De nombreuses études empiriques confirment qu’il existe une relation de cause à effet entre des taux élevés de LDL-cholestérol et des événements cardiaques. La devise actuelle concernant la réduction du cholestérol LDL est “The lower, the better”. Dans les lignes directrices actuelles sur la dyslipidémie de l’ESC/EAS, les valeurs cibles ont été considérablement revues à la baisse pour certains groupes à haut risque. Si le traitement par statine ne suffit pas, l’ézétimibe ou les inhibiteurs de PCSK9 peuvent être ajoutés.
Les maladies cardiovasculaires sont la deuxième cause de mortalité en Suisse. Les taux élevés de cholestérol LDL (LDL-C, “low density lipoprotein cholesterol”) représentent, avec l’hypertension, l’un des principaux facteurs de risque sur lesquels il est possible d’agir. L’hypercholestérolémie congénitale est associée à un risque plus élevé que l’hypercholestérolémie acquise plus tard dans la vie [1]. C’est pourquoi, par analogie avec les “pack years” des fumeurs, la notion de “LDL-cholestérol years” a été introduite. L’objectif d’un traitement hypolipémiant est de réduire au maximum le risque d’événements cardiovasculaires. De nouvelles études montrent que plus le LDL-C est bas, plus le risque cardiovasculaire est faible. Il n’y a donc pas de limite inférieure de concentration de LDL-C en dessous de laquelle le risque cardiovasculaire ne diminue pas davantage. Cela a été pris en compte dans les lignes directrices ESC/EAS révisées en 2019, les recommandations des experts se concentrant sur les patients à haut risque [1]. Le professeur Franz R. Eberli, médecin-chef en cardiologie, Stadtspital Waid et Triemli, Zurich, a donné un aperçu actuel des points les plus importants.
ESC-SCORE pour la stratification des risques
L’ESC-SCORE (“systematic coronary risk estimation”) pour la stratification du risque cardiovasculaire est disponible sous forme d’outil en ligne et de tableau de score et indique le risque absolu sur 10 ans, en pourcentage, d’un événement athérosclérotique mortel (y compris la mort subite d’origine cardiaque) [8 .9]. Les valeurs cibles de LDL-cholestérol pour les patients à très haut risque ont été ajustées à <1,4 mmol/l et ≥50% de réduction (tableau 1) [1]. Cet objectif thérapeutique est le plus facilement atteignable par l’ézétimibe ou les anticorps anti-PCSK9 en tant qu’add-on au traitement par statine, comme le montrent les preuves scientifiques actuelles. Les statines restent toutefois très importantes pour la gestion des lipides.
Les statines restent le premier choix
Un traitement par statine réduit la synthèse du cholestérol en inhibant l’HMG-CoA réductase [10]. L’intensité de la réduction du LDL varie en fonction de la statine, du dosage et de la prédisposition génétique. Les statines puissantes sont l’atorvastatine, la rosuvastatine et la pitavastatine. Toutes les statines, sauf la pravastatine, la rosuvastatine et la pitavastatine, sont métabolisées au niveau hépatique par des enzymes de la famille des cytochromes P450 [10]. En cas d’interactions médicamenteuses ou de contre-indications, il est recommandé de réduire la dose ou d’utiliser une autre statine. En cas d’intolérance aux statines caractérisée par une myopathie, il est utile d’essayer un traitement par pravastatine ou fluvastatine à faible dose.
L’association avec l’ézétimibe présente un bénéfice supplémentaire fondé sur des données probantes
L’ézétimibe inhibe l’absorption du cholestérol par l’intestin. Des études ont démontré le bénéfice supplémentaire de l’ézétimibe associé au traitement par statine par rapport à la monothérapie par statine chez les patients à haut risque. Par exemple, l’étude IMPROVE-IT a montré que l’ézétimibe 10 mg/d en plus du traitement par statine 40 mg/d chez les patients atteints de syndrome coronarien aigu réduisait davantage le taux d’événements cardiovasculaires que la monothérapie par statine, sans pour autant augmenter le taux d’événements indésirables [2,3]. “Il est logique que si vous n’atteignez pas la valeur cible avec les statines, vous ajoutiez l’ézétimibe”, résume le professeur Eberli [4]. Cela s’applique aux patients qui ont eu une maladie coronarienne cliniquement manifeste ou un accident vasculaire cérébral. L’association statine plus ézétimibe est généralement associée non seulement à un bénéfice supplémentaire en termes de réduction des lipides, mais aussi à moins d’effets secondaires qu’une augmentation supplémentaire de la dose de statine. En cas de taux élevés de LDL-C (>3,9 mmol/l), il est recommandé de traiter en premier lieu avec une préparation combinée.
