L’arthrose est souvent décrite comme une “maladie générale des articulations” ou une “usure des articulations”. Comment cette “usure des articulations” est-elle compatible avec le sport ? Comment faire fonctionner une cheville, un genou, une hanche ou une épaule surchargés ou même usés (par exemple en gymnastique artistique) ?
L’arthrose est la maladie articulaire la plus fréquente dans les pays occidentaux. Elle peut en principe survenir au niveau de n’importe quelle articulation, mais le plus souvent au niveau de la hanche, du genou, de mains et de la colonne vertébrale. L’arthrose affecte pratiquement toutes les parties de l’articulation à un moment donné, sous une forme ou une autre : les deux surfaces articulaires avec leurs revêtements cartilagineux, la capsule et, dans l’articulation du genou, les deux ménisques. Les substances abrasives provoquent généralement une inflammation de la capsule articulaire avec formation d’un épanchement, ce qui entraîne une perturbation supplémentaire et, finalement, une dégradation des muscles stabilisant l’articulation.
Qu’advient-il du cartilage ?
En principe, le cartilage joue un rôle central dans l’arthrose. Le cartilage est un tissu à la fois dur et élastique qui recouvre les extrémités des os et permet aux deux surfaces articulaires de glisser harmonieusement l’une contre l’autre lors des mouvements. Pour diverses raisons telles que l’âge, l’obésité, l’endommagement d’autres structures articulaires (ménisques, ligaments, par exemple en raison d’une activité sportive excessive), une mauvaise position des membres inférieurs au niveau de la hanche ou du genou (jambes en X ou en O) ou des maladies spécifiques, des fissures microscopiques apparaissent dans ces revêtements cartilagineux et peuvent s’agrandir progressivement. Plus tard, le cartilage a tendance à s’effriter et les petits fragments d’articulation qui pénètrent dans la cavité articulaire deviennent une cause d’inflammation, et donc de douleur, qui entretient le cercle vicieux et favorise ainsi la chronicité. Au fur et à mesure de l’usure, le cartilage peut même disparaître complètement, laissant les os de l’articulation se presser directement les uns contre les autres. Ces nouvelles contraintes entraînent des réactions osseuses (par exemple des ostéophytes, également appelés “hyperjambes”) qui aggravent encore l’ensemble des symptômes, en particulier les douleurs.
Symptômes et évolution
Les symptômes de l’arthrose sont d’abord des douleurs dans et autour des articulations, qui dépendent principalement de l’effort : Les douleurs sont donc pires après l’effort qu’au repos, une amélioration étant simulée par un prétendu “échauffement”, surtout dans la phase initiale. En raison de l’inflammation décrite, des épanchements peuvent se produire, qui sont perçus comme un gonflement et une déformation de l’articulation. Selon le degré de gravité, une raideur peut également apparaître.
L’évolution naturelle de l’arthrose varie d’une articulation à l’autre et d’une personne à l’autre, mais elle progresse presque toujours, heureusement pas trop rapidement.
Diagnostic
Un interrogatoire précis du patient est nécessaire pour établir le diagnostic. L’examen de l’articulation, avec les déformations et les restrictions de mobilité qui y sont associées, est une autre étape importante. L’examen radiologique reste toutefois central, si possible en charge (pas en position couchée sur la table d’examen, mais debout, par exemple pour les membres inférieurs). L’IRM, très utilisée aujourd’hui, peut bien entendu être également utilisée. Il donne des informations sur les parties molles qui ne sont pas visibles sur les radiographies.
Et que peut-on faire pour y remédier ?
Contrairement à ce que l’on entend souvent, l’arthrose est une affection qui peut être traitée. On distingue grossièrement les traitements conservateurs non chirurgicaux des traitements chirurgicaux.
Parmi les mesures non chirurgicales les plus fréquemment utilisées, du moins dans la phase initiale, on trouve les traitements médicamenteux et non médicamenteux. Dans ce dernier cas, nous souhaitons mentionner tout particulièrement, pour les sportifs, le guidage musculaire, la stabilisation et l’amortissement des articulations. Il a été prouvé à plusieurs reprises que les articulations qui ont un bon contrôle musculaire développent en principe moins d’arthrose. Mais les personnes déjà touchées par l’arthrose peuvent également tirer de nombreux avantages d’une physiothérapie avec entraînement musculaire. En tant que patient, il est possible d’apprendre des programmes de gymnastique spécifiques aux articulations auprès de physiothérapeutes expérimentés et de les réaliser soi-même à la maison sans effort, mais avec une discipline appropriée.
