Les patients souffrant d’embolie pulmonaire doivent être sous anticoagulation pendant au moins trois mois. Avant de commencer un traitement, plusieurs considérations doivent être prises en compte : Quel est l’anticoagulant le plus approprié pour ce patient, sur quelle période doit porter la durée de l’anticoagulation ? Et quel est le rapport bénéfice/risque ?
L’embolie pulmonaire aiguë est considérée comme la manifestation la plus grave de la thromboembolie veineuse (TEV). Pour la phase aiguë et la phase de maintien, l’objectif du traitement antithrombotique est d’empêcher la progression de la thrombose et de dissoudre le matériel thrombotique. Dans la phase initiale, la routine clinique est généralement effectuée par voie parentérale à l’aide d’héparine non fractionnée (HNF), d’héparines de bas poids moléculaire (HBPM) et de fondaparinux.
Phase initiale
Les héparines de bas poids moléculaire et le fondaparinux sont des traitements de choix pour l’anticoagulation parentérale initiale des patients qui ne sont pas considérés comme à haut risque. Comparés à l’HNF, l’HNM et le fondaparinux présentent des avantages en termes d’efficacité, de sécurité et de praticité, par exemple un taux de principe actif plus stable et donc un effet anticoagulant, une efficacité accrue, un risque réduit de saignements graves ou de thrombocytopénie induite par l’héparine (TIH), ainsi qu’une voie d’administration plus simple grâce à une injection sous-cutanée 1 à 2 fois par jour. Ces avantages l’emportent sur l’inconvénient d’un début d’action légèrement plus lent. Une alternative à l’anticoagulation parentérale est le traitement par les inhibiteurs oraux du facteur Xa, apixaban et rivaroxaban, chez les patients qui ne sont pas à haut risque.
En revanche, la situation est différente pour les patients qui sont hémodynamiquement instables et qui présentent un risque très élevé d’embolie. Matthias Ebner et Dr. Mareike Lankeit de la Charité – Universitätsmedizin Berlin (D) [1]. Les patients atteints d’embolie pulmonaire hémodynamiquement instables seraient donc particulièrement menacés par un taux de létalité élevé au cours des premières heures. Selon les chercheurs, l’administration intraveineuse d’HNF en bolus (généralement 5000 UI) est supérieure aux alternatives sous-cutanées que sont l’HNM et le fondaparinux. Surtout s’il existe une centralisation avec une diminution de la perfusion tissulaire en cas de choc obstructif. Ils recommandent ensuite une perfusion continue initiale de 1000 UI par heure avec pour objectif un allongement de 1,5 à 2,5 fois du temps de thromboplastine partielle (aPTT).
Phase aiguë et phase de maintien
Les antagonistes de la vitamine K (AVK) ont longtemps été les produits les plus utilisés pour l’anticoagulation thérapeutique. Cependant, ils sont limités par des facteurs tels que leur fenêtre thérapeutique étroite, les interactions médicamenteuses et alimentaires et la nécessité d’adapter la dose, y compris le monitoring (mesure de l’INR). Les anticoagulants oraux non dépendants de la vitamine K (NOAK), qui comprennent le dabigatran, l’apixaban, l’edoxaban et le rivaroxaban, constituent une alternative aux AVK. En 2019, l’European Society of Cardiology (ESC), en collaboration avec l’European Respiratory Society (ERS), a publié ses nouvelles lignes directrices selon lesquelles les NOAK doivent être préférés aux AVK pour l’anticoagulation orale des patients souffrant d’embolie pulmonaire (en l’absence de contre-indications). Les contre-indications aux NOAK incluent l’insuffisance rénale sévère, la fonction hépatique réduite, la grossesse ou l’allaitement et le syndrome des antiphospholipides.
Actuellement, différentes stratégies sont disponibles pour le traitement de l’anticoagulation orale des patients atteints d’embolie pulmonaire, écrivent le Dr Ebner et le Dr Lankeit : le régime “traditionnel” consiste en une double anticoagulation chevauchante avec NMH et un passage chevauchant à un AVK (objectif INR 2,0-3,0). Il existe également une bithérapie séquentielle avec initialement une HNM pendant au moins 5 jours, suivie d’un changement de traitement par le dabigatran ou l’edoxaban (à dose d’entretien) et d’une monothérapie par le rivaroxaban ou l’apixaban (à une dose plus élevée au départ). Selon les experts, une réduction de la dose de NOAK ne devrait être effectuée qu’après un examen critique et de manière restrictive au cours des 6 premiers mois suivant une embolie pulmonaire. Chez les patients atteints d’embolie pulmonaire qui ont également un cancer, l’anticoagulation doit être poursuivie jusqu’à ce que le cancer soit considéré comme guéri.
Prophylaxie secondaire
La prophylaxie secondaire vise à prévenir une nouvelle thromboembolie. Dans le guide ESC 2019 [2], les patients atteints d’embolie pulmonaire sont classés en 3 groupes en fonction du risque de récidive. Groupes répartis (Fig.1). En conséquence, chez les patients qui présentaient un facteur de risque transitoire/réversible important lors de la survenue de l’embolie pulmonaire (par exemple, une opération de remplacement de la hanche ou du genou ou un traumatisme avec fracture), le risque de récidive peut être considéré comme faible, de sorte que l’anticoagulation peut être arrêtée après 3 mois. Les patients qui présentent un risque moyen de récidive et pour lesquels la poursuite de l’anticoagulation est envisagée pour une durée indéterminée (avec évaluation régulière du rapport bénéfice/risque) sont ceux qui présentent soit un facteur de risque transitoire/réversible faible (par ex. intervention chirurgicale mineure, vol long courrier), soit un facteur de risque persistant faible (par ex. maladies auto-immunes actives, maladies inflammatoires chroniques de l’intestin), soit ceux pour lesquels aucun facteur déclenchant n’est identifiable. Les patients présentant un risque élevé de récidive et pour lesquels une anticoagulation permanente est recommandée ont un facteur de risque persistant important (par exemple, un cancer actif, un syndrome des antiphospholipides ou des épisodes récurrents de TEV qui ne peuvent pas être expliqués par des facteurs de risque transitoires importants).
Littérature :
- Ebner M, Lankeit M : Traitement antithrombotique de l’embolie pulmonaire. DMW – Deutsche Medizinische Wochenschrift 2020 ; 145(14) : 970-977 ; doi : 10.1055/a-0955-3379.
- Konstantinides SV, Meyer G, Becattini C, et al : 2019 ESC Guidelines for the diagnosis and management of acute pulmonary embolism developed in collaboration with the European Respiratory Society (ERS). Eur Heart J 2019 ; doi : 10.1093/eurheartj/ehz405.
InFo PNEUMOLOGIE & ALLERGOLOGIE 2021 ; 3(1) : 39-40