La réhabilitation pulmonaire est un pilier du traitement des maladies pulmonaires chroniques avancées. Elle améliore les performances, la qualité de vie et le risque d’hospitalisation. Peu de médicaments ont un effet positif comparable.
En prenant l’exemple de la BPCO, il a été démontré que le niveau d’activité physique est le principal prédicteur de la survie, avant même le VEMS [1]. De même, nous connaissons le lien entre l’activité physique et le risque d’exacerbation [2].
Cependant, les personnes souffrant de maladies pulmonaires chroniques évitent autant que possible l’exercice physique, ce qui, par le biais d’un déconditionnement consécutif, renforce à son tour la dyspnée d’effort. C’est ce que l’on appelle la spirale de la détresse respiratoire (fig. 1). Un cercle vicieux qui est renforcé par l’anxiété et la dépression ainsi que par le retrait social et qui ne peut guère être brisé de manière autonome.
C’est là qu’intervient la réadaptation pulmonaire qui, grâce à un programme sur mesure, aide les personnes concernées et déstabilisées à reprendre confiance en leur propre corps et à mener ainsi une vie durablement active.
Indications et données probantes : BPCO
Une grande partie des preuves de l’efficacité de la réadaptation pulmonaire concerne les patients atteints de BPCO – qui constituent également la grande majorité des participants.
Mortalité et hospitalisations : en 2011, une revue Cochrane de neuf études a montré un avantage impressionnant, tant en termes de mortalité (NNT 6) que de réhospitalisations (NNT 4), pour la réadaptation pulmonaire après une exacerbation aiguë de la BPCO [3].
Une mise à jour des mêmes auteurs en 2016 avec onze études supplémentaires a confirmé le bénéfice. Cependant, le résultat était moins clair, surtout en ce qui concerne la mortalité, ce qui peut s’expliquer en partie par l’hétérogénéité structurelle des programmes de réadaptation [4].
Performance physique et qualité de vie : une méta-analyse de 65 essais contrôlés randomisés portant sur un total de 3822 patients atteints de BPCO avancée met en lumière la qualité de vie et la performance. La réhabilitation pulmonaire, qu’elle soit hospitalière ou ambulatoire, permet d’améliorer significativement la qualité de vie. Parallèlement, la capacité de performance maximale en ergométrie et la capacité fonctionnelle au test de marche de 6 minutes peuvent être augmentées de manière significative [5].
Indications et données probantes : autres maladies pulmonaires
Les maladies pulmonaires interstitielles : Il est également bien établi que la réhabilitation pulmonaire dans les maladies pulmonaires interstitielles améliore à la fois la qualité de vie et la capacité fonctionnelle. Cet effet peut être démontré dans tous les sous-groupes malgré l’hétérogénéité de la pathologie, mais il diminue avec la gravité de la maladie [6].
Asthme : l’entraînement physique régulier est également important dans le cas de l’asthme bronchique car, outre une augmentation significative de la qualité de vie, il permet d’améliorer les jours sans symptômes ainsi que l’anxiété et la dépression [7]. En cas d’asthme stable, il suffit généralement de conseiller une activité physique régulière, par exemple dans une salle de sport. Mais il n’est pas rare que les personnes légèrement atteintes soient si déstabilisées qu’elles aient besoin d’une thérapie médicale d’entraînement en attendant de pouvoir s’entraîner seules. En cas d’évolution sévère ou instable, une prise en charge structurée et complète dans le cadre d’une réadaptation pulmonaire est recommandée.
Cancer bronchique : une rééducation préopératoire intensive de deux à quatre semaines permet, dans le cas du cancer bronchique, de ramener les patients inopérables en premier lieu à un état opérable (mesuré par la VO2 max). En postopératoire, les performances, la dyspnée et la fatigue peuvent être améliorées. En accompagnement d’une chimiothérapie, on peut s’attendre à une amélioration des symptômes et à un maintien des performances, à condition que l’adhérence ne soit pas trop limitée par les effets secondaires [8].
Conditions préalables
Un traitement médicamenteux optimisé est une condition préalable à la meilleure réussite possible de la rééducation. Les comorbidités telles que l’ostéoporose, les maladies cardiovasculaires ou les problèmes orthopédiques invalidants doivent également être systématiquement identifiées et traitées au préalable.
Sélection des patients : la réhabilitation pulmonaire chez les patients atteints de BPCO est indiquée à partir de la classe de risque B selon GOLD et peut être initiée aussi bien dans l’intervalle stable qu’à la suite d’une exacerbation aiguë. Dans le cas d’autres maladies pulmonaires chroniques, la réadaptation pulmonaire est utile lorsque la maladie entraîne une diminution de la qualité de vie.
