La coloscopie est une procédure de dépistage importante pour la détection et l’élimination des adénomes et des polypes qui peuvent potentiellement conduire au cancer colorectal. Depuis quelques années, un taux élevé de détection des adénomes est considéré comme un critère important pour la coloscopie de dépistage. Pour évaluer la qualité du nettoyage de l’intestin, on peut utiliser l’échelle de préparation de l’intestin de Boston.
En Suisse, le cancer du côlon ou du rectum (carcinome colorectal) est le troisième cancer le plus fréquent chez les hommes et le deuxième chez les femmes [1]. 4300 personnes développent un cancer du côlon chaque année dans notre pays, la plupart des personnes touchées ont plus de 50 ans [1]. En Suisse, entre 50 et 69 ans, l’assurance maladie obligatoire prend en charge deux coloscopies à un intervalle de ≥10 ans ou un test de recherche de sang occulte dans les selles (fecal immunochemical test, FIT) à un intervalle de ≥2 ans. En cas de résultat positif au FIT, il convient de procéder à un examen endoscopique de l’ensemble du côlon. La coloscopie préventive permet de dépister le cancer colorectal et de réséquer les polypes intestinaux. Chez les patients à risque et/ou présentant des symptômes suspects (aperçu 1) , une coloscopie peut également être indiquée en dehors de cet intervalle d’âge [2]. La coloscopie avec prélèvement de biopsies d’échantillon présente la sensibilité et la spécificité les plus élevées de tous les examens et constitue donc l’étalon-or en matière de diagnostic. Le fait qu’une coloscopie puisse réduire l’incidence du cancer colorectal et les taux de mortalité a par exemple été démontré dans l’étude non randomisée “à cohorte fermée” menée dans les cantons montagneux suisses [3]. Et en Allemagne, depuis l’introduction des coloscopies de dépistage remboursées par l’assurance maladie en 2002, la prévalence du cancer colorectal a considérablement diminué dans le groupe d’âge des 55-84 ans : de 17 à 20 % chez les hommes et de 20 à 26 % chez les femmes [4].
Taux de détection des adénomes : “Adenoma Detection Rate” (ADR)
Selon l’OMS, les mesures de dépistage efficaces doivent être documentées par une assurance qualité [5,6]. Une prise de position de l’European Society for Gastrointestinal Endoscopy (ESGE) énumère les “mesures de performance pour l’endoscopie gastro-intestinale basse” actuellement recommandées [7]. Il s’agit de paramètres dont il est prouvé qu’ils sont associés à un meilleur résultat. Dans les grandes études de cohorte, le taux de détection des adénomes (ADR), en particulier, a été associé à la fois à une incidence plus faible et à une mortalité plus faible du cancer colorectal [8,9]. La valeur ADR à atteindre est de 25%, en se basant sur le fait qu’une valeur de cut-off de 24,6% était associée à la plus faible mortalité par cancer colorectal [10,11].
Qualité de la préparation : “Boston Bowel Preparation Scale” (BBPS)
La détection des adénomes dépend essentiellement de la visualisation de l’ensemble de la muqueuse colique. Il est donc important d’obtenir, en plus d’un TDA élevé, une qualité de préparation adéquate et un taux de couverture cæcale suffisant. À cette fin, il est recommandé d’utiliser un système de notation validé, tel que l’échelle de préparation du bol de Boston(encadré) [12,13]. La qualité de préparation du côlon évalué doit être au moins moyenne [8, 14]. Il est recommandé de viser un taux élevé de coloscopies avec une exploration du cæcum, car un faible taux d’exploration du cæcum est associé à une incidence plus élevée de cancers colorectaux (à la fois distaux et proximaux) [15]. Actuellement, la norme minimale est un taux de couverture des cæcums ≥90%, un taux ≥95% étant considéré comme optimal [16]. Pour garantir l’ablation complète des polypes, l’ESGE prescrit un taux d’ablation conforme aux directives d’au moins 80%. Cela signifie que les polypes <10 mm doivent être enlevés avec l’anse froide et ≥10 mm avec l’anse chaude [17]. Une technique d’ablation inadéquate des polypes est responsable de jusqu’à 25% des cancers colorectaux après coloscopie de dépistage (post-colonoscopy colorectal cancer, PCCRC) [18].
Suivi après polypectomie
La coloscopie est considérée comme une procédure très sûre. Des études indiquent un taux de complications d’environ 0,3-0,5 pour 1000 examens [19]. Les complications survenant pendant l’examen ainsi que les événements survenant après une coloscopie, tels que les hospitalisations ou la mortalité à 30 jours, doivent être documentés conformément à l’ESGE [16]. En ce qui concerne la conformité du patient, il est important de minimiser la douleur et l’inconfort pendant une coloscopie. Bien qu’il n’existe actuellement aucune norme établie concernant la satisfaction des patients, l’expérience montre que des pratiques de sédation efficaces lors de la coloscopie peuvent contribuer à améliorer le ressenti des patients [20]. Après la coloscopie de dépistage, il est essentiel de gérer correctement les éventuelles coloscopies de suivi. En effet, seul un suivi adéquat après polypectomie permet d’éliminer les polypes qui ont éventuellement poussé ou qui ont été réséqués de manière incomplète. L’European Society for Gastrointestinal Endoscopy recommande aux patients chez qui des polypes à haut risque ont été détectés de subir une nouvelle coloscopie après 3 ans. Chez les patients ne présentant pas de polypes à haut risque, une nouvelle coloscopie est jugée utile après 10 ans. La définition des polypes à haut risque a été mise à jour en 2020 [21]. En conséquence, le suivi ne doit avoir lieu que chez les patients qui présentent au moins un adénome avec une dysplasie de haut niveau ou une taille ≥10 mm ou chez les patients qui présentent ≥5 adénomes ou qui ont au moins un polype séreux avec une dysplasie ou une taille ≥10 mm.
Littérature :
- Swiss Cancer Screening, www.swisscancerscreening.ch, (dernière consultation 03.11.2022)
- “Dépister le cancer colorectal à un stade précoce : Qu’est-ce qui a du sens ?” Prof. Benjamin Misselwitz, Clinique de chirurgie et de médecine viscérales, Hôpital de l’Île, Berne, 07.05.2022
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PRATIQUE DU MÉDECIN DE FAMILLE 2022 ; 17(10) : 35-36