Les pneumopathies interstitielles (PID) constituent un groupe hétérogène de maladies présentant des manifestations cliniques, radiologiques, physiologiques et pathologiques similaires. Une anamnèse complète est essentielle. Les principaux symptômes sont une dyspnée progressive, une toux (sèche) et divers signes extrapulmonaires. Les résultats cliniques typiques sont la sclérose, le clubbing et les signes d’une maladie rhumatologique sous-jacente. Il existe des schémas radiologiques typiques en radiographie thoracique et en tomodensitométrie à haute résolution. Le bilan comprend une évaluation cardiaque, la mesure des volumes pulmonaires, de la capacité de diffusion et des échanges gazeux, une bronchoscopie avec lavage broncho-alvéolaire et, si nécessaire, une biopsie pulmonaire. Une discussion interdisciplinaire entre pneumologues, rhumatologues, radiologues et pathologistes (ILD board) est fortement recommandée. Les nouvelles options thérapeutiques de la fibrose pulmonaire idiopathique sont la pirfénidone et le nintédanib.
Les maladies interstitielles pulmonaires (MIP) regroupent un grand nombre d’affections du parenchyme pulmonaire d’étiologies diverses ou inconnues. Un terme utilisé comme synonyme dans la littérature est “pneumopathie parenchymateuse diffuse” (DPLD). L’ILD peut être divisée en quatre groupes principaux :
- ILD avec cause connue
- Pneumonie interstitielle idiopathique (PII)
- Maladies granulomateuses
- Autres ILD
ILD avec cause connue
Le groupe des ILD dont la cause est connue comprend par exemple les ILD induites par les médicaments (drug induced respiratory disease, DIRD), les ILD associées aux rhumatismes (par exemple en cas de polyarthrite rhumatoïde), les pneumoconioses ou les pneumonies d’hypersensibilité (alvéolite allergique exogène, EAA).
Pneumonie interstitielle idiopathique (PII)
Le groupe des IIP comprend huit entités typiquement limitées aux poumons et dont la cause est généralement inconnue. Au sein de ce groupe, il convient de faire une nouvelle distinction entre la fibrose pulmonaire idiopathique (FPI) et les autres PII, car elles sont fondamentalement différentes. Alors que les processus inflammatoires jouent un rôle secondaire dans la FPI et que la fibrose progressive est au premier plan, les processus inflammatoires sont déterminants dans les autres PII. Cela a des implications importantes sur le choix du traitement.
Les IIP comprennent
- Pneumonie interstitielle non spécifique (NSIP)
- Pneumonie interstitielle aiguë (PIA)
- Pneumonie interstitielle desquamative (DIP)
- Pneumonie organisée cryptogénique (COP)
- Bronchiolite respiratoire avec DLI (bronchiolite respiratoire-DLI, RB-DLI)
- Pneumonie interstitielle lymphocytaire (LIP)
- Fibroélastose pleuro-parenchymateuse (pleuroparenchymal fibroelastosis)
Les IIP peuvent être distinguées en fonction de leur profil radiologique et histologique. Il en résulte souvent une confusion dans la pratique clinique quotidienne, car les noms des entités et les désignations des modèles radiologiques ou histologiques sont souvent confondus. La FPI, par exemple, s’accompagne du schéma radiologique et histologique de la “pneumonie interstitielle habituelle” (PIE). L’AIP se caractérise par des lésions alvéolaires diffuses (DAD). Dans le cas de la COP, le pathologiste décrit une pneumonie organisatrice (schéma opératoire). Pour les autres IIP, la maladie et le modèle ont le même nom.
Maladies granulomateuses
Un exemple typique des maladies granulomateuses est la sarcoïdose. En outre, certaines infections comme la tuberculose ou les vascularites peuvent également entraîner une pneumopathie granulomateuse.
Autres ILD
Les autres ILD comprennent diverses maladies rares qui ne peuvent être classées dans aucun des trois autres groupes, par exemple l’histiocytose à cellules de Langerhans (LCH), la lymphangioléiomyomatose (LAM) ou les pneumonies à éosinophiles.
Anamnèse et symptômes principaux
Une anamnèse complète et précise est essentielle pour établir correctement le diagnostic de la DLI. Il faut demander tous les antécédents médicaux, toute la carrière professionnelle, tous les loisirs et tous les médicaments ou autres traitements actuels et passés. L’âge du patient lors de la présentation peut déjà limiter le diagnostic différentiel probable. Alors que la sarcoïdose et la LCH, par exemple, ont tendance à apparaître au cours des quatre premières décennies, la FPI est une maladie de l’âge mûr (6e-8e décennie). La durée des symptômes donne également des indications importantes sur les diagnostics possibles. Les maladies à évolution aiguë ou subaiguë sont par exemple la pneumonie aiguë à éosinophiles (PEA), la PCO, la PIA ou les DLI associées à la rhumatologie. Les formes à évolution lente sont par exemple la FPI et les pneumoconioses. La sarcoïdose et la pneumonie d’hypersensibilité peuvent avoir une évolution très variable dans le temps.