Anticorps PCSK9 comme option add-on alternative
Si le traitement combiné ézétimibe plus statines ne permet pas d’atteindre la valeur cible, un anticorps anti-PCSK9 doit être envisagé comme alternative complémentaire. Les inhibiteurs de PCSK9 sont des agents qui entraînent une inhibition de la formation des récepteurs LDL au niveau du foie. Cependant, les limites imposées par l’Office fédéral de la santé publique ne permettent pas actuellement en Suisse une application 1:1 des recommandations ESC/EAS pour la prescription d’inhibiteurs de PCSK9 [1]. Pour l’évolocumab et l’alirocumab, la prise en charge par l’assurance maladie n’intervient que si les valeurs de LDL-C suivantes ne peuvent pas être atteintes pendant au moins trois mois avec la dose maximale tolérée d’un traitement intensif visant à réduire le LDL-C avec au moins deux statines différentes avec ou sans ézétimibe (ou ézétimibe avec ou sans autre hypolipémiant en cas d’intolérance aux statines) : en prévention secondaire après un événement cardiovasculaire ischémique cliniquement manifeste et lié à l’athérosclérose LDL-C >2,6 mmol/l. En prévention primaire LDL-C >5,0 mmol/L en cas d’hypercholestérolémie familiale hétérozygote ou homozygote ;
LDL-C >4,5 mmol/L chez les adultes présentant une hypercholestérolémie familiale hétérozygote sévère avec au moins un des facteurs de risque supplémentaires suivants : diabète sucré, lipoprotéine (a) >50 mg/dL ou >120 nmol/L et une hypertension artérielle marquée.
L’étude FOURIER a démontré que l’évolocumab, en plus du traitement standard, avait un effet bénéfique sur les événements cardiovasculaires futurs chez les patients atteints d’une maladie coronarienne stable [5]. Et dans l’étude ODYSSEY, l’alirocumab a entraîné une réduction de 15% des infarctus du myocarde, des attaques cérébrales, de l’angor instable et des décès d’origine cardiovasculaire en plus du traitement maximal par statine. [6]. La réduction du LDL-C par les inhibiteurs de PCSK9 dépend du niveau de départ, explique le professeur Eberli. Plus le LDL-C peut être abaissé avec les statines, plus il est probable que l’ajout d’un inhibiteur de PCSK9 permette d’atteindre la valeur cible.
Source : FomF Médecine générale et interne
Littérature :
- Riesen WF, et al. : Un aperçu commenté de l’AGLA. Nouvelles lignes directrices ESC/EAS sur les dyslipidémies. Swiss Med Forum 2020 ; 20(0910) : 140-148.
- Giugliano RP, et al. (IMPROVE-IT) : Circulation 2018 (10) ; 137(15) : 1571-1582.
- DGK : Réduction intensive des lipides avec statine plus ézétimibe : qui en profite particulièrement, 29 juillet 2019, www.kardiologie.org
- Eberli FR : Thérapie lipidique 2020. Franz R. Eberli, FOMF 23-27.6.20.
- Sabatine MS, et al. (FOURIER) : Evolocumab and Clinical Outcomes in Patients with Cardiovascular Disease. NEJM 2017 ; 376(18) : 1713-1722.
- Lüscher TF, et al : Gestion moderne des lipides. Cardiovasc Med 2020 ; 23:w02102. DOI: https://doi.org/10.4414/cvm.2020.02102
- Weingärtner O, et al. : Commentaire sur les lignes directrices (2019) de l’ESC/EAS sur le diagnostic et le traitement des dyslipidémies. Le cardiologue 2020 ; 14 : 256-266.
- EAPC : HeartScore, www.heartscore.org
- ESC : SCORE : Carte européenne des risques élevés, www.escardio.org/static_file/Escardio/Subspecialty/EACPR/Documents/score-charts.pdf
- Medix : Guideline : Hyperlipidémie, dernière révision : 07/2020, www.medix.ch
HAUSARZT PRAXIS 2021 ; 16(2) : 18-19 (publié le 19.2.21, ahead of print)