Introduction : En cas d’anomalies vasculaires près de l’oreille interne, certains patients perçoivent le flux sanguin pathologique sous la forme d’un bruit d’oreille rythmique. Ces acouphènes dits “pulsatiles” sont synchronisés avec le pouls, c’est-à-dire qu’ils sont en corrélation avec les battements du cœur. Typiquement, la fréquence et l’intensité des acouphènes augmentent avec l’accélération du rythme cardiaque, par exemple en cas de tension accrue ou lors de la pratique d’un sport. Cependant, le bruit d’oreille est souvent perçu “en silence” comme particulièrement gênant. De nombreuses personnes souffrent donc de troubles du sommeil et d’une diminution de leurs performances pendant la journée.
Contrairement aux acouphènes non pulsatiles, qui surviennent généralement dans un contexte de surdité neurosensorielle, les acouphènes pulsatiles résultent souvent d’une anomalie vasculaire structurelle d’origine artérielle ou veineuse. Les causes artérielles sont plus fréquentes et incluent les fistules artério-veineuses durales proches de la base du crâne, les anévrismes géants ou les sténoses. Les causes veineuses sont rares et comprennent les diverticules, le bulbe veineux jugulaire anatomiquement surélevé ou les sténoses du sinus transversal ou du sinus sigmoïde. Différentes procédures conservatrices, chirurgicales et endovasculaires ont été établies dans le traitement [1,2].
Pour le traitement des sténoses veineuses du sinus, de nouvelles approches thérapeutiques endovasculaires non ablatives ont été introduites ces dernières années, comme la reconstruction endoluminale de la lumière du sinus dans la section affectée par une angioplastie de stent transveineux assisté par ballon. La procédure n’est pas encore bien établie ou évaluée de manière définitive et comporte des risques de traitement importants pouvant aller jusqu’à la rupture létale du sinus. Toutefois, chez des patients soigneusement sélectionnés, le traitement endovasculaire peut être réalisé avec succès par des mains expertes. Il s’agit donc fondamentalement d’essais thérapeutiques individuels, qui ne sont appliqués qu’après avoir posé des indications strictes et épuisé de manière frustrante les options thérapeutiques établies. Nous décrivons ici un cas concret.
La sténose symptomatique du sinus veineux : si un rétrécissement se forme dans un sinus veineux, par exemple à cause de trabécules, de septa, de résidus d’une thrombose de la veine sinusale ou d’une hypertrophie des granulations de Pacchioni, le flux sanguin est localement accéléré et souvent plus turbulent. Cela peut entraîner des bruits audibles synchronisés avec le pouls, les acouphènes pulsatiles d’origine veineuse. Les sténoses bilatérales du sinus ou les sténoses unilatérales sévères du sinus dominant peuvent également entraver de manière significative l’écoulement veineux du tissu cérébral en amont, ce qui peut s’accompagner d’un gonflement du cerveau et d’une augmentation de la pression intracrânienne, voire d’une diminution de la résorption passive du liquide céphalorachidien avec formation d’une pseudotumeur cérébrale.
La présomption clinique d’une sténose sinusienne symptomatique est généralement clarifiée dans un premier temps à l’aide des techniques d’imagerie établies telles que la tomodensitométrie, l’imagerie par résonance magnétique et l’angiographie par résonance magnétique (Fig. 1A). Cependant, malgré des améliorations techniques considérables dans l’imagerie veineuse en coupe, la confirmation du diagnostic reste souvent difficile. Une angiographie diagnostique par soustraction numérique (fig. 1B à D), éventuellement avec mesure sélective du gradient de pression (fig. 2A à E), ou même une occlusion sinusienne probatoire avec un cathéter à ballonnet introduit par voie transveineuse, peuvent donc contribuer à confirmer le diagnostic dans certains cas particuliers.
Les procédures thérapeutiques établies pour le pseudotumeur cérébrale incluent une perte de poids conséquente, des médicaments diurétiques et la ponction lombaire thérapeutique. En cas de céphalées réfractaires ou de baisse progressive de l’acuité visuelle, la mise en place d’un système de dérivation ou l’ouverture chirurgicale des méninges autour du nerf optique peut contribuer à soulager les symptômes. La ligature de la veine jugulaire est l’une des méthodes classiques de traitement des acouphènes pulsatiles veineux réfractaires. Cependant, cette option thérapeutique reste controversée en raison du risque important de thrombose post-thérapeutique du sinus ou des veines cérébrales et du risque d’insuffisance de drainage veineux secondaire.
Ces dernières années, de nouvelles approches thérapeutiques non ablatives ont donc été introduites de plus en plus souvent pour traiter les sténoses sinusiennes symptomatiques. L’une de ces méthodes consiste à reconstruire la lumière du sinus dans la section affectée par une angioplastie de stent transveineuse assistée par ballon (Fig. 3A à B). Chez les patients atteints de pseudotumeur cérébrale, l’objectif de l’angioplastie transveineuse est de réduire le gradient de pression veineuse en rétablissant l’anatomie veineuse normale et de normaliser ainsi la résorption du LCR. Chez les patients souffrant d’acouphènes pulsatiles veineux, l’angioplastie transveineuse vise à abaisser le gradient de pression veineuse et à supprimer le flux sanguin turbulent afin d’obtenir une suppression permanente du bruit d’oreille (Fig. 3C à D).
Il n’existe actuellement aucune donnée fiable sur la sécurité et l’efficacité de l’angioplastie veineuse ou de l’angioplastie avec stent. Comme décrit au début, il s’agit pour l’instant d’une option thérapeutique expérimentale pour des patients sélectionnés. Il convient également de noter que le stenting transveineux nécessite à la fois une double inhibition plaquettaire (par ex. ASS à vie et clopidogrel pendant six mois) et une anticoagulation orale temporaire (par ex. Marcoumar® pendant six mois) afin de prévenir une occlusion intra-stent par activation de l’hémostase plasmatique.
Littérature :
- Lasjaunias P, Berenstein A, ter Brugge KG : Neuroangiographie chirurgicale. Vol. 2ème édition. Springer Verlag 2004.
- Yasargil MG : Microneurosurgery In 4 Volumes. Éditions Thieme 1994.
Littérature complémentaire :
- Hofmann E, et al : Pulsatile Tinnitus : Imaging and Differential Diagnosis. Deutsches Ärzteblatt International 2013 ; 110(26) : 451-458.
- Biousse V, Bruce BB, Newman NJ : Mise à jour sur la physiopathologie et la prise en charge de l’hypertension intracrânienne idiopathique. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2012 May ; 83(5) : 488-494.
- Baomin L, Yongbing S, Xiangyu C : Angioplasty and stenting for intractable pulsatile tinnitus caused by dural veinous sinus stenosis : a case series report. Otol Neurotol 2014 Feb ; 35(2) : 366-370.
InFo NEUROLOGIE & PSYCHIATRIE 2015 ; 13(4) : 28-30