Plus de 300 médecins et chercheurs de 40 pays se sont réunis à Copenhague du 7 au 11 juin 2014 pour le congrès de l’European Academy of Allergy and Clinical Immunology. Outre les activités de formation continue et la présentation des résultats de la recherche, le congrès a également été l’occasion de présenter le “Global Atlas of Allergy”, un document complet sur l’importance des maladies allergiques dans le monde.
(ee) Les maladies allergiques sont devenues une véritable épidémie : Dans certains pays, plus de la moitié de la population est déjà sensibilisée. C’est pourquoi les allergies constituent aujourd’hui un problème de santé publique mondial. L’Académie européenne d’allergologie et d’immunologie clinique (EAACI) a lancé un appel à toutes les grandes institutions du monde pour qu’elles créent un atlas mondial des allergies. Le document a été présenté lors du congrès annuel de l’EAACI 2014 (Fig. 1). Rédigé par les 170 principaux leaders d’opinion, l’atlas couvre tous les aspects des maladies allergiques, des prédispositions génétiques au diagnostic, au traitement et à la prévention, en passant par les mécanismes, les facteurs de risque et l’épidémiologie. Il introduit le nouveau concept d’une stratégie mondiale globale contre l’épidémie d’allergies, qui comprend des actions coordonnées de différentes institutions.
Ce document met en lumière les difficultés liées à la gestion des maladies allergiques. De nombreux pays en développement sont particulièrement touchés par ces problèmes en raison de l’insuffisance des soins médicaux, de l’hétérogénéité de la population et de l’absence de programmes de formation continue pour les prestataires de soins et les patients. De plus, la liste des médicaments obligatoires de l’Organisation mondiale de la santé ne comprend que peu de médicaments pour le traitement des maladies allergiques et l’immunothérapie allergénique (la seule possibilité d’intervention qui modifie l’évolution naturelle des allergies) est mentionnée comme étant d’un accès limité. Il souligne également la nécessité d’optimiser la formation continue sur les allergies et leur traitement. Les éditeurs sont notamment suisses (Cezmi A. Akdis, Institut suisse de recherche sur les allergies et l’asthme, Université de Zurich, et Christine Kühne, Centre de recherche sur les allergies et l’asthme, Davos). L’Atlas mondial peut être téléchargé en format PDF sur le site web de l’EAACI : www.eaaci.org/globalatlas/GlobalAtlasAllergy.pdf.
Parents fumeurs – enfants allergiques
Dans une étude suédoise présentée au congrès de l’EAACI, les auteurs ont examiné le lien entre le tabagisme passif pré- et postnatal des enfants et leur risque de maladies allergiques [1]. 4090 enfants ont été suivis pendant 16 ans. Pendant cette période, les parents ont été interrogés à plusieurs reprises sur leurs habitudes tabagiques et les facteurs liés au mode de vie, ainsi que sur les symptômes allergiques chez les enfants. Les enfants exposés à la fumée de tabac in utero avaient un risque accru de développer de l’asthme avant l’âge de 16 ans (OR : 1,45, IC à 95% : 1,15-1,83) ; leur risque de rhinite allergique ou de dermatite atopique n’était pas augmenté. Les enfants exposés au tabagisme passif pendant leur enfance ont vu leur risque d’asthme (OR : 1,23 ; IC à 95% : 1,01-1,51), de rhinite (OR : 1,18 ; IC à 95% : 1,01-1,39) et d’eczéma (OR : 1,26 ; IC à 95% : 1,09-1,45) augmenter. Un modèle dose-dépendant a été mis en évidence. Le risque d’asthme et de rhinite était surtout accru dans la petite enfance, et le risque de dermatite atopique chez les enfants plus âgés.
Ambrosia artemisiifolia : nouvel allergène
Les allergies au pollen d’Ambrosia artemisiifolia se répandent rapidement en Europe centrale et en Amérique du Nord. Jusqu’à présent, Amb-a-1 était le seul allergène identifié. Un groupe de chercheurs français vient de découvrir un nouvel allergène (Amb-a-11) [2]. 54% des personnes allergiques à l’ambroisie testées avaient produit des IgE contre cet allergène. Le remodelage moléculaire a révélé une forte homologie structurelle avec les protéases à cystéine connues comme allergènes, par exemple l’allergène Der-p-1 des acariens de la poussière de maison. L’allergène a été officiellement enregistré comme Amb-a-11 par l’OMS et l’Union internationale des sociétés d’immunologie (WHO/IUIS)(www.allergen.org). Les auteurs estiment que l’Amb-a-11 a une grande valeur diagnostique et thérapeutique.
