Cette maladie génétique rare s’accompagne de symptômes multiples touchant plusieurs systèmes d’organes, notamment le foie et le cœur. Le médecin français Daniel Alagille a été le premier à décrire ce syndrome en 1969.
La fréquence du syndrome d’Alagille est estimée à environ 1:80’000 à 1:100’000 [1]. Dans cette maladie à transmission autosomique dominante, une protéine dite de différenciation pour différents tissus de l’organisme est défectueuse. Le diagnostic est établi sur la base des symptômes cliniques typiques :
Maladies cardiaques multiples : Sténose pulmonaire
- Modifications du squelette : cubitus raccourci, clinodactylie, vertèbres en papillon (Fig. 1)
- Dysmorphies faciales : front remarquablement large, menton étroit, yeux enfoncés, hypertélorisme
- Cholestase avec ictère (particulièrement fréquent chez les nouveau-nés)
- Divers troubles du globe oculaire et du nerf optique
Les nouveau-nés présentant les symptômes correspondants doivent faire l’objet d’examens complémentaires. La certitude définitive de la présence du syndrome d’Alagille est apportée par un test génétique (encadré).
Mutation sur le chromosome 1 ou 20 Des mutations sur deux chromosomes différents peuvent être à l’origine du syndrome d’Alagille (ALGS). On distingue ainsi deux sous-formes de la maladie : |
– Dans une forme, la mutation se situe sur le chromosome 20, au locus p12. Dans ce cas, la maladie s’appelle ALGS1. |
– Dans le cas de l’ALGS2, le défaut se situe sur le chromosome 1, locus p13-p11, dans le gène dit NOTCH2. |
Tout porteur de l’une de ces mutations est également atteint phénotypiquement de l’ALGS. Cependant, la sévérité de la maladie varie considérablement. La transmission se fait selon un mode autosomique dominant. |
Thérapie axée sur les symptômes
Il n’existe pas de traitement causal pour le syndrome d’Alagille, mais le traitement est basé sur les symptômes. L’objectif est d’améliorer la sécrétion biliaire du foie, de réduire les douleurs liées à la maladie et de compenser les carences nutritionnelles. L’accumulation de bile, qui résulte du remaniement des canaux biliaires, provoque une jaunisse, des démangeaisons sévères et est également associée à des troubles de la croissance et de l’alimentation en raison de la diminution de la digestion des graisses [2]. D’autres effets du syndrome, par exemple sur les yeux, le squelette ou le visage, restent sans conséquences graves pour l’enfant. Dans les cas graves, des corrections chirurgicales sont effectuées. En cas de fonction hépatique déficiente, une transplantation hépatique peut être nécessaire.
Prurit cholestatique : approbation de l’EMA pour une nouvelle option thérapeutique
Sur la base d’études cliniques, le maralixibate a été approuvé par la FDA en 2021 pour le traitement du prurit hépatique chez les enfants de plus d’un an atteints du syndrome d’Alagille [3]. Depuis 2022, le maralixibate (nom commercial : Livmarli®) est également autorisé dans l’UE pour cette indication [4]. Les bénéfices du médicament ont été évalués dans deux études principales [4]. Dans la première étude, 31 enfants âgés de 1 à 18 ans atteints du syndrome d’Alagille ont été traités par maralixibate pendant 18 semaines. Les 29 patients dont le taux d’acides biliaires dans le sang avait diminué d’au moins 50% après le traitement initial de 18 semaines avec le médicament ont ensuite reçu soit un placebo, soit du maralixibate pendant quatre semaines. Les résultats ont montré que lorsque le traitement par maralixibate était poursuivi, le taux d’acides biliaires restait faible après quatre semaines, alors que chez les patients qui avaient changé de traitement pour un placebo, une augmentation significative était observée. Après une période de quatre semaines, tous les patients ont reçu à nouveau du maralixibate et il s’est avéré que les niveaux sanguins sous ce médicament étaient revenus aux niveaux précédemment observés. Dans l’étude, le prurit associé à la maladie s’est également amélioré.
Le maralixibate bloque l’action du transporteur apical des acides biliaires dépendant du sodium (ASBT), qui permet le transport des acides biliaires de l’intestin vers le sang et le foie. En inhibant l’ASBT, le médicament réduit la quantité d’acides biliaires transportés de l’intestin vers le foie. Cela permet d’éliminer l’excès d’acide biliaire de l’organisme, ce qui réduit l’accumulation d’acide biliaire et atténue les symptômes du prurit cholestatique. |
La deuxième étude a porté sur huit enfants âgés de deux mois à un an [4]. Les résultats ont montré qu’après 13 semaines de traitement au maralixibate, les patients présentaient en moyenne une amélioration des symptômes de démangeaisons associés à la maladie et une réduction des taux d’acides biliaires.
Littérature :
- Syndrome d’Alagille, https://flexikon.doccheck.com/de/Alagille-Syndrom,(dernière consultation 07.08.2023)
- Syndrome d’Alagille, www.medizin.uni-tuebingen.de/de/das-klinikum/einrichtungen/zentren/kinderleberzentrum/gallenwege/alagille-syndrom,(dernière consultation 07.08.2023)
- Gonzales E, et al. : Efficacité et sécurité du traitement par maralixibate chez les patients atteints du syndrome d’Alagille et de prurit cholestatique (ICONIC) : une étude randomisée de phase 2. Lancet 2021 ; 398 : 1581-1592.
- Agence européenne des médicaments, www.ema.europa.eu/en/documents/overview/livmarli-epar-medicine-overview_de.pdf,(dernière consultation 07.08.2023).
- Rizwanullah, Saad M, Ahmad QT, et al : Alagille Syndrome in an Infant : A Rare Case Report. J Dig Dis Hepatol 2022 : 6 : 176. www.gavinpublishers.com/article/view/alagille-syndrome-in-an-infant-a-rare-case-report,(dernière consultation 07.08.2023)
PRATIQUE DU MÉDECIN DE FAMILLE 2023 ; 18(8) : 22