L’auteur donne un aperçu des problèmes les plus courants qui se posent dans la pratique quotidienne en matière de vaccination. Il s’agit entre autres de la sécurité immunologique en cas de séries de vaccins incomplètes ou éloignées dans le temps et donc oubliées, de l’utilisation des vaccins combinés, de la détermination du titre après une vaccination contre l’hépatite B, ainsi que de questions sur la vaccination contre le HPV chez les jeunes filles à l’âge de la puberté et la vaccination ROR chez les femmes enceintes.
1) Mon patient a été vacciné deux fois contre la FSME il y a quelques années. Mais malheureusement, la troisième vaccination a été oubliée, de sorte que l’immunisation est restée incomplète. Maintenant que plusieurs années se sont écoulées, dois-je recommencer la série de vaccins ?
Réponse : Non. La mémoire immunologique se souvient des vaccins administrés précédemment. Vous pouvez ainsi reprendre la série de vaccins entamée là où elle a été interrompue, même si une longue période s’est écoulée depuis la dernière dose de vaccin. En d’autres termes, il existe des intervalles minimaux entre les doses d’une série de vaccins, mais pas d’intervalles maximaux. Ce principe s’applique à toutes les vaccinations.
2. quels vaccins puis-je administrer en même temps et quels vaccins nécessitent un intervalle minimal ?
Réponse: En principe, tous les vaccins, qu’ils soient à virus vivant ou inactivé, peuvent être administrés en même temps, mais pas dans la même seringue ni au même point d’injection. Si vous ne souhaitez pas administrer tous les vaccins en même temps, un intervalle minimum (1 mois) ne doit être respecté que dans une seule situation : pour deux vaccins à virus vivant (par exemple, ROR et fièvre jaune). Deux vaccins à virus vivant peuvent être administrés simultanément ou avec un intervalle minimum d’un mois. Cette particularité est particulièrement importante en cas d’indication médicale de voyage et doit être prise en compte lorsque la vaccination contre la fièvre jaune (en même temps que le ROR) doit être effectuée chez le médecin de voyage.
3. ma patiente n’a été vaccinée que contre la rougeole lorsqu’elle était enfant et elle souhaite à présent rattraper les vaccins contre la rubéole et les oreillons. Il semble toutefois qu’aucun vaccin monovalent contre la rubéole et les oreillons ne soit disponible. Que puis-je faire dans cette situation ?
Réponse: Vous pouvez utiliser un vaccin ROR sans problème, même si les trois composants ne sont pas nécessaires, car les virus vivants atténués contenus dans le vaccin ROR sont immédiatement neutralisés si des anticorps contre le(s) composant(s) correspondant(s) du vaccin sont déjà présents. C’est pourquoi les vaccins à virus vivant n’entraînent pas de survaccination, comme c’est le cas par exemple pour le tétanos.
4. ma nouvelle assistante médicale a été vaccinée contre l’hépatite B lorsqu’elle était enfant, mais aucun test de titre n’a été effectué à l’époque. Lorsque j’ai voulu refaire ce dosage pour déterminer son immunité, le titre d’anti-HBs était <5 mU/ml. Que dois-je faire maintenant ? Une nouvelle série complète de vaccins contre l’hépatite B, puis une nouvelle détermination du titre ?
Réponse: Le titre négatif chez votre assistante médicale ne signifie pas nécessairement qu’elle n’est pas protégée contre l’hépatite B, car les titres anti-HBs diminuent continuellement après la vaccination et deviennent tôt ou tard indétectables (selon le titre initial). Néanmoins, la plupart des personnes vaccinées conservent une immunité cellulaire (cellules mémoires) qui leur confère une protection durable, à condition qu’elles aient un titre anti-HBs supérieur à 100 mU/ml un à deux mois après la vaccination. Comme cela n’a pas été déterminé chez votre assistante à l’époque, vous devriez maintenant administrer une dose unique d’hépatite B qui booste l’immunité cellulaire et provoque ainsi une forte augmentation du titre d’anti-HBs. Vous pouvez ensuite mesurer ce taux un mois plus tard : Anti-HBs >100 mU/ml = protection à vie.
5. l’un de mes patients adultes ne sait plus s’il a été vacciné dans son enfance, ni combien de fois, ni contre quoi. Dois-je administrer une série complète de vaccins avec tous les vaccins recommandés, même si mon patient a probablement été vacciné lorsqu’il était enfant ?
Réponse : Si vous pouvez supposer que votre patient a déjà été vacciné auparavant, il vaut la peine de lui administrer une dose unique de vaccin dTpa (Boostrix®) et de vaccin contre l’hépatite B et de déterminer les titres contre le tétanos et l’hépatite B un mois plus tard. Si le titre du tétanos est supérieur à 500-1000 UI/l et le titre de l’hépatite B supérieur à 100 mU/ml, ces différents vaccins vous ont permis de mettre à jour votre immunité. Si les titres sont inférieurs, des doses supplémentaires (immunisation de base) doivent être administrées.
