Le psoriasis est une maladie très hétérogène qui nécessite des soins différenciés, notamment en raison de son caractère chronique et de sa grande souffrance. En tant que maladie systémique, elle peut affecter non seulement la peau, mais aussi les ongles et les articulations. Un diagnostic efficace est donc essentiel pour orienter les patients présentant une pression inflammatoire élevée vers un traitement efficace et ciblé.
Le psoriasis est l’une des maladies chroniques de la peau les plus courantes. En Suisse, environ 150 000 personnes sont concernées. Cette maladie systémique ne touche pas seulement la peau, mais peut également affecter les ongles et/ou les articulations et entraîner d’autres comorbidités caractéristiques (voir 1). La maladie inflammatoire chronique est causée par un dysfonctionnement du système immunitaire de l’organisme. Des protéines pro-inflammatoires, une hyperactivité des lymphocytes Th1 et différentes cytokines, telles que le facteur de nécrose tumorale alpha (TNF-alpha) et les interleukines 12 et 23 ainsi que l’interleukine 17, qui ont un effet pro-inflammatoire, jouent un rôle clé dans ce processus. La peau réagit par une réaction inflammatoire et les kératinocytes se divisent plus rapidement. Toutefois, outre une prédisposition génétique, plusieurs autres facteurs sont nécessaires pour déclencher la maladie (aperçu 2).
Apparences hétérogènes
Le psoriasis vulgaire, ou psoriasis en plaques, est le plus fréquent, avec 85 à 90% des cas. Elle se caractérise par des plaques bien délimitées, rougeâtres et légèrement en relief, recouvertes de squames blanc argenté. Celles-ci apparaissent parce que la peau des personnes concernées se renouvelle beaucoup plus rapidement, non pas tous les 28 jours, mais tous les trois à cinq jours. En règle générale, les plaques se localisent principalement sur les faces d’extension des coudes et des genoux, dans la région du sacrum et ou sur le cuir chevelu. Cependant, elles peuvent finalement affecter n’importe quelle partie du corps. Souvent, le psoriasis évolue de manière chronique à progressive pendant de nombreuses années ou se manifeste par des poussées aiguës. Ce sont surtout les infections, le stress ou certains médicaments qui peuvent influencer les manifestations.
Outre le psoriasis vulgaire, il existe d’autres formes de manifestations. Le psoriasis guttata est une forme d’évolution plutôt aiguë avec de petites lésions. Elle peut survenir surtout chez les enfants et les adolescents après une infection streptococcique et évoluer vers un psoriasis vulgaire. Dans le psoriasis intertrigineux/psoriasis inversé, les foyers inflammatoires apparaissent en outre dans les plis du corps. Lorsque toute la peau est touchée, on parle d’érythrodermie psoriasique. Cette forme rare est souvent associée à des complications qui nécessitent une hospitalisation. Il existe en outre différentes manifestations pustuleuses. Elles se caractérisent toutes par des pustules stériles. Elles peuvent apparaître sur la paume des mains ou la plante des pieds.
Psoriasis des ongles et arthrite psoriasique
Dans toutes les formes de la maladie, les ongles peuvent également être affectés. Près d’un patient psoriasique sur deux présente une atteinte des ongles, difficile à traiter. Les symptômes typiques sont les ongles tachetés, l’onychodystrophie, les taches d’huile ou l’hyperkératose sous-unguéale. Non seulement ces modifications des ongles sont associées à une évolution grave de la maladie et stigmatisent souvent les patients, mais elles sont également un prédicteur de l’atteinte articulaire. Jusqu’à 80% des patients atteints d’arthrite psoriasique (APS) présentent une atteinte des ongles. 20 à 30 % des personnes atteintes de psoriasis souffrent d’un APS. La moitié d’entre eux présentent des lésions articulaires érosives, souvent détectables dans les dix mois à deux ans suivant le diagnostic. C’est notamment pour cette raison qu’un diagnostic rapide et le plus précoce possible est indiqué.
