Environ la moitié des balanoposthites et des vulvovaginites sont d’origine allergique. Outre une anamnèse minutieuse concernant les habitudes d’hygiène et les produits utilisés, l’anamnèse sexuelle revêt une grande importance.
En cas de modifications inflammatoires dans la région génitale, on pense souvent en premier lieu à une infection, qu’elle soit transmise par voie sexuelle ou non. Même s’il est juste de rechercher et d’exclure ces causes infectieuses, près de 50% des balanoposthites et une proportion encore plus importante des vulvovaginites sont d’origine non infectieuse. D’autres dermatoses inflammatoires peuvent également se manifester dans la région génitale. Une partie d’entre elles sont d’origine allergique. Outre une anamnèse précise concernant les habitudes d’hygiène et les produits utilisés, l’anamnèse sexuelle revêt une importance capitale dans la recherche des causes de ces réactions allergiques dans la pratique quotidienne (médecin de famille). Bien que plus de 90% des patients souhaitent une telle anamnèse sexuelle, moins de la moitié d’entre eux la réalisent.
Selon le mécanisme immunologique de la sensibilisation et la réaction clinique qui en résulte, on peut distinguer essentiellement trois formes de réactions allergiques dans la région génitale : Les réactions de type immédiat (type I), les réactions de type tardif (type IV) et l’exanthème médicamenteux fixe (réaction de type IV médiée par des lymphocytes T CD8+ localisés).
Réactions tardives
Les réactions de type tardif, qui se traduisent par de l’eczéma, sont probablement les plus fréquentes. Dans la région génitale, ce sont surtout les eczémas de contact irritatifs et allergiques qui sont importants. Cependant, on observe également des eczémas atopiques et séborrhéiques dans la région génitale, qui doivent être délimités par un diagnostic différentiel. La morphologie typique de l’eczéma avec lichénification et desquamation (Fig. 1) n’est pas toujours visible. On observe souvent un érythème prurigineux uniforme, parfois un œdème (Fig. 2). Une lichénification et une excoriation peuvent se produire dans la région des grandes lèvres. L’atopie peut être recherchée par l’anamnèse et les prick-tests.
Une anamnèse détaillée et minutieuse de l’irritation, qu’elle soit mécanique, par exemple en cas de rapports sexuels/de masturbation prolongés et répétés, ou chimique, par exemple en raison de la présence d’ammoniaque dans l’urine, est essentielle. Outre l’anamnèse sexuelle, il convient donc de poser des questions sur les problèmes d’incontinence.
Les préservatifs (latex, accélérateurs en caoutchouc), les lubrifiants et les jouets sexuels doivent être recherchés lors de la recherche de toxines de contact. (Tab.1). Il ne suffit pas de noter que, par exemple, des préservatifs ont été utilisés – la marque et le produit spécifique doivent également être connus afin d’identifier les revêtements respectifs, qui peuvent aller des spermicides aux parfums en passant par les colorants (fluorescents). En ce qui concerne les substances appliquées en plus, l’imagination des patients est sans limite : Cela va des anesthésiques locaux pour prolonger les performances sexuelles à l’application de baume du tigre dans le cadre de pratiques sadomasochistes. Parfois, la toxine doit également être recherchée chez le partenaire sexuel. Par pudeur, les patients taisent souvent les dispositifs de soins, de lubrification ou autres appliqués sur les parties génitales, d’où la nécessité d’aborder ce sujet de manière ciblée. Ce même sentiment de honte est souvent à l’origine d’une auto-thérapie, qui peut à son tour conduire à une allergie de contact non sexuelle. Il convient donc d’établir l’anamnèse des traitements antérieurs et, si possible, de les clarifier par un test épicutané.
Sur le plan thérapeutique, après avoir éliminé les facteurs causaux, on peut, dans la mesure du possible, recourir à un nettoyage doux, à des soins relipidants et, éventuellement, à des stéroïdes topiques. Il faut savoir que les bases de crème ont tendance à brûler plus que les pommades au niveau des muqueuses. De même, les bases de crème contiennent davantage de conservateurs, ce qui peut à nouveau entraîner une irritation ou une allergie de contact secondaire.
