Environ la moitié des maladies des ongles sont dues à des infections. Les infections bactériennes sont moins fréquentes que les colonisations mycologiques ou les causes virales. Le point de départ d’une infection bactérienne des ongles est souvent une paronychie aiguë ou chronique. Les ongles artificiels sont davantage colonisés par des bactéries et des champignons que les ongles naturels.
Le Dr Michela Starace, MD, PhD, Université de Bologne (I), a donné un aperçu concis des infections des ongles et a montré qu’une évaluation diagnostique minutieuse ouvrait la voie à un traitement efficace [1]. Outre l’inspection clinique, la dermatoscopie, l’imagerie, les analyses mycologiques ou microbiologiques et l’histopathologie sont utiles. Le traitement des infections des ongles dépend du type et de la gravité de l’infection. Les modalités thérapeutiques vont du traitement médicamenteux à la chirurgie en passant par les thérapies physiques.
Panaris herpétique – le test de Tzanck est obligatoire
Le panaris herpétique est une inflammation purulente qui apparaît sur les doigts et qui est causée par une infection par le virus de l’herpès simplex (HSV) [2]. Les enfants sont plus souvent touchés que les adultes. Les lésions sont généralement localisées sur le bout du doigt ou sur le bord de l’ongle (paronychium). Lorsque l’unité unguéale est impliquée, cela concerne surtout la face latérale de l’ongle et le repli proximal de l’ongle, a expliqué le Dr Starace [1]. L’aspect du panaris herpétique présente des similitudes avec la paronychie bactérienne aiguë, ce qui constitue un diagnostic différentiel important. Afin d’éviter des mesures de traitement inutiles associées à un diagnostic erroné, comme le drainage (qui peut entraîner la propagation du virus), il est important d’établir un diagnostic correct en temps utile.
Typiquement, un polymorphisme composé d’érythèmes, de vésicules, d’érosions, d’ulcérations et de croûtes sans cicatrices se produit dans les 5 à 10 jours ; les symptômes associés sont une légère paresthésie, des démangeaisons ou des brûlures [1]. Au microscope, le test de Tzanck révèle des cellules balloniformes, c’est-à-dire des cellules géantes multinucléées formées par la fusion de cellules épithéliales. Histologiquement, la nécrose épidermique et les cellules géantes sont des signes typiques.
En ce qui concerne le traitement, des données récentes montrent que les antiviraux (aciclovir, valaciclovir, famiciclovir) sont plus efficaces lorsqu’ils sont utilisés dans les 48 heures suivant la manifestation des symptômes [3]. En cas de résurgence de l’infection, une stratégie de traitement antiviral plus courte et ciblée est recommandée.
Verrues dans la région des ongles – l’onychoscopie est utile
Les verrues sont dues à une infection par un papillomavirus humain (HPV), dont il existe plus de 100 sous-types [4]. Les verrues périunguéales sont causées par les types d’HPV 1, 2, 4 et 7 et apparaissent sous la forme d’une peau épaissie, sillonnée et en forme de chou-fleur sur la plaque de l’ongle. Les virus sont transmis par contact direct avec la peau ou par des objets ayant été en contact avec la peau, tels que des serviettes ou des rasoirs. Mais les verrues peuvent également devenir une compagne tenace en cas de contact de la peau avec un sol humide (par exemple une piscine). Lorsque la peau est humide, pré-endommagée ou ramollie, les virus HP peuvent franchir plus facilement la barrière cutanée. Les verrues périunguéales sont plus fréquentes chez les patients qui se rongent les ongles ou qui ont des professions où les mains sont chroniquement mouillées [5]. Les zones les plus fréquemment touchées sont le repli proximal et le repli latéral de l’ongle, ainsi que l’hyponychium/le lit de l’ongle. Alors que les verrues situées au niveau du repli de l’ongle sont généralement asymptomatiques, les verrues sous-unguéales sont douloureuses. L’onychoscopie est très utile pour visualiser les changements dans la zone de l’ongle, selon le Dr Starace [1]. Les signes cliniques typiques sont les papules hyperkératosiques, l’onycholyse, les nodules péri/sous-unguéaux et l’hyperkératose. L’oratrice a souligné qu’il était important de s’assurer qu’il ne s’agissait pas d’un carcinome épidermoïde [1]. En cas de doute, il est conseillé de faire une biopsie.
