Le myélome multiple, la multiplication pathologique des immunoglobulines dans la moelle osseuse, est toujours considéré comme incurable. Cependant, des médicaments très efficaces prolongent la durée de survie – jusqu’à 20 ans dans de rares cas.
Peu de gens connaissent le terme “myélome multiple” – c’est ainsi que Florin Rupper, président du Groupe de contact myélome suisse (MKgS), a caractérisé l’état des connaissances du public. L’information et la mise en réseau des personnes concernées sont nécessaires. Dans ce contexte, le professeur Christoph Driessen, médecin-chef de la clinique d’oncologie médicale et d’hématologie de l’hôpital cantonal de Saint-Gall, a donné des informations sur cette maladie cancéreuse rare dans le cadre d’une conférence de presse.
Très hétérogène et étiologiquement incertain
Chaque année, 250 personnes en Suisse développent un myélome multiple. Selon le Registre suisse des tumeurs, il y a actuellement environ 2500 personnes touchées. Le myélome multiple est le produit d’une prolifération monoclonale d’immunoglobulines dans la moelle osseuse. La maladie maligne s’exprime de manière très hétérogène sur le plan génétique et clinique. Environ un quart des patients atteints de myélome se comportent de manière asymptomatique. Lorsque les symptômes apparaissent, ils vont des douleurs osseuses (60%, généralement dans le squelette) et de la fatigue (40%, souvent liée à l’anémie) à la perte de poids, aux infections fréquentes et à l’hypercalcémie, en passant par une diminution de la fonction rénale et une urine mousseuse (protéinurie, albuminurie) [1]. Bien que des liens avec des facteurs génétiques, l’exposition aux radiations ou aux produits chimiques, des maladies auto-immunes, d’autres maladies à cellules plasmatiques et des infections virales soient suspectés, la pathogénie reste incertaine.
Le précurseur du myélome multiple est toujours une gammapathie monoclonale de signification indéterminée (MGUS). Il s’agit d’une multiplication fréquente et bénigne d’un clone de plasmocytes. Elle est de plus en plus fréquente avec l’âge : Environ 10% des nonagénaires présentent cette altération. Chez environ 1% des personnes concernées, une MGUS dégénère en myélome multiple. Là encore, plus la personne est âgée, plus elle est susceptible de développer un myélome multiple. Mais les exceptions confirment la règle, comme le montre le cas d’une patiente de 49 ans (encadré).
Douleurs dues à la résorption osseuse
La croissance des immunoglobulines dans la moelle osseuse déplace les cellules sanguines et immunitaires, ce qui entraîne une anémie, de la fatigue et une tendance aux infections et aux saignements. De plus, les cellules du myélome activent la résorption osseuse (figure 1). Les conséquences sont une ostéoporose sévère, des fractures, des douleurs associées et de la fatigue, voire de la confusion. Le dépôt de chaînes de protéines dans les reins entraîne une insuffisance rénale. Une manifestation en dehors de la moelle osseuse entraîne des douleurs et une perte de force.
En cas de suspicion de myélome, l’anamnèse et l’examen physique sont complétés par différents examens de laboratoire qui permettent de déterminer les taux sanguins de diverses protéines (paraprotéine, bêta-2-microglobuline, créatinine, albumine) et d’électrolytes. Une analyse de sang donne des informations sur les leucocytes. Les changements dans les os sont détectés par imagerie au moyen d’un scanner, d’une IRM et, le cas échéant, d’un PET. La moelle osseuse est examinée à l’aide d’une biopsie de la moelle osseuse.
De nouveaux médicaments améliorent la survie
Les recherches actuelles ne permettent pas de guérir le myélome multiple. Le traitement des patients atteints de myélome symptomatique a pour objectif principal d’obtenir la meilleure rémission possible avec un contrôle rapide des symptômes et des complications liées au myélome. En effet, le myélome multiple est une maladie progressive qui évolue par poussées. L’objectif à long terme est de prolonger la période sans progression et donc la survie globale [1].
Une étude rétrospective multicentrique dans le monde réel, réalisée sur la base des dossiers médicaux de 5 000 patients atteints de myélome, a fourni des données instructives sur l’évolution de la maladie [2]. Une fois le diagnostic posé, le patient reçoit un traitement de six mois, suivi d’un traitement d’entretien de six mois également. En moyenne, les patients passent ensuite dix mois sans traitement avant que la maladie ne revienne. Mais à chaque escalade thérapeutique, l’intervalle sans traitement se réduit. “Le temps sans traitement est de plus en plus court”, résume le professeur Driessen, “et le pourcentage de patients qui reçoivent le traitement suivant est également de plus en plus faible”.
Cependant, avec le développement de nouveaux médicaments, la survie s’est nettement améliorée. La moyenne est d’un peu plus de six ans. Les données de la Suisse orientale le prouvent. Le professeur Driessen est donc plein d’espoir : “C’est l’un des cancers dont le pronostic s’améliore le plus rapidement grâce à ces nouveaux médicaments”. Il y aurait davantage de “survivants”, c’est-à-dire de patients qui vivent plus longtemps avec la maladie. Mais le grand défi, selon le professeur Driessen, réside dans le diagnostic initial : comment distinguer, au moment du diagnostic, le patient qui survivra plus longtemps – 10 à 20 ans – de celui qui mourra de la maladie dans l’année qui suit ? Les analyses génétiques fournissent des indications.
Les traitements utilisés sont les thérapies locales, la radiothérapie et la chimiothérapie, les corticostéroïdes ainsi que de nouvelles approches telles que les immunomodulateurs (par ex. thalidomide, lénalidomide, pomalidomide), les inhibiteurs de protéase (par ex. bortezomib, carfilzomib, ixazomib) et, plus récemment, les anticorps monoclonaux (par ex. deratumumab, elotuzumab). “Pour la première fois, on dispose d’immunothérapies très efficaces, qui peuvent agir longtemps et qui sont nettement mieux tolérées que la chimiothérapie”, déclare le professeur Driessen, mais il attire aussitôt l’attention sur un fait problématique : Actuellement, les patients doivent attendre des années avant que la caisse d’assurance maladie n’approuve ce traitement coûteux.
Source : conférence de presse MKgS, Zurich
Littérature :
- Société allemande d’hématologie et d’oncologie médicale : Ligne directrice sur le myélome multiple. ICD10 : C90.0. Recommandations de la société savante pour le diagnostic et le traitement des maladies hématologiques et oncologiques. Situation en 2018.
- Yong K, et al : Myélome multiple : résultats des patients dans la pratique réelle. Br J Haematol. 2016 ; 175(2) : 252-264.
HAUSARZT PRAXIS 2019 ; 14(6) : 28-29 (publié le 24.5.19, ahead of print)
InFo ONKOLOGIE & HÉMATOLOGIE 2019 ; 7(5) : 20-21