Les patients atteints de maladies rhumatismales inflammatoires chroniques souffrent souvent de douleurs, de comorbidités ainsi que de limitations physiques et sociales, ce qui entraîne une très importante altération de leur qualité de vie [1, 2]. Pour améliorer la situation des personnes concernées par la PR, la SA et l’APs, la rémission clinique est l’objectif thérapeutique suprême qu’il convient de viser [1, 3, 4].
offline 26.05.23 En Suisse, environ 85’000 personnes sont concernées par la polyarthrite rhumatoïde (PR) et 70’000 par la spondylarthrite ankylosante (SA; morbus Bechterew), bien que pour cette dernière, 10’000 seulement soient probablement diagnostiquées correctement [5, 6]. L’arthrite psoriasique (APs) survient chez jusqu’à 15 % de tous les patients atteints de psoriasis et concerne, selon les études, entre 24’000 et 80’000 personnes en Suisse [7, 8]. En dehors des inflammations de l’appareil locomoteur et de la souffrance importante des personnes concernées, le tableau clinique des trois maladies rhumatismales inflammatoires chroniques est hétérogène, ce qui impose une prise en charge thérapeutique personnalisée [3, 4, 9].
Quand la rémission est-elle atteinte?
L’objectif suprême est d’atteindre une rémission, c’est-à-dire un état dans lequel la maladie est complètement inactive ou dans lequel elle est si peu active que le patient ne la remarque plus. Un diagnostic et un début de traitement précoces s’accompagnent d’un pronostic plus favorable [1, 3, 4, 10, 11]. Pour évaluer si la rémission est atteinte, les études cliniques utilisent différents scores (tableau).
Conformément aux recommandations de traitement EULAR en vigueur pour la prise en charge de la PR, l’activité de la maladie doit être surveillée régulièrement et le traitement adapté si aucune amélioration n’est observée après un traitement de trois mois ou si l’objectif thérapeutique n’est pas atteint après six mois [4]. Pour la SA et l’APs, il est également recommandé d’adapter le traitement en l’absence de la réponse souhaitée, même si la fenêtre temporelle pour l’évaluation du succès thérapeutique n’est pas explicitement abordée dans ce cas [3, 9].
Approches thérapeutiques systémiques avec différents mécanismes d’action
En Suisse, plusieurs approches systémiques, aux mécanismes d’action différents, sont disponibles pour le traitement des patients atteints de PR, de APs et SA. Outre les inhibiteurs du facteur de nécrose tumorale (TNFi), l’inhibiteur sélectif de Janus kinase (JAKi) upadacitinib (UPA; RINVOQ®) peut également être utilisé pour les trois indications [15, 16]. Les deux options thérapeutiques se distinguent de plusieurs manières:
- Les TNFi inhibent une cytokine spécifique, les JAKi influencent de nombreuses voies de signalisation immunologiques et disposent ainsi d’un large spectre d’action [17].
- Avec une demi-vie de 9 à 14 heures, l’UPA dispose d’une demi-vie nettement plus brève que le TNFi adalimumab (ADA), d’environ 2 semaines, et il est métabolisé plus rapidement, ce qui peut être utile, par exemple en cas d’intervention chirurgicale [15, 16].
- L’UPA est pris en comprimés, 1x par jour, ce qui rend le traitement plus agréable et plus simple pour de nombreux patients que l’injection d’ADA toutes les deux semaines [15, 16].
L’efficacité et la sécurité de l’UPA en cas de PR, de SA et d’APs ont été étudiées dans le cadre du très complet programme SELECT, incluant 11 études et plus de 8000 patients au total [18-28].
UPA en cas de PR – taux de rémission > 40 % après 26 semaines [20]
Dans l’étude randomisée de phase III SELECT-COMPARE, 41 % des patients atteints de PR qui avaient auparavant répondu de manière insuffisante au méthotrexate (MTX), ont obtenu une rémission DAS28-CRP < 2,6 après 26 semaines sous UPA + MTX. Sous ADA + MTX, 27 % y sont parvenus et sous PBO + MTX, 9 % (les deux p < 0,001) (Figure 1A) [20]. Les patients qui avaient terminé la première phase de 48 semaines en double aveugle de SELECT-COMPARE pouvaient ensuite rejoindre l’étude d’extension en ouvert en cours. Dans le cadre de l’analyse actuelle à 156 semaines, 32 % des patients du bras UPA + MTX et 22 % du bras ADA + MTX se trouvaient en rémission (p < 0,001) [29].
UPA en cas de SA – presque un patient sur 4 en rémission après 24 semaines [30]
Après la fin de la phase de 14 semaines en double aveugle de l’étude randomisée de phase II-b/III SELECT-AXIS 1, 16 % des patients atteints de SA sous UPA qui avaient auparavant répondu de manière insuffisante aux anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) se trouvaient en rémission ASDAS < 1,3. Sous PBO, cela n’a été le cas pour aucun des patients (Figure 1B) (p < 0,0001) [27]. À partir de la semaine 14, tous les sujets du bras PBO ont reçu l’UPA. Dès 10 semaines après le changement de traitement, le taux de rémission, de 26 %, était comparable aux 23 % de celui des patients qui avaient reçu l’UPA en continu pendant 24 semaines. Après 64 semaines au total, plus de 34 % des patients se trouvaient en rémission dans les deux groupes [30].