Enfants asthmatiques : réduction de la fonction pulmonaire au cours des trois premières années de vie
La résistance accrue dans les voies respiratoires chez les enfants asthmatiques semble se développer avant l’âge scolaire. Une connaissance approfondie du moment où la fonction pulmonaire se détériore est essentielle pour développer des mesures préventives. Mais comme il est difficile de mesurer la fonction pulmonaire chez les enfants d’âge préscolaire, on sait encore peu de choses à ce sujet. Une étude prospective menée à Copenhague a inclus 411 enfants présentant un risque élevé de maladies allergiques [3]. Entre trois et sept ans, ces enfants ont subi une body-pletysmographie tous les six mois. En outre, la fonction pulmonaire à l’âge de quatre semaines, l’exposition à la fumée de tabac (test capillaire) et les sensibilisations éventuelles ont été enregistrées et testées.
Les facteurs de risque d’une résistance accrue dans les voies respiratoires étaient le sexe masculin, des niveaux élevés de nicotine dans les cheveux et des variantes des gènes ORMDL3 et FLG. Aucune association significative n’a été observée avec les sensibilisations ou la dermatite atopique. Les enfants qui souffraient d’asthme à l’âge de sept ans présentaient déjà une résistance accrue des voies respiratoires à l’âge de trois ans, qui n’a pas progressé au cours des années suivantes. Ces résultats indiquent que la résistance des voies respiratoires des enfants asthmatiques augmente dès les trois premières années de leur vie – les trois premières années sont donc critiques en termes de réduction de la fonction pulmonaire.
Les produits de médecine complémentaire ne sont pas toujours inoffensifs
Les produits de médecine complémentaire et alternative (CAM) sont très populaires. Mais la qualité des préparations n’est pas toujours au-dessus de tout soupçon. Une étude canadienne a examiné des produits achetés dans des herboristeries et des pharmacies locales à Vancouver (Canada), Hong Kong (Chine) et Taipei (Taiwan) [4]. Plusieurs produits contenaient des substances pharmaceutiques actives, comme la caféine, dont le dosage dépassait les recommandations des autorités sanitaires nationales, ou la phénazone, qui peut provoquer de nombreuses interactions ainsi que des réactions allergiques. Un produit contenait des principes actifs pharmaceutiques qui n’étaient mentionnés qu’en japonais sur l’emballage – le vendeur ne pouvait pas donner d’informations sur les principes actifs et n’était pas non plus en mesure de traduire les indications en japonais. Les auteurs de l’étude appellent à une réglementation plus stricte des produits de CAM, car ils présentent également un risque d’interactions, d’effets secondaires, de surdosage et de réactions allergiques, en particulier lorsqu’ils contiennent des principes actifs pharmaceutiques inconnus.
Prévention de l’atopie chez les jeunes enfants
Cette étude prospective, randomisée, en double aveugle et contrôlée par placebo menée au Royaume-Uni a cherché à déterminer si l’exposition orale à un allergène d’acarien de poussière de maison dans la petite enfance réduisait le risque de développer une allergie [5]. 111 jeunes enfants ont été recrutés, tous présentant un risque génétique élevé d’atopie (≥2 proches parents souffrant d’asthme, de rhinite allergique ou de dermatite atopique). Au moment du recrutement, les prick-tests étaient négatifs chez les enfants. Entre 6 et 18 mois, les enfants ont reçu deux fois par jour par voie orale un extrait actif d’allergène d’acarien de poussière de maison (HDM) ou un placebo. Ils ont été suivis tous les trois mois. Dans le groupe d’intervention, une réduction significative et cliniquement importante de la sensibilisation cumulée aux allergènes en général a été observée. Aucune différence n’a été observée entre les deux groupes en ce qui concerne la sensibilisation aux HDM. Les symptômes cliniques tels que l’eczéma ou la rhinoconjonctivite étaient également présents avec la même fréquence dans les deux groupes. L’extrait était bien toléré. Les auteurs concluent que l’immunothérapie HDM à haute dose pendant la petite enfance est efficace pour prévenir le développement de l’atopie chez les enfants à haut risque génétique.
Source : Congrès de l’Académie européenne d’allergologie et d’immunologie clinique, 7-11 juin 2014, Copenhague
Littérature :
- Thacher J, et al. : Exposition pré- et postnatale au tabagisme parental et aux maladies allergiques jusqu’à l’adolescence. Abs. 1257.
- Nony E, et al. : Identification et caractérisation d’Amb a 11, un nouvel allergène majeur issu du pollen de l’ambroisie à feuilles courtes (Ambrosia artemisiifolia). Abs. 13.
- Bonnelyke K, et al : Les 3 premières années de la vie sont critiques pour la perte de fonction pulmonaire associée à l’asthme. Abs. 303.
- Wong HC : Potential adverse reaction from complementary and alternative medicine (CAM) containing pharmaceutical products purchased locally and overseas. Abs. 1009.
- Zolkipli Z, et al : Essai contrôlé randomisé de prévention primaire de l’atopie en utilisant l’immunothérapie orale contre les allergènes de poussière de maison dans la petite enfance. Abs. 1623.
DERMATOLOGIE PRATIQUE 2014 ; 24(4) : 40-42