Les scientifiques ont récemment démontré que des variantes héréditaires rares de SLC32A1, un gène codant pour le transporteur vésiculaire de l’acide gamma-aminobutyrique, peuvent provoquer des épilepsies génétiques accompagnées de convulsions fébriles. La question s’est alors posée de savoir si ces gènes mal codés pouvaient également être responsables d’une encéphalopathie épileptique.
Les membres de la famille des protéines SLC (Solute Carrier) transportent une grande variété de substrats, les acides aminés étant les plus courants. Pour le SCL32A1, il a été démontré qu’il transporte l’acide gamma-aminobutyrique (GABA) et la glycine dans les vésicules synaptiques (SVs). C’est pourquoi il est également appelé transporteur vésiculaire de GABA (VGAT) ou transporteur vésiculaire inhibiteur d’acides aminés (VIAAT). Le GABA est un neurotransmetteur inhibiteur important qui joue un rôle essentiel dans le bon fonctionnement du cerveau mature. Avec la glycine, le GABA agit également comme un neurotransmetteur inhibiteur dans la moelle épinière et le tronc cérébral. Étant donné qu’une perturbation de la neurotransmission GABA-ergique est une cause établie d’épilepsie et de troubles du développement neurologique, une fonction VGAT perturbée constitue une cause plausible d’encéphalopathie développementale et épileptique (DEE) [1]. Récemment, des variants Missense hétérozygotes rares dans SLC32A1 ont été décrits et isolés dans des familles présentant un phénotype d’épilepsie génétique avec convulsions fébriles plus (GEFS+) et d’épilepsie généralisée idiopathique [2]. Les membres de la famille affectés présentaient un large éventail de formes de crises – par exemple, des crises fébriles, des crises focales, des crises généralisées et des crises non classées, mais pas de retard de développement (DD) ou de déficience intellectuelle (ID). Une étude a maintenant montré la causalité des variantes par modélisation in silico et leur évaluation fonctionnelle dans un modèle de culture cellulaire neuronale [3].
Quatre cas de patients sous la loupe
Le séquençage de l’exome a permis d’identifier quatre personnes atteintes d’une encéphalopathie développementale et épileptique et présentant des variants de Missense de novo dans SLC32A1. Pour évaluer la causalité, une évaluation fonctionnelle des variants identifiés a également été réalisée dans un modèle de culture cellulaire neuronale de souris. Les résultats ont montré un retard global de développement et un retard mental modéré à sévère chez les quatre patients. Les crises ont commencé à l’âge de 4 mois et 1 mois respectivement pour les personnes 1 et 4 et au début de la petite enfance pour les personnes 2 et 3 (à l’âge de 15 mois et 18 mois respectivement). Les individus 1 et 4 présentaient initialement des troubles de la conscience focaux et focalisés, tandis que les individus 2 et 3 étaient dominés par des crises tonico-cloniques généralisées. En outre, la personne a présenté 2 crises myocloniques et un état de mal épileptique avec suspicion d’épilepsie atonique myoclonique. Elle a également présenté des crises focales avec des troubles de la conscience. Malgré la sémiologie initiale des crises focales de la personne 4, cette personne a ensuite développé une épilepsie généralisée avec des crises atoniques généralisées, des crises myocloniques et des crises tonico-cloniques généralisées, ainsi qu’une myoclonie des paupières.
Au cours de l’évolution de l’épilepsie, les quatre personnes ont connu au moins quelques périodes prolongées d’absence de crises. Pendant les périodes où les crises s’intensifiaient, toutes les personnes ont connu des périodes de ralentissement du développement et aussi de régression. Les quatre variants de novo de SLC32A1 identifiés dans cette étude comprenaient des modifications de type missense.
Un modèle de souris pour en savoir plus
Pour étudier les effets des quatre variantes de VGAT sur la neurotransmission inhibitrice, des constructions lentivirales de chaque variante ont été exprimées dans des neurones striataux GABAergiques de souris en culture en micro-îlots. Les neurones individuels qui se développent sur des micro-îlots d’astrocytes ne font de synapses qu’avec eux-mêmes. Les dérivations électrophysiologiques de ces neurones autaptiques isolés permettent d’analyser en détail la neurotransmission des neurones individuels dans des conditions définies et sont idéales pour les analyses structure-fonction des protéines synaptiques. Le VGAT humain et murin présente une identité de 98,5% au niveau des acides aminés.
La modélisation in silico et les analyses fonctionnelles ont montré que trois des variants situés dans les hélices entraînent une réduction de la taille quantique, associée à un remplissage altéré des vésicules synaptiques par le GABA. Le quatrième variant, situé à l’extrémité N-terminale de l’acide gamma-aminobutyrique vésiculaire, n’a pas d’effet sur la taille quantique, mais augmente la probabilité de libération présynaptique, ce qui entraîne une dépression synaptique plus importante lors d’une stimulation à haute fréquence.
Ainsi, les variants de l’acide gamma-aminobutyrique vésiculaire peuvent affecter la neurotransmission GABA-ergique par au moins deux mécanismes – celui du remplissage des vésicules synaptiques et celui de l’altération de la plasticité synaptique à court terme. Cela a permis de détecter des variants Missense de novo dans SLC32A1 comme cause d’une encéphalopathie développementale et épileptique.
Littérature :
- Maljevic S, Møller RS, Reid CA, et al : Spectrum of GABAA receptor variants in epilepsy. Curr Opin Neurol 2019 ; 32 : 183-190.
- Heron SE, Regan BM, Harris RV, et al : Association of SLC32A1 missense variants with genetic epilepsy with febrile seizures plus. Neurology 2021 ; 96 : e2251-e2260.
- Platzer K, Sticht H, Bupp C, et al : De Novo Missense Variants in SLC32A1 Cause a Developmental and Epileptic Encephalopathy Due to Impaired GABAergic Neurotransmission. Ann Neurol 2022 ; 92 : 958-973.
InFo NEUROLOGIE & PSYCHIATRIE 2023 ; 21(2) : 32