UPA en cas d’APs – Rémission chez plus de 3 patients sur 10 à la semaine 24 [31]
Parmi les patients atteints d’APs présentant une réponse insuffisante ou une intolérance à ≥ 1 médicament antirhumatismal modificateur de la maladie conventionnel synthétique (csDMARD) et qui avaient été traités par UPA dans le cadre de l’étude randomisée de phase III SELECT APs 1, après 24 semaines, 37 % répondaient aux critères de rémission MDA, comparé à 33 % dans le bras ADA et 12 % dans le bras PBO (Figure 1C). Ensuite, tous les sujets du bras PBO ont été passés à l’UPA. Après 56 semaines au total, 29 % de ces patients ont atteint une rémission MDA. Cet objectif avait déjà été atteint à ce moment-là par 45 % des patients sous traitement par UPA en continu et par 40 % des patients sous traitement par ADA en continu [31].
Figure 1: Taux de rémission pour la PR, la SA et l’APs dans les études randomisées de phase III.
(A) SELECT-COMPARE: Patients présentant une PR active après réponse insuffisante au MTX (B) SELECT-AXIS 1: Patients présentant une SA active et une réponse insuffisante aux AINS (C) SELECT APs 1: Patients atteints d’APs et présentant une réponse insuffisante ou une intolérance à ≥ 1 csDMARD
Toutes les analyses: Imputation des non-répondeurs (NRI). UPA: upadacitinib 15 mg 1 fois par jour; ADA: adalimumab 40 mg toutes les deux semaines; MTX: méthotrexate; csDMARD: médicament antirhumatismal modificateur de la maladie conventionnel synthétique; AINS: anti-inflammatoires non stéroïdiens; DAS28-CRP: score d’activité de la maladie sur 28 articulations, protéine C réactive (Joint Disease Activity-Score28-C-Reactive Protein); MDA: activité minimale de la maladie (Minimal Disease Activity; 5 critères sur 7 satisfaits); ASDAS: score d’activité de la spondylarthrite ankylosante (Ankylosing Spondylitis Disease Activity Score); n.s.: non significatif
Adapté de [20, 27, 29-31]
Soulagement de la douleur sous UPA dans les trois indications déjà après 3 mois [20, 25, 27]
Les douleurs de l’appareil locomoteur entraînent une souffrance importante pour les patients atteints de PR et de SA [1-3]. Comme le montrent les résultats des différentes études SELECT, l’UPA peut soulager rapidement, notablement et à long terme la douleur des malades. Ainsi, selon l’évaluation par les patients atteints de PR dans SELECT-COMPARE, après 12 semaines, sous UPA + MTX la douleur s’était améliorée de 32,1 points sur une échelle de 0 à 100, comparé à une amélioration de 25,6 points sous ADA + MTX et de 15,7 points sous PBO + MTX (p UPA vs PBO et vs ADA ≤ 0,001 chaque fois) [20]. Le soulagement de la douleur a été maintenu pendant 156 semaines sous UPA (-39,8 points sous UPA contre -31,2 points sous ADA; p < 0,001) [29].
Les patients atteints de SA de l’étude SELECT-AXIS 1 ont déjà montré, après 2 semaines de traitement en continu par UPA, une réduction significative des dorsalgies. Après 12 semaines, une amélioration de 3,22 points sur une échelle de 0 à 10 était observable sous UPA, et de 1,38 points dans le groupe PBO (p < 0,0001) [27]. Après 64 semaines, sous UPA, l’amélioration des dorsalgies s’était poursuivie avec une réduction de 4,95 points au total par rapport aux valeurs initiales [30].
Dans l’étude SELECT-PsA 1, les patients des bras UPA et ADA ont constaté une réduction moyenne de 2,3 points après 12 semaines, et de 0,9 points sous PBO [25]. Ici aussi, après un temps d’observation prolongé, de 56 semaines, la poursuite de l’amélioration des douleurs a été constatée (-3,3 points sous UPA contre -2,9 points sous ADA) [31].
Profil de sécurité stable et bien étudié [30-32]
Outre l’efficacité, la sécurité à long terme est un critère particulièrement important lors de la sélection d’un traitement adéquat en cas de maladie chronique. L’Agence européenne des médicaments (EMA) a mis en œuvre une évaluation de la sécurité de tous les JAKi autorisés dans le traitement des maladies inflammatoires chroniques [33]. Comme le montre une analyse intégrée actuelle des études cliniques portant sur l’UPA en cas de PR, sur une période d’observation de 4,5 ans, le profil de sécurité du JAKi est resté stable et comparable à celui de l’ADA, à l’exception de la survenue plus fréquente d’un zona et de l’élévation des taux de créatine phosphokinase sous UPA. Sous UPA 15 mg 1 x par jour, l’incidence des thromboembolies veineuses (TEV), malignités, événements cardiovasculaires graves (MACE) ou infections graves a été comparable à celle observée sous PBO et ADA [32]. Même dans les études concernant l’APs et la SA, aucun nouveau risque concernant la sécurité n’a été enregistré pour l’UPA [30, 31].
