Le traitement de la maladie de Parkinson doit toujours être individualisé et son début doit tenir compte de la souffrance du patient. Au début, presque tous les antiparkinsoniens peuvent être utilisés avec succès, mais la lévodopa doit être préférée chez les personnes âgées et/ou polymorbides, ainsi qu’en cas de parkinsonisme. En cas d’apparition de fluctuations motrices, de nombreuses stratégies de traitement, dont certaines invasives, sont disponibles. Une attention particulière doit être accordée aux symptômes non moteurs ; seule une partie d’entre eux s’améliore après l’administration de dopaminergiques, une partie ne s’améliore pas du tout, une autre partie s’aggrave même avec les antiparkinsoniens. D’autres mesures sont souvent indiquées.
On pense souvent à tort que le traitement de la maladie de Parkinson est simple. Nous connaissons bien les “anciens” médicaments, l’industrie pharmaceutique n’a “heureusement” guère mis de nouveautés sur le marché. L’individualisation du traitement reste néanmoins difficile. Existe-t-il des règles générales qui facilitent notre travail ?
Une fois que le diagnostic de syndrome parkinsonien est certain, nous devons d’abord nous demander s’il s’agit d’une forme “classique”, idiopathique. Pour cela, il convient de consulter un neurologue. Si la réponse est positive, les décisions suivantes doivent être prises : Quand traiter et comment commencer ? Que faire lorsque les premières fluctuations motrices apparaissent ? Quand les thérapies “plus agressives” sont-elles indiquées ? Peut-on atténuer les troubles non moteurs de la maladie, et si oui, comment ? Et que devons-nous faire si nos patients présentent effectivement un parkinsonisme ? Des réponses réfléchies et personnalisées à ces questions nous permettront d’offrir aux patients la meilleure qualité de vie possible le plus longtemps possible.
Quand et comment traiter ?
Aujourd’hui, on affirme souvent qu’il peut être avantageux de commencer le traitement le plus tôt possible. Il existe des preuves que des médicaments, tels que la rasagiline, retardent la progression de la maladie (mais cela n’a pas encore été clairement confirmé). En outre, un traitement précoce améliore plus tôt la qualité de vie des patients. De plus, l’effet préventif d’un traitement ultérieur sur le développement de fluctuations motrices n’est pas prouvé. Mais traiter plus tôt signifie aussi un risque plus précoce d’effets secondaires – et leur impact sur la qualité de vie a été peu étudié. Alors, comment procéder ? La vieille règle d’or reste valable : le moment du début du traitement doit être discuté en détail avec le patient. Ses souhaits, sa situation sociale et professionnelle et sa souffrance doivent être pris en compte.
Une fois la décision prise, la question qui vient à l’esprit est : “Avec quoi traiter ?” Miser sur l’espoir d’une neuroprotection ? Le patient souhaite-t-il une amélioration rapide des symptômes ? Des symptômes non moteurs préexistants ou d’autres atypies indiquent-ils un parkinsonisme ? Existe-t-il une polymorbidité ? Le tremblement est-il au premier plan pour le patient ? Les stratégies possibles pour le premier traitement sont résumées dans le tableau 1 .
En principe, la dose initiale doit être la plus faible possible et l’augmentation éventuelle de la dose doit être très progressive. Il n’est pas rare que l’on puisse commencer par une administration deux fois par jour, par exemple à 8 et 14 heures ; une administration plus fréquente peut être effectuée plus tard si nécessaire. Le début du traitement avec des médicaments à effet retard, des inhibiteurs de la COMT ou des médicaments à longue demi-vie présente peu d’avantages, car l’effet des médicaments standard dure plus longtemps au début et les symptômes moteurs nocturnes ou matinaux n’apparaissent généralement pas encore. De même, l’hypothèse selon laquelle une stimulation dopaminergique aussi continue que possible pourrait retarder le développement de dyskinésies et d’autres fluctuations motrices n’a jamais vraiment été confirmée : Les fluctuations des effets apparaissent certes plus tard – reste à savoir si elles ont été prévenues ou simplement bien traitées.