Il n’est malheureusement pas rare que ces traitements conservateurs ne suffisent pas, une intervention chirurgicale peut alors être indiquée. Il va sans dire que ces opérations doivent être personnalisées. Dans l’ensemble, on peut toutefois distinguer les possibilités chirurgicales suivantes :
- les soi-disant toilettes articulaires arthroscopiques (de plus en plus controversées)
- Correction de l’axe avec repositionnement (particulièrement fréquent dans l’articulation du genou)
- Prothèses articulaires.
Rinçage des articulations
Le lavage arthroscopique de l’articulation est un nettoyage de l’articulation au cours duquel on lisse et restaure quelque peu les différentes irrégularités affectées des revêtements cartilagineux et des autres structures articulaires. En même temps, l’articulation est également rincée des différentes abrasions qui se sont accumulées. Pour les formes d’arthrose pas trop avancées, ces opérations relativement sûres et pas trop coûteuses peuvent entraîner une amélioration temporaire.
Corrections d’axes avec réarrangements
Les corrections d’axe et les repositionnements, comme on le fait encore très souvent pour l’articulation du genou, consistent à corriger l’ensemble de l’axe de la jambe par une intervention avec ablation d’une partie de l’os, soit au niveau du membre supérieur, soit au niveau du membre inférieur, de manière à transférer le poids sur une couche de cartilage préservée. On ne peut donc pratiquer une telle opération sur le genou que si une partie de l’articulation est encore relativement intacte. Cela se produit souvent dans le cadre de blessures sportives, par exemple au ménisque, où un seul côté est généralement touché (le plus souvent le côté interne). Ce sont surtout les jeunes patients, en principe trop jeunes pour un remplacement complet de l’articulation, qui sont soumis à une correction de l’axe.
Prothèse articulaire/prothèse
La troisième option est le remplacement de l’articulation ou la prothèse, qui peut être complète ou semi-complète. Depuis un peu plus de 50 ans, on a l’expérience de cette technique chirurgicale, d’abord dans la région de la hanche, mais maintenant souvent dans la région du genou, de la cheville et des articulations des membres supérieurs (p. ex. l’épaule). Les parties endommagées des deux os qui forment l’articulation sont enlevées et remplacées par du matériel artificiel.
Lorsque l’on décide avec soin de se faire implanter une articulation artificielle, la question qui se pose généralement au chirurgien, plus qu’au patient, est la suivante : la prothèse va-t-elle vieillir plus que le patient ou inversement ? Dans l’idéal, l’articulation artificielle survit au patient. Plus le patient est âgé au moment de l’opération, plus cet objectif est réalisable. Des études montrent qu’après 15 ans, 90 à 95% des prothèses de genou et de hanche sont encore intactes. Cependant, chez les jeunes actifs, l’espérance de vie des prothèses est légèrement inférieure. Plus le porteur de prothèse est actif, plus l’usure des différentes parties de la prothèse est importante. Les couples de matériaux utilisés dans les articulations peuvent être très différents (métal, polyéthylène, céramique). Le glissement de ces différents composants les uns sur les autres crée ce que l’on appelle des abrasions, qui constituent actuellement le plus gros problème des articulations artificielles modernes. Il a été démontré que, dans l’articulation de la hanche, jusqu’à 500 000 microparticules sont éliminées de la cupule en polyéthylène en une seule étape. Si l’on considère qu’une personne fait environ un million de pas par an, on peut aisément imaginer que les couches qui glissent les unes sur les autres deviennent de plus en plus fines et peuvent se briser. Cette usure est bien entendu également proportionnelle aux forces exercées sur l’articulation. Ainsi, l’effort sportif constitue en soi une certaine menace. La question se pose donc toujours de savoir quels sports sont autorisés ou non. Dans le même temps, il faut noter qu’un os chargé devient plus solide grâce aux tensions musculaires qui s’exercent sur lui, et qu’une musculature bien entraînée fonctionne comme un élément d’amortissement. Il faut donc clairement trouver un compromis raisonnable.
Il ressort de différents travaux que les sports impliquant des mouvements de rotation contraignants, des mouvements incontrôlés (accélération, freinage, changements de direction rapides), des charges axiales importantes (à la réception après des sauts) ainsi qu’une contraction rapide et forte de la jambe écartée sont plutôt défavorables. Dans ces études, le ski de fond ou même le ski alpin sont considérés comme possibles pour les personnes entraînées.
On peut affirmer sans risque que certaines activités sportives restent possibles même après la pose d’une articulation artificielle. Tout est cependant une question de mesure et doit être bien discuté avec le chirurgien. Comme d’habitude, une rééducation bien construite et menée avec sérieux est la meilleure garantie contre un relâchement précoce ou une usure excessive.
PRATIQUE DU MÉDECIN DE FAMILLE 2016 ; 11(1) : 4-5