Souvent considérées comme une maladie de la prospérité, les personnes concernées souffrent des conséquences physiques et sociales de leur surpoids. Cependant, les régimes coûteux et les abonnements de fitness onéreux ne permettent pas toujours d’obtenir la perte de poids souhaitée. Les patients obèses peuvent bénéficier d’un soutien de la part de leur médecin généraliste. Cela est particulièrement vrai lorsque l’obésité est associée à des comorbidités conséquentes.
Un mode de vie plus sain, une activité physique accrue et une alimentation plus équilibrée. Ce sont les premiers mots qui viennent à l’esprit lorsqu’un patient obèse se présente au cabinet de son médecin généraliste pour demander de l’aide. Objectif : réduction du poids. Cependant, à ce stade, de nombreux patients obèses ont déjà fait plusieurs tentatives infructueuses pour perdre du poids. Qu’est-ce qui se cache derrière le problème de l’obésité ?
Problème de l’obésité
En Suisse, en 2017, près de la moitié des plus de 15 ans, soit 41,9%, souffraient de surpoids (IMC >25) ou d’obésité (IMC >30) [2]. Il en résulte des coûts annuels d’environ huit milliards de francs suisses en Suisse (situation en 2012) [3]. L’obésité en particulier, c’est-à-dire le surpoids sévère, est souvent associée à une grande souffrance. En effet, l’obésité provoque de nombreuses maladies secondaires qui peuvent être catégorisées selon le système des 4M :
- Maladies métaboliques concomitantes (dyslipidémie, syndrome des ovaires polykystiques, diabète sucré de type 2)
- Maladies mécaniques associées (hypertension artérielle, apnée du sommeil, problèmes orthopédiques)
- Maladies mentales concomitantes (dépression, troubles alimentaires)
- Problèmes monétaires (sociaux) (handicap dans le cadre de la recherche d’emploi ou de la vie de couple, discrimination) [4].
Répartition de la graisse
Le facteur déterminant pour l’apparition de complications de l’obésité est la répartition de la graisse. On distingue la graisse viscérale, c’est-à-dire intra-abdominale, et la graisse sous-cutanée. Un taux élevé de graisse viscérale est critique, car il réduit la sensibilité à l’insuline. La physiopathologie sous-jacente est complexe. Histologiquement, la graisse viscérale présente des adipocytes hypertrophiques avec une infiltration de cellules immunitaires. L’augmentation de la taille des adipocytes entraîne une expansion tissulaire continue dans l’obésité. Les adipocytes meurent en plus grand nombre que d’habitude. Une réaction inflammatoire est déclenchée, ce qui explique l’augmentation des cellules immunitaires visibles à l’histologie, notamment les macrophages des tissus adipeux (ATM). Les ATM libèrent à leur tour davantage de cytokines et d’ARN extracellulaire, ce qui entraîne une réponse immunitaire mal adaptée. Le métabolisme physiologique des adipocytes est alors perturbé. Ils deviennent résistants à l’insuline.
En revanche, la graisse sous-cutanée ne contribue souvent guère à l’apparition de comorbidités. Sur le plan thérapeutique, cela est pertinent dans la mesure où une liposuccion qui réduit uniquement la graisse sous-cutanée n’a pas d’influence directe sur le développement des maladies secondaires.
Diagnostic de l’obésité
Jusqu’où vaut-il la peine d’aller dans l’évaluation des patients obèses ? En termes de diagnostic, l’examen de l’IMC ne suffit pas. En effet, l’IMC seul ne dit rien sur la composition tissulaire de la masse corporelle. Pour évaluer le risque cardiovasculaire et métabolique, la mesure du tour de taille est déjà plus pertinente, car elle permet d’évaluer indirectement la répartition de la graisse. Un tour de taille supérieur à 102 cm pour les hommes et à 88 cm pour les femmes est considéré comme trop élevé [4]. Dans certaines indications, telles que l’infertilité, le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) ou la suspicion de syndrome métabolique, il est recommandé de procéder à un diagnostic de laboratoire plus approfondi.
Pour évaluer la résistance à l’insuline, on peut déterminer l’indice HOMA (tableau 1). Il faut veiller à utiliser des valeurs à jeun (au moins huit heures d’abstinence alimentaire).
La résistance à l’insuline est un facteur de risque élevé pour la stéatohépatite non alcoolique (NASH), l’hypertension artérielle, l’hypertriglycéridémie et le diabète sucré de type 2. Pour évaluer l’état du syndrome métabolique associé à une inflammation chronique légère, il est également recommandé de prélever les paramètres de laboratoire suivants :
- Valeurs rénales
- Microalbumine (urine spontanée)
- Bilan hépatique
- Cholestérol HDL et triglycérides
- CRP (et hCRP)
- HbA1c
- SHBG (en cas de bilan de fertilité)
La microalbuminurie permet de savoir si le système vasculaire est également touché et si une microangiopathie commence à se développer.
