La dyspnée chronique peut avoir différentes causes, les plus fréquentes étant pulmonaires ou cardiaques. En plus d’une bonne anamnèse et d’un bon examen clinique, des investigations complémentaires ciblées peuvent conduire au bon diagnostic. La réhabilitation pulmonaire joue un rôle important dans le traitement de la dyspnée dans la BPCO.
Le professeur Silvia Ulrich Somaini, Zurich, a abordé le thème de la dyspnée chronique inexpliquée. En guise d’introduction, elle a rappelé la définition de la dyspnée selon l’American Thoracic Society (ATS) : une dyspnée représente l’expérience subjective d’une difficulté à respirer, constituée de sensations qualitativement différentes et d’intensité variable. Des facteurs physiologiques, psychologiques, sociaux et environnementaux interagissent. L’ATS indique également qu’une détresse respiratoire peut provoquer d’autres réactions physiques et comportementales [1].
L’anamnèse est la première étape de la prise en charge diagnostique de la dyspnée chronique. “Une anamnèse ciblée est encore aujourd’hui le facteur décisif”, a souligné l’intervenante. “Lors de l’examen clinique, n’oubliez pas d’ausculter non seulement les poumons, mais aussi de rechercher des œdèmes des jambes, tels qu’ils apparaissent en cas d’insuffisance cardiaque ou de cor pulmonaire”. Outre les problèmes cardiaques et pulmonaires, le diagnostic différentiel d’une dyspnée peut inclure plusieurs autres pathologies (Fig. 1). Les examens complémentaires qui peuvent également être utilisés dans le cabinet du médecin généraliste pour confirmer un diagnostic de suspicion sont un hémogramme, la CRP, le BNP, la radiographie du thorax, l’ECG, la spirométrie, l’oxymétrie de pouls et certains tests d’effort (par exemple, monter les escaliers, le test de marche de 6 minutes, le test assis-debout).
Réhabilitation pulmonaire en cas de dyspnée chronique
Le Dr Alexander Turk, Horgen, a mis en lumière le thème de la réadaptation pulmonaire chez les patients souffrant de dyspnée en raison d’une BPCO. “Nous connaissons tous le cercle vicieux qui, partant de la peur de l’essoufflement, conduit à l’évitement des activités physiques, ce qui entraîne inévitablement une baisse de la condition physique et une augmentation de l’inactivité. Par conséquent, la confiance diminue et l’isolement augmente”, a-t-il expliqué. Les patients finissent par rester chez eux et tournent dans cette spirale de l’apnée. “La grande tâche de la réadaptation pulmonaire a toujours été de sortir les patients de cette spirale”, a-t-il déclaré.
En 2013, l’ATS, en collaboration avec l’European Respiratory Society (ERS), a défini la réadaptation pulmonaire comme une intervention globale, basée sur une sélection rigoureuse des patients et comprenant plusieurs formes de traitement adaptées à chaque patient [2]. Les éléments essentiels sont la thérapie d’entraînement, la formation et les changements de comportement. L’objectif de ces mesures est d’améliorer l’état physique et psychique des patients et d’induire un changement de comportement à long terme en matière de santé.
Effets positifs de la formation et de l’entraînement
“Les preuves des bénéfices de la réadaptation pulmonaire sont énormes”, a souligné le Dr Turk [3]. “En plus de la performance et de l’essoufflement, la qualité de vie est également améliorée, et c’est en fait ce qui est le plus important pour les patients atteints d’une maladie chronique”. Le cœur de la réadaptation pulmonaire est l’entraînement d’endurance et de musculation, qui peut être effectué en ambulatoire ou en hospitalisation. (Aperçu 1). En outre, la réadaptation comprend également des mesures qui aident les patients, par exemple, à inhaler correctement, à mieux gérer leur vie quotidienne ou encore à détecter précocement une exacerbation.