Conclusion
La rémission est le principal objectif thérapeutique en cas de maladies rhumatismales inflammatoires [1, 3, 4]. L’UPA peut contribuer à permettre à un nombre croissant de patients présentant une PR, APs et SA d’atteindre cet état, dans lequel ils ne remarquent plus leur maladie [30, 31, 34]. Ainsi, dans les 3 indications, un net soulagement de la douleur était déjà atteint après 3 mois avec l’UPA [20, 25, 27]. Après 3 ans, plus du tiers des patients atteints de PR de l’étude SELECT-COMPARE sous UPA + MTX se trouvaient encore en rémission et les dernières données des études portant sur la SA et l’APs, après 64 et 56 semaines respectivement, indiquent aussi qu’une rémission peut être maintenue à long terme avec l’UPA [29-31]. Le JAKi à prendre en comprimés présente en outre un profil de sécurité stable et bien étudié, et il peut également être utilisé en monothérapie, sans MTX [15, 30-32].
3 questions au Professeur Axel Finckh, Université de Genève
Que signifie le fait d’atteindre une rémission pour les patients atteints de maladies rhumatismales inflammatoires ?
Le vœu le plus cher des malades est de ne plus ressentir de douleur, et un faible niveau de douleur est le facteur le mieux corrélé à un niveau de qualité de vie élevé. Nous ne devons pas oublier cela, en tant que rhumatologues. À cet égard, les besoins des patients concordent bien avec le concept de rémission: Lorsqu’un patient se trouve en rémission, il ne doit plus souffrir d’arthralgies. De plus, en rémission, il convient de s’assurer qu’il n’existe aucune lésion articulaire, ou qu’elles sont très limitées, et que des lésions collatérales telles que des affections cardiovasculaires sont peu probables. Les critères précis utilisés pour la définition de la rémission sont différents pour la PR, l’APs et la SA. Les attentes des patients sont toutefois similaires dans toutes ces maladies: Mener une vie normale, comme avant.
Dans quelle mesure est-il réaliste d’espérer atteindre une rémission aujourd’hui?
De nombreuses études ont montré que la définition d’un objectif thérapeutique quantifiable et la vérification régulière des paramètres qui le composent («contrôle étroit») entraînent un meilleur contrôle de la maladie que le suivi normal. La communication entre le médecin et le patient joue également un rôle important. Cette approche est actuellement proposée dans les principales recommandations thérapeutiques internationales. L’ajustement individuel des objectifs thérapeutiques relève de la responsabilité du médecin. Chez les patients présentant des douleurs nociceptives, une maladie très avancée et des lésions articulaires structurelles, la rémission est souvent difficile à atteindre. Dans ce cas, poursuivre cet objectif peut même être contre-productif, car cela implique de nombreux ajustements thérapeutiques souvent inutiles. Environ un quart à un tiers des patients atteints de maladies rhumatismales inflammatoires présentent des arthralgies à composantes nociceptives que le médecin doit identifier et traiter de manière spécifique.
Quelle est votre propre expérience de l’utilisation de l’UPA chez vos patients atteints de PR, d’APs et de SA?
J’ai été agréablement surpris par la rapidité avec laquelle l’effet de l’UPA est apparu chez plusieurs de mes patients, même chez ceux qui avaient auparavant répondu de manière insuffisante à plusieurs DMARD biologiques. La rapidité de la réponse est un facteur important pour l’acceptation du traitement par les patients. Lorsque «l’avant» et «l’après» ne sont pas espacés de plusieurs mois, ils prennent mieux conscience de la différence et il est plus probable qu’ils poursuivent le traitement à long terme.
Plus d’un an de Rinvoq® dans la SA et l’APs!Le 23 mars 2021, l’UPA a obtenu l’autorisation de Swissmedic pour les indications de SA et d’APs [35]. Les patients présentant ces maladies rhumatismales inflammatoires peuvent ainsi bénéficier de ce traitement ciblé administré par voie orale depuis plus d’un an déjà. Pour les PR modérées à sévères, l’UPA peut déjà être administré depuis janvier 2020 [36]. Cela fait de l’upadacitinib le premier, et actuellement le seul JAKi, autorisé dans le traitement de la PR, de la SA et de l’APs [15, 37]. L’UPA se présente sous forme de comprimés, à prendre à la dose recommandée de 15 mg 1 fois par jour, avec ou sans aliments [15]. Le coût du traitement par l’UPA est pris en charge par les caisses d’assurance maladie dans les trois indications [38].
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Information professionnelle abrégée de Rinvoq®
Dr sc. nat. Jennifer Keim
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Contribution en ligne depuis le 27.06.2022
CH-RNQR-220059_06/2022