Dans les centres de traitement de l’obésité, l’analyse de la bio-impédance est souvent un autre outil de diagnostic utile. L’analyse de la bioimpédance consiste à examiner la conductivité électrique des tissus et à en déduire leur composition. Cela est particulièrement utile si l’on souhaite effectuer une mesure d’historique. En effet, il est essentiel de savoir si les patients perdent principalement de la masse graisseuse ou s’ils perdent en même temps une part considérable de masse musculaire métaboliquement active. Si la perte de masse cellulaire métaboliquement active est trop importante, une prise de poids au fil du temps, appelée effet yoyo, est inévitable. Une reprise de poids importante peut généralement être évitée par un apport suffisant en protéines et une augmentation de l’activité physique.
Options thérapeutiques
Dans le cas de l’obésité, la thérapie de première ligne consiste en des conseils nutritionnels et une augmentation de l’activité physique – autrement dit, un bilan calorique négatif. Il existe à cet effet des modèles pratiques de consultations diététiques où des spécialistes se rendent au cabinet sur demande. Cela permet d’éviter les consultations fastidieuses chez le médecin généraliste. De plus, il existe des approches modernes comme les conseils nutritionnels via une application, de sorte qu’un coaching continu est assuré.
Si le traitement conservateur ne donne pas les résultats escomptés, il existe des médicaments utiles qui facilitent la perte de poids. Les médicaments suivants sont autorisés en Suisse pour le traitement de l’obésité : Liraglutide, orlistat et bupropion/naltrexone (tab. 2).
Le liraglutide et l’orlistat peuvent être administrés jusqu’à trois ans en étant pris en charge par l’assurance-maladie si l’indication persiste, tandis que la préparation combinée bupropion/naltrexone ne peut être administrée en étant prise en charge par l’assurance-maladie qu’avec certaines formations complémentaires. Il est toujours possible de se faire prescrire des médicaments à ses propres frais. En outre, le sémaglutide, un analogue du GLP1, qui a obtenu des résultats deux fois supérieurs à ceux du liraglutide, une molécule de la même classe, est sur le point d’être autorisé.
Le dernier pilier de la thérapie est la chirurgie bariatrique. Dans 60 à 70% des cas, on obtient des résultats satisfaisants et durables sur plusieurs années. Même avec cette méthode invasive mais très efficace, les résultats à long terme ne sont garantis que si une adaptation du mode de vie est effectuée parallèlement à l’intervention.
Mission du médecin généraliste
L’important dans la prise en charge des patients obèses est de fixer des objectifs communs. Tout d’abord, il convient de noter qu’en tant que médecin généraliste, ce n’est pas l’IMC qui est traité en premier lieu, mais les comorbidités de l’obésité. Il est alors recommandé de définir ensemble un poids cible approximatif. Il est important de rester réaliste à cet égard. En règle générale, une réduction de poids d’environ 10 % suffit à freiner durablement le développement des séquelles. Chez certains patients, qui se trouvent par exemple dans des situations de stress psychosocial, l’arrêt de la prise de poids peut déjà être considéré comme un succès. En conséquence, les objectifs thérapeutiques peuvent être adaptés aux besoins individuels des patients.
Lorsque l’on demande aux patients obèses s’ils veulent perdre du poids, rares sont ceux qui répondent par la négative. Cependant, de nombreux patients ont besoin d’une motivation supplémentaire pour sortir de la voie difficile du syndrome métabolique. Laissés à eux-mêmes, près de 95% échouent. Atteindre l’objectif n’est généralement possible que par la continuité. Celle-ci ne doit pas être assurée uniquement par le médecin généraliste. La continuité peut également être assurée par un coaching de fitness ou des conseils nutritionnels. En tant que médecin généraliste, des outils simples, comme le suivi de l’évolution du poids, permettent de mettre en évidence des progrès objectivables. Si les patients proposent de suivre les tendances en matière de fitness, comme le jeûne intermittent actuellement très répandu, il faut également en profiter. La tendance peut être ponctuellement complétée par des conseils thérapeutiques de la part des médecins généralistes, si cela semble plus pertinent. Comme pour de nombreuses maladies chroniques, il est important de faire preuve de patience et de comprendre la souffrance du patient. Même si la perte de poids se présente souvent comme une tâche herculéenne, elle est possible.
Congrès : WebUp
Littérature :
- Monika Schmid (Oviva), Dr. med. Susanne Maurer (adimed), Traitement de l’obésité au cabinet du médecin généraliste, WebUp im Fokus 02.05.2022.
- Observatoire suisse de la santé, https://ind.obsan.admin.ch/indicator/monam/uebergewicht-und-adipositas-alter-15, consulté le 06.06.2022.
- Office fédéral de la santé publique OFSP, www.bag.admin.ch/bag/de/home/gesund-leben/gesundheitsfoerderung-und-praevention/koerpergewicht/uebergewicht-und-adipositas/kosten-uebergewicht-und-adipositas.html, consulté le 06.06.2022.
- Cité textuellement de : S. Maurer, Traitement non chirurgical de l’obésité. Éditions Medinfo : Le médecin informé, 10-13 (2017).
PRATIQUE DU MÉDECIN DE FAMILLE 2022 ; 17(6) : 41-42