La gravité de la maladie de base, les comorbidités, les problèmes psychosociaux, un long trajet et le tabagisme actif sont des facteurs de risque d’interruption de la rééducation. L’expérience montre cependant qu’aucun de ces critères ne permet de prédire l’adhésion avec suffisamment de fiabilité pour justifier une exclusion primaire. Il n’est pas rare que nous assistions à des évolutions étonnamment positives malgré des conditions défavorables, ce qui a également un effet motivant pour toute l’équipe. Il vaut donc la peine d’inclure très généreusement les patients dans un programme, mais d’accepter de temps en temps de l’interrompre.
Les contre-indications : En cas de maladie cardiovasculaire instable, la réadaptation pulmonaire est contre-indiquée. Mais des problèmes orthopédiques invalidants ou une coopération massivement limitée peuvent parfois conduire à une exclusion.
Évaluations : afin d’optimiser la planification de l’entraînement et d’exclure une ischémie cardiaque liée à l’effort, il convient de réaliser une ergométrie au début et une spiro-ergométrie en cas de problème particulier. Il est également recommandé d’utiliser au moins initialement un questionnaire d’évaluation de l’anxiété et de la dépression, par exemple l’échelle HADS (Hospital Anxiety and Depression Scale). Le test de marche de 6 minutes est la norme pour évaluer les performances physiques. Le test “assis-debout” (STS), d’une durée d’une minute, est également devenu courant et facile à réaliser. Le test Constant-load Cycle est également scientifiquement fiable et facilement reproductible. Le Chronic Respiratory Questionnaire (CRQ) s’est établi en Suisse comme questionnaire spécifique à la maladie pour l’évaluation et le suivi de la qualité de vie.
Réglage
Ambulatoire vs. stationnaire : dans la mesure du possible, il est préférable d’opter pour un cadre ambulatoire, car l’entraînement à proximité de la vie quotidienne facilite la transition vers un mode de vie actif à long terme. De plus, la réalisation ambulatoire de la rééducation avec une durée de programme de douze semaines permet une mise en place optimale de l’entraînement – nous savons par des études que l’augmentation des performances est ensuite plafonnée. Du point de vue de la physiologie de l’entraînement, il est recommandé d’effectuer au moins deux séances d’entraînement par semaine, voire trois.
Une mobilité fortement réduite, que ce soit en raison de la gravité de la maladie de base ou des comorbidités, plaide en faveur d’une prise en charge hospitalière. Des circonstances psychosociales difficiles peuvent également être à l’origine de l’option hospitalière, plus coûteuse. Souvent, directement après un programme hospitalier, il est utile de poursuivre la réadaptation pulmonaire en ambulatoire pour les raisons susmentionnées.
Centres accrédités : En Suisse, des programmes ambulatoires et hospitaliers sont désormais proposés sur l’ensemble du territoire. Une liste de tous les centres accrédités est disponible sur la page d’accueil de la Société Suisse de Pneumologie (www.pneumo.ch/de/pulmonale-rehabilitation.html).
Programme de réhabilitation
Il n’y a pas de “taille unique”. Pour obtenir un succès maximal et un comportement sain à long terme, un programme complet doit être personnalisé en fonction des possibilités et des besoins de chaque individu et être adapté en permanence.
Entraînement d’endurance : un entraînement d’endurance efficace doit être nettement plus dosé que l’effort quotidien, le patient doit alors ressentir un essoufflement modéré à sévère selon l’échelle de Borg. L’entraînement d’endurance à ce niveau élevé n’est possible qu’avec un suivi physiothérapeutique formé et intensif. Il est courant d’effectuer un effort continu sur un vélo ergomètre pendant 30 minutes à 60-80% de la puissance maximale [8]. En fonction des préférences personnelles ou, par exemple, en cas de problèmes orthopédiques, l’entraînement sur tapis roulant constitue une alternative. Souvent, les patients ne sont pas en mesure d’effectuer un effort constant pendant 30 minutes. Dans cette situation, un entraînement par intervalles de haute intensité est aussi efficace qu’un effort continu. Cependant, grâce aux phases de récupération, il est mieux toléré, notamment en ce qui concerne la dyspnée d’effort [8].
Nos participants apprécient beaucoup la marche nordique qu’ils pratiquent une fois par semaine sur notre Reha-Trail. Il permet un entraînement proche de la vie quotidienne – par exemple sur le comportement à adopter dans les pentes – et supprime la peur de faire des efforts à l’extérieur, même dans des conditions météorologiques défavorables.
