Une patiente de 52 ans souffre d’infections récurrentes depuis des années et a toujours besoin d’antibiotiques. Aucune autre maladie n’a été signalée. La raison en était un déficit en alpha-1-antitrypsine. Les bronchectasies peuvent mener sur cette piste, comme l’illustre un cas inhabituel.
Les lettres de médecins que la patiente a présentées au Professeur Dr Felix Herth de la clinique thoracique de l’hôpital universitaire de Heidelberg (D) lors de sa première visite indiquaient à plusieurs reprises “pneumonie”, sans que la femme n’ait apporté de radiographies [1]. Cependant, elle a elle-même déclaré avoir toujours souffert de “poumons fragiles”.
A ce moment-là, le pneumologue a pu constater chez cette femme de poids normal (56 kg pour une taille de 164 cm) des RG à grosses bulles à gauche>à droite, mais à part cela, il n’y avait pas d’anomalies dans le KU. Les lettres des médecins que nous avons apportées mentionnaient parfois des pneumocoques, parfois des hémophiles dans les crachats, jamais de pseudomonas. Le test de fonction pulmonaire demandé par le professeur Herth n’a rien révélé d’anormal non plus, à part une légère obstruction. DLCO/VA était de 89%, FeNO 9 ppb. Le dosage de la CRP a donné 5 mg/dl, les IgE 11 U/ml et les éosinophiles 70/nl. La radiographie n’a pas non plus été d’une grande aide, car elle n’a rien révélé de dramatique.
Ne pas trop faire confiance au radiologue
Le professeur Herth a alors envoyé la patiente en scanner HR. C’est là que l’on a finalement trouvé la solution : La dame avait des bronchiectasies. Les radiographies ne les avaient apparemment pas révélées jusqu’à présent, raison pour laquelle les collègues n’avaient pas encore envisagé cette possibilité et n’avaient donc pas non plus ordonné de programmes de sécrétolyse ou d’exercices de physiothérapie.
En ce qui concerne les radiations, l’expert a levé l’alerte : selon son expérience, les nouveaux scanners à couches minces à faible dose ont désormais une charge de radiation si faible qu’aucun effet négatif n’est à craindre pour les patients. En revanche, il estime que le rôle des radiologues est un peu plus problématique : “Il faut les tenir en respect. Si un radiologue voit une petite dilatation d’un demi-millimètre dans les bronches, il obtient déjà un résultat radiologique indiquant des bronchectasies. Mais le résultat ne compte que si les patients présentent une clinique correspondante”. Le professeur Herth a donc fait référence à la directive de l’ERS sur les bronchectasies, qui indique explicitement de ne pas se fier uniquement à un résultat radiologique. (encadré).
Déficit en alpha-1-antitrypsine plutôt rare
Le déficit en alpha-1-antitrypsine, qui fait partie des déficiences congénitales, est plutôt rare dans ce classement. Cependant, à Heidelberg, chaque nouveau patient présentant une obstruction est désormais examiné à cet égard, “car nous constatons toujours que nous trouvons encore ce déficit en alpha-1-antitrypsine chez des patients qui nous ont été adressés, par exemple pour une réduction endoscopique du volume pulmonaire, parce que cela avait été négligé”. La patiente du professeur Herth avait un taux d’AAT de 0,3 g/l et a le génotype ZZ après génotypage.
Bien stabiliser les patients sous traitement de substitution
Dans son guide, l’ERS se concentre sur le traitement des bronchiectasies par l’utilisation de bronchodilatateurs à courte ou longue durée d’action, de mucolytiques, de physiothérapie, de clairance des voies respiratoires et, le cas échéant, d’antibiotiques à inhaler. Toutefois, une substitution par l’alpha-1-antitrypsine est également possible. Le professeur Herth a indiqué qu’il existe une substance sur le marché qui n’est plus limitée par le VEMS et que l’on peut donc l’utiliser même si le VEMS n’est pas inférieur à 50. Selon lui, cela permet également, en termes d’autorisations de mise sur le marché, de donner ce qui n’était pas possible il y a 10 ans.
Pour la patiente de son étude de cas, l’expert utilise le traitement de substitution depuis 2016. “Si l’on me demande des études randomisées et contrôlées sur les bronchectasies sans broncho-obstruction majeure et sur la place du traitement de substitution alpha-1, j’ai évidemment peu d’arguments”, a-t-il reconnu. “Mais j’ai le principe d’action et j’ai le principe du déficit en alpha-1-antitrypsine en tant que maladie inflammatoire chronique, qui entraîne justement des modifications dans les poumons, de sorte que nous avons décidé de recourir à la thérapie de substitution”.
Le nombre d’exacerbations a été réduit
Le succès semble néanmoins donner raison aux pneumologues de Heidelberg : Le nombre d’exacerbations nécessitant des antibiotiques a pu être réduit chez la patiente, passant de 5 en 2015 à aucune en 2019. Il y en a eu une en 2018 et une en 2020 (la dernière n’étant pas liée à COVID-19). “Nous pensons donc que nous avons pu réduire significativement la fréquence des exacerbations de cette manière avec le traitement”. Depuis 2019, la patiente se donne elle-même les perfusions, ce qui présente évidemment un grand avantage en cas de pandémie. Le professeur Herth a conclu ce cas quelque peu inhabituel d’alpha-1 antitrypsine, qui montre que l’obstruction n’indique pas toujours la bonne direction. Cette fois, c’est la bronchiectasie qui a mis les médecins sur la bonne voie.
Séminaire organisé avec le soutien de CSL Behring et GSK.
Sources :
- StreamedUp : PneumoLive – Séminaire de cas interactif, 27/10/2020.
- Rademacher J, et al. : Etiologie des bronchectasies en Allemagne Résultats de PROGNOSIS. Pneumologie 2017 ; 71 : V458.
InFo PNEUMOLOGIE & ALLERGOLOGIE 2021 ; 3(1) : 30-31