Lorsque les personnes atteintes de tuberculose sont soumises à un traitement immunosuppresseur et que les défenses immunitaires de l’organisme ne fonctionnent plus correctement, la tuberculose ne se présente généralement plus comme une maladie locale, mais se répand dans tout le corps. En ce qui concerne le diagnostic et l’utilisation d’immunosuppresseurs, cela signifie qu’il faut tenir compte de certaines différences par rapport à la procédure standard.
La proportion de cas disséminés parmi tous les patients atteints de tuberculose est d’environ 0,6%. En revanche, sous immunosuppression, environ la moitié des personnes atteintes de tuberculose présentent le type de maladie disséminée. Le diagnostic ne fonctionne donc plus de la manière habituelle, des agents pathogènes paucibacillaires sont parfois présents, c’est pourquoi le médecin doit contacter d’urgence le laboratoire et déterminer quel matériel doit être envoyé. L’urine et les ponctions hépatiques seraient bien adaptées, mais les crachats et les sécrétions bronchiques restent classiques. “Tout ce que vous pouvez obtenir, car l’agent pathogène s’est propagé dans tout le corps”, a expliqué le Dr Brit Häcker, Comité central allemand de lutte contre la tuberculose, Berlin [1].
Le traitement est le même que pour les patients non immunodéprimés : On donne une combinaison de 4 médicaments différents (isoniazide, rifampicine, pyrazinamide, éthabmutol) pendant 2 mois, suivie d’un traitement d’entretien de 4 mois. Cela est également inscrit dans le guide, où les patients transplantés d’organes ont fait l’objet d’une telle recommandation [2]. “Cela peut également être transposé à d’autres personnes sous immunosuppression médicamenteuse”. Une adaptation du traitement standard doit être effectuée si les patients présentent par exemple un retard de réponse, des maladies concomitantes ou des intolérances.
Dépister la tuberculose avant la TNFi
Il convient de faire une distinction entre les deux types d’immunosuppression : Si celle-ci est effectuée avec des inhibiteurs du TNFa ou d’autres produits biologiques, la ligne directrice indique qu’elle doit être interrompue immédiatement en cas de développement d’une tuberculose. Le traitement de la maladie sous-jacente doit être adapté individuellement. Il s’agit toujours d’une décision interdisciplinaire au cas par cas, qui doit être évaluée individuellement, a expliqué l’experte : “Les patients et les évolutions de la maladie sont extrêmement hétérogènes”. Trouver l’équilibre entre le traitement immunologique de la maladie primaire et celui de la tuberculose est donc un véritable défi.
D’autre part, si un traitement par glucocorticoïdes est indiqué, les doses de glucocorticoïdes doivent être augmentées pendant le traitement par rifampicine. “Si l’on ne peut pas renoncer à l’immunosuppression, un contrôle régulier des taux et un ajustement de la dose, en particulier au début et à la fin du traitement, sont nécessaires pour trouver la bonne dose d’immunosuppression sous rifampicine. Le passage à d’autres médicaments doit être discuté individuellement, mais cela n’a pas été suffisamment étudié jusqu’à présent, selon le Dr Häcker.
Le test immunologique n’est pas fiable
Tous ceux qui sont testés positifs sur le plan immunologique (par la peau ou l’IGRA) ne développent pas forcément une tuberculose. Le problème du test réside donc dans sa faible prédictibilité. La valeur prédictive positive est comprise entre 1,5% (test cutané à la tuberculine, TST) et 2,7% (test de libération de l’interféron gamma, IGRA). Même au sein des groupes à risque, ces valeurs se situent dans une fourchette à un chiffre (2,4% TST, 6,8% IGRA). De plus, il ne faut pas oublier que la sensibilité de ces tests est encore plus affectée et détériorée par la maladie primaire (par ex. la PR) ainsi que par une médication antérieure existante”, constate le Dr Häcker.
Face à ce dilemme, la ligne directrice émet des recommandations sur les patients à risque qui devraient être dépistés. Pour les personnes immunodéprimées, il s’agit donc de personnes “avant un traitement par inhibiteurs du TNF et, le cas échéant, par d’autres produits biologiques et par des inhibiteurs JAK. Pour les autres médicaments immunosuppresseurs, la décision doit être prise au cas par cas”. Pour les patients traités par hématologie ou ceux qui vont être transplantés, il existe une recommandation théorique pour un traitement préventif.
Si un praticien souhaite administrer un inhibiteur du TNFa (TNFi), il doit d’abord exclure une tuberculose, effectuer une anamnèse spécifique à la tuberculose, un examen physique et une radiographie du thorax, car l’IGRA peut également être faussement négatif. Si l’un de ces aspects est positif, on peut passer directement au diagnostic de la tuberculose (c’est-à-dire à l’examen des crachats et au diagnostic radiologique étendu). Si le résultat est également positif, un traitement antituberculeux peut être entamé. Celle-ci doit être d’au moins Il faut compter entre 4 et 8 semaines avant que le TNFi ne puisse être utilisé.
Les personnes qui ne présentent pas d’anomalies initiales lors du premier examen reçoivent un IGRA. Si le résultat est positif, on passe à nouveau au diagnostic avancé. Si elle est négative, il s’agit d’une infection latente à Mycobacterium tuberculosis (LTBI), qui doit être suivie d’un traitement préventif de 4 semaines avant la première administration du TNFi. Si tout s’avère négatif, l’inhibiteur du TNF peut être commencé directement.
Le traitement préventif est réalisé avec des substances antituberculeuses individuelles. Les traitements à base de rifampicine recommandés sont la rifampicine mono (10 mg/kgKG, max. 600 mg/jour) pendant 4 mois ou la combinaison de rifampicine et d’isoniazide (5 mg/kgKG, max. 300 mg/jour) pendant 3 mois. “Mais il ne faut pas négliger le fort potentiel d’interaction”, conclut l’experte.
Congrès : DGIM 2023
Sources :
- Session “Patients particuliers – Agents pathogènes particuliers” ; exposé : “La tuberculose chez les patients sous immunosuppression thérapeutique” ; 129. Congrès de la DGIM, 24.04.2023.
- Schaberg T, Brinkmann F, Feiterna-SperlingC, et al. : Ligne directrice S2k “Tuberculose chez l’adulte” 2022 ; Registre AWMF n° 020/019.
InFo PNEUMOLOGIE & ALLERGOLOGIE 2023 ; 5(3) : 23 (publié le 16.8.23, ahead of print)