La principale utilisation du gui est le traitement complémentaire en oncologie. Elle y est aujourd’hui principalement utilisée pour améliorer la qualité de vie.
Viscum album L., le gui ou le gui à baies blanches, est un arbuste parasite de la famille des santalacées (Fig. 1). On distingue plusieurs sous-espèces en fonction de l’arbre hôte :
- Gui de feuillus (Viscum album subspecies album)
- Gui du sapin (Viscum album subspecies abietis)
- Chardon des pins (Viscum album subspecies austriacum).
Le gui est propagé par les oiseaux qui mangent les fruits collants, mais ne peuvent pas digérer la partie intérieure contenant les graines. Lorsque les graines sont excrétées sur un arbre correspondant, elles peuvent s’y fixer et germer. Ce faisant, ils privent l’hôte d’eau et de minéraux, ce qui permet au germe de gui de se développer lentement sur l’arbre. Au cours de nombreuses années, des structures sphériques d’un diamètre pouvant atteindre un mètre peuvent ainsi se former.
C’est ainsi que le gui se répand dans les zones tempérées d’Europe du Nord et d’Europe centrale. Au début du 20e siècle, le gui a également été introduit aux États-Unis et pousse dans la région de San Francisco.
Ingrédients
Parmi les composants de Viscum album, dont les effets sont si controversés, les glycoprotéines, c’est-à-dire les lectines de gui contenant du sucre, occupent une place centrale. On connaît une vingtaine de lectines différentes, qui sont présentes dans le gui en différentes compositions.
Outre les lectines, les viscotoxines, petits peptides cationiques riches en cystine appartenant au groupe des thiones, jouent également un rôle important [1]. De plus, le gui contient différents flavonoïdes ainsi qu’une teneur en thiols (p. ex. glutathion) mille fois supérieure à celle d’autres plantes, ce qui lui confère un très bon effet antioxydant.
Cardiovasculaire et anthroposophie
Le gui a une certaine importance en médecine traditionnelle, car des études indiquent qu’il a des effets cardioprotecteurs et hypotenseurs. En médecine anthroposophique, différentes préparations à base de gui sont utilisées pour traiter différentes maladies tumorales. En fonction de la tumeur, des préparations contenant du gui ayant poussé sur différents arbres hôtes sont utilisées. Peu de plantes médicinales font l’objet d’études dont les résultats sont aussi controversés. Alors que pour les uns, il n’y a pas la moindre évidence dans le traitement des tumeurs avec des préparations à base de gui [2], pour d’autres, notamment dans les milieux anthroposophiques, le gui représente une contribution importante et efficace au traitement des tumeurs [3].
Cœur, tension artérielle
Le gui a une longue tradition de médecine populaire dans plusieurs pays pour le traitement de l’insuffisance cardiaque légère et de l’hypertension artérielle [4]. Et déjà chez les Celtes, le gui était considéré comme sacré, surtout lorsqu’il poussait sur un chêne sacré pour les Celtes, ce qui est plutôt rare. C’est pourquoi elle n’était coupée qu’avec des faucilles en or et utilisée à des fins cultuelles.
Une étude pharmacologique publiée en 2014 s’est penchée sur les propriétés cardioprotectrices de Viscum album [5]. Des cœurs de rats isolés, chez lesquels une ischémie a été déclenchée expérimentalement, ont été traités avec de l’extrait de Viscum album avant et pendant l’ischémie et les résultats ont été comparés à ceux des cœurs non traités. L’étendue de l’infarctus sur les cœurs traités était significativement plus faible que sur les cœurs non traités (p<0,01). L’efficacité de l’extrait de gui dans le traitement de l’hypertension a été établie dans un essai clinique ouvert réalisé en 2014 [6]. Les patients présentant une pression artérielle systolique inférieure ou égale à 180 mmHg et une pression artérielle diastolique inférieure ou égale à 110 mmHg ont reçu dix gouttes de teinture mère de Viscum album trois fois par jour pendant douze semaines et aucun autre antihypertenseur. Les données de 42 patients ont pu être analysées. Après 12 semaines de traitement, la pression artérielle systolique a diminué en moyenne de 155,8 mmHg à 141,1 mmHg (p<0,001) et la pression artérielle diastolique de 84,4 mmHg à 79,5 mmHg (p<0,00177) par rapport à la ligne de base. Les résultats étaient donc significatifs.