6. un de mes patients présente un titre d’anticorps anti-HBs non mesurable malgré trois vaccinations contre l’hépatite B Que dois-je faire maintenant ?
Réponse : La première chose à faire dans cette situation est d’exclure une hépatite B chronique (asymptomatique), car ces patients ne répondent typiquement pas (ou ne peuvent pas répondre) à la vaccination contre l’hépatite B : Déterminez les anticorps anti-HBc et l’antigène HBs, qui sont positifs dans l’hépatite B chronique. Si vous avez exclu une hépatite B chronique, votre patient est un hypo- ou non-répondeur. Chez ces patients, il est recommandé d’administrer une deuxième série de vaccins contre l’hépatite B (3 doses) et de procéder ensuite à une nouvelle détermination du titre. Si le titre d’anti-HBs est toujours négatif, votre patient est un non-répondeur et doit être averti qu’il ne sera pas protégé en cas d’exposition et qu’il devra donc être immunisé passivement après l’exposition. Si le titre d’anti-HBs est positif mais inférieur à 100 mU/ml, le patient est un hyporépondeur qui n’est protégé que tant qu’un titre d’anti-HBs est mesurable. Chez ces patients, des doses supplémentaires de vaccin contre l’hépatite B entraînent généralement un titre supérieur à 100 mU/ml, en corrélation avec une protection à long terme. Certains experts recommandent d’utiliser le vaccin combiné HepA/HepB Twinrix® pour la deuxième série de vaccinations, car il semble être légèrement plus immunogène que les vaccins monovalents contre l’hépatite B seuls.
7. j’ai entendu dire qu’il fallait confirmer par sérologie le succès du vaccin après une vaccination contre l’hépatite B Mais je ne l’ai jamais fait jusqu’à présent.
Réponse : La détermination du titre après vaccination n’est nécessaire que si le patient présente une indication individuelle pour une vaccination contre l’hépatite B (par exemple, nouveau-né de mère HBs positive, patient présentant un risque familial, professionnel ou autre d’exposition). Après une vaccination générale, telle qu’elle est recommandée en Suisse en premier lieu pour les adolescents, un dosage du titre anti-HBs n’est pas indiqué.
8. la vaccination contre le HPV est récemment recommandée en Suisse pour les jeunes filles âgées de 11 à 14 ans avec un schéma à 2 doses, et pour les jeunes filles plus âgées avec un schéma à 3 doses. Quel est donc le schéma applicable à une adolescente de moins de 15 ans lors de la première dose, mais de plus de 15 ans lors de la deuxième ou de la troisième vaccination ? Une situation similaire existe pour la vaccination contre l’hépatite B, où un schéma à 2 doses est recommandé entre 11 et 15 ans, puis un schéma à 3 doses.
Réponse : Le facteur déterminant pour le choix du schéma est toujours l’âge à la première dose. Cela signifie que même en cas d’administration différée des doses suivantes, un schéma à 2 doses peut être utilisé si la personne vaccinée était âgée de 11 à 14 ans (HPV) ou de 11 à 15 ans (hépatite B) lors de la première dose.
9. combien de temps faut-il maintenir une contraception après une vaccination ROR chez une femme qui souhaite avoir un enfant, afin d’éviter une infection potentielle de l’enfant par les virus vaccinaux ? Quel est le danger si, après une vaccination ROR, il s’avère que la femme était enceinte au moment de la vaccination ?
Réponse : En raison du risque (purement) théorique d’embryopathie vaccinale, il est recommandé d’éviter toute grossesse pendant un mois. Ensuite, il n’y a plus de risque de virémie vaccinale et donc plus de risque d’infection pour l’enfant. Pour se rassurer, on peut toutefois dire qu’il existe aujourd’hui des milliers d’observations de cas où le ROR a été administré par inadvertance pendant une grossesse. Aucune embryopathie n’a été observée après la vaccination ROR, c’est pourquoi aucune mesure n’est nécessaire dans cette situation, notamment pas d’interruption de grossesse.
10. à qui puis-je m’adresser si j’ai une question spécifique sur les vaccins ?
Réponse : Avec le soutien de l’OFSP, de la Société Suisse de Pédiatrie, de la Société Suisse d’Infectiologie, de la Société Suisse d’Allergologie et d’Immunologie et de l’Université de Genève, InfoVac (www.infovac.ch) gère un système expert qui répond de manière compétente dans les 48 heures aux demandes par e-mail des médecins concernant les vaccinations et leur application correcte. En outre, InfoVac publie dix fois par an un bulletin contenant des informations actualisées sur la vaccination. Pour une participation aux frais de Fr. 25 par an (Fr. 50.- pour 2 ans), vous pouvez participer activement à ce système. Inscrivez-vous à l’adresse suivante : www.infovac.ch.
Dr Daniel Desgrandchamps
PRATIQUE DU MÉDECIN DE FAMILLE 2013 ; 8 (10) : 21-23