L’odorat joue un rôle important dans la vie quotidienne : il nous avertit de dangers parfois mortels tels que des aliments avariés, de la fumée ou des incendies, ainsi que des substances toxiques. Cette fonction d’alerte est perdue par les patients souffrant d’une perte olfactive de longue durée [1]. Les possibilités de traitement sont limitées, selon la cause. Le diagnostic et l’information des patients sont donc d’autant plus importants.
Thomas Hummel du Centre interdisciplinaire de l’odorat et du goût, Clinique d’oto-rhino-laryngologie, Hôpital universitaire Carl Gustav Carus à Dresde (Allemagne). En conséquence, la perte d’odorat peut également entraîner une forte dégradation de la qualité de vie, voire une dépression [2,3]. La prévalence de l’anosmie, c’est-à-dire la diminution importante, voire l’absence totale, de la perception olfactive, est estimée à environ 5% dans les études européennes, tandis que 15% de la population souffre d’une diminution légère à moyenne (hyposmie) [4,5]. Les causes de la déficience olfactive peuvent être multiples, allant de troubles liés à l’âge à des problèmes sinonasaux, des séquelles d’événements traumatiques à des effets post-infectieux, a expliqué le Dr Julien Hsieh, de l’Unité de neurosciences cliniques, Université de Genève. L’une des causes les plus fréquentes de la perte de fonction olfactive est une maladie des sinus, comme la rhinosinusite chronique avec ou sans polypose nasale.
Anosmies post-traumatiques et perte d’odorat post-infectieuse
Jusqu’à 56% des patients peuvent souffrir d’une perte d’odorat après un traumatisme crânien. Pour ce groupe, un entraînement olfactif peut être proposé dans un premier temps : Différentes odeurs telles que la rose, l’eucalyptus, le citron ou le clou de girofle sont soumises à un test olfactif trois fois par jour sur une période de 12 semaines. Dans une étude de contrôle randomisée, une amélioration a été constatée au bout de 3 mois. Toutefois, cet effet disparaît après 12 semaines supplémentaires, de sorte que les deux groupes présentent à nouveau les mêmes valeurs après un total de 24 semaines [6]. Un document de synthèse recommande néanmoins un entraînement olfactif à ces patients souffrant de traumatismes crâniens, car il peut améliorer la neurorégénération et la neuroplasticité et n’a pas d’effets secondaires [7]. La perte d’odorat post-infectieuse a été mise en avant dans le cadre de la pandémie de COVID-19, mais on observe également dans d’autres maladies, comme la grippe, que tous les symptômes disparaissent généralement après la fin de l’infection, mais que la perte d’odorat peut persister pendant des années, voire toute la vie. Dans ces cas également, l’entraînement olfactif constitue la première mesure à prendre : La probabilité d’une amélioration cliniquement significative est trois fois plus élevée si l’on procède à un entraînement olfactif en cas de troubles olfactifs post-infectieux [8–11]. Les corticostéroïdes ne sont pas recommandés dans le document de synthèse sur la dysfonction olfactive [7].
Diagnostic des troubles olfactifs
Le test olfactif est la pierre angulaire du traitement des troubles olfactifs. L’évaluation quantitative de la performance olfactive peut être effectuée par une évaluation subjective, des tests psychophysiques ou des méthodes électrophysiologiques. Bien que l’évaluation subjective soit la méthode la plus rapide et la plus simple pour évaluer la fonction olfactive, elle est souvent imprécise – probablement en raison des différences dans la souffrance et l’estime de soi – et ne correspond généralement pas à la capacité olfactive objective, comme l’a montré le professeur Basile Landis, chef du service de rhinologie et d’olfactologie aux Hôpitaux Universitaires de Genève, dans un travail (Fig. 1) [12,13]. Il existe de nombreux tests olfactifs différents dans le monde, qui peuvent être classés en trois catégories : les tests de seuil(threshold) permettent de déterminer la concentration la plus faible à laquelle une substance odorante peut être détectée [14,15]. Le test de discrimination(discrimination) évalue la capacité à distinguer les odeurs : Les sujets reçoivent par exemple trois échantillons d’odeur différents, dont deux sont identiques, et doivent dire quel échantillon ne correspond pas aux deux autres. Le test d’identification (identification) consiste à caractériser les odeurs à l’aide de quatre termes en général [15]. Le participant doit choisir le terme qui correspond à l’odeur. En principe, il est toujours préférable de tester plutôt que de simplement demander, selon le Dr Hsieh. Il recommande de tester différentes catégories d’odeurs, notamment pour une meilleure quantification de la fonction olfactive et pour distinguer les étiologies.

