Les blessures à l’épaule font partie des blessures sportives les plus fréquentes et présentent un large spectre. Un examen clinique et d’imagerie correct permet de détecter les dommages structurels et de mettre en place les mesures thérapeutiques appropriées. Il est souvent utile de traiter les blessures rapidement afin d’obtenir un résultat fonctionnel aussi optimal que possible sur le plan de la reconstruction. Un grand nombre de blessures peuvent ainsi être traitées de manière peu invasive et souvent par arthroscopie. Une rééducation bien encadrée est importante et peut apporter des améliorations jusqu’à un an après la blessure à l’épaule.
L’épaule est l’une des articulations les plus fréquemment touchées par les blessures, en fonction du sport pratiqué. Pour de nombreux sports, l’épaule est l’élément central du mouvement et est donc soumise à des contraintes particulières. En raison de la grande mobilité de l’articulation et de l’anatomie complexe nécessaire à son fonctionnement, on trouve un large éventail de blessures. En principe, il faut distinguer les blessures aiguës des lésions de surcharge (“épaule du sportif”).
Anamnèse
L’anamnèse permet de comprendre les schémas de blessures fréquents et donc de délimiter les blessures spécifiques. L’orientation du bras dans l’espace au moment de la blessure et la direction de la force appliquée sont importantes. En outre, certains sports présentent des schémas de blessure et de sollicitation typiques.
Examen clinique
L’examen se fait sur un patient déshabillé et en comparant les côtés. Souvent, on remarque déjà des asymétries. Les résultats d’inspection typiques sont, outre les atrophies musculaires, les lésions de l’articulation acromio-claviculaire (AC) avec une clavicule latérale proéminente et la déformation dite “Popeye” en cas de rupture du tendon du long biceps.
Il est recommandé de procéder à un examen cursif de l’amplitude des mouvements non douloureux de la colonne cervicale (cervicale) afin d’exclure les principaux diagnostics différentiels de la douleur à l’épaule. La palpation permet d’accéder facilement à l’articulation AC (dolence à la pression, phénomène de “touche de piano”), la douleur à la pression dans le sillon bicipital indique des lésions du tendon du long biceps.
Le test de l’amplitude des mouvements actifs en comparaison latérale comprend la flexion et l’extension, l’abduction et l’adduction ainsi que la rotation interne et externe. Les limitations par rapport à l’amplitude de mouvement passive ou en comparaison latérale sont de bons indicateurs d’une perte de fonction des muscles concernés. Le test fonctionnel des muscles est réalisé pour le muscle deltoïde en abduction à partir de l’adduction ou en maintenant l’extension sous-maximale (“extension lag sign”), pour le muscle sous-scapulaire par exemple par le test “lift off” (impossible de soulever la main derrière le dos) ou “belly press” (Napoléon). (Fig. 1). Le muscle supra-épineux peut être testé à l’aide du test de Jobe (fonction de maintien en abduction à 90°/flexion horizontale à 30° en rotation interne, variante “empty can”) et du test de démarrage à 0° (diminution de la force en abduction) ; en cas de blessure du muscle infra-épineux, la force en rotation externe (“lag sign” de la rotation externe) est limitée. Ces tests décrivent en fait une perte de force et sont souvent difficiles à différencier dans le cadre d’une situation aiguë en raison de la douleur. Ils sont donc sensibles, mais peu spécifiques.
En cas de suspicion de luxation de l’épaule, le “signe d’appréhension” (défense en abduction en rotation externe) et le test de relocalisation (fig. 2) sont utiles. Les tests du biceps sont considérés comme peu spécifiques, mais l’irradiation de la douleur dans la partie supérieure du bras est typique.
Imagerie : radiographie, scanner, sonographie, IRM
L’imagerie initiale après une blessure est réalisée par des méthodes conventionnelles appropriées dans plusieurs plans définis. Le scanner, l’IRM (arthro) ou l’échographie constituent des compléments. L’avantage de l’examen dynamique en échographie ne compense pas toujours la forte dépendance à l’examinateur.
Fractures de l’humérus proximal
Les fractures de l’humérus proximal sont des blessures sportives rares et, lorsque l’os est sain, des blessures typiques “à fort impact”, par exemple lors de la pratique du motocross, du cyclisme ou même du ski (fig. 3). La confirmation du diagnostic se fait de manière conventionnelle par radiographie ap/neer et, le cas échéant, par imagerie axiale. En cas de situation complexe non claire, une tomodensitométrie est effectuée.