Lors de l’enquête sur les antécédents médicaux, il convient de tenir compte des aspects suivants, qui sont souvent associés à la DLI :
- Une maladie rhumatologique est-elle connue ?
- Existe-t-il une maladie inflammatoire chronique de l’intestin ?
- Existe-t-il ou a-t-il existé une affection maligne ?
- Une chimiothérapie ou une radiothérapie est-elle/a-t-elle été effectuée ?
- Existe-t-il une immunosuppression (infections opportunistes) ?
En cas d’antécédents de suspicion d’ILD médicamenteuse, il est recommandé de vérifier le médicament suspecté sur le site www.pneumotox.com.
Certaines ILD sont clairement associées au tabagisme (LCH, DIP, RB-ILD et probablement IPF).
Les principaux symptômes typiques de l’ILD sont une dyspnée d’effort progressive et une toux non productive persistante. En outre, les symptômes extrapulmonaires peuvent indiquer une maladie sous-jacente ou associée (par exemple, douleurs musculo-squelettiques, faiblesse, fatigue, fièvre, douleurs articulaires ou arthrites, photosensibilité, phénomène de Raynaud, etc.)
Résultats cliniques
L’auscultation pulmonaire est généralement pathologique, mais non spécifique. L’auscultation de la FPI se caractérise par une sclérosiphonie (“crépitements”, “velcro rales”), typiquement accentuée à la base des deux côtés. Ce bruit rappelle celui de l’écartement d’une bande Velcro. Dans les DLI avancées, une complication tardive peut être un cor pulmonaire avec les résultats d’auscultation correspondants. Le “clubbing” (doigt à fléau de tambour) est une autre manifestation typique qui peut apparaître comme un signe tardif, en particulier dans la FPI ou l’asbestose. La cause en est une prolifération anormale de la peau et des os (ostéoarthropathie hypertrophique), bien que d’autres mécanismes d’apparition soient discutés en dehors de l’hypoxémie chronique. Enfin, on peut éventuellement trouver dans le statut physique des signes extrapulmonaires d’une maladie rhumatologique associée.
Résultats de laboratoire
Les électrolytes, les paramètres hépatiques et rénaux, la formule sanguine différentielle et les résultats urinaires ne sont pas spécifiques en cas de DLI. Les résultats de laboratoire suivants peuvent indiquer une étiologie particulière :
- ANA et ANCA (vascularite ; DD granulomatose avec polyangéite, anciennement maladie de Wegener ; syndrome de Churg-Strauss ; polyangéite microscopique)
- Facteurs rhumatoïdes (polyarthrite rhumatoïde)
- anti-Scl70 (sclérodermie)
- anti-dsDNA/anti-ENA (lupus érythémateux disséminé, “maladie des tissus connectifs mixtes”)
- anti-GBM (syndrome de Goodpasture)
- Anticorps précipitants (pneumonie d’hypersensibilité, HP).
Imagerie
Dans la plupart des cas, une radiographie du thorax est réalisée en premier lieu. La corrélation avec l’entité ou la sévérité clinique est plutôt mauvaise. Il est important de comparer avec des images plus anciennes, si elles sont disponibles, pour évaluer la dynamique du processus. Dans environ 10% des DLI, on trouve un thorax radiologique sans particularité.
En cas de suspicion d’ILD, il est indispensable de réaliser un scanner thoracique haute résolution (HRCT). La précision de la question de l’ILD est plusieurs fois supérieure. Néanmoins, l’interprétation dépend beaucoup de l’expertise du radiologue. Selon la question posée, l’examen peut également être réalisé en décubitus ventral (pour exclure les atélectasies dépendantes) ou en inhalation et en expiration (pour rechercher des zones hyperinflationnistes). Lors de l’évaluation, il est important de reconnaître certains modèles. ) et recherche, entre autres, des lésions de type “groundglass”, des consolidations, des réticulations, des nodules et des kystes. Des exemples typiques sont présentés dans les figures 1 à 4.
Évaluation cardiaque
L’examen initial de routine d’une DLI comprend également un ECG et une échocardiographie transthoracique, car ce sont surtout les DLI avancées qui peuvent provoquer une hypertension pulmonaire. En outre, certaines DLI peuvent présenter une implication cardiaque (par exemple, la sarcoïdose).
