La tryptase, une enzyme produite presque exclusivement par les mastocytes, est considérée comme un paramètre pertinent en cas de suspicion de MCAS. Si l’augmentation de la tryptase liée à l’événement dépasse un certain seuil par rapport aux intervalles sans symptôme, cela indique une implication des mastocytes. Un autre critère important est la réponse au traitement par des médicaments spécifiques aux mastocytes, tels que les antihistaminiques ou les stabilisateurs de mastocytes. Une stratégie de traitement adaptée à chaque individu permet généralement de bien gérer le syndrome mastocytaire.
Les mastocytes se caractérisent par une accumulation excessive de mastocytes dans les tissus de l’organisme. On parle d’activation des mastocytes (AMC) lorsque certains facteurs déclencheurs entraînent une libération accrue et non régulée de médiateurs vasoactifs et pro-inflammatoires tels que l’histamine, la tryptase, les prostaglandines ou les leucotriènes (tableau 1). Chez les patients présentant des symptômes récurrents d’activation des mastocytes, il convient de déterminer s’il peut s’agir d’un syndrome d’activation des mastocytes (MCAS). La sévérité des symptômes du MCAS est associée à l’ampleur de la libération du Mediator. Dans les cas graves d’activation des mastocytes, la symptomatologie est comparable à l’anaphylaxie. La probabilité qu’il s’agisse d’un MCAS est plus élevée si au moins deux des systèmes d’organes suivants sont impliqués : cutané, cardiovasculaire, pulmonaire, gastro-intestinal.
En cas de symptômes aigus, il faut d’abord stabiliser l’état. Ensuite, les éléments suivants doivent être documentés [1] : (i) la gravité de la réaction, (ii) réaction systémique et systèmes d’organes impliqués (iii) évolution : récidivante vs. non récidivante, (iiii) activation des mastocytes (détection en laboratoire).
Augmentation transitoire des taux de tryptase comme marqueur important
Le Dr Claudia Lang, de la clinique dermatologique de l’hôpital universitaire de Zurich, rapporte que l’expérience montre que les personnes concernées qui se présentent chez leur médecin/dermatologue souffrent souvent d’une pression considérable [2]. En raison de la diversité des symptômes, ils passent souvent par une odyssée de plusieurs années d’examens médicaux avant d’obtenir le bon diagnostic [3]. Le diagnostic de suspicion de MCAS est confirmé lorsqu’une augmentation transitoire des taux de tryptase sérique liée à un événement est détectée, explique l’intervenante [2]. Comme la tryptase est spécifique aux mastocytes et nettement plus stable que l’histamine, il s’agit d’un paramètre bien adapté à la détection d’une activation des mastocytes [4]. Certes, la tryptase est également présente dans les basophiles, mais en quantité beaucoup plus faible. Le moment le plus propice pour détecter une augmentation de la tryptase est 1 à 4 heures après un événement anaphylactique [1,5]. Les valeurs mesurées doivent être comparées aux taux de tryptase de base individuels. Si les valeurs de référence ne sont pas disponibles, elles peuvent être obtenues au plus tôt 24 à 48 h après la disparition de tous les symptômes [1]. En ce qui concerne la valeur seuil, il est apparu, après des études sur la cinétique de la tryptase, qu’une valeur aiguë de la tryptase de ≥20% au-dessus de la valeur basale individuelle plus 20 ng/ml rendait probable une activation des mastocytes comme cause de la réaction [1]. L’augmentation de la tryptase liée à un événement est l’un des trois critères MCAS faisant l’objet d’un consensus [1,6]:
- signes cliniques typiques d’une AMC aiguë sévère et récurrente (notamment les signes cliniques d’anaphylaxie)
- Une implication mastocytaire démontrée avec une augmentation de la tryptase liée à l’événement par rapport aux intervalles sans symptômes : 20% par rapport à la valeur initiale plus 20 ng/ml
- Réponse au traitement par des médicaments spécifiques à la mastocytose
Les trois critères doivent être remplis pour que le diagnostic de MCAS soit posé [1]. Le diagnostic différentiel doit exclure les causes secondaires (par ex. mastocytose, allergie IgE-dépendante, maladies inflammatoires) [7,8]. Si les taux de tryptase de base restent élevés après un événement (>20 ng/ml), cela peut indiquer des maladies sous-jacentes telles que l’α-tryptasémie héréditaire ou la mastocytose systémique.