Pour traiter les verrues périunguéales, outre l’excision chirurgicale et les modalités de traitement physique (cryothérapie, laser, électrofulguration), il existe des agents antiprolifératifs (podophylline, 5-fluorouracil, bléomycine) ou l’immunothérapie sous forme d’administration topique (par ex. diphéncyprone, imiquimod) ou systémique (par ex. lévamisole). Les méthodes physiques doivent être appliquées avec précaution afin d’éviter la dystrophie des ongles. Quelques progrès ont été réalisés dans la recherche de nouvelles immunothérapies ; les esters d’acide carré et l’antigène Candida sont des traitements prometteurs qui stimulent l’immunité locale [3]. Les agents virucides formaldéhyde, glutaraldéhyde et cidofovir se sont révélés efficaces pour contrôler la croissance des verrues [3].
Paronychie bactérienne aiguë – le drainage des abcès est essentiel
La paronychie bactérienne aiguë est une infection douloureuse au niveau des mains. Les femmes sont plus souvent touchées que les hommes. Les facteurs prédisposants sont les ongles artificiels et les traumatismes mécaniques, par exemple le rongement des ongles ou la manucure. La paronychie bactérienne se caractérise par un œdème, un érythème et la formation d’abcès en peu de temps. Une douleur pulsatile est généralement ressentie. Les abcès se situent principalement dans la zone proximale du repli de l’ongle. Une mesure thérapeutique importante consiste à drainer les abcès, ce qui permet de soulager rapidement les symptômes. Le cas échéant, une lymphangite peut être présente, mais cela est plutôt rare. L’onychoscopie est un outil important pour diagnostiquer la paronychie bactérienne aiguë. Normalement, les signes d’inflammation diminuent progressivement, mais il peut y avoir des séquelles temporaires ou permanentes, selon le Dr Starace [1]. Les séquelles temporaires comprennent les lignes de Beau et l’onychomadèse, tandis que les séquelles permanentes sont l’anonychie, la micronychie et la ptérygion dorsale.
Dermatophytomes : étude analysant les cas suspects Les dermatophytomes sont des hyperkératoses sous-unguéales avec des cavités remplies de champignons. Les amas denses de champignons sont souvent associés à un biofilm et sont résistants aux antifongiques oraux. Il n’est pas rare que les dermatophytomes soient mal diagnostiqués (par exemple comme une onycholyse traumatique), en particulier lorsqu’un seul ongle est touché. Dans une étude publiée en 2024 par Miller et al., 33 cas suspects de dermatophytome ont été identifiés et analysés parmi 2576 patients atteints d’onychomycose au cours de la période 2019-2022. |
– Localisation : La plupart des cas étaient localisés au niveau des ongles des orteils (93,9%), le gros orteil étant de loin le plus souvent touché (90,9%). Dans la grande majorité des cas, aucune douleur n’a été ressentie (97%). |
– Caractéristiques dermatoscopiques : coloration jaune au centre (85,7%), stries adjacentes (100%), hyperkératose sous-unguéale ondulée (71,4%). |
– Taux de guérison clinique : après trois mois de traitement à la terbinafine, 46,2% des dermatophytomes ont guéri contre 75,0% des non-dermatophytomes. |
d’après [9] |
Onychomycoses – Les PCR multiplex permettent un diagnostic rapide