Examen clinique
Une perte d’odorat idiopathique est plutôt inhabituelle et peut être un signe précoce de la maladie de Parkinson [16] et aussi de la démence [17]. De même, la perte d’odorat idiopathique peut indiquer une mortalité accrue. Plus de 90% des hommes et des femmes atteints de la maladie de Parkinson idiopathique (MPI) présentent un trouble de l’odorat, qui est considéré comme un critère diagnostique d’appui dans le diagnostic clinique de la MPI. Le trouble olfactif peut apparaître plus de 10 ans avant l’apparition des symptômes moteurs [16]. Des troubles olfactifs sévères peuvent également apparaître dans différentes formes de démence [18,19]. Ils sont considérés comme un symptôme précoce de la maladie d’Alzheimer et apparaissent chez des patients dont les capacités cognitives ne sont pas encore très altérées.
Mesures thérapeutiques
Des options de traitement médicamenteux sont disponibles pour les affections nasales sous-jacentes. Les inflammations chroniques sous-jacentes, telles que la rhinosinusite chronique avec polypose nasale (CRSwNP), peuvent être traitées par des stéroïdes topiques, qui ont également un effet significatif sur la fonction olfactive [20]. L’administration de corticostéroïdes oraux par voie systémique pendant deux semaines permet d’obtenir une amélioration temporaire de l’odeur, mais l’hyposmie ou l’anosmie réapparaît lentement après environ 50 jours [21]. Si les corticostéroïdes ne fonctionnent pas pour le SRC, l’expert a recommandé la chirurgie endoscopique fonctionnelle des sinus (FESS) comme alternative. Les anticorps monoclonaux (biologiques) constituent une troisième option de traitement du CRSwNP. Les patients CRSwNP qui répondent à au moins trois des critères de la figure 2, dont l’un doit être une perte significative de l’odorat mesurée par un test olfactif, peuvent être éligibles pour un traitement biologique. Pour les CRSwNP ou les polypes nasaux, 3 médicaments biologiques sont actuellement autorisés en Suisse : Dupilumab, Mepolizumab et Omalizumab [23– 25]. La plupart des études ont analysé l’identification des odeurs. Le Dr Hsieh a expliqué qu’il était nécessaire de mener des études en vie réelle avec des tests plus robustes afin d’étudier les effets sur la sensibilité et la discrimination des odeurs. Lorsqu’un trouble de l’odorat n’est pas lié à une pathologie nasale, il existe peu d’options thérapeutiques et de recommandations [26, 27]. Seul l’entraînement olfactif, c’est-à-dire l’olfaction consciente de différentes odeurs plusieurs fois par jour, a pu démontrer une valeur thérapeutique [28].

Littérature :
1 Nordin S, et al : Effects of smell loss on daily life and adopted coping strategies in patients with nasal polyposis with asthma. Acta Otolaryngol 2011 ; 131 : 826-832.
2. Temmel AF, et al. : Characteristics of olfactory disorders in relation to major causes of olfactory loss. Arch Otolaryngol Head Neck Surg 2002 ; 128(6) : 635-641.
3. Croy I, et al. : Olfactory disorders and quality of life – an updated review. Chem Senses 2014 ; 39 : 185-194.
4. Landis BN, Hummel T : New evidence for high occurrence of olfactory dysfunctions within the population.
Am J Med 2006 ; 119 : 91-92.
5. Vennemann MM, et al : L’association entre le tabagisme et l’altération du goût et de l’odorat dans la population générale. J Neurol 2008 ; 255 : 1121-1126.
6 Langdon C, et al : Olfactory Training in Post- Traumatic Smell Impairment : Mild Improvement in Threshold Performances : Results from a Randomized Controlled Trial. J Neurotrauma 2018 ; 35(22) : 2641-2652.
7. Whitcroft KL, et al : Position paper on olfactory dysfunction : 2023, Rhinology 2023 ; 61(33) : 1-108.
8. Kattar N, et al : Olfactory training for postviral olfactory dysfunction : systematic review and meta-analysis. Otolaryngol Head Neck Surg 2021 ; 164(2) : 244-254.
9. Altundag A, et al : Olfactory training is helpful in postinfectious olfactory loss : a randomized, controlled, multicenter study. Laryngoscope 2015 ; 125(8) : 1763-1766.