Les fractures non déplacées ou impactées en valgus stable se qualifient pour un traitement conservateur. Après une courte période d’immobilisation, la mobilisation passive (exercices de pendule) peut commencer. Si la situation reste stable radiologiquement (contrôle de l’évolution après environ dix jours), le traitement peut être poursuivi de manière active-assistive sans charge avec une augmentation progressive de l’amplitude des mouvements pendant environ six semaines. Les fractures déplacées et instables sont généralement traitées par ostéosynthèse par plaque à angle stable et par sangles de traction de la tubérosité. Les fractures déplacées de la tubérosité correspondent à des lésions osseuses de la coiffe des rotateurs et doivent être traitées chirurgicalement.
Fractures de la clavicule
Les fractures de la clavicule font partie des blessures les plus fréquentes, en particulier dans le cyclisme, mais aussi dans les sports d’hiver. La cause est généralement un traumatisme indirect avec chute sur l’épaule alors que le bras est attaché. Environ deux tiers des fractures sont localisées dans le tiers moyen. Cliniquement, outre la douleur locale à la pression et les palpitations, on observe souvent une crépitation. L’évaluation radiologique se fait par un cliché ap et un cliché tangentiel de la clavicule. Les fractures non déplacées sont traitées de manière conservatrice et fonctionnelle, éventuellement dans une écharpe pour réduire la douleur.
Les fractures ouvertes, les fractures menaçant de se perforer et les fractures présentant des lésions neurovasculaires concomitantes doivent être traitées chirurgicalement. Les autres indications chirurgicales sont un raccourcissement supérieur à 15 mm et une déviation de l’axe supérieure à 20°. Les patients ayant subi une intervention chirurgicale sont plus rapidement libérés de la douleur et présentent moins de pseudarthroses. Pour les fractures simples, il est possible de recourir à des procédures peu invasives (par ex. clous élastiques en titane, ill. 4), les fractures plus complexes sont traitées par ostéosynthèse par plaques.
Jusqu’à 30% des fractures de la clavicule sont localisées dans le tiers latéral. Les ligaments coracoclaviculaires, qui assurent la liaison entre la clavicule et l’omoplate, constituent un détail anatomique important. S’ils sont également blessés, le poids du membre supérieur entraîne une dislocation. Ces fractures cicatrisent mal et doivent plutôt être opérées – l’opération se fait, selon le type de fracture, avec des plaques, des plaques à crochets ou, éventuellement, avec une stabilisation coracoclaviculaire assistée par arthroscopie (fig. 5).
Blessures de l’articulation acromio-claviculaire
Les blessures de l’articulation scapulo-humérale surviennent également le plus souvent lors d’une chute sur le bras replié, plus rarement sur le bras tendu. Il peut en résulter des lésions de la capsule tendue de l’articulation AC, des ligaments coracoclaviculaires, voire des lésions du fascia musculaire environnant. L’aspect clinique est celui d’une dolence locale à la pression et, dans le cas de lésions plus graves, d’une extrémité latérale de la clavicule proéminente par rapport aux autres côtés, avec une instabilité verticale et souvent horizontale. L’instabilité verticale est confirmée radiologiquement sur le cliché de l’épaule/clavicule ap, plus ciblé avec un cliché de Zanca. En cas d’incertitude, une photographie comparative des côtés (panorama) sous charge peut aider. L’instabilité horizontale peut être représentée, au moins partiellement, sur des clichés axiaux de l’épaule. La classification se fait selon Rockwood (I-VI).
Les blessures mineures de type Rockwood I-II, caractérisées par une lésion isolée de la capsule articulaire AC, peuvent être traitées de manière fonctionnelle (écharpe uniquement comme traitement de la douleur). Les blessures plus graves (ill. 6) impliquant les ligaments coracoclaviculaires ne peuvent pas être réduites par le poids du bras et doivent donc plutôt être opérées. Afin d’obtenir une cicatrisation suffisamment tendue des ligaments blessés, l’opération doit être rapide (max. 14 jours après l’accident). Parmi les nombreuses procédures chirurgicales, la plaque à crochets (ablation du métal obligatoire) et la stabilisation coracoclaviculaire assistée par arthroscopie avec systèmes de poulies et éventuel cerclage acromioclaviculaire par fils sont aujourd’hui les plus fréquemment pratiquées. Les activités pénibles au-dessus du niveau de la tête ne sont pas autorisées avant au moins quatre mois. Les blessures symptomatiques manquées doivent être traitées par des greffes de tendons biologiquement augmentées.
