Cette année, le congrès de la Société suisse de psychiatrie et de psychothérapie (SSPP, août 2016, Bâle) avait pour thème “La santé mentale dans une perspective générationnelle”. Le suicide est un problème intergénérationnel et, surtout chez les personnes âgées, de plus en plus le suicide assisté. Celui-ci est légal en Suisse, contrairement à la plupart des pays européens. Lors d’un symposium, des expertes ont présenté un aperçu des chiffres actuels et des stratégies de prévention.
Nicole Steck, de l’Institut de médecine sociale et préventive de l’Université de Berne, a donné des informations sur l’évolution du nombre de suicides au cours des dernières années. Différentes études montrent que le taux de suicide en Suisse (et dans d’autres pays européens) a diminué depuis les années 90. Parallèlement, le nombre de membres des organisations d’euthanasie EXIT et Dignitas est en forte augmentation, et par conséquent, le nombre de suicides assistés aussi. Une étude a examiné cette évolution de plus près [1].
Beaucoup plus de suicides assistés chez les personnes âgées
L’analyse s’est basée sur la Swiss National Cohort, une étude longitudinale de l’ensemble de la population suisse, issue de la combinaison des recensements de 1990 et 2000 avec les statistiques sur les causes de décès jusqu’en 2008. Depuis 1998, l’Office fédéral de la statistique utilise un code spécifique pour les suicides (présumés) assistés.
Au cours de la période étudiée, entre 1991 et 2008, il y a eu au total environ 24 400 suicides (17 400 hommes, 7000 femmes), dont environ 2300 ont probablement été assistés (1000 hommes, 1300 femmes) rien qu’à partir de 1998. Chez les hommes, le taux de suicide a légèrement baissé dans tous les groupes d’âge ; les suicides par arme à feu, en particulier, ont nettement diminué, ce qui s’explique par la réforme de l’armée et la réduction de la taille de l’armée – et donc par la moindre disponibilité des armes à feu. En revanche, le taux de suicide est resté stable chez les femmes. Chez les femmes de plus de 65 ans, le taux a même augmenté, surtout pour les empoisonnements, qui sont en grande partie des suicides assistés.
En l’espace de quelques années, le nombre de suicides assistés a triplé chez les femmes de plus de 64 ans et a doublé chez les hommes de la même catégorie d’âge. “Pour que cette évolution puisse être surveillée, il faut un enregistrement de tous les suicides assistés”, a demandé l’intervenante.
Suicides et prévention du suicide chez les personnes âgées
En 2013, 786 hommes et 284 femmes sont morts par suicide en Suisse, soit quatre fois plus que les décès liés à la circulation. Chaque année, on estime qu’environ 10 000 personnes reçoivent des soins médicaux après une tentative de suicide et que les coûts directs d’une tentative de suicide s’élèvent à au moins 19 000 francs, a expliqué le professeur Gabriela Stoppe, directrice de MentAge et responsable du GT Santé mentale et vieillesse de Swiss Public Health. Chez les hommes en particulier, le taux de suicide augmente sensiblement dans les groupes d’âge de plus de 70 ans ; les méthodes pratiquées sont principalement la fusillade (plus d’un tiers) et la pendaison (environ un quart). Chez les femmes, les armes à feu ne jouent pratiquement aucun rôle, alors que l’empoisonnement et la pendaison sont les types de décès les plus fréquents.
Les principaux facteurs de risque de suicide sont les maladies mentales, en particulier les dépressions non diagnostiquées et non traitées, et les tentatives de suicide antérieures. Il existe cependant d’autres facteurs de risque importants, dont une nouvelle maladie grave et le décès du partenaire ou de la personne qui a été malade. de la partenaire. Pour la prévention du suicide, ce sont surtout les facteurs de protection qui sont importants (tab. 1).
Le thème du suicide chez les personnes âgées a été abordé pour la première fois de manière approfondie en 2009 dans le cadre d’une table ronde interdisciplinaire. Depuis 2011, le forum sur la prévention du suicide a lieu chaque année en automne à Rüschlikon (cette année sur le thème de la prévention du suicide assisté, programme disponible sur www.ipsilon.ch). La conclusion de la conférencière : le suicide chez les personnes âgées est un grave problème de santé publique, d’autant plus que dans de nombreux cas, il existe des causes qui doivent être traitées ou des mesures de prévention. pourraient être éliminés.
Plan d’action pour la prévention du suicide de la Confédération, des cantons et de Promotion Santé Suisse
Esther Walter, responsable du projet de prévention du suicide, Office fédéral de la santé publique, a présenté le plan d’action pour la prévention du suicide. En 2014, les Chambres fédérales ont donné au Conseil fédéral le mandat de renforcer la prévention du suicide à l’échelle nationale. Concrètement, la Confédération est chargée de présenter et de mettre en œuvre un plan d’action pour la prévention du suicide. Le projet a été rédigé en collaboration avec 100 experts et 130 acteurs du secteur de la santé et de l’extérieur ont participé à la consultation.
Le projet de plan d’action prévoit toute une série de mesures, comme la promotion de la santé mentale, la sensibilisation de la population, le dépistage, l’intervention précoce et les soins de santé, mais aussi dans le suivi des survivants ou des personnes impliquées dans le cadre de leur travail. L’objectif du plan d’action est de réduire davantage et durablement le taux de suicides non assistés pendant les crises de stress ou les maladies mentales. Les taux de suicide ont déjà nettement diminué depuis 1995. Le plan d’action vise à réduire davantage et durablement ce taux.
Source : Congrès de la Société suisse de psychiatrie et de psychothérapie (SSPP), 17-19 août, Bâle
Littérature :
- Steck N, et al : Time-trends in assisted and non-assisted suicides completed with different methods : Swiss National Cohort. Swiss Med Wkly 2015 ; 145 : w14153.
InFo NEUROLOGIE & PSYCHIATRIE 2016 ; 14(5) : 43-44