L’onychomycose est une infection fongique de la plaque unguéale, du lit de l’ongle ou des deux. Les ongles des orteils sont environ dix fois plus touchés que les ongles des mains. Dans environ 90% des cas, les agents pathogènes sont des dermatophytes (Trichophyton rubrum, Trichophyton interdigitale) [6]. Les onychomycoses sous-unguéales sont souvent associées à la tinea pedis. Les champignons atteignent l’ongle par l’hyponychium. La pénétration et la prolifération des hyphes fongiques dans la couche cornée du lit de l’ongle s’accompagnent d’une onycholyse, d’une hyperprolifération réactive du lit de l’ongle avec accumulation de squames (hyperkératose sous-unguéale) et d’une décoloration de l’ongle (blanc ou jaunâtre). Des squames sous-unguéales sont présentes sur les bords distaux [8]. Le diagnostic clinique de suspicion d’onychomycose est confirmé par la détection de l’agent pathogène [10]. Celle-ci peut se faire par détection directe au microscope en utilisant de l’hydroxyde de potassium, par immunofluorescence directe, par histologie en utilisant la coloration à l’acide périodique-Schiff (PAS) et/ou la culture, et maintenant aussi par PCR (multiplex) [11]. En onychoscopie, les onychomycoses sous-unguéales distales se caractérisent par une couleur blanc-jaune-orange mate de la plaque unguéale et un motif d’aurore boréale. Le traitement de l’onychomycose dépend d’une part du type d’invasion de l’ongle (implication de la matrice de l’ongle, étendue de la surface de l’ongle touchée) et d’autre part de certaines caractéristiques du patient (par ex. multimorbidité) [10,12]. Les préparations topiques de vernis à ongles et les antifongiques oraux sont les plus utilisés, soit en monothérapie, soit en association. Le traitement est long et s’étend sur des mois, voire des années. L’ablation atraumatique de l’ongle est recommandée comme mesure adjuvante avant le traitement antifongique local et systémique de l’onychomycose, afin de réduire le nombre de champignons [12].
Congrès : réunion annuelle de l’EADV
Littérature :
- “Infections de l’ongle”, Dr Michela Starace, Présentation ID D2T07.4B, Réunion annuelle de l’EADV, Amsterdam, 26.09.2024.
- “Herpetisches Panaritium”, https://flexikon.doccheck,(dernière consultation 03.12.2024).
- Iorizzo M, Pasch MC : Infections bactériennes et virales de l’unité unguéale : conseils pour le diagnostic et la prise en charge. Hand Surg Rehabil 2024 Apr ; 435 : 101502.
- Haley CT, et al. : Oncovirus humains : manifestation mucocutanée, pathogenèse, thérapeutique et prévention. Papillomavirus et polyomavirus à cellules de Merkel. JAAD 2019 ; 81 : 1-21.
- “Verrues (Verrucae vulgaris)”, www.msdmanuals.com,(dernière consultation 03.12.2024).
- Gupta AK, et al : Onychomycosis : a review. JEADV 2020 ; 34(9) : 1972-1990.
- Velasquez-Agudelo V, Cardona-Arias JA : Méta-analyse de l’utilité de la culture, de la biopsie, et de l’examen direct du KOH pour le diagnostic de l’onychomycose. BMC Infect Dis 2017 Feb 22 ; 17(1) : 166.
- Iorizzo M, et al. : La valeur de la dermoscopie du bord libre de la plaque unguéale et de l’hyponychium. JEADV 2021 ; 35(12) : 2361-2366.
- Miller RC, et al. : Difficultés dans le diagnostic des tomas dermatophytiques : analyse des résultats cliniques et dermoscopiques. JEADV 2024 ; 38(11) : e967-e970.
- Bieber K, et al. : Diagnostic de l’onychomycose et de la tinea pedis basé sur une puce à ADN. JDDG 2022 ; 20(8) : 1112-1122.
- Lipner SR, Scher RK : Onychomycose : Aperçu clinique et diagnostic. JAAD 2019 ; 80(4) : 835-851.
- Nenoff P, et al. : S1-Leitlinie Onychomykose, 2022, AWMF-Register-Nr. 013-003), www.awmf.org/leitlinien/detail/ll/013-003.html,(dernière consultation 06.12.2024).
DERMATOLOGIE PRAXIS 2024; 34(6): 36–37