Luxation de l’épaule
La luxation de l’articulation de l’épaule est l’une des blessures sportives les plus courantes. Dans la plupart des cas, il existe une luxation antéro-inférieure due à un mouvement forcé d’abduction-rotation externe, suivie d’une luxation postérieure (plutôt dans les cas de crises, d’accidents électriques) et très rarement d’une luxation purement inférieure (luxatio erecta). L’examen clinique révèle une posture de repos avec une limitation fonctionnelle douloureuse et une saillie de l’acromion (phénomène de l’épaulette). Il est important de vérifier et de documenter la fonction du nerf axillaire (muscle deltoïde), souvent également blessé.
Avant de tenter une réduction, il faut exclure une fracture radiologiquement (ap/Neer). Une luxation postérieure (Fig. 7) est souvent difficile à identifier, et une anamnèse précise peut être utile. En plus d’une analgésie suffisante, le patient et le praticien doivent être aussi détendus que possible pour réduire l’épaule.
Les manœuvres d’auto-réduction, comme celles de Stimson (Fig. 8) en position ventrale avec le bras suspendu ou la méthode de Davos, sont également possibles.
Une fois la réduction réussie, on procède à l’immobilisation corporelle, à un nouveau contrôle de la fonction du muscle deltoïde et à la documentation radiologique de la réduction. Les éventuelles lésions osseuses associées, telles que les fractures du rebord glénoïdien (fig. 9) ou les déchirures de la coiffe des rotateurs, peuvent déjà être détectées de cette manière et, le cas échéant, faire l’objet d’un examen plus approfondi par tomodensitométrie. Les lésions associées des tissus mous, telles que les lésions du labrum et de la capsule, les lésions de l’ancre du biceps et de la coiffe des rotateurs peuvent être examinées plus en détail à l’IRM. Nous considérons que l’IRM est indiquée chez les patients de moins de 30 ans et chez les patients présentant une pseudoparalysie ou des limitations fonctionnelles lors de contrôles cliniques au cours de l’évolution. En particulier, les patients de moins de 30 ans ayant une demande fonctionnelle élevée au-dessus de l’horizontale présentent un risque élevé de luxation et devraient donc plutôt être traités chirurgicalement en cas de blessures correspondantes.
Une immobilisation en cas de traitement conservateur est effectuée pendant 7 à 14 jours après l’administration de la douleur. Un exercice de physiothérapie visant à équilibrer les muscles stabilisateurs de l’épaule peut être immédiatement entrepris.
La reconstruction arthroscopique du labrum et de la capsule à l’aide de fils d’ancrage est aujourd’hui considérée comme la méthode standard de stabilisation de l’épaule en cas de lésions des tissus mous. Le risque de récidive après ces opérations est d’environ 12%. Pour les défauts glénoïdiens plus importants, qui surviennent souvent après des luxations récidivantes, il est souvent nécessaire de procéder à une reconstruction osseuse par copeaux d’os ou à un transfert de coracoïde (après Latarjet).
Blessures du tendon du long biceps
La lésion du tendon du long biceps intra-articulaire peut survenir par différents mécanismes. Les douleurs souvent décrites en position postérieure et irradiant dans la partie ventrale de l’humérus sont difficiles à classer avec une dolence à la pression dans le sillon, des tests fonctionnels douloureux du biceps (supination/flexion), une symptomatologie d’impaction pouvant aller jusqu’au saut du tendon en cas de lésion de la poulie du bice. L’arthro-IRM ne permet pas de détecter de manière fiable les lésions de l’ancrage du biceps (lésions SLAP : labrum supérieur d’avant en arrière) et de la bobine du biceps et ne sont souvent confirmées que par arthroscopie. Chez les jeunes patients, les techniques de reconstruction sont prometteuses. La ténotomie du tendon du long biceps est plus pragmatique. Les ruptures complètes du tendon du long biceps sont généralement la conséquence de changements dégénératifs et ne constituent pour la plupart qu’un problème esthétique, la fonction étant assurée par la courte tête du muscle. Il est possible de procéder à une ténodèse, qui est alors généralement réalisée par voie sous-pectorale.
Rupture du tendon du biceps distal
Le plus souvent, le fait de soulever une charge en flexion et en supination est à l’origine d’une rupture du tendon distal du biceps (ex. : musculation). Les patients ressentent une perte de force aiguë et entendent souvent une détonation. Cliniquement, le tendon n’est plus palpable, le test de Hook est positif (Fig. 10). Sur le plan fonctionnel, on observe une diminution de la force en flexion-supination par rapport au côté. Si le diagnostic n’est pas cliniquement certain, l’IRM ou l’échographie peuvent aider. Comme la blessure entraîne une perte complète de la fonction, le tendon doit être réinséré rapidement.
