Le Dr Hermann Keller a été invité à intervenir lors du 3e atelier Swiss Life sur le peeling et a donné des informations sur l’anesthésie lors des peelings chimiques. Il a montré aux participants comment rendre la situation des patients aussi supportable que possible pendant le traitement. Parmi les autres points importants, le Dr Hermann Keller a mentionné la préparation des patients à l’anesthésie et les soins postopératoires.
Dr Keller, à quoi devez-vous faire attention en cas d’anesthésie pour un peeling chimique ?
Dr. Keller :
La douleur provoquée par un peeling profond est si intense que les analgésiques seuls ne suffisent pas. Ce traitement nécessite presque plus de médicaments que l’opération de l’appendicite. Il s’agit de rendre la situation aussi supportable que possible pour les patients. Le problème, cependant, est que l’anesthésie générale est un “no-go” dans cette situation. Les patients doivent être ventilés et cela n’est pas compatible avec le traitement, car le masque et le tube entraînent des déformations du visage. En outre, il n’est pas certain que les substances exfoliantes attaquent le matériau des appareils. La variante de l’anesthésie régionale n’est pas non plus une option, car une anesthésie régionale complète du visage n’est pas du tout possible, car les nerfs crâniens sont également impliqués.
Quelle forme d’anesthésie utilisez-vous alors ?
Je dois choisir une solution intermédiaire et c’est l’analgo-sédation. L’objectif est que les patients soient calmes, qu’ils ne souffrent pas et, dans l’idéal, qu’ils soient amnésiques de l’intervention. Vous recevez un somnifère léger, généralement du Dormicum, ainsi qu’un analgésique. Les opiacés ne doivent pas être utilisés, ou seulement avec prudence. Si les opiacés ont l’avantage d’offrir une bonne analgésie, ils provoquent en revanche une dépression respiratoire. Cela peut être dangereux, surtout en combinaison avec d’autres médicaments. La kétamine est une alternative dans ce cas, mais il faut de l’expérience et les effets secondaires sont désagréables, surtout chez les jeunes patients qui ont des hallucinations. Cependant, avec un dosage de 0,5 à 1 mg par kilogramme de poids corporel, on obtient une assez bonne analgésie. La dépression respiratoire n’est pas aussi rapide qu’avec les opiacés. Tant que l’on reste dans une certaine limite, le patient est toujours en auto-respiration.
Le propofol est une autre possibilité. Il a une action brève, est facilement contrôlable, mais n’a pas d’effet analgésique. Comme il peut provoquer un arrêt cardiaque, en particulier chez les jeunes patients, le propofol nécessite une surveillance du patient par ECG.
Comment êtes-vous équipé pour une telle mission ?
Comme pour une anesthésie normale ! Il faut donc un équipement d’anesthésie complet avec monitoring, c’est-à-dire l’ECG, la mesure de la pression artérielle et de la saturation en oxygène, un accès veineux pour l’application des médicaments, en particulier en cas d’effets secondaires ou de complications, par exemple des vomissements, des troubles du rythme cardiaque ou, comme mentionné, un arrêt cardiaque. Et de l’oxygène doit être disponible avec la possibilité de ventiler le patient.
Comment les patients doivent-ils être préparés à l’anesthésie ?
En cas d’anesthésie, la visite de prémédication est obligatoire, même pour les interventions ambulatoires. Le patient se rend au cabinet pour la consultation préalable et remplit le questionnaire d’anesthésie. Si cela s’avère nécessaire, je procède également à un examen clinique. En outre, l’autorisation d’opérer et d’anesthésier doit être signée. C’est la même procédure que pour un patient qui subit une opération, il n’y a pas de différence pour moi.
Que se passe-t-il après l’intervention ?
Les patients doivent être surveillés pendant au moins deux heures en postopératoire. Ensuite, ils ne peuvent rentrer chez eux accompagnés que s’ils sont complètement éveillés, c’est-à-dire que les exigences relatives à l’anesthésie s’appliquent. En effet, ils restent vulnérables à la suite de l’anesthésie et des effets secondaires des médicaments post-opératoires, même à la maison, par exemple s’ils ne sont pas pleinement oralisés. Après l’intervention, la douleur est parfois si forte que je donne aux patients des opiacés faibles et des anti-inflammatoires pendant 48 heures. J’essaie d’agir avec des médicaments à différents endroits de l’apparition et du traitement de la douleur, mais la fenêtre est étroite pour la réduction de la douleur.
Selon vous, quelles sont les précautions particulières à prendre par le médecin lors d’un peeling profond ?
Le dermatologue doit passer “en mode chirurgien” pour un tel traitement et être conscient qu’il provoque une lésion relativement massive et étendue, qui plus est sur le visage. Il devrait également tenir compte de l’impact que cela aura sur les patients. L’essentiel est que le dermatologue soit suffisamment responsable pour savoir ce qu’il fait lors d’une telle intervention. Ma conviction est que le peeling profond ne devrait pas être pratiqué si un anesthésiste n’est pas présent. Si l’on veut faire les choses sérieusement et prendre ses responsabilités vis-à-vis du patient, on ne peut pas se passer d’un anesthésiste.
Dr Keller, merci beaucoup pour cet entretien.
DERMATOLOGIE PRATIQUE 2016 ; 26(6) : 32-33