Le congrès de l’EPA à Munich a été l’occasion de faire le point sur les progrès réalisés dans le traitement des patients dépressifs. L’amélioration précoce de la santé mentale positive est justement cruciale pour la réponse et la rémission. De nouvelles substances actives montrent des possibilités prometteuses pour contrer la réduction des affects positifs dans la dépression.
(ag) Selon le professeur Guy Goodwin, d’Oxford, la symptomatologie de la dépression comprend des affects négatifs tels que l’humeur déprimée, la culpabilité, la colère, la tristesse, l’anxiété et la fatigue. Mais les symptômes basés sur la perte d’affects positifs tels que la joie, l’intérêt, la confiance en soi, l’optimisme, l’énergie et la motivation sont également très importants. Selon le professeur Goodwin, l’amélioration de la santé mentale par la restauration d’affects positifs est justement essentielle pour une rémission complète. Selon l’expert, les limites du traitement actuel sont principalement l’efficacité (pas de réponse globale/composantes non traitées du syndrome clinique) et la tolérance à long terme (fonction sexuelle altérée, prise de poids). L’anhédonie, qui se caractérise par une diminution de la capacité à vivre des émotions positives, a été jusqu’à présent négligée en tant qu’objectif thérapeutique.
Nouvelles pistes thérapeutiques
L’agomélatine (Valdoxan®), un agoniste mélatonergique (des récepteurs MT1 et MT2) et un antagoniste 5-HT2C, est autorisée en Suisse pour le traitement des épisodes dépressifs des adultes selon la CIM-10 (“dépression majeure” selon le DSM IV). Chez les patients qui ont bien répondu à l’agomélatine dans le traitement aigu, elle est également indiquée pour le traitement d’entretien pendant six à douze mois [1]. Il resynchronise les rythmes circadiens dans des modèles animaux et augmente également la libération de noradrénaline et de dopamine (en particulier dans le cortex frontal), ce qui est lié à la régulation de l’humeur et des émotions. Il n’a pas d’influence sur le taux de sérotonine extracellulaire. “En outre, il entraîne une diminution de la libération de glutamate induite par le stress et une augmentation du BDNF (“brain-derived neurotrophic factor”), dont le rôle crucial dans les troubles de l’humeur est confirmé par plusieurs études”, a déclaré le professeur Giorgio A. Racagni, Milan. L’agomélatine a ainsi un effet négatif sur l’humeur déprimée et un effet positif sur l’intérêt et le plaisir, ce qui optimise le fonctionnement au quotidien. Contrairement aux autres antidépresseurs, l’effet antidépresseur ne nécessite pas la libération de sérotonine et d’autres monoamines.
Effet sur les affects positifs décisif
“Du point de vue des patients dépressifs, un traitement doit notamment restaurer la santé mentale positive (optimisme, énergie, confiance en soi) [2]”, a expliqué le professeur Pierre-Michel Llorca, de Clermont-Ferrand. “Dans le modèle hypothétique de Nutt et al., les antidépresseurs qui augmentent la libération de noradrénaline et de dopamine sont plus à même de contrecarrer la réduction des affects positifs que les antidépresseurs sérotoninergiques [3]”. Cette hypothèse est-elle confirmée pour l’agomélatine ? Nouvelles données de Gorwood et al. sur 1565 patients dépressifs montrent que l’agomélatine permet par exemple d’améliorer de manière précoce et substantielle la motivation, un affect positif important ayant la meilleure valeur prédictive pour la réponse [4]. De même, l’agomélatine a permis d’améliorer le score MAThyS dans la catégorie “plaisir”. L’influence de l’agomélatine sur l’anhédonie a été étudiée il y a deux ans par Martinotti et al. : ils ont conclu que la substance active avait un effet significativement meilleur sur ce trouble que l’ISRS venlafaxine, avec la même efficacité antidépressive [5].
“L’agomélatine permet effectivement de restaurer plus rapidement les affects positifs par rapport à d’autres antidépresseurs, avec une amélioration équivalente des affects négatifs. Ceci est important car un changement précoce dans les affects positifs (après une semaine) est un prédicteur de la rémission après six semaines [6]. Gorwood et al. voient également dans une amélioration précoce des émotions positives (après deux semaines sous agomélatine) un prédicteur plus spécifique de la réponse ultérieure que l’atténuation des émotions négatives [7]. En outre, l’agomélatine contrecarre le retard psychomoteur et joue un rôle central dans la rémission fonctionnelle, dont l’évaluation prend de plus en plus d’importance dans le traitement de la dépression majeure [8]”, a conclu le professeur Llorca.
Source : “Understanding biological and clinical features of depression to achieve better treatment”, symposium satellite du 22e European Congress of Psychiatry, 1er-4 mars 2014, Munich
Littérature :
- Information professionnelle Valdoxan®: www.kompendium.ch
- Zimmerman M, et al : How should remission from depression be defined ? Le point de vue du patient déprimé. Am J Psychiatry 2006 Jan ; 163(1) : 148-150.
- Nutt D, et al : The other face of depression, reduced positive affect : the role of catecholamines in causation and cure. J Psychopharmacol 2007 Jul ; 21(5) : 461-471. Epub 2006 Oct 18.
- Gorwood P, et al. : Au-delà des symptômes dépressifs, comment l’agomélatine modifie-t-elle la réactivité émotionnelle, la vitesse cognitive, la motivation, la fonction psychomotrice et la perception sensorielle ? European Psychiatry 2014 ; Article : EPA-0762.
- Martinotti G, et al : Agomélatine versus venlafaxine XR dans le traitement de l’anhédonie dans le trouble dépressif majeur. Journal of Clinical Psychopharmacology 2012 ; 32(4) : 487-491.
- Geschwind N, et al : Une amélioration précoce des émotions positives plutôt que négatives prédit la rémission de la dépression après une pharmacothérapie. Eur Neuropsychopharmacol 2011 Mar ; 21(3) : 241-247. doi : 10.1016/j.euroneuro.2010.11.004. Epub 2010 Dec 13.
- Gorwood P, et al : L’augmentation des émotions positives après deux semaines d’agomélatine est plus spécifique pour prédire la réponse ultérieure au traitement que la diminution des émotions négatives. European Psychiatry 2014 ; Article : EPA-0601.
- Mouchabac S, Lemoine P, Baylé FJ : Rémission fonctionnelle dans la dépression et indice de satisfaction du patient : résultats de l’étude diapason. European Psychiatry 2013 ; 28 (S1) : 1.
InFo NEUROLOGIE & PSYCHIATRIE 2014 ; 12(3) : 41-42