Les lésions de surcharge dans le sport ont des étiologies multiples. Leur traitement nécessite la prise en compte de divers facteurs intrinsèques et extrinsèques. Un aperçu des causes et des manifestations de ce type de lésions sportives les plus courantes – et comment les traiter.
Outre les effets bénéfiques sur la santé d’une activité physique régulière et raisonnable, le sport présente également un revers de la médaille : les accidents et les lésions de surcharge liés au sport. Alors que le nombre d’accidents de sport est relativement bien recensé par les statistiques (LAA : 300 000/an*, BPA : 410 000/an), les lésions dues au surmenage ne sont guère quantifiables, car elles sont gérées par les caisses d’assurance maladie et ne sont donc pas déclarées. Toutefois, une étude statistique menée sur cinq ans a montré que les lésions dues au surmenage étaient deux fois plus fréquentes que les blessures [1].
Comment se produit la surcharge ?
Pour comprendre la notion de lésions dues à la surcharge dans le sport, il est nécessaire de rappeler les principes de base de la théorie de l’entraînement (une charge et une récupération correctes entraînent une adaptation positive de la structure stimulée) et de passer en revue les performances d’adaptation des types de tissus du système musculosquelettique (tableau 1).
Or, dans le cadre de l’engagement sportif, il arrive souvent que ces principes de base ne soient pas respectés – au contraire : on s’entraîne, notamment dans le sport amateur, en pleine charge, sans tenir compte de facteurs extrinsèques tels que la planification de l’entraînement, la récupération, l’alimentation, l’équipement (chaussures de sport, circonférence du manche de la raquette de tennis, dimensions de la roue, etc.), la technique sportive et le choix du sol. Lorsqu’à des facteurs extrinsèques défavorables s’ajoutent des variations de forme anatomiques intrinsèques ou gênantes (pied plié, pied creux, pied étalé, jambes en O ou en X, rotation de la hanche, hyperlordose, valgus du coude, etc.) et d’autres aspects tels qu’un trouble de la densité osseuse ou la croissance, il est compréhensible que des parties du corps soient endommagées. L’exemple le plus clair d’une réaction de surcharge est peut-être la fracture de fatigue ou de stress du IIe métatarsien : la charge exercée sur l’arrière-pied est égale à 1,2 fois le poids du corps à chaque pas, et à 2,4 fois lors d’un jogging tranquille. Pour une personne de 70 kg effectuant 8000 à 10 000 pas (la limite inférieure pour un effet bénéfique sur la santé), ses pieds ont supporté une charge de 2,52 tonnes à la fin de la journée et de 858 480 tonnes à la fin de l’année. Avec de telles charges, il n’est pas surprenant qu’un petit os long du pied “cède”, d’autant plus si les chaussures et donc la statique du pied ne sont pas optimales.
Manifestations du surmenage sportif
Le surmenage sportif est une lésion réversible, parfois irréversible, d’une structure principalement musculo-squelettique, due à une inadéquation entre la charge et la résistance de la partie du corps concernée, et favorisée par différents facteurs de nature intrinsèque et extrinsèque. La disproportion ne se manifeste alors qu’après un certain temps. Le tableau 2 indique les réactions de surcharge possibles des différents types de tissus.
Les réactions de stress sur l’os sont des conditions douloureuses avec une réaction périostée, mais sans interruption de la continuité de la corticale. On les trouve sur le bord interne du tibia. Le tableau clinique est connu sous le nom de syndrome de stress tibial médian (MTSS). Il s’agit d’une étape préliminaire dans un continuum jusqu’à la fracture de stress complète. Les termes tendinopathie et tendinose ont remplacé le terme tendinite. Les pathologies tendineuses ont été bien étudiées scientifiquement, prouvant entre autres que les facteurs inflammatoires sont peu présents dans les tendons douloureux. Les facteurs responsables de cette modification ne sont pas seulement mécaniques, mais aussi métaboliques : ainsi, les personnes obèses et diabétiques sont plus souvent atteintes de tendinopathies, un rôle central étant attribué aux “reactive oxygen species” (ROS). Le concept de déséquilibre musculaire – “raccourcissement” (augmentation du tonus) des muscles toniques et affaiblissement des muscles phasiques – a été suffisamment diffusé par la médecine manuelle. Les enthésopathies touchent aussi bien les muscles que les tendons. Le sujet de l’arthrose et du sport est très complexe. En principe, le sport n’augmente pas le risque d’arthrose si les articulations sont saines. Cependant, le sport favorise de nombreuses blessures articulaires qui peuvent ensuite ouvrir la porte à la (pré)arthrose. Les bursites se situent à des endroits anatomiques où des muscles tendus et leurs tendons irritent mécaniquement les structures protectrices. Citons par exemple le syndrome de la bandelette ilio-tibiale et la neuropathie ulnaire, causée chez le cycliste par les vibrations du guidon. La figure 1 résume certains des diagnostics les plus courants en cas de surcharge. Nous avons délibérément choisi de ne mentionner que les diagnostics rencontrés chez l’adulte. Chez l’adolescent, toutes les ostéochondroses de croissance (Osgood Schlatter, Sinding Larsen, Sever, etc.) peuvent être considérées comme des pathologies de surcharge.