En cas de parkinsonisme et de polymorbidité : lévodopa
En cas de suspicion de parkinsonisme, il faut malheureusement souvent s’attendre à une résistance au traitement. Néanmoins, nombre de ces patients présentent une réponse au moins partielle au traitement dopaminergique au cours des premières années. La lévodopa est ici le traitement de premier choix. En cas de parkinsonisme, l’apparition précoce de symptômes non moteurs graves (tels que l’orthostatisme symptomatique ou les troubles cognitifs et psychiatriques) est très probable, alors que le risque de dyskinésie est minime. La lévodopa ayant un effet plus faible sur l’hypotension, les hallucinations et les psychoses que les autres antiparkinsoniens, elle doit être privilégiée en cas de parkinsonisme. Il en va de même pour les patients âgés et polymorbides, dont la vulnérabilité aux effets secondaires est connue. Ces patients sont souvent traités par un traitement compliqué ; l’absence d’interaction de la lévodopa (un acide aminé) est ici un avantage supplémentaire.
Premières fluctuations
Après quelques années de traitement relativement simple, des fluctuations motrices apparaissent chez la plupart des patients. La durée d’action des médicaments est plus courte (“wearing off”) si la dose minimale efficace de lévodopa est administrée plus fréquemment que toutes les quatre heures. Les symptômes de la maladie de Parkinson peuvent également apparaître la nuit et des dystonies douloureuses peuvent accompagner les phases akinétiques. La cause ? La lévodopa, qui a une courte demi-vie, n’est tout simplement plus “stockée” par le cerveau.
La mesure efficace la plus simple serait alors d’administrer la lévodopa plus fréquemment, à une fréquence qui tienne compte de la durée d’action observée par le patient. Si les horaires de prise ne doivent pas être modifiés, nous pouvons administrer des préparations à base de lévodopa retard ; celles-ci peuvent être associées à la lévodopa standard afin de réduire la latence éventuelle du délai d’action. Alternativement, une médication complémentaire (avec des inhibiteurs de la COMT, des agonistes de la dopamine ou des inhibiteurs de la MAO-B) est envisageable. En cas d’administration de préparations supplémentaires, il est recommandé de réduire légèrement la lévodopa afin d’éviter une augmentation des dyskinésies.
Ces mouvements involontaires sont désormais fréquents (y compris chez les patients traités par agonistes dopaminergiques, bien qu’un peu plus tard). La meilleure stratégie pour y remédier est de maintenir la dose de médicaments aussi faible que possible. Les dyskinésies biphasiques (rares) qui accompagnent l’entrée en action et la fin de l’action constituent une exception. Là, étonnamment, une réduction de la dose entraînera une augmentation des mouvements involontaires : En revanche, une augmentation de la dose et l’abandon des préparations à effet retard provoqueront une amélioration paradoxale.
Pour les dyskinésies, on choisit souvent l’amantadine, mais son effet n’est souvent visible que pendant quelques mois.
Fluctuations plus importantes
Avec le temps, les phases de réapparition des symptômes de la maladie de Parkinson deviennent de plus en plus irrégulières. On peut certes s’attaquer aux akinésies imprévisibles en utilisant une forme de lévodopa rapidement absorbée qui doit être dissoute dans l’eau. Cependant, en raison du temps de préparation plus long, les avantages d’une absorption plus rapide sont généralement perdus. En outre, les dyskinésies augmentent souvent et peuvent avoir un effet limitant sur la dose, éventuellement en association avec d’autres effets secondaires.
En cas de maladie de Parkinson à un stade avancé avec de fortes fluctuations et divers symptômes non moteurs concomitants, il est possible de recourir à la “thérapie par pompe” en plus de la chirurgie de la maladie de Parkinson lorsque les médicaments conventionnels (oraux et transdermiques) sont épuisés. Le contexte théorique de l’apomorphine administrée par voie sous-cutanée à l’aide de pompes et du gel de lévodopa/carbidopa administré par voie entérale (par gastrojéjunostomie) est le concept de stimulation dopaminergique continue.
L’apomorphine, un agoniste dopaminergique, a un effet antiparkinsonien très puissant. En cas d’injection sous-cutanée, l’effet se fait sentir au bout d’une dizaine de minutes, ce qui est utilisé par exemple lors de l’utilisation du stylo à apomorphine(fig. 1).
Fig. 1 : Stylo à apomorphine
L’administration d’apomorphine par pompe(figure 2) convient aux patients qui souffrent de problèmes on-off et qui présentent simultanément des dyskinésies pendant les périodes de bonne efficacité du médicament, ou lorsque le stylo à apomorphine est utilisé très fréquemment.
Fig. 2 : Pompe à apomorphine
La pompe externe contrôle la perfusion continue d’apomorphine. En conséquence, les temps morts sont réduits de 50 à 70%. Les dyskinésies sont souvent réduites de manière significative lorsque la prise orale de lévodopa est évitée.