Les lésions cutanées ne sont pas synonymes de gravité
Différents paramètres doivent être utilisés pour déterminer la gravité. Même les patients qui n’ont que quelques lésions cutanées peuvent être gravement touchés. Surtout si les ongles, le visage ou la région génitale sont touchés. Outre l’évaluation de l’atteinte cutanée par PASI ou BSA, il convient donc d’évaluer la localisation des lésions ainsi que la qualité de vie individuelle. La BSA (Body Surface Area) indique le pourcentage de la surface corporelle affectée. Une paume de main reflète un pour cent de la surface du corps. Pour l’indice de zone et de sévérité du psoriasis (PASI), quatre régions du corps sont considérées : la tête, les bras, le tronc et les jambes. Pour chaque région du corps, trois symptômes sont évalués : l’intensité de la rougeur (érythème), l’intensité de l’épaississement de la peau (infiltration) et l’intensité de la desquamation, chacune sur une échelle de 0 à 4. L’estimation de la surface corporelle affectée se fait sur une échelle de 0 (pas affecté) à 6 (complètement affecté).
Topique ou systémique – quelle thérapie est efficace ?
Le traitement de base avec des bases de pommade sans principe actif ou des préparations topiques d’urée et d’acide salicylique est indispensable pour toutes les formes de la maladie. Ensuite, la décision de traitement ultérieur est prise sur la base de la gravité.
Un psoriasis léger est bien conseillé avec un traitement topique. L’étalon-or est la vitamine D3 topique, les stéroïdes topiques ou une combinaison de cortisone et de vitamine D3.
Le psoriasis modéré à sévère est généralement traité par voie systémique. En premier lieu, outre la photothérapie, on dispose ici de la ciclosporine, des esters d’acide fumarique, du méthotrexate et des rétinoïdes.
Objectif thérapeutique – peau sans imperfections
Un médicament biologique peut être utilisé comme traitement lorsque le traitement de première ligne n’a pas donné de résultats suffisants et en cas d’intolérance ou de contre-indication aux traitements systémiques conventionnels. Dans ce cas, on peut par exemple avoir recours à un antagoniste du TNF-alpha comme l’adalimumab, l’étanercept, le certolizumab et l’infliximab, à un inhibiteur de l’interleukine 17A comme le sécukinuab, le brodalumab et l’ixekizumab ou à l’ustékinumab, un anticorps monoclonal dirigé contre les interleukines 12 et 23. Le guselkumab, le risankizumab et le tildrakizumab sont des bloqueurs purs de l’IL-23 qui se distinguent comme étant les agents biologiques les plus sûrs, avec une efficacité élevée et aucune perte d’efficacité au fil du temps.
Le choix du traitement systémique final doit être adapté à chaque patient. Pour cela, il faut également tenir compte des maladies et des médicaments concomitants. En fin de compte, il est nécessaire d’équilibrer les critères cliniques avec le profil du médicament et les caractéristiques du patient afin de mettre en place un traitement individuel efficace pour la personne concernée.
Littérature complémentaire :
- www.beobachter.ch/gesundheit/krankheit/schuppenflechte-psoriasis (dernier accès le 15.01.2020)
- Augustin M, Reich K, Blome C et al. Psoriasis des ongles en Allemagne : épidémiologie et charge de morbidité. Br J Dermatol 2010 ; 163 : 580-585.
- Reich K, Krüger K, Mössner R, Augustin M : Epidemiology and clinical pattern of psoriatic arthritis in Germany : a prospective interdisciplinary epidemiological study of 1511 patients with plaque-type psoriasis. Br J Dermatol 2009 ; 160(5) : 1040-1047.
- Radtke MA, Mrowietz U, Feuerhahn J, et al : Early detection of comorbidity in psoriasis : recommendations of the National Conference on Healthcare in Psoriasis. J Dtsch Dermatol Ges. 2015 ; 13(7) : 674-689.
- Thaçi D, Augustin M, Krutmann J, Luger T : Importance de la thérapie de base dans le psoriasis. J Dtsch Dermatol Ges. 2015 ; 13(5) : 415-418.
PRATIQUE DU MÉDECIN DE FAMILLE 2020 ; 15(3) : 43-44