-artérielle : temps de recanalisation courts, taux de recanalisation élevés et réduction des taux d’hémorragie intracrânienne en évitant l’utilisation de fibrinolytiques. Cependant, en raison des conditions anatomiques des vaisseaux intracrâniens, qui sont tortueux et de petit diamètre, la mise en œuvre clinique s’est avérée difficile.
Approches de thrombectomie distale : La première génération de techniques de thrombectomie comprenait la thrombectomie distale. Le thrombus est traversé par un microcathéter et un petit panier ou une petite spirale est déployée derrière le thrombus. Le thrombus doit être retiré en retirant ce panier déplié. Cette approche a fait l’objet de nombreuses études depuis 2004, sur une dizaine d’années. Les représentants typiques de cette thrombectomie étaient les dispositifs de Merci ou de Catch (Fig. 2). En fait, les taux de recanalisation ne se sont révélés que légèrement supérieurs à ceux de la thrombolyse intra-artérielle. Parallèlement, les études récentes montrent que les temps d’intervention, les taux de complications et la récupération clinique des patients sont nettement inférieurs aux approches plus récentes utilisant des techniques de deuxième génération, ce qui explique l’abandon progressif de ce type de recanalisation mécanique [4,5].
Thrombectomie par stent-retriever : depuis 2009, une variante perfectionnée de la thrombectomie mécanique est utilisée ; elle s’impose de plus en plus au niveau international. La thrombectomie de deuxième génération est une combinaison de stenting intracrânien et de thrombectomie. Comme pour les approches distales, un microcathéter est d’abord introduit à travers le thrombus dans le segment vasculaire distal, puis un stent est déposé dans le thrombus. En règle générale, ce stent “temporaire” entraîne, après son retrait, une compression du thrombus et un effet de pontage avec rétablissement de la perfusion intracrânienne. Le stent est toutefois solidement attaché à un fil (Fig. 2). Contrairement au stenting typique, ce dispositif est retiré après environ cinq minutes et enlevé des vaisseaux cérébraux. Dans la plupart des cas, le thrombus s’accroche aux mailles de l’endoprothèse et peut également être complètement retiré.
Certaines études ont montré que les paramètres pertinents du traitement de l’AVC en sont favorablement influencés. On constate des taux de recanalisation élevés dans un temps d’intervention court avec une bonne récupération du patient. En raison de l’évitement des médicaments fibrinolytiques, le taux d’hémorragies intracrâniennes symptomatiques est faible dans les études menées jusqu’à présent.
La plus grande étude sur la thrombectomie de deuxième génération, l’étude STAR, a été initiée en Suisse et menée en Europe, en Amérique du Nord et en Australie [6]. Cette étude prospective de thrombectomie pour le traitement de l’AVC aigu a examiné 202 patients présentant une occlusion des vaisseaux de la circulation antérieure (artère carotide interne, artère cérébrale moyenne) dans le cadre d’un plan à bras unique. L’âge moyen était de 72 ans et le score NIHSS était de 17, ce qui équivaut à des accidents vasculaires cérébraux graves. Tous les patients ont été traités dans un délai de huit heures, parfois après une thrombolyse intraveineuse effectuée mais non réussie. Une recanalisation pertinente (≥TICI2b, gradation “Thrombolysis in cerebral infarction”) a été obtenue dans 79,2% des cas et une récupération clinique favorable des patients a été observée dans 57,9% (Modified rankin scale ≤2). Le temps de recanalisation était en moyenne de 29 minutes. L’étude a révélé un taux de mortalité des patients de seulement 6,9% et un faible taux d’hémorragie intracrânienne symptomatique de 1,5% (fig. 3 et 4).
Situation actuelle des études
Les études concernant le traitement endovasculaire de l’AVC sont jusqu’à présent confuses et hétérogènes. En février 2013, trois études randomisées ont été publiées dans le New England Journal of Medicine [7–9], qui ont évalué l’effet du traitement endovasculaire par rapport au traitement systémique. Aucune de ces études n’a pu démontrer un effet significatif du traitement endovasculaire par rapport au groupe témoin ayant reçu une thrombolyse intraveineuse purement systémique. Il convient toutefois de noter qu’en raison de l’évolution historique décrite du traitement endovasculaire des AVC, aucune de ces études n’a utilisé de manière significative les méthodes thérapeutiques de deuxième génération.
Malgré les taux élevés de recanalisation, la courte durée d’intervention et le bon résultat clinique des patients traités avec des endoprothèses dans des études à bras unique, l’efficacité de cette procédure au niveau des études randomisées contrôlées n’est donc pas prouvée. Actuellement, cet aspect fait l’objet de plusieurs études ciblées plus approfondies. L’étude Swift Prime, qui examine le traitement de l’AVC initié dans les 4,5 premières heures, mérite d’être soulignée. Sont comparés les patients ayant subi une thrombolyse intraveineuse uniquement et ceux ayant subi une thrombolyse intraveineuse suivie d’une recanalisation mécanique.
Résumé
La clé d’un traitement efficace de l’AVC est le rétablissement rapide du flux sanguin cérébral.
La thrombectomie mécanique, en particulier avec les techniques de deuxième génération (stent-triever), présente des taux de recanalisation élevés et des temps d’intervention courts. Dans les études actuelles à bras unique, cela est corrélé à une très bonne récupération des patients.
Cette technique offre la possibilité de recanaliser les patients présentant des contre-indications à la thrombolyse intraveineuse après l’échec de la thrombolyse et au-delà de la fenêtre de 4,5 heures, ce qui améliore significativement les chances de récupération du patient.
On ne sait pas encore dans quelle mesure le traitement endovasculaire avec des approches modernes complète ou remplace le traitement systémique établi dans la fenêtre de 4,5 heures.
Prof Dr. med. Jan Gralla
Littérature :
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