Rapport de cas : Depuis trois à quatre mois, ce garçon de six ans a développé deux nodules de couleur chair dans la région de l’abdomen, qui ont considérablement augmenté de taille au fil du temps.
Il n’y a pas d’autres symptômes que de légères démangeaisons. Le patient est par ailleurs en bonne santé, vacciné selon le schéma CH et n’a jamais eu de problèmes de peau auparavant. L’examen révèle dans la région abdominale gauche deux nodules ovales d’environ 20×5 mm chacun, de couleur chair, légèrement brillants, grossiers et ombiliqués, avec une croûte marginale (Fig. 1). L’examen du reste du tégument est sans particularité.
Quiz
Sur la base de ces informations, quel est le diagnostic le plus probable ?
A Verrucae vulgares
B Molluscum contagiosum giganteum
C Xanthogranulome juvénile
D Naevus pointu
Diagnostic et discussion : le tableau clinique montre des mollusques typiques dits géants (Molluscum contagiosum giganteum, réponse B). Le molluscum contagiosa (synonymes : verrues génitales, verrues volantes) se caractérise par des papules (généralement) de 1 à 5 mm de diamètre, de la couleur de la peau, avec des ongles et des poils. Le molluscum contagiosa se caractérise par une dépression centrale avec un pore d’où s’exprime un matériel blanchâtre grumeleux (particules virales). Le molluscum contagiosa est une maladie de peau contagieuse, bénigne et auto-limitante très répandue chez les enfants, causée par un virus à ADN de la famille des poxvirus [1]. Dans de rares cas, les lésions peuvent atteindre un diamètre de plusieurs centimètres et on parle alors, comme dans le cas présent, de mollusques dits géants [2]. Contrairement à l’adulte, les mollusques géants, tout comme une infestation étendue de mollusques, sont très rarement associés à une immunodéficience. Des investigations plus poussées sont toutefois indiquées en cas de signes cliniques supplémentaires.
Le virus se transmet directement d’une personne à l’autre ou par auto-inoculation. Les mollusques contagiosa peuvent en principe se manifester sur l’ensemble du tégument, mais ils préfèrent les zones intertrigineuses comme les aisselles et la région génitale, ainsi que les flancs et le visage. L’atteinte des muqueuses est très rare. La propagation des condylomes est favorisée par une barrière cutanée altérée, notamment dans le cadre d’une dermatite atopique, ce qui peut conduire à un ensemencement disséminé des mollusques, appelé eczéma molluscatum [3]. Les mollusques situés au niveau du bord de la paupière peuvent provoquer une kératoconjonctivite et, dans de rares cas, une cicatrice cornéenne. Une autre complication est l’impétiginisation secondaire avec formation d’abcès.
Compte tenu de la rémission spontanée élevée (en général dans les six mois chez les enfants immunocompétents), il n’est pas nécessaire de traiter activement toutes les verrues génitales. En principe, il est recommandé d’appliquer régulièrement des soins cutanés intensifs et relipidants (et, pour les patients atteints d’eczéma, une thérapie locale anti-inflammatoire) afin d’éviter toute nouvelle germination et de favoriser la guérison. Un traitement est souvent souhaité en cas de molluscum persistant, subjectivement gênant et/ou de complications. Il n’existe à ce jour aucun traitement antiviral spécifique du molluscum contagiosum. Le choix de la méthode de traitement doit être guidé par l’ampleur de l’infestation par les mollusques ainsi que par l’âge, l’acceptation et la compliance du patient et les éventuels effets indésirables de chaque forme de traitement. Avant de commencer le traitement, il convient de faire disparaître tout eczéma (à l’aide de corticostéroïdes topiques ; les inhibiteurs topiques de la calcineurine doivent être évités).
Chez les enfants un peu plus âgés et coopératifs, avec un nombre raisonnable de mollusques, l’ablation mécanique à l’aide d’une curette (cuillère tranchante) ou d’une pince à épiler sous crème anesthésiante (par ex. Emla®) est une bonne option simple – tout comme la cryothérapie à l’azote liquide (sans crème anesthésiante).
Pour de nombreux mollusques ou des enfants (plus jeunes) anxieux, nous utilisons une solution topique d’hydroxyde de potassium à 5% (par exemple Infectodell®) comme traitement de première ligne. Cette substance entraîne la lyse des cellules infectées par le virus. Une application soigneuse de la solution avec applicateur est effectuée une à deux fois par jour jusqu’à l’apparition d’une réaction inflammatoire cliniquement identifiable. Cela peut parfois provoquer des brûlures et des irritations, mais dans l’ensemble, c’est facile à réaliser, peu coûteux, efficace et sans effets secondaires [4]. La solution d’hydroxyde de potassium ne doit pas être utilisée dans la région des muqueuses, dans la région périorbitaire ou sur une peau eczémateuse.
Dans le cas présent, les mollusques géants ont complètement guéri en l’espace de sept semaines grâce à un traitement systématique par Infectodell® (fig. 2). Une autre possibilité de traitement est l’application topique d’un immunomodulateur, l’imiquimod (Aldara®), dont les taux de réponse sont très variables et les coûts de traitement élevés [5]. Chez les enfants présentant une infestation étendue de mollusques, par exemple dans le cadre d’un déficit immunitaire, l’application topique indolore d’une solution de cidofovir (un analogue de nucléotide) s’avère efficace, bien qu’elle entraîne des coûts considérables [6].
Dr. med. Lisa Weibel
Dr. med. Regula Wälchli
Dr. med. Martin Theiler
Médecin praticien Alexandra Smith
Littérature :
- Brown J, et al : Childhood molluscum contagiosum. Int J Dermatol 2006 ; 45 : 93-99.
- Kim SK, et al : Giant molluscum contagiosum of immuncompetent children occurring on the anogenital area. Eur J Dermatol 2007 ; 17(6) : 537-538.
- Erdmann SM, et al. : Molluscum contagiosa in an infant with atopic eczema : a therapeutic challenge. Hautarzt 2004 ; 55(10) : 991-994.
- Short KA, et al : Double-blind, randomized, placebo-controlled trial of the use of topical 10% potassium hydroxide solution in the treatment of molluscum contagiosum. Pediatr Dermatol 2006 ; 23(3) : 279-281.
- Katz A, et al : L’imiquimod n’est pas un médicament efficace contre le molluscum contagiosum. The Lancet infectious diseases 2013 ; 13(10) : 877-880.
- Briand S, et al : 1% topical cidofovir used as last alternative to treat viral infections. J Eur Acad Dermatol Venereol 2008 ; 22(2) : 249-250.
DERMATOLOGIE PRATIQUE 2014 ; 24(3) : 34-35