Lors d’un apéritif pour les médias à Zurich, il a été question de la sécurité des médicaments dans le monde et en Suisse. La pharmacovigilance est une stratégie qui permet d’évaluer en permanence les bénéfices et les risques d’un médicament et d’en prévenir les éventuels effets négatifs. Comment toutes les instances du système de santé peuvent-elles collaborer dans l’intérêt du patient et quels sont les domaines d’action particulièrement pertinents (comme les interactions médicamenteuses) ?
(ag) Le Dr. med. Lutz Petersdorf, Berlin, a parlé de la “pharmacovigilance”. Il s’agit d’un processus de surveillance continue du profil de sécurité des médicaments, qui est inclus dans les coûts de recherche et qui implique une coopération entre les fabricants de médicaments, les autorités, les médecins et les patients. Le processus repose sur quatre piliers : identifier, évaluer, comprendre et éviter.
D’une part, les signaux doivent être détectés, ce qui signifie qu’un système mondial de pharmacovigilance et une “recherche” structurée de signaux de sécurité potentiels sont nécessaires. Pour ce faire, nous utilisons des rapports de cas individuels, des résultats d’études, de la littérature/des publications, des demandes des autorités et des rapports de presse (vous avez donc une vue d’ensemble des preuves). Il s’agit en outre d’évaluer régulièrement ces preuves, ce qui implique également d’identifier les lacunes dans les connaissances. Il en résulte des rapports de sécurité (compréhension) pour les autorités réglementaires nationales et internationales, ainsi que des analyses bénéfice/risque visant soit à augmenter le bénéfice, soit à minimiser le risque éventuel (c’est-à-dire une stratégie d’évitement prudente). Les mesures de minimisation de routine sont par exemple des modifications de l’information professionnelle et des changements d’emballage ; en outre, du matériel d’information, des cartes de patient, ce que l’on appelle la “Dear HealthCare Professional Communication” et une distribution contrôlée peuvent contribuer à minimiser les risques. Inversement, ces évaluations des risques stimulent également la recherche (études de sécurité/d’efficacité post-autorisation) lorsque des lacunes ont été identifiées dans un domaine. “Les plans de gestion des risques spécifiques à un produit décrivent clairement tous les risques connus d’un médicament, expliquent les mesures de prévention et de minimisation et font l’objet d’un accord ou d’une approbation par les autorités réglementaires”, a déclaré l’orateur. La pharmacovigilance est donc un domaine d’action important tant pour les autorités que pour les fabricants et ne peut fonctionner que par un échange entre les deux instances. L’évaluation du rapport bénéfice/risque doit alors prendre en compte l’ensemble des patients, mais aussi le cas individuel, car les deux niveaux sont pertinents et peuvent conditionner différentes mesures de minimisation des risques.
La sécurité des médicaments en Suisse
Le Dr Marco Egbring, pharmacologie clinique à l’hôpital universitaire de Zurich, a discuté des conséquences financières des effets indésirables des médicaments. Une étude de Bates et al. a montré dès 1997 [1] qu’environ un tiers de tous les effets indésirables liés à des erreurs pouvaient être évités et que deux tiers pouvaient au moins être atténués. Les effets secondaires prolongent de manière significative la durée d’hospitalisation (de 2,2 jours) et entraînent également des coûts consécutifs élevés : selon l’étude, la seule prévention des effets secondaires évitables aurait permis d’économiser 4685 dollars par cas (ces chiffres sont même plutôt bas selon les auteurs). Les efforts visant à réduire les coûts supplémentaires en développant des stratégies préventives sont donc plus que justifiés. Une possibilité est le dépistage de certaines caractéristiques génétiques qui impliquent un risque d’effets secondaires toxiques des médicaments [2]. “La polypharmacie est également un problème important : 16,7% de la population totale prennent cinq médicaments ou plus en même temps, et ce chiffre atteint 41,2% chez les plus de 65 ans. Les interactions médicamenteuses, si elles sont considérées comme dangereuses, doivent donc être évitées dans tous les cas”, a déclaré le Dr Egbring. Par exemple, des instruments électroniques permettent de détecter et surtout de visualiser les interactions cliniquement pertinentes (l’orateur a fait référence au service d’EPha.ch). Bien entendu, des outils tels que le contrôle des interactions ne remplacent pas la décision éclairée du médecin, mais favorisent simplement sa capacité à prendre des décisions. Les alternatives thérapeutiques fondées sont représentées graphiquement de manière compréhensible dans une matrice. Le médecin est soutenu dans sa compétence à choisir une alternative thérapeutique pertinente.
Source : “Sécurité des médicaments”, apéritif pour les médias, 21 octobre 2014, Zurich
Littérature :
- Bates DW, et al : The costs of adverse drug events in hospitalised patients. Adverse Drug Events Prevention Study Group. JAMA 1997 ; 277(4) : 307-311.
- Wusk B, et al : Thiopurine S-methyltransferase polymorphisms : efficient screening method for patients considering taking thiopurine drugs. Eur J Clin Pharmacol 2004 Mar ; 60(1) : 5-10.
PRATIQUE DU MÉDECIN DE FAMILLE 2015 ; 10(1) : 2