Depuis des années, on dispose également d’une préparation combinée de lévodopa et de carbidopa sous forme de gel visqueux qui est administré en continu directement dans l’intestin grêle au moyen d’une pompe portée sur le corps(fig. 3) via une sonde gastrojéjunale percutanée (JET-PEG).
Fig. 3 : Duodopa
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-pompe
Sous ce traitement, une amélioration significative des symptômes de la maladie de Parkinson a été démontrée sur une durée allant jusqu’à sept ans : Diminution des fluctuations et des dyskinésies, réduction du off quotidien, amélioration des troubles de la marche et des “freezings”, diminution des chutes. Les symptômes non moteurs se sont également améliorés et de nombreux patients ont montré une meilleure qualité de vie et une plus grande autonomie.
La neurochirurgie fonctionnelle est abordée plus en détail dans ce numéro par le PD Dr Christian Baumann, Zurich (article sur l’utilité de la stimulation cérébrale profonde dans la maladie de Parkinson). Il suffit de souligner ici que le meilleur effet des interventions chirurgicales est égal au meilleur effet des médicaments. Quelle est donc la différence ? L’effet est maintenu pendant 24 heures lors de l’opération et permet en outre de réduire les éventuels effets secondaires des médicaments. Le fait que les meilleurs effets des médicaments ne soient pas dépassés signifie toutefois que les parkinsonismes résistants au traitement ne sont malheureusement guère améliorés par la chirurgie.
Symptômes non moteurs : réduction de la médication ?
Les patients atteints de parkinsonisme ne sont pas les seuls à souffrir de symptômes non moteurs. Même si les patients ont la “chance” d’être atteints de la “vraie” maladie de Parkinson, leur traitement est principalement compliqué par des symptômes non moteurs.
Rarement prononcés au début (sinon, cela indique un parkinsonisme), ces troubles augmentent avec l’évolution et sont peu améliorés, voire parfois aggravés, par le traitement antiparkinsonien. Ainsi, les dopaminergiques renforcent ou provoquent des hallucinations et des psychoses : un exemple typique est le syndrome de dysrégulation dopaminergique (avec des troubles du comportement comme un comportement pathologique d’achat ou de jeu, une tendance à l’abus de médicaments, une hypersexualité, une hypomanie). La dose totale d’antiparkinsoniens doit être réduite en cas de manifestations psychiatriques et une monothérapie par la lévodopa doit être envisagée, car celle-ci exerce un effet plus faible sur le système mésolimbique que les autres dopaminergiques. Si l’utilisation de neuroleptiques est malgré tout nécessaire, seules la clozapine et la quétiapine à très faibles doses sont envisageables. Une monothérapie par la lévodopa doit également être envisagée en cas de démence et d’orthostatisme symptomatique. En cas d’orthostatisme, il est notamment possible d’utiliser la dompéridone dans une tentative d’inhiber partiellement l’effet périphérique des dopaminergiques. Une somnolence diurne accrue – à surveiller particulièrement chez les conducteurs – peut également être due à la maladie, mais elle est en outre renforcée par les médicaments, notamment le pramipexole et le ropinirole ou provoquée par eux : une attention particulière (et une réduction des médicaments !) s’impose dans ce cas.
En revanche, une augmentation des médicaments antiparkinsoniens peut atténuer de nombreux autres symptômes, comme la dépression, relativement fréquente : la valorisation du quotidien par une médication optimisée améliorera l’humeur des patients, de plus, la composante organique de la dépression s’améliore grâce aux dopaminergiques. De même, la symptomatologie douloureuse fréquente, qui peut être aggravée ou même causée par la maladie, est généralement soulagée par l’optimisation de la médication. Il en va de même pour l’éventuelle symptomatologie des jambes sans repos, les troubles sexuels, la salivation et la constipation fréquente.
Une fois que l’adaptation (augmentation ou réduction de la dose ou simplification) des médicaments antiparkinsoniens a été effectuée, de nombreuses médications non dopaminergiques ou des mesures de soins peuvent être prises pour tenter de contrôler ces symptômes gênants(tableau 2). Néanmoins, ces troubles constituent probablement la principale cause d’invalidité en cas de maladie avancée.
L’expérience montre que la constellation de troubles que présentent les patients est très complexe et individuelle. Une grande flexibilité et une approche multidisciplinaire en étroite collaboration avec différents spécialistes peuvent permettre de donner aux patients une qualité de vie satisfaisante le plus longtemps possible.
Le tableau 3 donne un aperçu des caractéristiques des différents médicaments contre la maladie de Parkinson.
Bibliographie chez l’éditeur
InFo NEUROLOGIE & PSYCHIATRIE 2013 ; 11(4) : 10-15