Le 11 janvier 2018, la 21e réunion annuelle de la Société suisse d’attaque cérébrale s’est tenue à Lausanne. Les vascularites, qui peuvent provoquer un accident vasculaire cérébral lorsqu’elles touchent le SNC, ont été un sujet important. Il n’existe pas de directives basées sur des preuves pour le traitement de la vascularite primaire du SNC – les études de cohorte et les recommandations des experts sont d’autant plus importantes.
Le Dr Grégoire Boulouis, neuroradiologue à l’hôpital Saint-Joseph, Paris, et à l’université Paris-Descartes, Paris (F), a donné des informations sur les causes et les diagnostics différentiels des différentes vascularites et sur la manière dont celles-ci, lorsqu’elles entraînent des complications neurologiques, se présentent à l’imagerie.
Vascularites et accident vasculaire cérébral
En principe, on distingue les vascularites infectieuses (tableau 1) des vascularites non infectieuses. Le plus souvent, elles apparaissent comme des manifestations secondaires de maladies systémiques telles que le lupus érythémateux, la sarcoïdose ou les tumeurs – souvent, le pronostic de ces maladies est mauvais lorsque le SNC est impliqué. Le risque d’accident vasculaire cérébral est particulièrement élevé dans le cas de l’artérite temporale à cellules géantes (maladie de Horton), qui touche principalement les personnes de plus de 50 ans et peut rapidement entraîner la cécité si elle n’est pas traitée. La vascularite de Takayasu, qui affecte l’aorte et les grosses artères qui en partent, est moins fréquente en Europe qu’en Asie. Les patients sont généralement âgés de moins de 40 ans et 10 à 20% d’entre eux présentent un accident vasculaire cérébral. Les autres causes de vascularite sont la radiothérapie (angiite due aux radiations) ou les angiites toxiques dues à la chimiothérapie ou à l’abus d’héroïne ou de cocaïne. Une forme rare est la vascularite primaire du SNC chez l’adulte (aPACNS), qui entraîne des lésions ischémiques chez 75% des patients. Ceux-ci sont multiples ou disséminés chez environ la moitié des patients. Le diagnostic ne peut être posé qu’après avoir exclu les diagnostics différentiels et au plus tôt après un suivi de six mois.
En principe, il faut toujours garder à l’esprit qu’un AVC peut être causé par une vascularite, surtout si la présentation des symptômes est inhabituelle, voire bizarre. Le diagnostic nécessite une imagerie IRM avec différents protocoles d’imagerie, qui représentent par exemple les signes d’inflammation intramuraux. “L’angiographie peut également fournir des indications sur le diagnostic, surtout si l’imagerie est négative mais qu’il existe une forte suspicion de vascularite”, a déclaré le Dr Boulouis. L’angiographie permet également de visualiser la sévérité des lésions vasculaires.
Traitement de la vascularite primaire du SNC
“Malheureusement, il n’y a pas beaucoup de preuves sur le traitement des patients atteints de vascularite primaire du SNC”, a regretté le Pr Mathieu Zuber, neurologue à l’hôpital Saint-Joseph, Paris, et à l’université Paris-Descartes, Paris (F). Pour les vascularites secondaires du SNC, le meilleur traitement consiste à traiter la maladie sous-jacente. En ce qui concerne le traitement des vascularites primaires du SNC, seules deux études de cohorte portant sur un grand nombre de patients ont été publiées au cours des dix dernières années (cohorte de la Mayo Clinic : n=163, cohorte française : n=97) [1,2]. La décision de savoir si, quand et quel traitement doit être prise individuellement pour chaque patient, en fonction de la probabilité du diagnostic de vascularite et des résultats du diagnostic. Le professeur Zuber a mentionné que, bien que les biopsies cérébrales soient rarement pratiquées de nos jours, il ne faut pas complètement oublier cette possibilité, car un traitement inapproprié pendant des semaines peut faire plus de mal au patient qu’une biopsie cérébrale. “La vascularite est un processus dynamique, il peut donc être très utile de répéter les mesures diagnostiques après quatre à six semaines”, a-t-il déclaré. Les facteurs de risque d’une évolution plus défavorable sont un âge plus élevé du patient, l’atteinte de gros vaisseaux et la présence d’un accident vasculaire cérébral – par rapport aux patients qui n’ont pas (encore) subi d’accident vasculaire cérébral. Le rehaussement en gadolinium des leptoméninges à l’IRM est un bon signe pronostique. L’enhancement indique une infection qui peut éventuellement être traitée de manière spécifique.