Aspect clinique
En consultation, la plupart des patients se plaignent d’une douleur liée à l’effort. Celui-ci peut être décrit en suivant Blazina et al. [2] en quatre stades différents :
- Douleur uniquement au début de l’activité
- Douleur au début et à la fin de l’activité
- Augmentation de la douleur pendant le programme sportif
- Douleur permanente d’intensité variable, même au repos
Cette classification ne donne qu’une indication de la gravité des dommages causés par la surcharge. Elle ne modifie guère le traitement, qui doit être initié dès la première étape pour un pronostic favorable.
Pendant l’anamnèse, le patient est généralement en mesure de montrer avec précision la zone douloureuse, qui est souvent ponctuelle. Des tests de provocation appropriés (mouvements contre résistance) sont utilisés pour tenter de reproduire la douleur. Dans certains cas (bursites, fractures de fatigue, tendinopathies), on observe un gonflement au-dessus de la zone douloureuse, plus rarement des rougeurs. En principe, on ne trouve pas de valeurs pathologiques dans le sang. L’imagerie est nécessaire en cas de suspicion de fractures de stress, l’IRM étant l’outil de choix. Pour la plupart des autres lésions de surcharge liées au sport, de telles investigations technologiques ne sont pas obligatoires. Il serait également utile d’avoir des informations, pas toujours faciles à obtenir en consultation, sur la technique d’exécution du geste spécifique au sport (revers et coup droit au tennis, prise de javelot, style de course dans les différentes disciplines de course à pied) et sur les caractéristiques de l’équipement sportif (par exemple, la circonférence du manche et l’épaisseur du cordage de la raquette de tennis, la position assise sur le vélo, le modèle d’usure des semelles de chaussures). Il n’est pas rare que des analyses biomécaniques de la marche se soient révélées utiles. Ces méthodes de clarification sont aujourd’hui relativement faciles à obtenir.
Thérapie
Le traitement d’un symptôme de surmenage du système musculo-squelettique d’un sportif est un acte médical passionnant, mais aussi très exigeant en raison de la complexité des mécanismes d’action (fig. 2). Le médecin traitant devrait notamment modérer son éventuelle envie d’appliquer une injection de cortisone “loco dolenti”. Le soulagement local de la douleur, qui est rapide et efficace à court terme, ne changera absolument rien aux causes du problème, mais ne fera qu’accélérer le cercle vicieux : Grâce à la réduction momentanée de la douleur, le sportif reprendra rapidement et complètement l’activité à laquelle il aspire, mais de manière similaire, et il ne faudra pas longtemps avant que le problème ne se manifeste à nouveau, peut-être de manière plus grave. En pratique, il s’agit d’abord de stopper l’exposition nocive, ce qui peut constituer un défi en soi pour les personnes qui s’entraînent. Parallèlement, un programme de remplacement doit être mis en place, de préférence avec l’aide du kinésithérapeute, qui doit absolument être impliqué dans le traitement. Il peut soulager la douleur locale par des mesures essentiellement passives tout en renforçant les muscles et les tendons par un entraînement spécifique. En outre, les facteurs intrinsèques et extrinsèques doivent être abordés. Dans ce cas, il peut également être avantageux d’impliquer l’entraîneur dans le processus de guérison, car les erreurs d’entraînement jouent souvent un rôle. Le traitement des lésions dues au surmenage est donc une entreprise qui implique de nombreux facteurs avec de nombreuses parties prenantes et qui requiert une grande sensibilité de la part du médecin du sport.
* La base de données est constituée des salariés obligatoirement assurés selon la loi sur l’assurance-accidents (LAA) en Suisse ainsi que des chômeurs. Toutes les autres personnes (enfants, élèves, étudiants, personnes au foyer sans activité professionnelle, retraités) sont assurées selon la loi sur l’assurance maladie (LAMal) et ne sont donc pas incluses dans les statistiques.
Littérature :
- Jenoure P : Consultation sur les statistiques 2003.
- Blazina ME, Kerlan RK, Jobe FW : Jumper’s Knee. Orthop Clin North Am 1973 ; 4 : 665-678.
- Jenoure P, Feinstein R, Segesser B : Mesures prophylactiques dans le domaine des blessures et des lésions sportives. Journal autrichien de médecine sportive 1987 ; 3 : 7-10.
PRATIQUE DU MÉDECIN DE FAMILLE 2018 ; 13(9) : 8-10