La rhinite allergique (RA) est l’une des maladies allergiques les plus courantes au monde. Chaque année, pendant la saison pollinique, de nombreuses personnes souffrent d’éternuements, de rhinite, de larmoiement et de congestion nasale. Les antihistaminiques H1 modernes de deuxième génération constituent une option thérapeutique fondée sur des preuves pour la RA. C’est également ce qui ressort d’une revue systématique publiée en 2023 dans Annals of Allergy, Asthma & Immunology par une équipe de chercheurs canadiens.
Les manifestations cliniques de la rhinite allergique (RA) sont causées par une cascade immunitaire médiée par les IgE en cas d’exposition aux allergènes. La RA est divisée en une forme saisonnière et une forme perannuelle, selon que les symptômes sont associés à des saisons spécifiques ou qu’ils se manifestent toute l’année [1]. Le pollen des arbres et des graminées pollinisées par le vent est le principal déclencheur de la RA saisonnière. L’objectif thérapeutique à court et moyen terme est la disparition des symptômes. L’utilisation d’antihistaminiques H1 de deuxième génération (encadré) est recommandée de préférence aux antihistaminiques de première génération, plus anciens et plus sédatifs, comme traitement de première ligne de la RA. Pour les AR modérés à sévères, il est également possible d’utiliser des glucocorticoïdes intranasaux et/ou des antihistaminiques intranasaux.
Les antihistaminiques sont des agonistes inverses du récepteur H1 de l’histamine, ce qui signifie qu’ils stabilisent le récepteur dans sa conformation inactive. Ils annulent ainsi les effets de l’histamine et soulagent les symptômes allergiques. Les anciens antihistaminiques H1 de première génération ont des effets anticholinergiques et sédatifs marqués et présentent de nombreuses interactions avec l’alcool et d’autres médicaments. Ils traversent la barrière hémato-encéphalique et atteignent le cerveau, où ils provoquent des effets secondaires centraux tels que la fatigue, la somnolence et les vertiges. Les agents de la deuxième génération sont généralement spécifiques du récepteur H1 et moins atténuants. C’est pourquoi ils sont également appelés “antihistaminiques non sédatifs”, mais ils peuvent aussi, plus rarement, provoquer de la fatigue. Ils ne traversent pas la barrière hémato-encéphalique, sont spécifiques du récepteur H1 et n’ont pas d’effet anticholinergique. Ils ont également une durée d’action plus longue, de 12 à 24 heures, et ne doivent donc être administrés qu’une fois par jour. |
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Preuves de l’efficacité des antihistaminiques H1 oraux de 2e génération
Les chercheurs de l’Allergy Research Unit du Kingston General Health Research Institute en Ontario (Canada) ont résumé plusieurs études et méta-analyses cliniquement pertinentes pour différents antihistaminiques H1 récents dans la RA. En Suisse, à l’exception de la rupatadine, toutes les substances actives incluses sont autorisées [2] : La fexofénadine depuis 1997, la desloratadine et la lévocétirizine depuis 2001, la bilastine depuis 2011. Ci-dessous, les résultats obtenus par Linton et al. Les preuves incluses sont résumées ci-dessous :
- Fexofénadine : dans une méta-analyse publiée en 2011 et basée sur 8 études randomisées contrôlées en double aveugle (RCT) portant sur un total de 3532 participants, l’efficacité de la fexofénadine dans la RA a été évaluée sur la base du score symptomatique total (TSS) et du score symptomatique individuel. La fexofénadine a eu un effet positif sur tous les critères d’évaluation (p<0,001) et aucune différence significative n’a été observée par rapport au placebo en termes d’événements indésirables (EI) (p=0,75) [3].
- Desloratadine : en 2007, une méta-analyse d’ECR a été réalisée pour évaluer l’efficacité de la desloratadine dans le traitement de la RA. Au total, 13 études impliquant 3108 participants ont été incluses dans cette méta-analyse. La desloratadine a entraîné une réduction significative du score total de symptômes (TSS) (p=0,004), ainsi que du score total de symptômes nasaux (TNSS) (p<0,001) et de la congestion nasale (p=0,005) par rapport au placebo [4].
- Lévocétirizine : une méta-analyse publiée en 2017 a évalué les effets sédatifs potentiels de la lévocétirizine sur la base de 48 études portant sur un total de 18 014 participants. Par rapport au placebo, la lévocétirizine a montré un effet sédatif modéré (risque relatif [RR]: 1,67 ; intervalle de confiance à 95% [KI], 1,17-2,38), mais par rapport aux antihistaminiques de première génération, la lévocétirizine a eu un effet moins sédatif et a été associée à une modification plus faible du temps de réaction (différence moyenne : 250,76 secondes ; IC à 95%, 338,53-162,98) [5].
- Bilastine/cétirizine/fexofénadine : un ECR de phase II publié en 2010 a comparé l’effet de la bilastine à celui de la cétirizine, de la fexofénadine et d’un placebo sur le TNSS après une exposition à l’herbe. Cette étude a porté sur 75 personnes souffrant de rhinite allergique saisonnière. On a constaté que, bien que la bilastine et la fexofénadine aient un effet similaire sur le TNSS dans les quatre premières heures suivant l’administration, la bilastine et la cétirizine étaient significativement plus efficaces que la fexofénadine 22 à 26 heures après l’administration [6].
