Vers la fin de l’année dernière, l’ESC a publié de nouvelles recommandations sur le diagnostic et la prise en charge de l’embolie pulmonaire aiguë [1]. Les nouveautés les plus pertinentes par rapport à la version de 2008 concernent la stratification du risque et le traitement adéquat qui en découle, ainsi que les stratégies de diagnostic et de traitement de l’hypertension pulmonaire thromboembolique chronique.
En pratique, les patients atteints d’embolie pulmonaire présentant un risque de mortalité intermédiaire sont fréquents mais sous-diagnostiqués. Ils sont hémodynamiquement stables, c’est-à-dire qu’ils ne présentent ni choc cardiogénique ni hypotension artérielle persistante, mais ils ont une dysfonction ventriculaire droite à l’échocardiographie et une augmentation du biomarqueur troponine. Selon les nouvelles lignes directrices, ces patients nécessitent une surveillance étroite – mais une reperfusion de routine par thrombolyse systémique primaire n’est pas recommandée. Il s’agit plutôt d’une option qui doit être examinée au cas par cas. Si l’on décide de ne pas recourir à une thérapie de lyse immédiate, une décompensation hémodynamique doit être détectée le plus tôt possible grâce à une surveillance étroite et abordée avec une thérapie de reperfusion de secours.
Stabilisation, mais pas d’amélioration en termes de mortalité
Cette recommandation est basée sur une étude randomisée en double aveugle (PEITHO) [2]. Celle-ci a comparé le fibrinolytique Tenecteplase plus héparine à un placebo plus héparine chez 1005 patients atteints d’embolie pulmonaire et présentant un risque intermédiaire (atteinte cardiaque droite et test de troponine positif). Si la fibrinolyse a permis de prévenir efficacement la décompensation hémodynamique, elle n’a pas apporté de gain significatif en termes de mortalité. Le risque de saignement grave et d’accident vasculaire cérébral (principalement hémorragique) a augmenté de manière significative sous traitement. Les chiffres correspondants sont résumés dans le tableau 1 .
Hypertension pulmonaire thromboembolique chronique – comment procéder ?
Le problème de l’hypertension pulmonaire thromboembolique chronique (HTPC) est également discuté en détail dans la nouvelle ligne directrice. Les données actuelles indiquent que l’HTPC semble être en premier lieu une conséquence possible à long terme des embolies pulmonaires. Dans ce cas, les emboles qui ne sont pas complètement dissous se transforment en un tissu cicatriciel fibrotique dans les artères, et ce tissu ne peut pas être dissous par l’anticoagulation.
L’incidence cumulée varie fortement entre 0,1 et 9,1% au cours des deux premières années suivant une embolie pulmonaire symptomatique. Le nombre de cas non déclarés est probablement bien plus élevé. Le diagnostic (précoce) de l’HCTPE reste un défi. Si, après au moins trois mois sous anticoagulation efficace, il existe une suspicion clinique (dyspnée persistante), la ligne directrice de l’ESC prévoit d’abord une échocardiographie, puis une scintigraphie de ventilation-perfusion. L’angiographie par scanner est considérée comme insuffisante, car un angio-TDM jugé normal n’exclut pas la maladie avec certitude. Si la scintigraphie est négative, il est possible d’exclure une CTEPH. Si l’on trouve au moins 1 à 2 défauts segmentaires ou plus importants, le diagnostic définitif doit être établi par cathétérisme cardiaque droit et angiographie pulmonaire (éventuellement aussi si la scintigraphie n’a pas permis d’établir un diagnostic définitif). Ces examens servent également à la planification du traitement.
Si l’HTPC diagnostiquée est opérable selon l’évaluation multidisciplinaire des experts, l’endartériectomie pulmonaire est recommandée. Elle se fait à l’aide d’une machine cœur-poumon et est très coûteuse, car le matériel thrombotique est décortiqué de l’intérieur du vaisseau dans l’artère pulmonaire. Pour les patients définitivement inopérables, le riociguat est désormais disponible – cette option ne doit toutefois être envisagée que lorsqu’une deuxième équipe/un centre d’experts a confirmé l’inopérabilité. Le riociguat est également une option pour les formes d’HTPC persistantes ou récidivantes après une intervention chirurgicale.
Les figures 1 et 2 présentent, sous une forme légèrement abrégée, l’algorithme de diagnostic et de traitement de la CTEPH.
Littérature :
- Konstantinides S, et al. : 2014 ESC Guidelines on the diagnosis and management of acute pulmonary embolism. European Heart Journal 2014 ; 35 : 3033-3080.
- Meyer G, et al : Fibrinolysis for Patients with Intermediate-Risk Pulmonary Embolism. N Engl J Med 2014 ; 370 : 1402-1411.
CARDIOVASC 2015 ; 14(3) : 26-27