Tumeurs
Les travaux sur les effets anti-tumoraux des préparations à base de gui pourraient remplir des bibliothèques et, comme nous l’avons déjà mentionné, les avis sont très controversés à ce sujet. Il semble difficile de démontrer une efficacité avec les règles actuelles des essais cliniques. C’est pourquoi de nombreux auteurs considèrent le traitement par le gui comme un simple traitement placebo [2]. Sans remettre en cause l’importance des essais cliniques, certains arguments soulignent la difficulté de faire dépendre l’efficacité des traitements au gui des résultats des études. C’est ce qu’a déclaré Markus Reif de l’IKF Berlin lors d’une présentation au 28e Congrès suisse de phytothérapie :
“La réalisation de nouveaux ECR souffre d’une part du fait que les extraits de gui ne peuvent pas vraiment être utilisés en aveugle par rapport à un placebo en raison de leurs effets secondaires locaux parfois importants, jusqu’à l’apparition desquels la dose de gui administrée est augmentée. D’autre part, les médecins et les patients sont peu enclins à participer à des études sur le gui. Les médecins qui soutiennent le traitement par le gui ne peuvent pas se permettre d’en priver leurs patients atteints d’une tumeur. Les patients qui refusent le traitement par le gui ne sont pas prêts à participer à un essai clinique randomisé” [7].
Dans cet exposé, Reif a également mentionné que l’utilisation d’extraits de gui depuis des décennies pour le traitement des maladies tumorales représente une quantité importante d’informations qui fournissent des indications sur le contrôle des symptômes des maladies tumorales, sur la compliance des patients, sur la qualité de vie, sur le déroulement des études et sur les avantages potentiels d’une approche thérapeutique globale.
Qualité de vie
Alors qu’auparavant, c’est-à-dire jusqu’à la fin des années 1980 environ, on discutait principalement de l’efficacité antitumorale des préparations à base de gui, en mettant l’accent sur la durée de survie et les rémissions, la qualité de vie a fait l’objet d’un intérêt croissant depuis 1990 environ. Lors du 21e Congrès suisse de phytothérapie, un exposé a porté sur la qualité de vie avec le traitement par le gui [8]. Dans ce contexte, le terme “qualité de vie”, souvent compris de différentes manières, est assimilé à la satisfaction d’un individu par rapport à sa situation physique, émotionnelle, spirituelle et sociale [9]. Il en résulte que les questionnaires multidimensionnels remplis par les patients concernés eux-mêmes sont plus fiables que les données fournies par les médecins ou le personnel infirmier. Dans son exposé, Melzer a présenté plusieurs études qui fournissent des données sur la qualité de vie des personnes atteintes d’un cancer et en a tiré des conclusions :
“Les études cliniques menées jusqu’à présent sur le traitement par le gui […] indiquent […] que les extraits de gui, en plus des traitements oncologiques […], peuvent améliorer la qualité de vie des patients atteints de cancer”.
Depuis, plusieurs études ont été publiées pour confirmer cette affirmation [10–13]. Bien sûr, il y a eu des études et des avis avec des résultats négatifs [14] – ou des voix qui ont souligné des lacunes dans les études positives [15].
Résumé
La mystérieuse plante médicinale Viscum album, le gui, est passée du statut de plante sacrée chez les Germains à celui de plante médicinale fréquemment utilisée et controversée. Son utilisation en médecine populaire pour la cardioprotection a fait l’objet d’études pharmacologiques. Une étude clinique pilote plaide en faveur d’un effet antihypertenseur.