- Bilastine/cétirizine : un autre grand ECR publié en 2009 a été réalisé pour comparer l’efficacité et la sécurité de la bilastine et de la cétirizine après une période de traitement de 14 jours. Cette étude a porté sur 683 participants souffrant de rhinite saisonnière. Les résultats cliniques étaient l’aire sous la courbe du TSS (TSS-AUC) et les valeurs des symptômes individuels. La réduction du TSS-AUC a été similaire pour la bilastine et la cétirizine, et significativement plus importante dans les deux cas par rapport au placebo (p<0,001). Les symptômes de somnolence (p<0,001) et de fatigue (p<0,02) étaient significativement plus prononcés chez les patients du groupe traité à la cétirizine que dans le groupe traité à la bilastine [7]. En 2012, une étude similaire a été publiée [8] : 650 participants atteints de rhinite perannuelle ont été inclus, mais la durée du traitement était de quatre semaines. Dans cette étude également, l’AUC moyenne du total des 6 symptômes a été significativement réduite par rapport à la ligne de base par rapport au placebo dans les deux groupes (p<0,05).
- Rupatadine : une autre méta-analyse de plusieurs ECR a évalué l’efficacité et la sécurité de la rupatadine dans la RA. Dix études comprenant 2573 patients ont été incluses. Au final, la rupatadine a montré un profil bénéfice/risque favorable dans le traitement de la RA. Les résultats cliniques ont été le TSS, le TNSS et les scores individuels de symptômes nasaux et oculaires [9].
Il existe également de plus en plus de preuves en faveur de l’utilisation d’antihistaminiques H1 oraux de deuxième génération chez certains groupes de patients, comme les enfants. 2021, une étude ≤12 ans a comparé les risques d’effets secondaires des antihistaminiques de deuxième génération à ceux de la première génération, ainsi que le montelukast ou le placebo [10]. 45 études publiées entre 1989 et 2017 ont été incluses. Les antihistaminiques de deuxième génération se sont révélés plus sûrs et mieux tolérés. Parmi les antihistaminiques de nouvelle génération, la cétirizine a eu l’effet sédatif le plus prononcé.
Littérature :
- Linton S, Hossenbaccus L, Ellis A : Evidence-based use of antihistamines for treatment of allergic conditions. Ann Allergy Asthma Immunol 2023 ; 131(4) : 412-420.
- Swissmedic : Information sur les médicaments, www.swissmedicinfo.ch,(dernière consultation 26.04.2024)
- Compalati E, Canonica GW : Efficacité et sécurité de la rupatadine pour la rhino-conjonctivite allergique : une revue systématique des études randomisées, en double aveugle, contrôlées par placebo avec méta-analyse. Curr Med Res Opin 2013 ; 29 : 1539-1551.
- Canonica GW, et al : Efficacité de la desloratadine dans le traitement de la rhinite allergique : une méta-analyse d’essais randomisés, en double aveugle, contrôlés. Allergy 2007 ; 62 : 359-366.
- Snidvongs K, et al : Effets sédatifs de la lévocétirizine : une revue systématique et une méta-analyse des études contrôlées randomisées. Drugs 2017 ; 77 : 175-186.
- Horak F, et al : Les effets de la bilastine par rapport à la cétirizine, la fexofénadine, et le placebo sur les symptômes nasaux et oculaires induits par les allergènes chez les patients exposés aux aéroallergènes dans la Chambre de défi de Vienne. Inflamm Res 2010 ; 59 : 391-398.
- Kuna P, et al. : Efficacité et sécurité de la bilastine 20 mg comparée à la cétirizine 10 mg et au placebo pour le traitement symptomatique de la rhinite allergique saisonnière : une étude randomisée, en double aveugle, en groupes parallèles. Clin Exp Allergy 2009 ; 39 : 1338-1347.
- Sastre J, et al : Bilastine Study Group. Efficacité et sécurité de la bilastine 20 mg comparée à la cétirizine 10 mg et au placebo dans le traitement de la rhinite allergique perannuelle. Curr Med Res Opin 2012 ; 28 : 121-130.
- Compalati E, et al : Systematic review on the efficacy of fexofenadine in seasonal allergic rhinitis : a meta-analysis of randomized, double-blind, placebo-controlled clinical trials. Int Arch Allergy Immunol 2011 ; 156 : 1-15.
- Miligkos M, et al : Les antihistaminiques de nouvelle génération et le risque d’événements indésirables chez les enfants : une revue systématique. Pediatr Allergy Immunol 2021 ; 32 : 1533-1558.
- Zuberbier T, et al. : [S3-Leitlinie Urtikaria. Partie 2 : Traitement de l’urticaire – adaptation en langue allemande du guide international S3]. J Dtsch Dermatol Ges 2023 ; 21(2) : 202-216.
- PharmaWiki, www.pharmawiki.ch,(dernière consultation 26.04.2024).
PRATIQUE DU MÉDECIN DE FAMILLE 2024 ; 19(5) : 34-35