10 Damm M, et al : Olfactory training is helpful in postinfectious olfactory loss : a randomized, controlled, multicenter study. Laryngoscope 2014 ; 124(4) : 826-831.
11. Hummel T, et al : Effets de l’entraînement olfactif chez les patients souffrant de perte olfactive. Laryngoscope 2009 ; 119(3) : 496-499.
12 Landis BN, et al : Ratings of overall olfactory function. Chem Senses 2003 ; 28(8) : 691-694.
13 Lötsch J, Hummel T. : Utilité clinique des performances olfactives auto-évaluées – une évaluation basée sur la science des données de 6000 patients. Chem Senses 2019 ; 44 : 357-364.
14. Croy I, et al : Comparaison entre les seuils d’odeur pour le phényl éthyl alcool et le butanol. Chem Senses 2009 ; 34 : 523-527.
15. Doty RL : Mesure de la fonction chimiosensorielle.
World J Otorhinolaryngol Head Neck Surg 2018 ; 4 : 11-28.
16. Haehner A, et al : Incidence de la maladie de Parkinson dans une large cohorte de patients avec perte idiopathique de l’odorat et du goût. Journal of Neurology 2019 ; 266 : 339-345.
17 Laukka EJ, et al : Marqueurs de dysfonctionnement olfactif et progression vers la démence : une étude de population sur 12 ans. Alzheimer & démence 2023 ; 19(7) : 3019-3027.
Driver-Dunckley E, et al. : Dysfonctionnement olfactif dans la maladie de Lewy et la maladie de Parkinson. Parkinsonism Relat Disord 2014 ; 20 : 1260-1262.
19. Pardini M, et al : Fonction olfactive dans le syndrome corticobasal et la démence frontotemporale. Arch Neurol 2009 ; 66 : 92-96.
20. Damm M, et al. : Diagnostic et traitement des troubles olfactifs. HNO 2019 ; 67 : 274-281.
Van Zele, et al. : Stéroïdes oraux et doxycycline : Deux approches différentes pour traiter les polypes nasaux. Allergy and Clinical immunology 2010 ; 125(5) : 1069-1076.
22. Fokkens WJ, et al : EPOS/EUFOREA update on indication and evaluation of Biologics in Chronic Rhinosinusitis with Nasal Polyps 2023. Rhinology 2023 ; 61(3) : 194-202.
23. information professionnelle Dupixent®,
www.swissmedicinfo.ch
24. Information professionnelle Nucala®, www.swissmedicinfo.ch
25. Information professionnelle Xolair®, www.swissmedicinfo.ch
26. Patel ZM, et al. : International consensus statement on allergy and rhinology. Olfaction. Int Forum Allergy Rhinol 2022 ; 12 : 327-680.
27 Doty RL : Traitements pour les troubles du goût et de l’odorat : une revue critique. Handb Clin Neurol 2019 ; 164 : 455-479.
28. Hummel T, et al : Position paper on olfactory dysfunction. Rhinology 2017 ; Suppl. 25 : 1-30. 1
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Information spécialisée succincte
Dupixent®.
W : Dupilumab.
I : Indiqué chez les enfants <12 ans (J.) uniquement sous forme de seringue prête à l’emploi.
Dupixent est approuvé chez : Patients (Pat.) ≥ 6 mois (M.) atteints de dermatite atopique (DA) modérée/sévère et (u.) pour le traitement (Behlg.) des adultes (Adultes) atteints de prurigo nodulaire (PN) modéré/sévère, lorsque le traitement par des traitements topiques délivrés sur ordonnance.
ne permet pas un contrôle adéquat de la maladie ou (o.) n’est pas recommandé.
Dupixent peut être utilisé avec ou sans corticostéroïdes topiques (CS).
En tant que traitement d’entretien complémentaire chez les patients atteints de cancer.
≥ 6 ans avec asthme sévère et critères suivants :
*nombre d’éosinophiles dans le sang ≥ 150 cellules/µL, contrôle insuffisant de l’asthme et ≥ 1 exacerbation sévère au cours des 12 derniers mois (malgré un traitement par inhalation et des bronchodilatateurs à longue durée d’action) ; *o. Insuffisance respiratoire permanente avec KS systémique. Comme traitement add-on avec KS intranasal chez les adultes atteints de rhinosinusite chronique sévère avec polypes nasaux (CRSwNP) qui ne peut pas être suffisamment contrôlée par KS systémique et/ou intervention chirurgicale, ainsi que chez les patients ≥ 12 ans, ≥ 40 kg atteints d’œsophagite à éosinophiles (EoE) qui sont insuffisamment traités par un traitement médicamenteux conventionnel, ne le tolèrent pas ou pour lesquels un tel traitement n’est pas envisageable. D : Dupixent est injecté par voie sous-cutanée. AD/PN : Adultes : dose initiale (dose de charge) 600 mg, puis 300 mg toutes les 2 semaines (q2w). AD : Enfants/adolescents (6-17 ans) : 15 kg. <30 kg : AnfDos.
