L’expérience de l’utilisation des anticoagulants oraux directs ne cesse de croître. De nombreuses études démontrent une nette supériorité par rapport aux antagonistes de la vitamine K. Mais il n’a pas été possible jusqu’à présent de créer des données claires pour chaque scénario. C’est là qu’intervient le nouveau guide pratique de l’EHRA, dans lequel plusieurs experts ont déduit des recommandations pratiques sur la base des preuves existantes et de l’expérience clinique.
Les DOAK sont aujourd’hui sur toutes les lèvres. Et à juste titre. En effet, ils ont prouvé qu’ils constituaient non seulement une alternative aux antagonistes de la vitamine K (AVK) pour la prévention ou le traitement des événements thromboemboliques artériels et veineux, mais qu’ils leur étaient même supérieurs dans de nombreux domaines. Une étude récente a par exemple examiné l’efficacité et la sécurité des deux substances chez des patients hémodialysés [1]. 132 patients hémodialysés souffrant de fibrillation auriculaire ont été randomisés pour recevoir quotidiennement soit des AVK, soit 10 mg de rivaroxaban, soit du rivaroxaban et de la vitamine K2 pendant 18 mois. Le critère d’efficacité principal était une combinaison d’événements cardiovasculaires mortels et non mortels. Dans le groupe AVK, le critère d’évaluation primaire était de 63,8 pour 100 personnes-années, de 26,2 pour 100 personnes-années pour le DOAK seul et de 21,4 pour 100 personnes-années pour le DOAK plus vitamine K2. Cela montre qu’une dose réduite de rivaroxaban chez les patients hémodialysés réduit significativement l’issue combinée des événements cardiovasculaires mortels et non mortels et des complications hémorragiques graves par rapport aux AVK.
Mais les données ne sont pas toujours claires, comme l’a expliqué le professeur Jan Steffel de Zurich. C’est pourquoi, dans le guide pratique, les experts ont travaillé avec des codes couleur pour les interactions médicamenteuses potentielles, par exemple [2]. Le bleu signifie qu’il existe un risque de réduction des concentrations plasmatiques de DOAK, ce qui pourrait limiter l’efficacité. Les agents marqués en jaune pourraient entraîner une augmentation des niveaux plasmatiques des DOAK, en particulier en cas de polypharmacie, et donc un risque accru d’hémorragie. Les substances actives marquées en orange sont des inhibiteurs modérés du CYP3A4 et/ou de la P-gp et peuvent donc augmenter les concentrations plasmatiques des NOAK. Si de telles substances sont prises en même temps qu’un NOAK, la dose de NOAK doit être réduite ou la dose la plus faible doit être administrée. En revanche, les substances actives telles que les inhibiteurs de la protéase du VIH ne doivent pas être utilisées avec un DOAK et ont donc été marquées en rouge.
Cibler des populations de patients spécifiques
Le traitement est souvent difficile pour les groupes à risque spécifiques, comme les patients atteints de maladies du foie. Mais ce sont justement ces derniers qui ne doivent pas être négligés, selon l’expert. Avant de commencer un traitement par AOD, il est essentiel d’évaluer la fonction hépatique et rénale, les risques de saignement, les facteurs de risque thromboembolique et les comédications pertinentes. En cas d’administration d’un traitement anticoagulant, un suivi étroit est indiqué dans tous les cas. Toutefois, les AOD sont contre-indiqués chez les patients atteints d’une maladie du foie associée à une coagulopathie cliniquement manifeste et à des risques hémorragiques cliniquement significatifs, tels qu’une cirrhose du foie au stade C de Child-Pugh.
Pour les personnes souffrant de thrombocytopénie et pour lesquelles un traitement anticoagulant est indiqué, par exemple en raison d’une fibrillation auriculaire, la décision doit être prise individuellement et avec le patient. Il convient de déterminer au préalable les raisons de la thrombocytopénie, le nombre/la dynamique des plaquettes et le risque de saignement. Toutefois, le traitement par DOAK ne devrait être réellement évité que si le nombre de plaquettes est inférieur à 20 000/µl. Entre 20 000/µl et 50 000/µl, il convient d’être prudent et de procéder à un suivi clinique étroit, y compris à des examens de contrôle. de la surveillance du taux de plaquettes. S’il existe au moins un risque de saignement, l’administration d’une demi-dose de DOAK doit être envisagée. Si >50 000/µl, une surveillance étroite est suffisante.
Pour les patients âgés, les DOAK font partie du traitement standard pour la prévention des AVC. Même chez les patients fragiles ou souffrant de troubles cognitifs, les avantages du traitement l’emportent sur les inconvénients. Les experts estiment également que la présence de microhémorragies cérébrales détectables à l’IRM ne constitue pas en soi une raison de priver le patient d’une anticoagulation orale. Ce n’est qu’en cas d’extrême fragilité ou d’espérance de vie réduite que l’administration de DOAK doit être envisagée. En principe, une surveillance étroite est toutefois indiquée.
Congrès : Association européenne du rythme cardiaque (EHRA)
Littérature :
- Dr Vriese AS, Caluwe R, Van Der Meetsch H, et al. : Safety and Efficacy of Vitamin K Antagonists versus Rivaroxaban in Hemodialysis Patients with Atrial Fibrillation : A Multicenter Randomized Controlled Trial. J Am Soc Nephrol 2021;32(6) : 1474-1483.
- Steffel J, Collins R, Antz M, et al. : 2021 European Heart Rhythm Association Practical Guide on the Use of Non-Vitamin K Antagonist Oral Anticoagulants in Patients with Atrial Fibrillation ; EP Europace 2021, euab065, DOI : https://doi.org/10.1093/europace/euab065
CARDIOVASC 2021 ; 20(2) : 34 (publié le 24.6.21, ahead of print)