Blessures de la coiffe des rotateurs
Avec l’âge, les blessures de la coiffe des rotateurs sont de plus en plus fréquentes et sont souvent associées à des lésions dégénératives antérieures. Souvent, les patients sont gênés par des douleurs nocturnes en plus de la fonction limitée. L’examen clinique avec les déficits fonctionnels correspondants fournit des indications importantes. Les arrachements osseux de la manchette peuvent être suffisamment visualisés par radiologie conventionnelle ou par tomographie informatisée. Sinon, l’arthro-IRM ou l’échographie aident à confirmer le diagnostic. En cas de rupture traumatique, il est recommandé de procéder à une prise en charge rapide afin d’éviter la progression, la rétraction et l’engraissement du muscle. L’arthroscopie est un moyen élégant de détecter d’éventuelles lésions concomitantes dans l’articulation et de les traiter en même temps. L’objectif principal doit être une refixation anatomique stable, que l’on peut obtenir par exemple avec des ancres à fils (fig. 11). Un traitement ultérieur modéré – en particulier pour les lésions purement tendineuses – est une condition préalable à un bon résultat.
“Terrible triade” de l’épaule
La “terrible triade” de l’épaule désigne une luxation de l’épaule avec lésion de la coiffe des rotateurs et lésions neurologiques du nerf axillaire ou du plexus supérieur du bras. Cette blessure se produit jusqu’à 18% des luxations antérieures de l’épaule et est souvent négligée initialement. Jusqu’à 90% des symptômes neurologiques sont réversibles. Si la coiffe des rotateurs est refixée à temps, il y a une chance que l’épaule fonctionne bien, même si la fonction du muscle deltoïde ne se rétablit pas.
“Épaule d’athlète”
Ce terme désigne classiquement les troubles qui surviennent chez les sportifs pratiquant des sports de lancer, comme les handballeurs. La raison invoquée est une adaptation à l’effort sportif, qui entraîne une hyperlaxité due aux mouvements d’extension maximale. Il en résulte un décentrage de la tête humérale et, par conséquent, une symptomatologie combinée d’impingement et d’instabilité. Ces surcharges entraînent ensuite des pathologies de la coiffe des rotateurs (jusqu’à 83% des handballeurs sont concernés), du tendon du long biceps et de son ancrage, ainsi que du labrum. Il n’est pas rare que ces lésions de surcharge se terminent par des lésions complètes aiguës. Des efforts répétitifs unilatéraux, comme en natation ou en escalade, peuvent entraîner des coincements et des bursitides. Une réduction du volume d’entraînement et un entraînement compensatoire approprié peuvent aider.
Thérapie initiale
Si une lésion structurelle est exclue, il est généralement possible de continuer de manière fonctionnelle, en adaptant le traitement à la plainte. L’immobilisation ne doit être que de courte durée (7 à 14 jours) afin de préserver au maximum l’amplitude des mouvements. Une analgésie conséquente est également importante. Pour l’immobilisation, des fixations proches du corps sont généralement suffisantes (Fig. 12). Si l’évaluation initiale est difficile, il est utile de contrôler les patients au cours de l’évolution. Un exercice de physiothérapie peut aider à coordonner à nouveau les mouvements et à équilibrer les muscles de l’épaule. Les injections de cortisone n’ont pas leur place dans le traitement initial des blessures.
Littérature complémentaire :
- Doyscher R, et al : Blessures aiguës et lésions de surcharge de l’épaule dans le sport. Orthopédie 2014 ; 43(3) : 202-208.
- Doyscher R, Scheibel M : Examen clinique de l’épaule – un aperçu structuré. Dtsch Z Sportmmed 2013 ; 61 : 260-266.
- Gyftopoulos S, Recht M : The Throwing Shoulder. Le site
- Les lésions communes et leurs mécanismes sous-jacents. Semin Musculoskelet Radiol 2014 ; 18(4) : 404-411.
- Jensen G, et al : Lésions de l’articulation acromio-claviculaire. Unfallchirurg 2015 ; 118 : 1041-1055.
- Prudnikov OE, Prudnikov DO : Terrible triade de l’épaule. Extrémité supérieure 2011 ; 6 : 199-207.
Lien utile :
www.shoulderdoc.co.uk
PRATIQUE DU MÉDECIN DE FAMILLE 2016 ; 11(4) : 10-15