Une patiente de 3,5 ans souffrait régulièrement d’infections respiratoires – pneumonies et bronchites obstructives – tout en présentant un développement physique par ailleurs normal. Des tests de laboratoire et une analyse génétique ont finalement permis de faire la lumière sur la situation.
Contexte : Une jeune patiente âgée de trois ans et demi a été adressée à la pneumologie pédiatrique en raison de pneumonies récurrentes et de bronchites obstructives régulières depuis l’âge de six mois. Les bronchites obstructives survenaient environ cinq fois par an, mais ne nécessitaient jamais d’hospitalisation et pouvaient être bien traitée par inhalation en ambulatoire. Après un total de quatre épisodes de bronchite, la patiente a développé des symptômes cliniques de pneumonie, qui ont pu être traités avec succès en ambulatoire avec des antibiotiques administrés par voie périorale. En outre, un diagnostic d’otite moyenne aiguë a été posé au cours de la première année de vie. Entre les épisodes de symptômes respiratoires, la patiente était physiquement résistante et ne présentait aucune dyspnée. Son développement et sa croissance étaient normaux, et elle ne présentait aucun symptôme chronique. Les antécédents familiaux suggéraient l’existence d’une atopie chez les deux parents, mais aucune autre maladie congénitale ou grave n’était connue. La mère de l’enfant souffre de la maladie de Graves avec hypothyroïdie et présente des sinusites récurrentes depuis plusieurs années.
Antécédents et diagnostic : L’examen médical et une radiographie pulmonaire n’ont révélé aucune anomalie. La mesure de la fonction pulmonaire n’a pas été concluante en raison de la coopération modérée à ce jeune âge, mais aucun signe d’inflammation chronique des voies respiratoires n’a été trouvé. Le test d’allergie était normal. Les analyses biologiques ont montré une hypogammaglobulinémie modérée, mais avec une réponse spécifique adéquate en anticorps aux vaccins à base de protéines et de polysaccharides. En revanche, les IgG spécifiques de la rougeole et de la varicelle n’ont pas pu être détectés malgré deux vaccinations. Une anomalie des cellules T ainsi que des troubles de la fonction des neutrophiles ou du complément ont pu être exclus. Un vaste dépistage génétique des immunodéficiences congénitales (séquençage de l’exome) a révélé une variante hétérozygote du gène PIK3CD, héritée de la mère et inconnue jusqu’alors, qui, associée aux symptômes cliniques, est compatible avec un syndrome de PI3K-delta activé (APDS) de type 1.
Diagnostic initial en cas de suspicion d’immunodéficience congénitale
Si vous avez des questions ou des doutes, vous devriez contacter un expert, par exemple à l’hôpital pédiatrique de Zurich, qui est le seul centre médical hautement spécialisée (MHS) en Suisse dans le domaine des clarifications spéciales pour les enfants atteints d’immunodéficience primaire (génétique). (Également possible par télé-immunologie : aerzte.immunologie@kispi.uzh.ch) |
Traitement et évolution : Le traitement choisi était une substitution d’IgG par voie intraveineuse depuis l’âge de quatre ans. Cette intervention a rapidement permis de supprimer complètement les symptômes et est depuis effectuée régulièrement toutes les quatre semaines en ambulatoire dans une clinique de jour.
Commentaire du PD Dr. Johannes Trück : L’APDS est un déficit immunitaire congénital à transmission autosomique dominante, qui repose sur un dysfonctionnement du système immunitaire. Les symptômes peuvent être très variés, ce qui rend le diagnostic difficile. L’augmentation de l’activité de la phosphoinositide 3-kinase (PI3K) entraîne une transmission trop forte des signaux dans les cellules, activant le système immunitaire et provoquant une prolifération continue des cellules immunitaires. En outre, les cellules autoréactives peuvent être produites en excès, ce qui peut déclencher des maladies auto-immunes. Une prolifération aberrante peut entraîner un vieillissement prématuré et la mort des cellules immunitaires. En raison de l’immunodéficience qui en résulte, les patients atteints d’APDS souffrent souvent d’infections fréquentes pendant l’enfance, notamment d’infections associées aux muqueuses telles que des otites, des sinusites ou des bronchites/pneumonies – comme dans le cas présent. Cependant, le type et l’intensité des plaintes sont très variables, et les symptômes peuvent aussi n’apparaître qu’à l’âge adulte. En raison des infections fréquentes, des lésions organiques, notamment des lésions des poumons, sous forme de bronchectasies, peuvent survenir. Outre l’immunodéficience, certains patients présentent une lymphoprolifération, comme un gonflement des amygdales, des végétations adénoïdes, des ganglions lymphatiques ou de la rate. Le dérèglement immunitaire peut se manifester par la formation d’auto-anticorps et donc par le développement de maladies auto-immunes qui provoquent des cytopénies, des thyroïdites ou des arthrites. En outre, certains patients développent des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin. Par ailleurs, les patients atteints d’APDS ont un risque accru de développer un lymphome.
PD Dr. Dr. med. Johannes Trück
Médecin principal en immunologie pédiatrique et chef du groupe de recherche
Hôpital pédiatrique de Zurich et Centre de recherche pour l’enfant (FZK), Université de Zurich (UZH), Zurich, Suisse
« ELVIS » comme acronyme pour une susceptibilité pathologique à l’infection
E – Agents pathogènes (« Erreger ») : infections par des pathogènes opportunistes, par exemple la pneumonie à Pneumocystis jirovecii, infections récurrentes et graves par des germes courants L – Localisation : infections dans des localisations inhabituelles, par exemple abcès cérébral/hépatique, ou infections polytopiques graves récurrentes V – Évolution (« Verlauf ») : évolution prolongée des infections ; réponse insuffisante aux antibiotiques ; évolution inhabituelle des infections avec des agents pathogènes « courants » (par exemple, les virus de l’herpès) I – Intensité : infections présentant un degré élevé de gravité, par exemple septicémie, méningite ou pleuropneumonie S – Somme : infections fréquentes (mineures), par exemple infections des voies respiratoires supérieures, bronchite obstructive, otite moyenne (un nombre « normal » d’infections est difficile à définir et dépend fortement de l’âge) Source : https://www.awmf.org/leitlinien/detail/ll/112-001.html |
Ce texte a été rédigé avec le soutien financier de Takeda Pharma AG.
C-ANPROM/CH/CUVI/0012 06/2021
Article en ligne depuis le 07.09.2021