Dans le passé, le diagnostic de fibrose kystique (CF) était synonyme de décès précoce, généralement avant l’âge de 30 ans. Cette maladie héréditaire raccourcit encore la vie, mais les progrès de la recherche et les nouvelles thérapies ont déjà permis d’augmenter l’espérance de vie moyenne en Europe centrale à plus de 50 ans. Pour les adultes atteints de mucoviscidose, il existe désormais un certain nombre d’options pour gérer la maladie.
L’introduction des enzymes pancréatiques a constitué une avancée thérapeutique majeure, mais la création de centres où les patients atteints de mucoviscidose sont traités de manière ciblée a également contribué à augmenter la probabilité de survie, a déclaré en guise d’introduction le Dr Sivagurunathan Sutharsan, médecin-chef à la clinique de pneumologie, Ruhrlandklinik, Universitätsmedizin Essen (D). En 1989, le gène CFTR a été découvert. En 2014, l’ivacaftor (IVA) a été la première substance active à être autorisée en Suisse pour un petit groupe de patients (5-6%). Depuis, il existe trois autres modulateurs, disponibles sous forme de combinaison et, depuis août 2020, sous forme de triple. (Tab.1).
Complications croissantes avec l’âge
Les premières complications apparaissent dès la petite enfance : les enfants se présentent souvent (jusqu’à 25%) avec l’iléus méconial comme indicateur le plus précoce, le plus souvent (>85%), une insuffisance pancréatique est déjà présente et les infections pulmonaires sont souvent déjà présentes (mais seulement <25% de Pseudomonas aeruginosa). Au cours de l’enfance et de l’adolescence, la proportion de P. aeruginosa augmente pour atteindre environ 45%, mais d’autres organes entrent également en jeu, notamment les maladies du foie et les polypes nasaux (25%). Enfin, à l’âge adulte, le tableau complet apparaît, avec notamment de graves maladies pulmonaires et osseuses (aperçu 1).
Au cours de la première décennie de la vie, Staphylococcus aureus et Haemophilus influenzae sont les bactéries les plus fréquemment isolées des crachats dans la mucoviscidose, tandis que Pseudomonas aerugiosa est beaucoup plus fréquent au cours de la deuxième et de la troisième décennie.
Les exacerbations augmentent le risque
La prévention des exacerbations est un élément central de la prise en charge de la mucoviscidose. “Les patients qui ont plus de deux exacerbations pulmonaires par an doivent s’attendre à un risque accru de décès ou de transplantation pulmonaire”, a expliqué le Dr Sutharsan. La réduction du nombre d’exacerbations et de la perte de fonction pulmonaire qui s’ensuit devrait donc être un objectif majeur de la prise en charge de la mucoviscidose.
Lors de la prise en charge, une physiothérapie est généralement prescrite afin d’évacuer les sécrétions des poumons, une antibiothérapie est indiquée en cas d’infection chronique par des pseudomonas ou des staphylocoques, des macrolides tels que l’azithromycine sont souvent utilisés en traitement continu en cas de colonisation chronique par des pseudomonas. Si les patients saignent, on a la possibilité de réaliser une occlusion des artères bronchiques. Le traitement par modulateurs du CFTR est une nouveauté (aperçu 2).
Modulateurs CFTR
Dans le cas de la mutation la plus fréquente, F508del, la protéine est certes produite, mais elle est généralement dégradée dans la cellule. Mais avec les nouveaux modulateurs, les correcteurs CFTR Elexacaftor (ELX) et Tezacaftor (TEZ), le canal chlorure est stabilisé sur différents sites de liaison, ce qui empêche la dégradation. Il s’ensuit un transport dirigé vers la surface cellulaire, où le potentialisateur CFTR Ivacaftor peut augmenter la probabilité d’ouverture du canal chlorure. Il existe aujourd’hui 4 modulateurs CFTR approuvés. Alors que l’ivacaftor peut être utilisé chez environ 5% de la population atteinte de mucoviscidose, la nouvelle triple combinaison ivacaftor/tézacaftor/lexacaftor permet de traiter environ 90% des patients dans le monde. Pour pouvoir bénéficier du traitement, il faut avoir au moins une mutation 508 sur un allèle. “La deuxième mutation n’a généralement pas d’importance”, explique le Dr Sutharsan. Les effets secondaires décrits sont principalement des éruptions cutanées et des démangeaisons, qui sont généralement bien contrôlées par des antihistaminiques oraux ou des stéroïdes. Un bon effet n’est toutefois pas seulement décrit sur les poumons, mais aussi sur les sinus.
Dans sa clinique d’Essen, le Dr Sutharsan et ses collègues ont mis 133 patients atteints de mucoviscidose sous le nouveau triple ELX/TEZ/IVA (80 homozygotes, 32 + 21 (cas difficiles) hétérozygotes). Dans le groupe homozygote, 96 hospitalisations sous traitement i.v. ont eu lieu au cours des 12 mois précédents en raison d’exacerbations. En 6 mois de triple traitement, ce nombre a été réduit à seulement 5 thérapies IV. La situation était similaire chez les hétérozygotes : Les 29 + 74 (cas de rigueur) traitements IV avant l’introduction sur une période de 12 mois sont devenus seulement 2 + 7 (cas de rigueur) traitements IV au cours des 6 premiers mois sous ELX/TEZ/IVA. Bien qu’il faille attendre la suite des événements, les chiffres “montrent déjà les énormes progrès thérapeutiques apportés par les nouveaux modulateurs”, a conclu le Dr Sutharsan.
Source : 128. Congrès de la Société allemande de médecine interne (DGIM)
InFo PNEUMOLOGIE & ALLERGOLOGIE 2022 ; 4(2) : 30-31