Le lymphogranulome vénérien est redevenu nettement plus fréquent ces dernières années, y compris en Europe. La maladie semble endémique, en particulier chez les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes.
Le lymphogranulome vénérien (LGV) semble être en nette recrudescence ces dernières années en Europe parmi les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) et est probablement devenu endémique dans cette population, où il constitue une cause relativement fréquente de proctite et parfois d’ulcérations génitales. La LGV est causée par Chlamydia trachomatis Biovar L2b dans la plupart des cas chez les HSH en Europe [1].
Chez les hétérosexuels, le lymphogranulome vénérien est beaucoup plus rare en Europe et est alors généralement importé de pays endémiques. Connue jusqu’en 2003 comme une “maladie tropicale”, elle est endémique dans certaines régions d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie [1]. En Afrique et en Inde, il représente 7 à 19% des ulcères génitaux, est très répandu chez les deux sexes et souvent asymptomatique [2,3]. En 2003, une épidémie de proctite à LGV a été documentée chez 13 HSH à Rotterdam [4], puis d’autres épidémies sont survenues chez des HSH, à nouveau dans des pays industrialisés [5,6]. On estime que la co-prévalence de la LGV et du VIH est très élevée (57-100%) [7].
Clinique
La lésion primaire non spécifique et généralement indolore (Fig. 1) du lymphogranulome veineux peut se manifester sous la forme d’une papule inflammatoire, d’une vésicule, d’une papulopustule ou finalement d’une ulcération plane et guérit spontanément en 10 à 14 jours [1].
En cas d’atteinte génitale, le gland du pénis, le sillon coronaire, le prépuce ou l’urètre antérieur chez l’homme, la vulve, le vagin ou le col de l’utérus chez la femme peuvent être touchés. Le rectum est souvent touché (Fig. 2) .
Les ganglions lymphatiques typiquement douloureux du stade II apparaissent deux à six semaines après la lésion primaire, en cas d’effet primaire génital, le plus souvent unilatéralement inguinal, au-dessus et/ou en dessous de la bande de Puopart (fig. 3). Les bubons ressemblent initialement à des grains de café et peuvent se regrouper en paquets, s’abcéder, se perforer et former des fistules au cours de l’évolution. En cas d’infection du rectum, de la partie supérieure du vagin ou du col de l’utérus, les ganglions lymphatiques périrectaux ou para-aortiques (glandes gerota) réagissent [1,8].
Les signes systémiques possibles au stade II sont la leucocytose, la lymphocytose, la fièvre, les douleurs rhumatismales, l’arthrite, l’exanthème, la conjonctivite, la méningo-encéphalite aseptique, l’hépatosplénomégalie, la périhépatite, la pneumonite [1,9]. Au stade III (Fig. 4), on observe un complexe de symptômes anorectaux ou un syndrome anogénitorectal avec éléphantiasis génitoanorectal ulcéreux [1].
Diagnostic
Le diagnostic de lymphogranulome vénérien est posé à l’aide de l’anamnèse, y compris une anamnèse sexuelle détaillée, d’un tableau clinique et avec la mise en évidence directe de l’agent pathogène par PCR à partir d’un ulcère génital, d’un frottis anorectal ou d’un aspirateur à bubons. Si un tel frottis n’est pas possible, la sérologie peut aider au diagnostic ; en particulier, un titre élevé d’anticorps IgA chez un patient symptomatique est suggestif de la LGV. Cependant, un titre faible n’exclut pas la LGV, de même qu’un titre élevé ne prouve pas la LGV chez un patient cliniquement asymptomatique [1]. Très souvent, le stade I évolue de manière non spécifique et passe inaperçu [2,10], le plus souvent le diagnostic est posé au stade II. En raison des co-infections fréquentes, un dépistage complet des IST doit toujours être effectué en complément [10].
Les diagnostics différentiels sont l’herpès génital, la lymphadénopathie syphilitique, généralement indolore et bilatérale, l’ulcère de la bouche dû à l’hémophilus ducreyi dans le cadre des diagnostics différentiels vénériens, et plus largement d’autres agents bactériens et viraux tels que les streptocoques, les mycobactéries ou l’herpès zoster [10].
Thérapie
Sur le plan thérapeutique, la doxycycline 100 mg deux fois par jour pendant trois semaines est utilisée comme antibiotique de première ligne [1,3,11]. Les alternatives de traitement sont l’érythromycine 500 mg quatre fois par jour pendant trois semaines ou l’azithromycine 1 g une fois par semaine pendant encore trois semaines [1]. Les symptômes doivent régresser dans un délai d’une à deux semaines après le début du traitement. Bien entendu, un traitement du partenaire doit toujours être mis en place.
Conclusion
En plus d’être considéré comme un diagnostic différentiel important dans les zones d’endémie comme l’Afrique, le lymphogranulome vénérien devrait également être envisagé comme diagnostic différentiel en cas d’ulcères génito-anaux et/ou de lymphadénopathies, en particulier chez les HSH infectés ou non par le VIH, en raison d’une recrudescence évidente de cette infection sexuellement transmissible en Europe.
Messages Take-Home
- Le lymphogranulome vénérien (LGV) est causé par Chlamydia trachomatis Biovar L2b chez les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) en Europe dans la plupart des cas.
- On estime que la co-prévalence de la LGV et du VIH est très élevée (57-100%).
- Les ganglions lymphatiques typiquement douloureux au stade II apparaissent deux à six semaines après la lésion primaire, en cas d’effet primaire génital le plus souvent unilatéral inguinal au-dessus et/ou en dessous de la bande de Puopart.
- En raison des co-infections fréquentes, un dépistage complet des IST doit toujours être effectué en complément.
- Sur le plan thérapeutique, la doxycycline 100 mg deux fois par jour pendant trois semaines est utilisée comme antibiotique de première ligne.
Littérature :
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