300 mg (jour 1) et 300 mg (jour 15), puis 300 mg toutes les 4 semaines (q4w) ; 30 kg – <60 kg : AnfDos.
400 mg, puis 200 mg q2w ; ≥ 60 kg : AnfDos.
600 mg, puis 300 mg q2w.
AD : Enfants (6 m.-5 ans) : 5 kg – <15 kg :
200 mg q4w ; 15 kg – <30 kg : 300 mg q4w. Asthme : adultes/adolescents (≥ 12 ans) : *En cas d’asthme sévère, sous KS inhalé et bronchodilatateurs à longue durée d’action : Dose initiale. 400 mg, puis 200 mg q2w. *En cas d’asthme sévère, sous KS oraux : AnfDos. 600 mg, puis 300 mg q2w. Enfants (6-11 ans) : 15 kg – <30 kg : 300 mg q4w ; 30 kg – <60 kg : 200 mg q2w ou 300 mg q4w ; ≥ 60 kg : 200 mg q2w. CRSwNP : Adultes : 300 mg q2w. EoE : adultes/adolescents (≥ 12 ans) 300 mg qw. Autres indications : voir information professionnelle. CI : hypersensibilité à la substance active/à l’excipient. VM : contient du sodium ( <1 mmol/dose). Réactions d’hypersensibilité : En cas d’hypersensibilité systémique générale (immédiate ou retardée), arrêter immédiatement l’utilisation de Dupixent et instaurer un traitement approprié. Hyperéosinophilie : Des cas de pneumonie à éosinophiles et de vascularite associée à une granulomatose à éosinophiles avec polyangéite ont été rapportés sous traitement par Dupixent. Chez les patients présentant une hyperéosinophilie, le médecin doit être particulièrement attentif à l’apparition d’une éruption cutanée vascularisée, d’une aggravation des symptômes pulmonaires, de complications cardiaques et/ou d’une neuropathie. Helminthose préexistante : traiter avant le traitement par Dupixent. En cas d’infection pendant le traitement par Dupixent et d’absence de réponse au traitement de l’helminthose, Dupixent doit être arrêté jusqu’à la disparition de l’infection. Conjonctivite/kératite : des cas de conjonctivite et de kératite ont été rapportés avec Dupixent chez des patients atteints de DA. Les patients et les personnes qui s’occupent de jeunes enfants doivent signaler à leur médecin l’apparition ou l’aggravation de tout symptôme oculaire. Les patients (y compris les nourrissons et les jeunes enfants) qui développent une conjonctivite sous traitement par Dupixent et qui ne disparaissent pas après un traitement standard ou qui développent des signes de kératite doivent subir un examen ophtalmologique si nécessaire. Patient asthmatique : adapter le traitement de l’asthme uniquement en accord avec le médecin. Surveiller attentivement le patient après l’arrêt du traitement. IA : Éviter l’utilisation simultanée de vaccins vivants. EI : Réactions/œdème au site d’injection, conjonctivite, herpès labial, autres infections à virus herpès simplex (à l’exception de l’eczéma herpétique), (hyper)éosinophilie, arthralgies, insomnie, gastrite, entérobiose, céphalées et douleurs dentaires. P : Dupixent, 2 seringues/pistons prêts à l’emploi, 200 mg ou 300 mg. AK : B. ZI : sanofi-aventis (suisse) sa, 3, route de Montfleury, 1214 Vernier. Pour plus d’informations, voir www.swissmedicinfo.ch. Mise à jour de l’information : janvier 2024
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Texte/rédaction : Jens Dehn
Ce rapport a pu être réalisé grâce à l’aimable soutien de Sanofi (Suisse) S.A..
Source : Symposium “Oh what a smell !” dans le cadre du SGORL/SSORL Spring Meetings 2024, Lugano, 13.06.2024 ; Organisateur : Sanofi. sanofi-aventis (suisse) sa, 3, route de Montfleury, 1214 Vernier
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