Musculation : les exercices de musculation provoquent moins de dyspnée d’effort que les exercices d’endurance, ce qui permet souvent une plus grande augmentation. Il est recommandé d’effectuer une à trois séries de huit à douze répétitions à une intensité de 60-70% du “one repetition maximum” (poids maximum pouvant être déplacé en une répétition) [8].
Autres aspects de l’entraînement : En cas de performances très limitées, il est possible de recourir à des méthodes d’entraînement alternatives telles que l’électrostimulation neuromusculaire, la vibration du corps entier ou l’entraînement excentrique sur tapis roulant (“downhill walking”). Un entraînement musculaire inspiratoire en plus de l’entraînement d’endurance et de force peut apporter un avantage en cas de BPCO et de faiblesse pertinente des muscles respiratoires inspiratoires (PI max <60%) [9].
Programme d’accompagnement : les formations d’accompagnement pour la BPCO renforcent la compréhension de la maladie et la responsabilité personnelle des personnes concernées. En Suisse, le programme de formation “Mieux vivre avec la BPCO” est largement répandu. En outre, le programme d’entraînement devrait être complété, le cas échéant, par des conseils en matière d’arrêt du tabac ou de nutrition. L’expérience montre qu’un conseil psychologique facilement accessible est également précieux, car l’anxiété liée à la maladie peut être un obstacle majeur à l’entraînement physique.
Durabilité : à la fin de la réadaptation pulmonaire, un entraînement de suivi doit être planifié. L’accent doit être mis sur la praticabilité et les préférences du patient afin de réussir à augmenter l’activité physique à long terme et de maintenir ainsi le succès de la réadaptation pulmonaire. Des programmes de suivi structurés facilitent la poursuite d’une activité physique régulière, car les fluctuations quotidiennes dues à la maladie rendent souvent difficile l’autodiscipline nécessaire à un entraînement autonome. Ainsi, près des deux tiers des anciens participants à notre programme de réadaptation pulmonaire ambulatoire fréquentent, souvent pendant des années, nos séances d’entraînement en groupe deux fois par semaine en payant eux-mêmes.
Messages Take-Home
- La réhabilitation pulmonaire est un pilier du traitement des maladies pulmonaires chroniques avancées. En Suisse, elle est devenue une prestation obligatoire de l’assurance maladie depuis 2005.
- La réhabilitation pulmonaire est recommandée pour la BPCO à partir de la classe de risque B selon GOLD. Elle améliore les performances physiques, la qualité de vie et le risque d’hospitalisation. Peu de médicaments ont un effet positif comparable.
- L’efficacité de la réadaptation pulmonaire a également été démontrée pour d’autres maladies pulmonaires chroniques (aperçu 1).
Littérature :
- Waschki B, et al : L’activité physique est le prédicteur le plus fort de la mortalité toutes causes chez les patients atteints de BPCO : une étude de cohorte prospective. Chest 2011 Aug ; 140(2) : 331-342.
- Gimeno-Santos E, et al : Déterminants et résultats de l’activité physique chez les patients atteints de BPCO : une revue systématique. Thorax 2014 ; 69 : 731-739.
- Puhan MA, et al : Pulmonary rehabilitation following exacerbations of chronic obstructive pulmonary disease. Cochrane Database Syst Rev 2011 Oct 5 ; (10) : CD005305.
- Puhan MA, et al : Pulmonary rehabilitation following exacerbations of chronic obstructive pulmonary disease. Cochrane Database Syst Rev 2016 Dec 8 ; 12 : CD005305.
- Mc Carthy B, et al : Pulmonary rehabilitation for chronic obstructive pulmonary disease. Cochrane Database Syst Rev 2015 Feb 23 ; (2) : CD003793.
- Downman L, et al : The evidence of benefits of exercise training in interstitial lung disease : a randomised controlled trial. Thorax 2017 Jul ; 72(7) : 610-619.
- Mendes FA, et al : Effects of aerobic training on psychosocial morbidity and symptoms in patients with asthma : a randomized clinical trial. Chest 2010 Aug ; 138(2) : 331-337.
- Spruit M, et al : An Official American Thoracic Society/European Respiratory Society Statement : Key Concepts and Advances in Pulmonary Rehabilitation. Am J Respir Crit Care Med 2013 Oct 15 ; 188(8) : e13-64.
- Gosselink R, et al. : Impact de l’entraînement des muscles inspiratoires chez les patients atteints de BPCO : quelle est l’évidence ? Eur Respir J 2011 Feb ; 37(2) : 416-425.
PRATIQUE DU MÉDECIN DE FAMILLE 2017 ; 12(12) : 19-21