Les corticostéroïdes, éventuellement administrés initialement de manière pulsée, constituent le traitement de choix. Chez les patients qui ne reçoivent pas de stéroïdes, le risque de décès ou de séquelles graves est très élevé. La question de savoir si des immunosuppresseurs doivent être administrés en plus des stéroïdes est controversée. Dans la cohorte de la Mayo-Clinic, 49% des patients ont reçu des immunosuppresseurs, contre 84% dans la cohorte française. Certes, les taux de mortalité et de récidive étaient plus faibles dans la cohorte française, mais l’orateur a souligné que les deux études ne pouvaient pas être comparées directement.
Autrefois, l’immunosuppression consistait essentiellement en l’administration de méthotrexate, mais on dispose aujourd’hui de médicaments mieux tolérés, tels que le cyclophosphamide (Endoxan®) et le rituximab (Mabthera®) (fig. 1). Le traitement d’induction par stéroïdes et éventuellement par immunosuppresseurs dure de quatre à six mois. On ne sait pas si un traitement d’entretien doit être administré, ni pendant combien de temps. Dans la cohorte française, 49% des patients ont reçu un traitement d’entretien (le plus souvent de l’azathioprine), en moyenne pendant deux ans (fourchette : 6-72 mois). Parmi les patients ayant reçu un traitement d’entretien, 22% ont rechuté, contre 45% chez les patients n’ayant pas reçu de traitement d’entretien. “Étant donné qu’il y a tant de questions en suspens concernant le traitement de cette maladie, des essais contrôlés randomisés seraient particulièrement importants”, a conclu le professeur Zuber.
Traitement aigu de l’AVC – gestion préhospitalière
Le professeur Urs Fischer, co-directeur du Stroke-Center de l’Hôpital de l’Île à Berne, a expliqué les directives de la thérapie des AVC en 2018 :
- Le principe “Time is Brain” est toujours d’actualité : les patients doivent être traités le plus rapidement et le plus efficacement possible.
- Les patients présentant une occlusion d’un gros vaisseau (LVO, large vessel occlusion) doivent être transférés immédiatement dans un centre d’AVC, où un traitement endovasculaire (EVT) est possible.
- Les patients sans occlusion d’un gros vaisseau doivent être transférés immédiatement dans un centre où une thrombolyse (IVT) peut être réalisée.
Il existe différents scores qui permettent de déterminer la probabilité d’un LVO sur la base de critères cliniques, mais lorsque la spécificité est élevée, la sensibilité de ces scores est faible et inversement. “En outre, l’évolution d’un accident vasculaire cérébral est souvent dynamique”, a rappelé le professeur Fischer. “Les critères cliniques peuvent changer en quelques minutes”.
Il existe différentes stratégies pour que le patient accède le plus rapidement possible à un traitement spécifique. Les unités mobiles de soins intensifs sont certes très efficaces, mais elles ne peuvent être utilisées de manière réellement efficace que dans les grandes villes. Dans le modèle “drip and drive”, l’intervenant se rend chez le patient en périphérie – ce modèle est par exemple pratiqué à Hambourg. Deux autres modèles sont réalistes pour la Suisse : le modèle “Drip and ship”, dans lequel le patient reçoit une TIV dans un hôpital périphérique et est ensuite transféré dans le centre Stroke pour la TEV, et le modèle “Mothership”, dans lequel le patient est amené directement dans le centre Stroke. Les deux modèles présentent des avantages et des inconvénients importants et, pour l’instant, il n’existe pas de preuves permettant de déterminer quelle option permet d’obtenir de meilleurs résultats pour les patients (tableau 2).
Source : 21e réunion annuelle de la Société suisse d’attaque cérébrale, 11 janvier 2018 à Lausanne.
- Vascularite et accident vasculaire cérébral : causes, diagnostic différentiel par imagerie (Dr Grégoire Boulouis) ; Traitements aigus et chroniques (Prof. Mathieu Zuber)
- Prise en charge des accidents vasculaires cérébraux hyperactifs : nouveaux modèles préhospitaliers pour la Suisse (Prof. Dr. med. Urs Fischer)
Littérature :
- Salvarani C, et al : Adult primary central nervous system vasculitis treatment and course : analysis of one hundred sixty-three patients. Arthritis Rheumatol 2015 ; 67(6) : 1637-1645.
- de Boysson H, et al : Adult primary angiitis of the central nervous system : isolated small-vessel vasculitis represents distinct disease pattern. Rheumatology (Oxford) 2017 Mar 1 ; 56(3) : 439-444.
InFo NEUROLOGIE & PSYCHIATRIE 2018 ; 16(1) : 46-48