Fonction pulmonaire
L’évaluation standard comprend la mesure des volumes pulmonaires dynamiques et statiques par spirométrie et bodyplethysmographie, la mesure de la capacité de diffusion et l’évaluation des échanges gazeux par saturation en O2, analyse des gaz du sang artériel et test de marche de 6 minutes (6-MWT). Un trouble ventilatoire restrictif (diminution de la capacité pulmonaire totale) est typique, bien que celui-ci puisse être absent aux stades précoces. Des troubles obstructifs de la ventilation sont également possibles, notamment en cas de sarcoïdose, de LAM, d’HP, de LCH, de bronchiolite ou de fibrose pulmonaire combinée à l’emphysème (combined pulmonary fibrosis and emphysema, CPFE).
La capacité de diffusion est typiquement abaissée. Une capacité de diffusion fortement diminuée alors que les volumes pulmonaires sont normaux peut être le signe d’une CPFE ou d’une hypertension pulmonaire associée à la DLI. Les échanges gazeux doivent être étudiés au repos et à l’effort. Pour ce dernier, on peut utiliser soit un 6-MWT soit une spiroergométrie.
Lavage broncho-alvéolaire
Le lavage broncho-alvéolaire (LBA) consiste à “rincer” les voies respiratoires distales avec une solution saline physiologique pendant une bronchoscopie. Pendant la réalisation, l’examinateur recherche une éventuelle hémorragie alvéolaire (rougeur croissante des différentes portions de LBA), ce qui est typique d’une vascularite pulmonaire. Le liquide récupéré est ensuite analysé (nombre et différenciation des cellules, agents pathogènes, cellules malignes). Le modèle BAL ainsi créé est un élément supplémentaire dans la recherche du diagnostic ou de la différenciation de la DLI.
Biopsie pulmonaire
Une biopsie pulmonaire est réalisée lorsque les examens effectués jusque-là ne permettent pas de poser un diagnostic fiable. Dans ce contexte, il est important d’évaluer judicieusement les bénéfices et les risques. Le choix de la bonne localisation est décisif pour le succès du diagnostic, car dans le cas contraire, une “erreur d’échantillonnage” est possible. Plusieurs techniques de différents niveaux d’invasivité sont disponibles avec différents profils de risque (biopsie transbronchique, cryobiopsie, biopsie chirurgicale, ouverte ou thoracoscopique).
Discussion interdisciplinaire (ILD-Board)
Le traitement et le pronostic dépendent de manière cruciale de l’établissement d’un diagnostic correct. Il est donc recommandé d’effectuer un bilan ILD pour établir le diagnostic. Celui-ci se définit par la présence de toutes les disciplines impliquées : pneumologie, rhumatologie, radiologie et pathologie. Il a été démontré qu’une telle approche permet d’obtenir de meilleurs résultats cliniques.
Nouvelles options thérapeutiques pour la FPI
Deux médicaments à action antifibrotique ont été spécifiquement approuvés pour le traitement de la FPI depuis 2015 : La pirfénidone (Esbriet®) et le nintédanib (Ofev®). Le choix de l’un ou l’autre médicament dépend en premier lieu du profil d’effets secondaires et de la préférence du patient.
Littérature complémentaire :
- Schwartz M, et al. : Interstitial Lung disease, 5th ed, People’s Medical Clearing House, Shelton, CT 2011.
- Raghu G, et al : An official ATS/ERS/JRS/ALAT statement : idiopathic pulmonary fibrosis : evidence-based guidelines for diagnosis and management. Am J Respir Crit Care Med 2011 ; 183 : 788.
- King TE Jr, et al : Fibrose pulmonaire idiopathique. Lancet 2011 ; 378 : 1949.
- Bradley B, et al : Interstitial lung disease guideline : the British Thoracic Society in collaboration with the Thoracic Society of Australia and New Zealand and the Irish Thoracic Society. Thorax 2008 ; 63 Suppl 5 : v1.
- Travis WD, et al. : An official American Thoracic Society/
- European Respiratory Society statement : Mise à jour de la classification internationale multidisciplinaire des pneumonies interstitielles idiopathiques. Am J Respir Crit Care Med 2013 ; 188 : 733.
- Aziz ZA, et al : HRCT diagnosis of diffuse parenchymal lung disease : inter-observer variation. Thorax 2004 ; 59 : 506.
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PRATIQUE DU MÉDECIN DE FAMILLE 2016 ; 11(7) : 22-25