L’évaluation des symptômes et des risques d’exacerbation est essentielle pour un traitement médicamenteux efficace. La classification des risques ABCD sert de base à cet effet. Les symptômes respiratoires et le nombre d’exacerbations permettent de poser l’indication du traitement, indépendamment du VEMS. Si une monothérapie n’est pas efficace, une bithérapie ou une “trithérapie” associant LAMA plus LABA à un stéroïde inhalé peut être utile, comme le confirment les données d’études récentes.
Selon la Ligue pulmonaire suisse, il y a environ 400 000 personnes atteintes de BPCO dans notre pays et les séquelles sont l’une des principales causes de décès [1]. Le tabagisme de longue durée est, avec l’exposition à d’autres polluants, le principal facteur de risque de broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO). Les fumeurs et ex-fumeurs de plus de 40 ans avec 20 “pack years” et une toux ont 50 % de chances de recevoir un diagnostic de BPCO [4]. Toutefois, environ un tiers des personnes concernées déclarent n’avoir jamais fumé. Les non-fumeurs atteints de BPCO ont des ramifications respiratoires particulièrement étroites, comme le montre une étude publiée en 2020 dans le JAMA [2].
Taux d’exacerbation et sévérité des symptômes essentiels pour l’indication
Les deux caractéristiques de la BPCO sont, d’une part, la toux avec ou sans expectoration et l’essoufflement et, d’autre part, l’obstruction de certaines parties des voies respiratoires. Au début, la toux ne survient que lors d’un effort physique, puis elle se manifeste également au repos. Comme la fonction pulmonaire, respectivement le VEMS1-(capacité en une seconde) n’est pas nécessairement directement liée à la qualité de vie, aux symptômes ou à la fréquence des exacerbations, le traitement médicamenteux de la BPCO est, depuis 2017, principalement basé sur la classification ABCD (Tab.1). La sévérité des symptômes peut être évaluée soit par le test d’évaluation de la BPCO (score CAT), soit par le questionnaire modifié du British Medical Research Council (mMRC). (Tab. 2). Les médicaments de base chez les patients symptomatiques présentant une obstruction légère ou modérée avec ou sans exacerbations fréquentes sont les anticholinergiques à longue durée d’action (“long-acting muscarinic-receptor antagonist”, LAMA) et les bêta-agonistes à longue durée d’action (“long acting beta agonist”, LABA). Le choix entre LABA et LAMA dépend de la réponse individuelle du patient. Il existe des preuves que les LAMA sont légèrement plus efficaces pour prévenir les exacerbations et que les LABA ont tendance à avoir un effet symptomatique plus important [4].
Combinaisons LAMA/LABA comme traitement de deuxième intention
Un traitement combiné par LAMA+LABA a un effet supplémentaire modéré sur la fonction pulmonaire et la qualité de vie par rapport à une monothérapie bronchodilatatrice. Les associations LAMA/LABA sont autorisées en Suisse comme traitement de deuxième ligne chez les patients pour lesquels une monothérapie n’est pas efficace (tableau 3). Dans la prévention des exacerbations, les associations LAMA/LABA sont également supérieures à l’association CSI/LABA et provoquent significativement moins de pneumonies [4]. Contrairement à l’asthme bronchique, il existe de moins en moins de preuves en faveur d’un traitement continu avec des CSI ou une combinaison CSI/LABA [4]. Le sevrage et l’arrêt du traitement par CSI sont possibles chez la majorité des patients atteints de BPCO sans impact sur la fréquence des exacerbations, en particulier s’ils ne présentent pas d’éosinophilie sanguine [4]. Les CSI plus LABA peuvent constituer le premier choix chez les patients ayant des antécédents ou des caractéristiques d’asthme et de BPCO. Les indices anamnestiques sont les allergies, l’asthme, la rhinite dans l’anamnèse personnelle ou familiale et l’éosinophilie sanguine.
La “triple thérapie” présente des avantages supplémentaires avérés
Si d’autres exacerbations surviennent malgré un traitement par LAMA+LABA ou LABA+ICS, le traitement par une triple combinaison (LAMA+LABA+ICS) peut être utile pour réduire le taux d’exacerbations (tableau 3). Il est recommandé de consulter des pneumologues avant d’introduire une combinaison de trois médicaments. Un point important est la bonne technique d’inhalation, cela est crucial pour l’efficacité. Il faut donc s’entraîner avec le patient et procéder à des vérifications périodiques [4]. Si, malgré l’entraînement, la technique d’inhalation reste insuffisante, il convient d’envisager le choix d’un autre système d’application, l’utilisation éventuelle d’un dispositif d’aide à l’inhalation et l’utilisation d’un nébuliseur humide.
Les résultats de l’étude de phase III randomisée et en double aveugle ETHOS (“Efficacy and Safety of Triple Therapy in Obstructive Lung Disease”) montrent que les patients atteints de BPCO peuvent bénéficier d’une trithérapie comprenant un spray de cortisone, LAMA et LABA. La trithérapie a permis de réduire significativement le nombre d’exacerbations annuelles par rapport à la bithérapie et a démontré une amélioration de la qualité de vie. L’étude, d’une durée de 52 semaines, a porté sur 8509 patients atteints de BPCO modérée à très sévère et provenant de 26 pays différents. La triple combinaison testée était composée d’un corticoïde inhalé, le budésonide (à deux doses différentes), d’une préparation de LAMA (glycopyrrolate) et d’un β2-sympathomimétique, le formotérol (LABA). Les deux bithérapies testées contenaient respectivement du LAMA et du LABA (glycopyrrolate et formotérol) et un stéroïde et du LABA (budésonide et formotérol).
Les non-fumeurs peuvent aussi être atteints de BPCO
Une équipe de recherche dirigée par le Dr Benjamin M. Smith, spécialiste du département médical du centre médical Irving de l’université de Columbia à New York, a analysé les données de trois études sur des fumeurs et des non-fumeurs avec et sans BPCO, dans lesquelles le ratio dit “airway to lung” des sujets a été déterminé. Pour ce faire, la largeur des ramifications bronchiques est mesurée dans 19 régions anatomiques sur des images de tomographie assistée par ordinateur et mise en relation avec le volume total des poumons. Plus ce rapport est faible, plus les voies respiratoires sont étroites [2,3]. Les trois études (MESA, CanCOLD et SPIROMICS) ont montré que les fumeurs avaient plus de mal à respirer : Les non-fumeurs qui ont développé une BPCO avaient des ramifications respiratoires beaucoup plus étroites que les fumeurs qui n’ont pas développé de BPCO malgré leur forte consommation de tabac.
Littérature :
- Ligue pulmonaire suisse : COPD Pocket Guide. Diagnostic et soutien à la gestion pour les professionnels, www.lungenliga.ch (dernier appel 05.02.2021)
- Smith BM, et al : Association of Dysanapsis With Chronic Obstructive Pulmonary Disease Among Older Adults. JAMA 2020 ; 323(22) : 2268-2280. www.cuimc.columbia.edu/news/undersized-airways-may-explain-why-nonsmokers-get-copd
- Les pneumologues en réseau, www.lungenaerzte-im-netz.de (dernière consultation 05.02.2021)
- www.medix.ch/wissen/guidelines/lungenkrankheiten/copd (dernier appel 05.02.2021)
- swissmedic : www.swissmedicinfo.ch
Littérature complémentaire :
- www.lungeninformationsdienst.de/krankheiten/copd/diagnose/index.html
PRATIQUE DU MÉDECIN DE FAMILLE 2021 ; 16(2) : 20-22