Le gui est beaucoup plus répandu en oncologie, où les préparations correspondantes sont utilisées comme traitement anti-tumoral et aujourd’hui de plus en plus pour améliorer la qualité de vie. Les sceptiques des thérapies à base de gui font toujours remarquer que les résultats positifs proviennent principalement de professionnels bien disposés à l’égard du traitement à base de gui. Cependant, les résultats négatifs proviennent souvent de scientifiques qui ne connaissent pas suffisamment la phytothérapie – un dilemme bien connu de la phytothérapie. Une revue de la littérature existante, sans parti pris, plaide surtout en faveur d’une efficacité des traitements à base de gui dans le domaine de la qualité de vie des personnes atteintes de cancer.
Littérature :
- Société des médecins anthroposophes d’Allemagne (GAÄD). www.mistel-therapie.de
- de Giorgio A, Stebbing J : Mistletoe : for Cancer or just for Christmas ? Lancet Oncol 2013 ; 14(13) : 1264-1265.
- Kienle GS, Kiene H : Article de revue : Influence of Viscum album L (European mistletoe) extracts on quality of life in cancer patients : a systematic review of controlled clinical studies. Integrative Cancer Therapies 2010 ; 9(2) : 142-157.
- Carpernaros Z : The golden bough : le cas du mistlet. Eur J Herbal Med 1994 ; 1 : 19-24.
- Suveren E, et al. : Effets cardioprotecteurs des extraits de feuilles de Viscum album L. subsp. album (misletoe européen) dans l’ischémie myocardique et la reperfusion. J Ethnopharmacol 2017 ; 209 : 203-209.
- Poruthukaren KJ, et al : Evaluation clinique de la teinture mère de Viscum album comme antihypertenseur : une étude pilote. J Evid Based Complementary Altern Med 2014 ; 19(1) : 31-35.
- Reif M : Études de cohorte comme base pour des connaissances élargies de l’efficacité des préparations à base de plantes à l’exemple du gui. AM thema Phytotherapie 2014 ; 14 : 12-16.
- Melzer J : Qualité de vie et traitement par le gui en oncologie. AM thema Phytotherapie 2007 ; 7 : 2-4.
- Donelly S, et al : Quality of life measurement in the palliative management of advanced cancer. Support Care Cancer 2001 ; 9 : 361-365.
- Kienle GS, et al. : Traitement intraveineux par mistletoe dans les soins intégratifs du cancer : une étude qualitative explorant les procédures, les concepts et les observations des médecins experts. Evid Based Complement Alternat Med 2016 ; 2016 : 4628287.
- Tröger W, et al : Additional Therapy with a Mistletoe Product during Adjuvant Chemotherapy of Breast Cancer Patients Improves Quality of Life : An Open Randomized Clinical Pilot Trial. Evid Based Complement Alternat Med 2014 ; 2014 : 430518.
- Tröger W, et al : Quality of life of patients with advanced pancreatic cancer during treatment with mistletoe : a randomized controlled trial. Dtsch Arztebl Int 2014 ; 111(29-30) : 493-502.
- Kim KC, et al : Quality of life, immunomodulation and safety of adjuvant mistletoe treatment in patients with gastric carcinoma – a randomized, controlled pilot study. BMC Complement Altern Med 2012 ; 12 : 172.
- Evans M : Cancer Patients’ Experiences of Using Mistletoe (Viscum album) : A Qualitative Systematic Review and Synthesis. J Altern Complément Med 2016 ; 22 : 134-144.
- Shneerson C, et al : The effect of complementary and alternative medicine on the quality of life of cancer survivors : a systematic review and meta-analyses. Complement Ther Med 2013 ; 21 : 417-429.
PRATIQUE DU MÉDECIN DE FAMILLE 2018 ; 13(4) : 5-6