Une revue Cochrane a évalué l’effet de la réadaptation pulmonaire chez les patients atteints de BPCO instable après une exacerbation [4]. Les études incluses étaient très hétérogènes, mais ont montré un effet positif de la réadaptation sur le nombre d’hospitalisations (odds ratio : 0,44). “Si l’on regarde le nombre de décès, il est nettement inférieur à 10”, a ajouté le Dr Turk. Il y a peu d’interventions en pneumologie qui obtiennent un meilleur score, a-t-il ajouté. La revue a également trouvé de bonnes preuves que la rééducation améliore la qualité de vie de manière significative et cliniquement pertinente. De plus, la distance de marche de 6 minutes s’est améliorée de 62 mètres en moyenne. “Cela peut paraître peu, mais cela peut faire toute la différence pour les patients”.
Thérapies non causales
Parmi les formes de traitement non causal qui peuvent être utilisées chez les patients atteints de BPCO, on trouve par exemple l’oxygène ou encore l’Héliox [1]. “L’effet de l’oxygène sur la dyspnée n’est pas tout à fait clair. Seul un effet a été observé chez les patients hypoxémiques”, a commenté le Dr Turk. L’héliox, un mélange d’hélium et d’oxygène, est une approche thérapeutique intéressante, mais ne peut pas être recommandé pour le moment. En revanche, un travail a démontré un effet significatif sur la dyspnée d’un petit ventilateur manuel dont le flux d’air était dirigé vers le visage [5]. Le frein labial est également fortement recommandé [6]. “Cependant, il faut montrer aux patients la bonne technique dans ce cas”, explique le Dr Turk. Il a par ailleurs souligné que les opiacés occupent une place importante dans la dyspnée aiguë [6,7].
Enfin, pour aider à la gestion d’une crise de dyspnée aiguë, le Dr Turk a recommandé d’élaborer un plan d’action avec le patient et sa famille, afin que tous les participants connaissent les mesures pertinentes à prendre dans une telle situation. Le plan COMFORT (Call, Observe, Medications, Fan, Oxygen, Reassure, Timing), qui comprend sept mesures adaptables à chaque patient, peut servir de point de repère [7].
Source : Symposium sur la dyspnée 2018. A la recherche des traces – La dyspnée à la croisée du cœur et des poumons. 5 juillet 2018, Rüschlikon.
Littérature :
- Parshall MB, et al : An Official American Thoracic Society Statement : Update on the Mechanisms, Assessment, and Management of Dyspnea. Am J Respir Crit Care Med 2012 ; 185 : 435-452.
- Spruit MA, et al : An official American Thoracic Society/European Respiratory Society statement : key concepts and advances in pulmonary rehabilitation. Am J Respir Crit Care Med 2013 ; 188 : e13-64.
- Extrait de la Stratégie mondiale pour le diagnostic, la prise en charge et la prévention de la BPCO, Initiative mondiale pour la bronchopneumopathie chronique obstructive (GOLD) 2017. Disponible sur www.goldcopd.org.
- Puhan MA, et al : Pulmonary rehabilitation following exacerbations of chronic obstructive pulmonary disease. Cochrane Database Syst Rev 2016 Dec 8 ; 12 : CD005305.
- Galbraith S, et al. : L’utilisation d’un ventilateur portatif améliore-t-elle la dyspnée chronique ? A randomized, controlled, crossover trial. J Pain Symptom Manage 2010 ; 39 : 831-838.
- Marciniuk DD, et al : Managing dyspnea in patients with advanced chronic obstructive pulmonary disease : a Canadian Thoracic Society clinical practice guideline. Can Respir J 2011 ; 18 : 69-78.
- Mahler DA, et al : Recent advances in dyspnea. Chest 2015 ; 147 : 232-241.
- Mularski RA, et al : An official American Thoracic Society workshop report : assessment and palliative management of dyspnea crisis. Ann Am Thorac Soc. 2013 ; 10 : S98-106.
PRATIQUE DU MÉDECIN DE FAMILLE 2018 ; 13(6) : 9-10