Sur le plan thérapeutique, outre l’évitement des facteurs déclencheurs, l’utilisation d’antihistaminiques H1 ou de stabilisateurs de mastocytes font partie des mesures les plus importantes. Il est pris en tant que médicament permanent ou en cas de besoin. Les antagonistes des leucotriènes ou les inhibiteurs de la synthèse des prostaglandines font partie des autres substances actives à prendre en considération. Une alimentation réduite en histamine peut être utile, mais une recommandation générale pour un régime sans histamine n’est pas forcément pertinente [2].
Lorsque les patients MCAS sont sur le point de subir une intervention chirurgicale : Que faire ?
Les techniques d’anesthésie se sont améliorées ces dernières années. Les complications peuvent être évitées en adaptant la prise en charge pré-, per- et postopératoire, explique le Dr Lang [2]. Pour ce faire, les points suivants doivent être pris en compte :
- éviter certains anesthésiques, analgésiques, antibiotiques et myorelaxants en cas d’intolérance connue
- chez les patients ayant des antécédents documentés d’anaphylaxie : prémédication avec de la prednisolone et des antihistaminiques H1 et H2 environ 30 min avant l’intervention.
- La prémédication doit également être envisagée dans les situations difficiles à évaluer.
- dans les cas graves, l’omalizumab peut être envisagé comme traitement prophylactique.(L’omalizumab se lie aux IgE et empêche ainsi la liaison des IgE au récepteur FcεRI de haute affinité. Parallèlement, le seuil d’activation des mastocytes augmente [12])
Congrès : Société suisse d’allergologie et d’immunologie
Littérature :
- Valent P, et al : J Allergy Clin Immunol Pract 2019 ; 7(4) : 1125-1133.
- Lang C : Syndrome d’activation des mastocytes (MAS) / Libération d’histamine non spécifique : mythes et faits. Dr. med. Claudia Lang. Allergologie et immunologie mise à jour AIU. 28.-30.01.2022.
- “Les causes du syndrome post-Covid – Traiter les séquelles à long terme de Corona de manière causale/Comment les virus persistants, les inflammations auto-immunes et l’activation des mastocytes conduisent à Long Covid”, https://drjacobsinstitut.de (dernière consultation 05.04.2022)
- Pejler G, et al : Mast cell proteases. Adv Immunol 2007 ; 95 : 167-255.
- Kristensen T, et al : Allergy 2017 ; 72 : 1737-1743.
- Valent P, et al : Int Arch Allergy Immunol 2012 ; 157 : 215-225.
- Vitte J, et al : J Allergy Clin Immunol Pract 2021 ; 9(8) : 2994-3005.
- Ebo DG, et al : J Allergy Clin Immunol Pract 2021 ; 9(8) : 3051-3059.
- Thermo Fisher Scientific Inc (SE) : ImmunoCAP tryptase. Directions for use, www.phadia.com (dernière consultation 05.04.2022)
- Société suisse d’intolérance à l’histamine (SIGHI), www.mastzellaktivierung.info, (dernière consultation 05.04.2022)
- Afrin LB, et al : The Amercian Journal of the Medical Sciences 2017 ; 353(3) : 207-215.
- Lemal R, et al : The journal of allergy and clinical immunology En pratique 2019 ; 7(7) : 2387-95.e3
DERMATOLOGIE PRAXIS 2022 ; 32(3) : 36-37 (publié le 14.6.22, ahead of print)