Les patients doivent toujours être amenés à un équilibre thérapeutique en ce qui concerne leurs habitudes d’hygiène, en évitant le manque de nettoyage ainsi que les soins excessifs avec l’utilisation fréquente de détergents irritants. Cela est particulièrement important lorsque des traitements préalables ont déjà eu lieu. Un traitement inadapté ou trop intensif, souvent accompagné d’un changement rapide de préparation en cas d’absence de réponse, peut entraîner la perpétuation de l’eczéma, raison pour laquelle il est parfois nécessaire d’interrompre temporairement tout traitement dans ces situations.
Réactions immédiates
Les réactions de type immédiat dans la région génitale sont beaucoup plus rares que les allergies de type tardif. La symptomatologie peut être localisée et se manifester par un œdème ou une urticaire, mais elle est nettement plus marquée chez près des trois quarts des patients présentant une réaction systémique pouvant aller jusqu’à l’anaphylaxie. Les allergies au plasma séminal sont le plus souvent dirigées contre l’allergène majeur, l’antigène spécifique de la prostate (PSA), qui présente une homologie de séquence avec Can f 5, l’allergène majeur de l’allergie aux poils de chien. Cette réaction croisée peut éventuellement expliquer l’apparition de la symptomatologie lors du premier rapport sexuel non protégé, si une allergie aux poils de chien est déjà présente au préalable. La détection d’IgE spécifiques contre le plasma séminal et un prick-to-prick positif sont des éléments de diagnostic.
D’autres allergènes de type immédiat pertinents dans la région génitale sont le latex (préservatifs) avec les allergènes principaux Hev b 1 et Hev b 6, contre lesquels des IgE spécifiques peuvent également être détectées.
Les allergènes de type immédiat provenant d’aliments (par ex. arachide, noix du Brésil) et de médicaments (par ex. amoxicilline) peuvent également être transmis par le sperme dans le cadre d’un hétéro-transfert et déclencher ainsi des réactions.
Exanthème médicamenteux fixe
La région génitale est un site de prédilection de l’exanthème médicamenteux fixe, avec plus de 50% des cas. Chez l’homme, des bulles apparaissent sur le gland ou le sillon coronaire, et chez la femme, sur la vulve, sur des érythèmes livaires. Souvent, il n’y a plus de bulles visibles, mais seulement des érosions ou des ulcérations avec des bords livide (fig. 3). Par conséquent, le diagnostic différentiel peut être difficile à établir, en particulier lors du premier épisode, si l’on n’y pense pas. En cas d’épisodes répétés avec une anamnèse médicamenteuse appropriée, le diagnostic devient plus facile (encadré). Outre la réexposition avec réaction, le test épicutané positif réalisé par voie intraloculaire est probant, mais il n’est par nature pas toujours praticable. La seule solution thérapeutique est l’éviction des allergènes.
Messages Take-Home
- Plus de la moitié des balanoposthites et des vulvovaginites sont d’origine non infectieuse. Parmi elles, on trouve les allergies
- Réactions. Elles peuvent être classées en trois formes : Les réactions de type immédiat, les réactions de type tardif et l’exanthème médicamenteux fixe.
- Les réactions de type tardif, notamment l’eczéma de contact allergique, sont les plus fréquentes. Les eczémas atopiques et séborrhéiques doivent faire l’objet d’un diagnostic différentiel.
- Plus rarement, des réactions de type immédiat se produisent, le plus souvent avec une symptomatologie systémique. Les réactions allergiques peuvent être provoquées par le sperme (antigène spécifique de la prostate, aliments, médicaments) et le latex.
- Un exanthème médicamenteux fixe se manifeste chez les hommes au niveau du gland ou du sillon coronaire, et chez les femmes au niveau de la vulve sous forme de bulles ou d’érosions sur des érythèmes livaires.
Littérature complémentaire :
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